31/07/2019
J'aime mieux examiner la façon dont certaines choses qui vous déplaisent se sont établies dans le monde
... Ou plutôt celles "qui me déplaisent". Celles qui "vous" déplaisent n'étant pas mon principal souci , chacun voyant midi à sa fenêtre .
Et puis, pour ceux qui aiment se plaindre, ronchonner à propos de tout et de rien, je les laisse faire leur choix , s'ils ont en plus du temps à perdre, les sujets étant fournis à foison et jet continu : https://www.20minutes.fr/actu-generale/
L'actualité est ainsi, touffue, donnant plus d'ombre que de lumière, plus de doute que de vérité ! Voir :
https://www.20minutes.fr/monde/2574227-20190730-ethiopie-...
« A Etienne-Noël Damilaville
20è juin 1764
J'ai de plus à vous dire, mon cher frère, que j'ai renvoyé à M. d'Argental l'ange, la lettre de M. Hulin avec ce mot de ma main à M. Hulin 1. Je lui ai dit que le paquet qui est chez M. de Laleu peut être retiré à ses ordres . Je ne sais ce que c'est que cet écu que les libraires de Paris exigent pour chaque exemplaire ; et je lui certifie que ce n'est pas mon ordre . Je lui dis que je ne me suis mêlé que de commenter, de souscrire et de payer .
Vous m'avez fait observer que si le roi de Pologne prend tous ses exemplaires, il n'en restera plus pour faire des présents . Ma foi je crois que le roi de Pologne doit faire comme le roi de France, et comme moi, ne prendre que la moitié des exemplaires pour lesquels il a souscrit, encore n'en ai-je que le tiers, et j'ai payé le total . Je ne pouvais d'ailleurs prendre que ce tiers parce qu'il n'en restait plus . On n'en avait pas assez tiré . Il y a des souscripteurs qui n'ont point eu de livres, et ce sont ceux qui n'avaient point payé le premier engagement . M. Corneille pourrait , à l'aide de M. Cramer, faire tenir des exemplaires à ceux qui ont souscrit, qui n'ont point payé, et qui paieraient . M. Cramer doit proposer cet arrangement . Tout ceci , mon cher frère, est peu philosophique . J'aime mieux examiner la façon dont certaines choses qui vous déplaisent se sont établies dans le monde . J'ai appris que sait Paul s'était brouillé avec Gamaliel, parce que ce Gamaliel lui avait refusé sa fille . Sur ce, je vous embrasse le plus tendrement du monde .
Écr l'inf . »
1 Voir lettre du 18 juin 1764 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2019/07/27/je-ne-sais-mes-chers-anges-si-j-aurai-le-temps-de-vous-dire-un-mot-touchant.html
10:02 | Lien permanent | Commentaires (0)
30/07/2019
vous donnez des plaisirs à l'esprit tandis que d'autres n'en donnent qu'aux yeux
... Suivez ce choix, vous devriez ne pas le regretter : https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/07/29/chanson...
https://www.numero.com/fr/art/olafur-eliasson-tate-modern...
Pour s'en mettre plein les yeux !
« Au marquis Francesco Albergati Capacelli
Senatore di Bologna
à Bologna.
20è juin 1764 aux Délices
Par ma foi, monsieur, je crois que j'irai bientôt retrouver Francesco Algarotti . Sa conversation était fort agréable ; je m’entretiendrai de vous avec lui, et ce sera ma consolation ; mais je ne me ferai point dresser de monument de marbre, quoiqu'il y ait en Suisse d'assez bon marbre et un assez bon sculpteur . Je trouve que les mausolées ne doivent être érigés que par les héritiers . Je suis affligé de sa perte, il avait du mérite, et c'était un des meilleurs infarinati 1 que nous eussions . Notre ami Goldoni ne passera pas de sitôt par mon petit ermitage . Il me paraît qu'il restera longtemps à Paris .
