03/10/2019
ayant renoncé à tout, n'ayant rien à demander, je n'écoute que mon cœur
...
« A Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de Lutzelbourg
6è auguste 1764 à Ferney
Vous êtes plus jeune que moi, madame, puisque vous faites des voyages, et moi si j'en faisais ce ne serait que pour venir vous voir . Vous avez de la santé, et vous la méritez par une sobriété constante, et par une vie uniforme . Je ne suis pas si sage que vous, aussi j'en suis bien puni . Je regrette comme vous, Mme de Pompadour, et je suis bien sûr qu’elle ne sera jamais remplacée . Elle aimait à rendre service et était en état d'en rendre ; mais mon intérêt n'entre pour rien dans les regrets que je donne à sa perte ; ayant renoncé à tout, n'ayant rien à demander, je n'écoute que mon cœur, et je pleure votre amie sans aucun retour sur moi-même .
Si vous êtes à Colmar, madame, je vous prie de faire souvenir de moi M. le premier président votre frère . Je serai peut-être obligé, malgré ma mauvaise santé et ma faiblesse , de faire un tour dans votre Alsace pour quelques arrangements que j'ai à prendre avec M. le duc du Virtemberg ; mais alors il ne sera que le prétexte et vous serez la véritable raison de mon voyage . Vous ne sauriez croire quel plaisir j'aurais à m'entretenir avec vous . Nous parlerions du moins du passé pour nous consoler du présent . C'est la ressource des anciens amis . Regardons l'avenir en philosophes, jouissons avec tranquillité du peu de temps qui nous reste . Puissé-je venir philosopher avec tous au Jar, je ne vous y dirais jamais assez combien je vous suis attaché ; je croirais renaître en vous faisant ma cour . Je maudis mille fois l’éloignement des Alpes au Rhin . Adieu, madame, portez-vous bien et conservez-moi des bontés qui font la consolation de ma vie .
V. »
08:34 | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.