29/06/2014
Si on ne m'aide pas on aura grand tort . Et pour m'aider il faut me laisser faire . Si tous les possesseurs de terres en usaient comme moi, l’État s'en trouverait mieux
... Liberté d'entreprise, l'idée n'est pas nouvelle, on est loin des contraintes administratives et des subventions de toutes sortes . Le bâton répressif réglementaire et/ou financier est de plus en plus employé , hélas . Ce qui ouvre la porte à de nouvelles formes de fraudes, du détournement de subventions au cheval qui meugle sans oublier le Bordeaux au Canard WC . Quel merveilleux bénéfice pour l'Etat !
En attendant qu'on me laisse faire, reprenons des forces
« A François de Bussy 1
L'oncle et la nièce, monsieur, sont enchantés de vos bontés . Nous aimons les négociations autant que nous craignons les intendants . Si vous avez le temps de lire notre mémoire nous le recommandons à votre esprit trancheur de petites difficultés et à votre cœur bienfaisant . Nous présentons nos humbles et très inutiles actions de grâce , mais tendres et sincères à M. le duc de Choiseul . Ni lui ni vous qui songez à l'Europe, ne savez ce que c'est que de faire valoir au milieu des renards, des loups et des neiges des Alpes, des terres qui manquent d'habitants, où l'on ne connait point l'argent de France, où l'on parle le patois de Charlemagne et où les fermiers généraux entretiennent encore quatre-vingt-quatre commis, ce qui est à peu près le nombre de mes sujets . Ils font bonne chère ; et mes paysans ont les écrouelles, les hommes ont la moitié d'une culotte, et les femmes la moitié d'une chemise . Je peuple le pays de Suisses, j'y établis un haras du roi . Je mets hommes, chevaux, boeufs et moutons dans un pays où il n'y avait que des glaces, des ronces et deux curés . Si on ne m'aide pas on aura grand tort . Et pour m'aider il faut me laisser faire . Si tous les possesseurs de terres en usaient comme moi, l’État s'en trouverait mieux . Absit vanitas 2, ma terre de Ferney était autrefois souveraine, je ne demande qu'à être laboureur et meunier . Je compte sur la protection de M. le duc de Choiseul, sans quoi je me serai ruiné à faire du bien . Prenez mon cher négociateur cette affaire à cœur je vous en conjure . J'espère qu'enfin toutes les vôtres réussiront .
Remerciement, attachement, reconnaissance de la part de votre très humble et très obéissant serviteur.
V. Suisse.
Aux Délices 16 mai [1759] »
1 Le manuscrit porte les mentions « à M. de Bussy » et « M. de Voltaire R[épon]du le 28 mai 1759 » ; Mme Denis envoie le même jour elle aussi un mot .Voir lettre du 18 avril 1759 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/06/11/vous-avez-toujours-aime-les-femmes-comme-disait-le-cardinal.html
et aussi : http://edl.revues.org/268#ftn27
2 Sans vanité .
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