Je vois, monsieur, par votre lettre , que vous donnez les plus belles fêtes d'Italie . On peut faire ailleurs des courses de chevaux , mais vous courez sur le cheval Pégase, vous donnez des plaisirs à l'esprit tandis que d'autres n'en donnent qu'aux yeux . Mes yeux ne sont plus guère capables d'avoir du plaisir, mais mon âme a un plaisir bien sensible à être un peu aimée de la vôtre .
Agréez, monsieur, les assurances de mon respectueux attachement .
V. »
1 Voir lettre du 17 juin 1764 à Formey : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2019/07/26/je-me-doute-que-ce-sont-des-radoteurs-et-c-est-pour-cela-meme-que-je-les-ve.html
08:56 | Lien permanent | Commentaires (0)
29/07/2019
je m'intéresse à tout
... avec quatre priorités " nous dit le ministre de la Culture Franck Riester .
https://www.lejdd.fr/Politique/tribune-les-4-grandes-prio...
« A Charles Manoël de Végobre
[19 juin 1764]1
Si je pouvais sortir je viendrais dire à monsieur de Végobre combien je m'intéresse à tout ce qui le touche et à quel point je lui suis dévoué .
V. »
1 Daté par Végobre sur le manuscrit .
08:05 | Lien permanent | Commentaires (0)
28/07/2019
Je lui souhaite les deux cents mille livres de rente dont ces ivrognes jouissent
... Présidents, ministres, sénateurs, parlementaires à la retraite ?
« A François-Louis Defresnay
Aux Délices 18 juin [1764]
J'ai reçu, monsieur, une lettre non datée , de Marmoutier 1, signée Defresnay . Je suppose qu'elle me vient d'un homme très aimable que j'ai eu l'honneur de voir, il y a environ douze ans, à Strasbourg, et je ne suppose pas pourquoi il se trouve au milieu d'une troupe de bénédictins allemands . Je lui souhaite les deux cents mille livres de rente dont ces ivrognes jouissent . Je suis à peu près comme le vieux Tobie . Je perds la vue, et je n'ai point de fils qui me la rende avec le secours de l'ange Raphaël . Je dicte ma réponse, et je la dicte un peu au hasard dans le doute où je suis, si c'est le fils de Mme Defresnay de Strasbourg qui m'a fait l'honneur de se souvenir de moi . Je serai toujours très attaché au fils et à la mère . Il me parle dans sa lettre d'un homme de lettres qui a beaucoup d'esprit et de talents, qui est, je crois, actuellement à Nancy 2. Je le supplie , s'il est lié avec cette personne dont il me parle, de lui dire que je suis pénétré d''estime pour elle . Il est vrai que je suis fort embarrassé à son sujet . Vous savez, monsieur, que toutes les puissances de ce monde ont été en guerre ; les gens de lettres, qui sont fort loin d'être des puissances, y sont aussi ; il se trouve que l'homme de mérite en question, fait la guerre à des hommes de mérite dont je suis l'ami ; je voudrais pouvoir être leur conciliateur .
Je suis moi-même en guerre de mon côté avec des gens qui sont ses ennemis ; tout cela est difficile à arranger, mais je conclus qu'il faut rire, et passer ses jours gaiement .
J'ai l'honneur d'être, avec tous les sentiments que j'ai voués à monsieur et à madame Defresnay, monsieur vôtre, etc. »
1 Dans l'actuel Bas-Rhin : https://fr.wikipedia.org/wiki/Marmoutier_(Bas-Rhin)
2 Palissot .
09:10 | Lien permanent | Commentaires (0)
27/07/2019
vous savez que l'édification des Français consiste à rire .... moins de nouvelles moins de sottises
...
« A Etienne-Noël Damilaville
18 juin 1764 1
Mon cher frère, vous recevrez par frère Gabriel deux Meslier . On n' a pas eu le temps de faire le paquet plus gros parce qu'il allait partir . Mais quand ces deux sacrements ne serviraient qu'à sauver deux âmes, cela serait toujours fort honnête . Quand vous en voudrez et que je trouverai une occasion je vous en ferai tenir ; car il ne faut pas mettre la lampe sous le boisseau . Je vous réitère les grands pardons que je dois vous demander de vous avoir empêtré de tant de Corneille . Tout ira beaucoup plus vite en les faisant brocher . Voilà le temps où frère Thieriot se porte beaucoup mieux, et où ce petit exercice peut affermir sa santé . Je lui demande en grâce de vous aider dans cette distribution .
