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03/03/2013

Je vous demande en grâce de ne pas retrancher un mot de la fin ; il me semble que ce que j'ai dit doit être dit

... Et les non-dits méritent le même respect .

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

A Lausanne 3 de janvier [1758]

Le peu que je viens de lire du septième tome, mon cher grand homme, confirme bien ce que j'avais dit quand vous commençâtes : que vous vous tailliez des ailes pour voler à la postérité . Comptez que je vous révère, vous et M. Diderot .

Il y a encore quelques gens d'un grand mérite qui ont mis de belles pierres à vos pyramides . Pour moi chétif et mes compagnons nous devons vous demander pardon pour nos petits cailloux ; mais vous les avez exigés . En voici trois pour le commencement de votre huitième volume . Je me suis hâté parce que après Habacuc,1 Habile 2 doit venir . Je vous demande en grâce de ne pas retrancher un mot de la fin ; il me semble que ce que j'ai dit doit être dit .

L’article Hémistiche 3 que vous m'avez confié sera plus long, quoiqu’il semble devoir être plus court . Je voudrais y donner en vers de petits préceptes et de petits exemples de la manière dont on peut varier l'uniformité des hémistiches ; j'aurais peut-être encore quelques nouveautés à dire, mais je ne suis qu'un vieux Suisse . Vous autres Parisiens vous jetterez mes hémistiches au feu s'ils ne vous plaisent pas .

Quand aurai-je le Père de famille ?4 On m'a dit que cela est extrêmement touchant . L'auteur prouve que les géomètres et les mathématiciens ont un cœur .

Pour les prêtres ils n'en ont point . J'ignore si l'hérétique de Prades a conspiré contre le roi de Prusse 5. Je ne le crois pas ; mais les prêtres hérétique de Genève conspirent contre nous ; il n'y a sorte d'atrocité que quelques uns d'eux n’aient faite contre le mot Atroce 6; mais je les attends à l’article Servet 7 . En attendant ils doivent vous écrire . Je vous prie très instamment de leur mander, pour toute réponse, que vous avez reçu leur lettre, que vous leur rendrez service autant que vous le pourrez et que vous me chargez de leur signifier vos intentions et de finir cette affaire . Je vous assure que, mes amis et moi, nous les mènerons bon train , ils boiront le calice jusqu'à la lie . Faites ce que je vous demande et laissez agir nos 8 amis : vous serez content . J'attends à Lausanne Histoire 9 contresignée . Je suis un peu incommodé des mouches dont mon appartement est plein, vis-à-vis des glaces éternelles de Alpes . Il y a toujours dans ce monde quelque mouche qui me pique, mais cela ne m'empêchera pas de vous servir .

On dit Breslau repris par le roi de Prusse,10 cela pourrait bien être car il y a plus d'un mois qu'il ne m'a envoyé de vers . Je le crois très occupé et vous aussi . Ainsi je finis en vous embrassant de tout mon cœur, ainsi fait Mme Denis.

Le Suisse V. »

1Encyclopédie VIII, 5a, article de Mallet : voir : de.revues.org/69?&id=69&file=1 ; et autres articles religieux de l'abbé Mallet dans l' Encyclopédie

2Encyclopédie VIII, 6, anonyme .

3Encyclopédie VIII, 113-114, est bien signé de Voltaire .

4Voir lettre du 29 décembre 1757 à d'Alembert où V* demande déjà cette œuvre de Diderot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/02/27/i...

5 Frédéric II pensait avoir raison de penser que de Prades qui avait fait sa paix avec l’Église, avait trahi le secret de sa correspondance avec la France ; il le fit enfermer à Magdebourg ; voir lettre de Thieriot à V* du 27 décembre 1757 .

7 Il n'y a pas d'article Servet dans l'Encyclopédie, mais seulement Servettistes Encyclopédie XV, 120a-121a.

8 Ici il faut peut-être lire « vos », sinon V* se trouverait exclu .

9 Voir lettre du 29 décembre 1757 à d'Alembert .

 

J'ai bien peur que les annuités, les loteries, les rentes ne soient pas meilleures que nos troupes

... Politiciennes .

 Dur de trouver quelque chose à se mettre sous la dent au rayon surgelé

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« A Jean-Louis Labat, baron de Grandcour

à Genève

1er janvier [1758]

Mon cher baron, je vous souhaite la bonne année à vous, à toute votre famille et au grand Tronchin .

