24/02/2015
Je remercie à deux genoux la philosophe qui met son doigt sur son menton, et qui a un petit air penché
... Quand elle lit Voltaire , c'est Mam'zelle Wagnière .
« A Jean de LINANT. 1
Aux Délices, 22 février 1760
Je remercie à deux genoux la philosophe 2 qui met son doigt sur son menton, et qui a un petit air penché que lui a fait Liotard 3 ; son âme est aussi belle que ses yeux. Elle a donc la bonté de s'intéresser à notre malheureuse petite province de Gex ; elle réussira si elle l'a entrepris ; puisse-t-elle revenir avec M. Linant et le Prophète de Bohême !
J'écris, monsieur, à M. d'Argental, en faveur de Mlle Martin,4 ou Lemoine, ou tout ce qu'il lui plaira ; quelque nom qu'elle ait, je m'intéresse à elle. J'ai entendu parler de deux nouveaux volumes du roi de Prusse, imprimés depuis peu à Paris; il fait autant de vers qu'il a de soldats. La police a défendu ses vers, on dit même qu'on les brûlera : cela paraît plus aisé que de le battre.
Je suis médiocrement curieux de l'éloquente Oraison 5 de M. Poncet de La Rivière 6, mais je voudrais avoir le Spartacus de M. Saurin 7 ; c'est un homme de beaucoup d'esprit, et qui n'est pas à son aise. Je souhaite passionnément qu'il réussisse.
Vous me parlez de terribles impôts ; puissent-ils servir à battre les Anglais et les Prussiens ! Mais j'ai peur que nous n'en soyons pour notre argent.
Je présente mes obéissances très-humbles à toute la famille.
Si Mme d'Épinay veut m'écrire un petit mot, elle comblera de joie un solitaire malade dans son lit. Ce malade a demandé au grand Tronchin s'il fallait s'enduire de poix-résine, comme l'ordonne Maupertuis ; il a répondu qu'il fallait attendre des nouvelles de l'Académie française. »
1 Gouverneur du jeune d'Epinay ; il en est question dans les Mémoires de Mme d'Epinay : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k205323h
2 Mme d'Épinay .
3 Jean.-Étienne. Liotard, peintre, né à Genève en 1702, mort en 1776. Le portrait est un pastel conservé au Musée d'Art et d'Histoire de Genève . Voir : http://www.google.fr/imgres?imgurl=http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/e/e3/Louise_d%27Epinay_Liotard.jpg&imgrefurl=http://en.wikipedia.org/wiki/Louise_d%27%25C3%2589pinay&h=486&w=377&tbnid=j3aQeb9BP36eMM:&zoom=1&tbnh=97&tbnw=75&usg=__q8IS5MSzuxFvJ9t-WrBBwVP2hdA=&docid=mJ-1X-xCEDjQuM&sa=X&ei=cb7rVPWBCYu3UbKZgKgP&ved=0CCUQ9QEwAA
4 Voir lettre du 18 juillet 1760 à Linant : page 467 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6514333b/f483.image.r=linan
5 L’Oraison funèbre de très haute et très puissante princesse, madame Louise-Élisabeth de France, [...] duchesse de Parme […] prononcée dans l'église de Paris, le 12 février 1760 , de Mathias Poncet de La Rivière.
7 Le Spartacus de Saurin a été joué le 20 février avec succès. Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard-Joseph_Saurin
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