Vous me feriez plaisir de me faire avoir les bêtises de Fréron sur les Commentaires de Corneille . Figurez-vous que Panckoucke à communiqué à M. d'Aquin sa lettre et ma réponse . Ainsi , puisqu'elles sont connues, le droit des gens permet qu'on les imprime 2. Je crois même que la chose est nécessaire pour l'édification publique, et vous savez que l'édification des Français consiste à rire . Je crois ce temps-ci fort stérile en nouvelles . Je suis d’ailleurs toujours comme ce personnage de l’Écossaise 3 qui disait, moins de nouvelles moins de sottises . Portez-vous bien, mon cher frère, et surtout écr l'inf.
N.B. – On a fait de jolies éditions de la Tolérance à Liège et en Angleterre 4. »
1 L'édition de Kehl , suivant la copie Beaumarchais et suivie par les autres éditions, remplace la plus grande partie de cette lettre par des extraits des lettres du 20 juin 1764 et du 22 juin , le tout daté du 22 juin 1764 .Voir page 472 : https://books.google.fr/books?id=4oRJAAAAcAAJ&pg=PA473&lpg=PA473&dq=l%27%C3%A9cossaise+acte+II++sc%C3%A8ne+5&source=bl&ots=lmmzeBPQg5&sig=ACfU3U2kT5_C5q4SF3wdP9A8BJj6V9uQSQ&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwibgtv_wtTjAhVDQhoKHS4QDaAQ6AEwAXoECAcQAQ#v=onepage&q=l'%C3%A9cossaise%20acte%20II%20%20sc%C3%A8ne%205&f=false
2 Ces lettres ne furent pas publiées dans L'Avant-Coureur mais on lit dans le numéro du 23 juillet 1764 une lettre de Panckoucke : « On vient d'imprimer , messieurs, et de publier une lettre adressée à M. de Voltaire qu'on m’attribue, avec une réponse de cet illustre écrivain . Je déclare que je ne suis point l'auteur de cette lettre, telle qu'elle est ; et j'en appelle au propre témoignage de M. de Voltaire, qui certainement n'a aucune part à cette publication . »
3 C'est Freeport, dans ac. II, sc. 5 : voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Caf%C3%A9_ou_l%27%C3%89cossaise
4 Ces éditions ne sont pas connues, et une traduction anglaise a déjà paru .
09:13 | Lien permanent | Commentaires (0)
Je ne sais mes chers anges si j'aurai le temps de vous dire un mot touchant la lettre ci-jointe
... Réflexion faite : non !
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
18 juin [1764]
Je ne sais mes chers anges si j'aurai le temps de vous dire un mot touchant la lettre ci-jointe . La poste va partir . Je viens d'écrire à M. Damilaville qui m'a envoyé la lettre de M. de Hulin 1. J'écris à M. de Hulin en conformité ; et je vous supplie de permettre que je vous adresse la lettre .
Je supplie instamment les sages qui travaillent à la Gazette littéraire de me garder toujours le plus profond secret 2. »
1 Jacques Hulin (1681-1774) est le représentant de Stanislas à Paris de 1737 à 1766 . Voir : Lettres inédites du roi Stanislas, duc de Lorraine et de Bar à Jacques Hulin, son ministre en cour de France (1733-1766)
2 Cette recommandation vise spécialement le compte rendu qu'avait fait V* de l'ouvrage de l'abbé Sade (voir lettre du 30 juin 1764 à d'Argental : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/08/correspondance-annee-1764-partie-22.html ) . Inutile de dire que le secret ne fut pas gardé, car, quelque temps après, un certain « abbé Berth …, chanoine de … à Paris » écrit à Sade : « J'ai vu aussi dans le temps M. l'abbé Arnaud, qui me communiqua la critique de l'Homère des Alpes . Je l'engageai à ne point la faire paraître, ou qu'il la modifiât s'il y était contraint par les ordres de la cour . C'est ce qu'il a fait comme vous avez dû voir dans la Gazette littéraire . Il faut avouer que cet habitant des Alpes est bien de mauvaise humeur . Il m'a toujours paru qu'il voudrait en mourant que tout le monde littéraire expirât avec lui . »
08:24 | Lien permanent | Commentaires (0)
26/07/2019
Je me doute que ce sont des radoteurs, et c’est pour cela même que je les veux lire ; j’en ai lu tant d’autres !