Rendez-moi je vous prie un petit service . Vous avez auprès de monsieur votre fils un précepteur qui est un jeune homme d'un très grand mérite . Pourrait-il se donner la peine, à votre prière, de faire ce que je demande par le papier ci-joint ?1 Je vous serai très obligé .

Si Luc a gagné deux ou trois batailles pour ses étrennes mandez-le moi .

J'ai bien peur que les annuités, les loteries, les rentes ne soient pas meilleures que nos troupes . Qu'en pensez-vous baron ?

Aimez toujours un peu le Suisse

V. »

1 Ce papier n'est pas connu .

 

02/03/2013

J'entre dans tous les détails, je voudrais sauver ce petit garçon . Qu'ordonnez-vous ? A propos la France est aussi malade que lui

... Et tant pour la maladie des corps que pour la maladie de l'Etat, Voltaire sait de quoi il parle .  Très humainement, très afffectueusement il donne la priorité à un enfant, lui accordant les mêmes soins qu'à lui-même . Trop de personnes oublient cette facette du patriarche, ne retenant que l'homme d'esprit dans le meilleur des cas, l'homme d'affaire dans le pire . Comment ne pas aimer ce gaillard là ?

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« A monsieur le professeur Théodore Tronchin

à Genève

Dimanche [1757/1758] au soir

Mon cher Esculape, mon petit malade 1 après avoir pris sa seconde dose d'émétique avant hier fut encore bien purgé par le bas de matières fétides et rendit un paquet de vers parmi lesquels il y en avait un de six pouces de long . Je lui donnai une décoction de rue, de petite centaurée, de menthe, de chicorée sauvage, et pour adoucir la vivacité que cette tisane pourrait porter dans un sang irrité par la fièvre, je lui fais prendre de demi-heure en demi-heure entre ces potions , une émulsion légère . La fièvre subsiste, continue avec redoublement, mais moins violente . Il a dormi un peu . La tête n'est point embarrassée mais il y a toujours mal . Le bout de la langue est du rouge le plus vif mais il s'en faut de beaucoup que l’œil soit net . Il ne l'est guère, je crois, dans ces maladies . La peau n'est pas ardente . Depuis qu'il a rendu des vers il n'a pas été à la garde-robe . Ne conviendrait-il pas de lui ôter sa tisane antivermineuse qui peut l'échauffer et continuer à délayer beaucoup les humeurs ?

N. b. qu'il a toujours la bouche ouverte et qu'il lui est difficile de la fermer . J'entre dans tous les détails, je voudrais sauver ce petit garçon . Qu'ordonnez-vous ?

A propos la France est aussi malade que lui . Mademoiselle votre fille est-elle palliée 2? »

1 C'est sans doute le petit Pichon, voir lettre du 8 août 1757 à Jean-Robert Tronchin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/11/30/oserais-je-monsieur-vous-prier-de-vouloir-bien-envoyer-a-cet.html

2 Normalement, « pallier »signifie « soulager une maladie sans la guérir » . V* semble appliquer le terme à la malade elle-même au sens de « soulager » .

 

Y a-t-il rien de plus net et de plus décisif ?

… Bernard Arnault, roi du luxe est et reste Français, à son grand (Amster)dam, ce qui n'augmente pas la gloire de la France, mais prouve que  les Belges ne sont pas aussi vénaux que (Ras)poutine : http://www.lepoint.fr/societe/la-belgique-ne-veut-pas-bernard-arnault-02-03-2013-1635162_23.php

 A propos de Belges, un  des Dupont-Dupond, a été vu du côté de Castel Gandolfo au sortir d'un atelier point de croix de soeur Viva-il-Papa :

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« A monsieur le ministre Jacob Vernes

chez monsieur son père

[1757 / 1758 ?]

Voici le book que vous m'avez demandé mon cher monsieur,on me l'a enfin rendu et je vous l'envoie aussitôt . Voudriez-vous avoir la bonté de me reprêter l'Apocalypse du savant Abauzit 1? Vous me feriez un extrême plaisir . A propos avez-vous lu dans les constitutions apostoliques cette prière : Ô Dieu éternel, Dieu unique, père du Christ et du Saint Esprit ?

Y a-t-il rien de plus net et de plus décisif ?

Vale.

V.

