11/06/2014
Vous avez toujours aimé les femmes, comme disait le cardinal
... Avec une pointe d'envie (oh ! péché capital ! ), car sous la calotte écarlate et la soutane est un corps d'homme qui ne vit pas que d'hostie et d'eau bénite .
http://www.youtube.com/watch?v=NdWTcRcm_pY
« A François de Bussy 1
Au château de Ferney
par Genève 18 avril 1759
Vous avez toujours aimé les femmes, comme disait le cardinal de Noailles, or, monsieur, ma nièce Mme Denis compte sur vous 2 ; et moi, tout vieux Suisse que je suis, j'y compte aussi . Elle a eu l'honneur de vous importuner pour un brevet et M. le duc de Choiseul a eu la bonté de le promettre . Je lui ai envoyé un extrait de nos pièces avec toute la soumission, toute la reconnaissance et toute l'exactitude possible, et puis j'ai craint de ne l'avoir pas assez ennuyé, et vous aussi monsieur .
Voici donc pour perfection d'ennui tout le contrat d'acquisition sans qu'il s'en manque un mot . Les notaires sont comme les théologiens, ils disent force choses inutiles . Il n'y a dans ce contrat qu'un mot à la page 3 qui regarde mon affaire, c'est celui où il est dit que le château et les terres sont de l'ancien dénombrement . Connaissez-vous, monsieur, cet ancien dénombrement, parmi tous les traités qui sont dans votre tête ? C'est assurément le plus petit dénombrement qui soit au monde, mais enfin ce pauvre petit drACoit est fondé sur des pancartes sacrées de nos rois . Nous avons ou raison ou prétexte d'en demander très humblement la confirmation . Nos joignons à notre contrat la copie du brevet accordé à M. de Brosses en pareil cas . Nous avons eu l'honneur d'envoyer à Mgr le duc de Choiseul nos motifs, nous attendons vos bontés et les siennes, c'est une bagatelle je le sais bien mais rien est beaucoup pour des marmottes du mont Jura . J'ai bien une autre grâce à vous demander . Je vous supplie de renvoyer cet énorme paquet contenant contrat et brevet, à M. d'Espagnac,3 conseiller clerc de grand chambre, demeurant dans la grande ville de Paris, rue Verneuil, lequel abbé d'Espagnac est chef du petit conseil de finances de Mgr le comte de La Marche, mon seigneur suzerain à qui je dois argent, foi et hommage, et pour qui je dois combattre à la tête de douze hommes armés pour l'honneur des dames et de la chevalerie ainsi que le portent les inféodations . Ce grand chambrier veut avoir mon contrat . Pardon, monsieur de vous entretenir de mes misères, quand vous êtes occupé de celles de l'Europe, mais vous suffisez à tout . Secourez-nous . Je suis pour ma vie, et en franc Suisse
votre très humble et très obligé serviteur
Voltaire
gentilhomme ordinaire du roi
Ah si vous saviez à quel point le roi de Prusse est un drôle de corps ! »
1 Le manuscrit est endossé « à M . de Bussy, premier commis des Affaires étrangères » et « M. de Voltaire . R[épond]u le 9 mai 1759 » . Voir page 273 : http://books.google.fr/books?id=TjNAJ46-MYYC&pg=PA273&lpg=PA273&dq=Fran%C3%A7ois+de+Bussy+premier+commis+des+Affaires+%C3%A9trang%C3%A8res&source=bl&ots=fMwizGRaXW&sig=7oKTh5s0q4QddDMrcPeE59VRsRM&hl=fr&sa=X&ei=LZCXU6e5E86a0QW5joHgDw&ved=0CCIQ6AEwAA#v=onepage&q=Fran%C3%A7ois%20de%20Bussy%20premier%20commis%20des%20Affaires%20%C3%A9trang%C3%A8res&f=false
D'Argenson disait de Bussy : « petit fripon que j'avais chassé des bureaux » Voir ref. page 598 : http://books.google.fr/books?id=5AwhAwAAQBAJ&pg=PA55&lpg=PA55&dq=Fran%C3%A7ois+de+Bussy+premier+commis+des+Affaires+%C3%A9trang%C3%A8res&source=bl&ots=bb2H1z6Y8m&sig=iaABibpvJJTlWQnJG_H4ZUYAwZU&hl=fr&sa=X&ei=LZCXU6e5E86a0QW5joHgDw&ved=0CDoQ6AEwBg#v=onepage&q=Fran%C3%A7ois%20de%20Bussy%20premier%20commis%20des%20Affaires%20%C3%A9trang%C3%A8res&f=false
2 Mme Denis avait écrit le 31 mars à François de Bussy pour lui demander de suivre et d'accélérer l'affaire de la conservation des droits de l'ancin dénombrement pour la terre de Ferney . Lalettre de V* provoquera la réponse à celle de Mme Denis sur lemanuscrit de laquelle est portée la mention : « Mme Denis . R[épon]du le 8 mai 1759 » Cependant l'affaire suit son cours puisque le 19 avril le duc de Choiseul demande à Joly de Fleury son « avis, tant sur le fond que sur la forme de brevet à accorder par le roi », lequel est « disposé à accorder cette grâce à M. de Voltaire » Le 20 avril, Chopiseul écrit assez longuement à V*, précisant qu'il ne « néglige pas ce qui [l']intéresse » ; c'est la répponse à lalettre au sujet des « deux strophes terribles » du roi de Prusse ; voir lettre du 30 mars 1759 à Etienne-François de Choiseul : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/05/20/mes-eloges-et-mes-remerciements-de-la-maniere-honnete-dont-v-5373884.html
et du 6 avril 1759 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/04/05/est-ce-l-infame-amour-propre-dont-on-ne-se-defait-jamais-bie.html
3 Léonard de Sahuguet-Damarzit d'Espagnac , abbé commandataire de l’abbaye de Notre-Dame du Palais (ou du Palais Notre-Dame) qui est une ancienne abbaye cistercienne, fondée au XIIe siècle par les moines de l'abbaye de Dalon, et qui était située sur le territoire de la commune de Thauron, dans la Creuse. Voir page 86 : http://books.google.fr/books?id=bgL0EQRYJMEC&pg=RA1-PA86&lpg=RA1-PA86&dq=abb%C3%A9+L%C3%A9onard++d%27Espagnac+conseiller+clerc+de+grand+chambre&source=bl&ots=SGtZs2hTVY&sig=itOQAE_UD5jkZMzkb2OWZqOzJAM&hl=fr&sa=X&ei=wY2XU53NN6eI0AWeuoGQDQ&ved=0CCIQ6AEwAA#v=onepage&q=abb%C3%A9%20L%C3%A9onard%20%20d%27Espagnac%20conseiller%20clerc%20de%20grand%20chambre&f=false
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