... Ah ! Google actualités ...
« A Jean-Henri-Samuel Formey
Le 17 juin 1764, aux Délices 1
Il est vrai, monsieur, que nous ne sommes pas vous et moi de la première jeunesse. On dit dans le monde que la vie est courte, et qu’elle se passe en malheurs ou en niaiseries. J’ai pris ce dernier parti ; et il paraît que vous en faites autant : ce n’est pourtant pas une niaiserie que d’avoir de jolies filles qui jouent la comédie ; et je vous fais mon compliment de tout mon cœur sur les agréments que vous goûtez dans votre famille. Réjouissez-vous dans vos œuvres 2, car c’est là votre portion . Une de vos vocations, à ce que je vois, est de faire des journaux. Il y a longtemps que vous passez en revue les sottises des hommes, et quelquefois les miennes. Si vous y trouvez utile dulci 3, continuez.
C’est un Livonien très aimable qui vous rendra ma réponse. Il m’a trouvé constant dans mes goûts, j’habite depuis dix 4 ans les Délices sans m’en lasser ; il est vrai qu’on ne joue point la comédie dans le sacré territoire de Genève, et c’est ce qui fait que je ne dis plus :
Je ne décide point entre Genève et Rome.5
Je décide pour Rome sans difficulté ; mais j’ai fait bâtir en France, à une lieue de Genève, un fort joli théâtre : envoyez-moi toutes vos filles, je leur donnerai des rôles.
Voulez-vous me faire un plaisir, quoique nous ne soyons pas de la même religion ? c’est de faire donner ce petit billet au libraire de Berlin 6 qui a imprimé Timée de Locres 7, et Ocellus Lucanus 8. Je me doute que ce sont des radoteurs, et c’est pour cela même que je les veux lire ; j’en ai lu tant d’autres !
Je suis affligé de la perte d’Algarotti ; c’était le plus aimable infarinato 9 d’Italie. Vous aurez le plaisir de le louer, en attendant celui de me juger. Je perds la vue comme Tirésie, sans avoir su, comme lui, les secrets du ciel : c’est ce qui fait que je ne mets pas ici de ma main la belle et solide formule de
votre très humble et très obéissant serviteur.
Voltaire.»
1 Selon l'édition Formey qui rapporte que seule la signature est autographe, et fait précéder la lettre de ce commentaire : « Un gentilhomme livonien m’ayant fait visite le 2 avril 1764 , me demanda une lettre propre à l'introduire chez M. de Voltaire […] Voici sa réponse. »
2 Ecclésiaste , III, 22 : voir : https://saintebible.com/ecclesiastes/3-22.htm
3 L'utile et l'agréable ; Horace, L’Art poétique, v. 343 , voir : http://bcs.fltr.ucl.ac.be/HOR/PisonsTrad.html
4 Corrigé en six par les éditeurs modernes .
5 Henriade, acte II, sc. 5 : voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-la-henriade-chant-second-partie-1-73660943.html
6 Ce libraire est Bourdeaux, mais la lettre en question n'est pas connue .
7 Timée de Tauromenium, Timée de Locres en grec et en français, par M. le marquis d'Argens, 1763 : https://archive.org/details/timedelocreseng00platgoog/page/n5
8 Ocellus Lucanus en grec et en français […] par M. le marquis d'Argens, 1762 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9630594w.texteImage
9 C'est à dire un dilettante .
10:48 | Lien permanent | Commentaires (0)