Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

02/05/2019

j’ai toujours dit ce que j’ai pensé, et je ne connais aucun cas dans lequel il faille dire ce qu’on ne pense point

... Ami Voltaire, nous sommes là bien loin de ce que pratiquent nos politiciens de tous bords . Leurs places d'élus sont bâties sur des mensonges grands ou petits et la crédulité et/ou la lassitude des électeurs . Ce ne sont pas les élections européennes à venir qui montreront le contraire .

Image associée

Paroles sincères d'ami, de Winnie à Porcinet

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

26è mars 1764 1

Vous voyez bien, mon cher frère, que vous aviez conçu trop d’alarmes au sujet de frère Platon, et qu’un aussi mauvais ouvrage que la Palissotise 2 ne pouvait nuire en aucune manière qu’à son auteur. Il est vrai qu’il est protégé par un ministre 3 ; mais ce ministre, plein d’esprit et de mérite, aime fort la philosophie et n’aime point du tout les mauvais vers. S’il fut un peu sévère, il y a quelques années, envers l’abbé Morellet 4, il faut lui pardonner. L’article indiscret, inséré dans une brochure, au sujet de madame la princesse de Robecq 5, indigna tous les amis de cette dame, qui, en effet, n’apprit que par cette brochure le danger de mort où elle était. Je suis persuadé que tous nos chers philosophes, en se conduisant bien, en n’affectant point de braver les puissances de ce monde, trouveront toujours beaucoup de protection . Ce serait assurément grand dommage que nous perdissions madame de Pompadour ; elle n’a jamais persécuté les gens de lettres, et elle a fait beaucoup de bien à plusieurs. Elle pense comme vous, et il serait difficile qu’elle fût bien remplacée . Je me console de n’avoir pu parvenir à voir les fatras de l’archevêque de Paris et de l’abbé de Caveyrac, et je suis honteux de m’être fait une bibliothèque de tout ce qui s’est écrit, depuis deux ans, pour et contre les jésuites. Il vaut bien mieux relire Cicéron, Horace et Virgile . Vous aurez incessamment le Corneille commenté ; j’ai pris la liberté de vous en adresser un ballot de vingt-quatre exemplaires, dont je vous supplie d’envoyer douze à M. de Laleu, vous ferez présent des autres à qui il vous plaira . C’est à vous à distribuer vos faveurs. Il y a des gens de lettres qui ne sont pas assez riches pour acheter cet ouvrage, et qui le recevront de vous bien volontiers gratis . Les fanatiques de Corneille n’y trouveront peut-être pas leur compte ; mais je fais plus de cas du bon goût que de leur suffrage . J’ai tout examiné sans passion et sans intérêt, j’ai toujours dit ce que j’ai pensé, et je ne connais aucun cas dans lequel il faille dire ce qu’on ne pense point. Comptez, mon cher frère, que je dise la chose du monde la plus vraie, quand je vous assure de mon très tendre attachement. »

1 L'édition de Kehl ,suite à la copie Beaumarchais, insère dans cette lettre un fragment de celle du 16 avril 1764 ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/07/correspondance-annee-1764-partie-11.html

3 Le duc de Choiseul .

4 Lorsque celui-ci a été embastillé quelque temps en 1760 ; voir lettre du 7 juillet 1760 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/07/06/ayant-sous-son-nez-80-mille-autrichiens-et-100-mille-russes-5732407.html

5 Sur l'affaire de Mme de Robecq, dans laquelle l'attitude de Morellet a été en effet inqualifiable , voir lettre du 10 juin 1760 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/06/10/quand-je-vous-ecrivis-en-beau-style-academique-je-m-en-fous.html

Les commentaires sont fermés.