Do not say I have lent you the book. 2»

1 Discours historique sur l'Apocalypse, édité en 117 , mais V* disposait d'un manuscrit .http://books.google.fr/books?id=fK5DAAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

2 Ne dites pas que je vous ai prêté le livre

Donc tout s'est fait de pièces et de morceaux, donc -donc-

... C'est un ... blog normal ! J'allais écrire banal, mais un reste d'orgueil me fait mettre normal, eût égard à ma source, Voltaire étant tout ce que l'on veut, sauf banal . Je m'emploie à vous le montrer au fil des jours .

Pièces et morceaux, plus ou moins brillants, comme nos jours

 pièces et morceaux.jpg

 

 

« A monsieur le ministre Jacob Vernes

chez monsieur son père

[1757 / 1758 ?]

I like Abauzit more than ever, I would read all his writings .

Les constitutions apostoliques 1 ne sont pas des apôtres mais elles sont incontestablement des premières années du second siècle . Dons au second siècle on n'était pas de l'avis d'Athanase . Donc tout s'est fait de pièces et de morceaux, donc -donc-

Et malgré ces donc I am yr

for ever .

V. »

1 La collection de ces constitutions apostoliques, généralement considérée comme apocryphe, est estimée par V* qui semble avoir été influencé par William Whiston qui écrivit dans son ouvrage Primitive Christianity Revived, 1711, qu'elles sont « le modèle le plus sacré du christianisme, égal en autorité aux Évangiles et supérieur en autorité aux épîtres de chaque apôtre pris en particulier. »

 

01/03/2013

Je ne veux que le repos, et je le souhaite à tous mes confrères, moines, curés, ministres, séculiers, réguliers, trinitaires, unitaires, quakers, moraves, turcs, juifs, chinois, hurons etc., etc., etc., etc., etc

... Blogueurs, blogueuses (pas si gueuses que ça au demeurant !), à qui je souhaite le repos de l'âme et du corps,  la vivacité de l'esprit et une curiosité sans limites . 

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« A monsieur le ministre Jacob VERNES.
chez monsieur son père
à Genève

A Lausanne, 29 décembre [1757].
Oui, je vous tiens, mon ami, et, tout jeune que vous êtes, je vous fais mon prêtre. Je signe votre profession de foi 1, à condition que ni vous ni votre aimable Arabe 2 vous n'y changerez jamais rien, et que vous ne mettrez jamais, comme milord Pierre 3, ni nœud d'épaule ni ruban sur votre bel habit uni.
Ayez la bonté de me garder les grands hommes lyonnais 4 jusqu'à mon retour. Luc le grand homme du jour 5 m'a fait faire des compliments, et va peut-être donner une nouvelle bataille pour ses étrennes. Il est vrai qu'il a fait conduire à Spandau 6 le théologien de Prades, qu'il a soupçonné d'avoir eu quelque commerce avec la pauvre reine de Pologne. Je ne sais si de Prades l'a confessée et communiée; mais avouez que c'est une singulière destinée pour un gentilhomme bordelais d'être ex- communié à Paris, chanoine en Silésie, et prisonnier à Spandau. Que ne venait-il sur les bords de mon lac ? Il aurait signé votre Catéchisme, et aurait vécu paisiblement.
Or çà, carissime frater in Deo, et in Serveto 7, êtes-vous bien fâché, dans le fond du cœur, qu'on dise dans l'Encyclopédie que vous pensez comme Origène, et comme deux mille prêtres qui signèrent leur protestation contre le pétulant Athanase ? le bonhomme Abauzit ne rit-il pas dans sa barbe? Vous voilà bien malade que quelques gros Hollandais vous traitent d'hétérodoxes ! Serez-vous bien lésés quand on vous reprochera d'être des infâmes, des monstres, qui ne croient qu'un seul Dieu plein de miséricorde? Allez, allez, vous n'êtes pas si fâchés. Soyez comme Dorine qui aimait Lycas, comme vous devez le savoir. Lycas s'en vanta, et Dorine, qui en fut bien aise, dit
Lycas est peu discret
D'avoir dit mon secret 8.

D'Alembert est Lycas, vous autres êtes Dorine, et moi je suis tout à vous, très-tendrement.

V.
Au reste, si quelque orthodoxe ou hétérodoxe m'accusait d'avoir la moindre part à l'article Genève, je vous supplie instamment de rendre gloire à la vérité. J'ai appris le dernier toute cette affaire. Je ne veux que le repos, et je le souhaite à tous mes confrères, moines, curés, ministres, séculiers, réguliers, trinitaires, unitaires, quakers, moraves, turcs, juifs, chinois, hurons etc., etc., etc., etc., etc. »

3 Voyez la lettre du 27 décembre 1757 à Bertrand : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/02/26/l...

V* fait allusion à l'apôtre Pierre et à ses successeurs papes, ce qui fera un des thèmes centraux du Pot pourri .

