24/02/2021
Je ne peux m’imaginer que monsieur le Dauphin soit en danger, puisqu’on donne continuellement des fêtes
... Le prince consort Philip d'Edimbourg qui veut souffler sa nonante-neuvième bougie d'anniversaire , est dit dans un état inquiétant/récupérable, si les petits cochons microbes ne le mangent pas . Pas de Covid sous l'uniforme , ni de grippe aviaire ! Les médecins le disent hospitalisé pour "quelques jours" : voilà le genre de phrase qui me ferait frémir, elle sous-tend qu'il ne vous reste que quelques jours à vivre . Nous verrons , -et on peut le lui souhaiter-, s'il est plus vaillant que le Dauphin de France en 1765 . God save the queen's husband !
Je vous jure, Majesté, ce n'est pas une MST !
« A Henri-Louis Lekain Comédien
ordinaire du roi
près de la Comédie Française
à Paris
J’ai reçu, mon cher ami, votre lettre du 24 Octobre, et vous devez avoir reçu à présent, par M. d’Argental, tout ce que j’ai pu faire pour votre bretonne Adélaïde. Je ne l’ai pas actuellement sous les yeux . Les maçons et les charpentiers se sont emparés de ma maison, et mes vers m’ennuient.
Je vous prie de me mander si vous êtes actuellement bien employé à Fontainebleau, si Mlle Clairon y a paru, et si elle y paraîtra, si on a joué Gertrude 1, et Ce qui plaît aux Dames 2.
Je ne peux m’imaginer que monsieur le Dauphin soit en danger, puisqu’on donne continuellement des fêtes. Sa santé peut être altérée, mais ne doit point donner d’alarmes. Mandez-moi, je vous prie, s’il assiste au spectacle, et s’il a vu votre Adélaïde ; je dis la vôtre, car c’est vous seul qui l’avez ressuscitée.
Adieu, je vous embrasse, et je vous prie de me dire des nouvelles, si vous avez le temps d’écrire.
V.
1er novembre 1765 à Ferney.
Comme on allait porter ma lettre à Genève, j’ai retrouvé quelques lambeaux de cette Adélaïde, que j’ai si longtemps négligée.
1°/ Je suppose qu’on a rayé dans votre copie ces quatre vers du 3è acte :
Mais bientôt abusant de ma reconnaissance,
Et de ses vœux hardis écoutant l’espérance,
Il regarda mes jours, ma liberté, ma foi,
Comme un bien de conquête, et qui n’est plus à moi 3.
Ces quatre vers sont bons à être oubliés.
2°/ Je trouve, dans ce même troisième acte, à la dernière scène, ces vers dans un couplet de Coucy :
Faites au bien public servir votre disgrâce.
Eh bien ! rapprochez-les, unissez-vous à moi , etc.4
Ce dernier vers n'a pas de sens . Il faut que le copiste se soit trompé ; il doit y avoir,
Rapprochez les partis, unissez-vous à moi .
Je suppose qu’à la scène 5è et dernière du quatrième acte, vous tombez dans un fauteuil lorsque Coucy dit :
Il ne se connaît plus, il succombe à sa rage 5.
Voilà, mon cher ami, tout ce que je puis vous dire sur une pièce qui ne méritait pas l’honneur que vous lui avez fait.
Nous avons des pluies continuelles ; si la saison n’est pas plus belle à Fontainebleau, vos fêtes doivent être assez tristes.
2è novembre [1765] »
1 Voir lettre du 19 octobre 1765 à Voisenon : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/02/18/qui-est-un-des-deux-conservateurs-des-graces-de-la-gaiete-francaise.html
2 Inspirés par le conte de Voltaire, Favart et Voisenon ont écrit une comédie : La Fée Urgèle ou Ce qui plait aux dames, jouée à Fontainebleau le 26 octobre 1765, puis au Théâtre-Italien le 3 décembre 1765 . Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b90674186.image
3Vers d'Adélaïde du Guesclin, ac. III, sc. 2, supprimés par la suite .
4 Ibid. ac. III, sc. 5 .
5 Cette indication scénique fut maintenue à l'ac. IV, sc. 5 de cette même pièce .
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