4 Recherches pour servir à l'histoire de Lyon, ou les Lyonnais dignes de mémoire, 1757, deux volumes petit in-8°, ouvrage de Jacques Pernetti, né en 1696, mort en 1777. http://books.google.fr/books?id=34xaAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

5 Frédéric, qui avait gagné les batailles de Rosbach et de Lissa, les 5 novembre et 5 décembre.

6 Bastille prussienne. L'abbé de Prades n'y était pas renfermé. Il avait la ville de Magdebourg pour prison. (Beuchot.)

7 Très cher frère en Dieu et en Servet (latin de cuisine)

8  Vers d'Alceste, opéra de Philippe Quinault, acte I, scène 4

 

28/02/2013

Je vous adresse la lettre ci-jointe pour le chapeau rouge . Pour des coquineries, il n'y en a point; pour des douceurs, je n'en réponds pas

... Eh bien ! voici une femme qui  sait parler aux princes du clergé catholique romain . A mes yeux la démission de Benoit xvi est un non évènement qui ne changera pas la face du monde, du niveau de Splash, et du gangnam style .

Vale !

C'est écrit dans le ciel, aux couleurs papales .

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« De madame Sophie-Frédérique-Wilhelmine de Prusse , margravine de BAIREUTH.

Si mon corps voulait se prêter aux insinuations de mon esprit, vous recevriez toutes les postes de mes nouvelles. Je suis, me direz-vous, aussi cacochyme que vous, et cependant j'écris. A cela je vous réponds qu'il n'y a qu'un Voltaire dans le monde, et qu'il ne doit pas juger d'autrui par lui- même. Voilà bien du bavardage. Je vois votre impatience d'apprendre les choses qui vous intéressent. Une bataille gagnée 1. Breslau au pouvoir du roi; trente-trois mille prisonniers, sept cents officiers et quatorze généraux de pris, outre cent cinquante canons et quatre mille chariots de vivres, de bagages, et de munitions, sont des nouvelles que je puis vous donner. Je n'ai pas fini. Il est resté quatre mille morts sur le champ de bataille, quatre mille blessés se sont trouvés à Breslau, et on compte quatre mille cinq cents déserteurs. Vous pouvez compter que c'est un fait non-seulement avéré par le roi et toute l'armée, mais même par une foule de déserteurs autrichiens qui ont été ici. Les Prussiens ont cinq cents morts et trois mille blessés. Cette action est unique, et parait fabuleuse. Les Autrichiens étaient forts de quatre-vingt mille hommes: les Prussiens n'en avaient que trente- six mille. La victoire a été disputée mais toute l'affaire n'a duré que quatre heures. Je ne me sens pas de joie de ce prodigieux changement de la fortune. Je dois ajouter encore une anecdote, le corps que commandait le roi avait fait quarante-deux milles d'Allemagne en quinze jours de temps, et n'avait eu qu'un jour pour se reposer avant de livrer cette mémorable bataille. Le roi peut dire comme César Je suis venu, j'ai vu, j'ai vaincu. I1 me mande qu'il n'est embarrassé à présent que de nourrir et de placer ce prodigieux nombre de prisonniers. La lettre que vous lui avez écrite, où vous lui demandez la relation de la bataille de Mersbourg 2, a été enlevée avec la mienne. Heureusement il n'y avait rien qui puisse vous faire du tort. Je vous adresse la lettre ci-jointe pour le chapeau rouge 3. Pour des coquineries, il n'y en a point; pour des douceurs, je n'en réponds pas.
Nous avons eu, il y a trois jours, trois secousses d'un tremblement de terre, à quatre milles d'ici; on dit que la première était forte, et qu'on a entendu des bruits souterrains. Il n'a causé aucun dommage. On n'a point d'exemple d'un pareil phénomène dans ce pays; je vous laisse le soin d'en trouver la raison. Bien des compliments à Mme Denis. Soyez persuadé de toute mon estime.

Le 27 décembre[1757].
WILHELMINE »

1 Celle du 5 décembre.

2 Ou de Rosbach.

3 Le cardinal de Tencin.