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07/07/2019

La religion, et la probité vous engageront sans doute à réparer sa faute

... Sans aller jusqu'à mêler la religion aux affaires profanes de l'éducation nationale, il faut corriger la faute des enseignants grévistes et les pénaliser comme ils pénalisent les bacheliers ; leur impunité ne doit pas persister : https://www.capital.fr/lifestyle/pourquoi-les-recales-du-bac-pourraient-contester-leur-resultat-en-justice-1344048

 

 

« A Jean-François de Chatillard de Montillet-Grenaud 1

29 mai 1764, au château de Ferney

en Bourgogne, route de Genève .2

Permettez, monseigneur qu'un gentilhomme s’adresse à vous pour une chose qui vous regarde et qui me touche . Affligé depuis quatre ans d'une maladie incurable, j'ai été recueilli dans un château par M. de Voltaire sur les confins de la Bourgogne . Il me tient lieu de père ainsi qu'à la nièce du grand Corneille . Je lui dois tout . Vous m'avouerez qu'il a dû être surpris et blessé quand on m'a dit que vous aviez traité dans un mandement 3 mon bienfaiteur d'auteur mercenaire et d'homme dont les sentiments erronés avaient disposé la nation à chasser les jésuites . Quant à l'épithète de mercenaire daignez vous informer de votre neveu M. de Billiat 4 s'il lui a prêté de l'argent en mercenaire, et quant aux jésuites informez-vous aussi s'il n'a pas reçu et s'il n'entretient pas chez lui le père Adam, jésuite qui a professé vingt ans la rhétorique à Dijon . Informez vous si dans ses terres il n'a pas mis tous les paysans à leur aise par ses bienfaits . Quand vous serez instruit je m'assure que vous saurez un peu de mauvais gré à celui qui vous a donné de si faux mémoires et qui a si indignement abusé de votre nom . La religion, et la probité vous engageront sans doute à réparer sa faute, et vous sentirez quelque repentir d'avoir outragé ainsi sans aucun prétexte une famille qui sert le roi dans les armées et dans les parlements . J'attendrai l'honneur de votre réponse un mois entier .

J'ai l'honneur d'être dans cette espérance

monseigneur

V. »

2 Quoique le manuscrit porte en tête « copie de la lettre de M. Daimar à l'archevêque d'Auch », et qu'elle ait sans doute été envoyée sous le nom de Daumart, il est évidemment impossible de ne pas attribuer à V* une lettre dont la minute par lui est signée de son initiale . On a déjà vu des exemples analogues, notamment avec des lettres de Wagnière ; mais le cas présent est encore plus patent . V* reviendra plusieurs fois sur l'évêque d'Auch, notamment dans les Honnêtetés littéraires .

3 La lettre pastorale de monseigneur l'archevêque d'Auch au clergé séculier et régulier de son diocèse, datée du 23 janvier 1764 : https://archive.org/details/bub_gb_DLtw04Txz4UC/page/n1

4 Claude-Joseph-Hippolyte de Bourgeois, marquis de Billiat.

06/07/2019

plutôt pour tous les réformés

...

 

 

« A Charles Manoël de Végobre

[28 mai 1764]1

M. de Voltaire fait bien des compliments à M. de Végobre, il est toujours à ses ordres, il lui envoie le factum pour les sieurs Potin, ou plutôt pour tous les réformés . »

1 Date notée par Végobre sur le manuscrit .

05/07/2019

vous n'aurez encore aujourd’hui qu'un mot du malingre

... Riez !

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« A Etienne-Noël Damilaville

28è mai 1764 1

Mon cher frère, vous n'aurez encore aujourd’hui qu'un mot du malingre . J'ai fait un terrible quiproquo en prenant Lemierre pour La Harpe 2. Je ne sais comment réparer la bévue . Gabriel Cramer jure toujours qu'il y a depuis plus de deux moi un gros paquet pour vous sur la route de Bourgogne . Dès que j'ai un moment de relâche à mes maux, je songe à porter les derniers coups à l'infâme . Mais les frères sont dispersés, désunis, et j'ai peur d'être comme le vieux Priam telum que imbelle sine ictu 3. La lettre sous le nom de Jean-Jacques est à peu près de même 4; l'archevêque d'Auch s'en rit, il a quarante mille écus de rente .

Mon cher frère , écr l'inf .

Qu'est devenu je vous prie un M. d'Acquin 5? Vous lui avez donné un Corneille . Je n'entends point parler de ce d'Acquin, fait-il un Avant-coureur ?

J'ai reçu le factum pour Potin et pour l'humanité . J'en remercierai frère Beaumont 6. »

1 L'édition de Kehl, d'après la copie Darmstadt B. , amalgame deux phrases de la présente lettre à la lettre du 1er juin 1764 .

3 Un trait débile et sans impact ; Virgile, Enéide, II, 544 .

4 L'auteur ,- Pierre-Firmin de Lacroix - , d'une prétendue Lettre de J.-J. Rousseau, de Genève, qui contient sa renonciation à la société civile, ses derniers adieux aux hommes , vient de récidiver avec une brochure intitulée Jean-Jacques Rousseau, citoyen de Genève, à Jean-François de Montillet, archevêque e seigneur d'Auch, datée du 15 mars 1764 . Après s'être contenté de nier qu'il fût l'auteur de cet opuscule, Rousseau se plaignit de cette « fourberie sortie de la boutique de M. de Voltaire » . Ses plaintes deviennent plus vives encore le 16 juin 1764 : « M. de Voltaire vient tout récemment de faire un nouveau tour de son métier en publiant sous mon nom une lettre à M. l'archevêque d'Auch qui, dans une instruction pastorale l'avait assez malmené . »

Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5789272v.texteImage

et : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10400809.image

et : https://books.google.fr/books?id=X1ZixOxS2M8C&pg=PA414&lpg=PA414&dq=M.+de+Voltaire+vient+tout+r%C3%A9cemment+de+faire+un+nouveau+tour+de+son+m%C3%A9tier+en+publiant+sous+mon+nom+une+lettre+%C3%A0+M.+l%27archev%C3%AAque+d%27Auch+qui,+dans+une+instruction+pastorale+l%27avait+assez+malmen%C3%A9&source=bl&ots=VBQnYaLkcA&sig=ACfU3U31Dq0qgcG0mi24N0QEvppaVy5mVw&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwj6x5D0wIzjAhUL6RoKHeAjAkMQ6AEwAHoECAkQAQ#v=onepage&q=M.%20de%20Voltaire%20vient%20tout%20r%C3%A9cemment%20de%20faire%20un%20nouveau%20tour%20de%20son%20m%C3%A9tier%20en%20publiant%20sous%20mon%20nom%20une%20lettre%20%C3%A0%20M.%20l'archev%C3%AAque%20d'Auch%20qui%2C%20dans%20une%20instruction%20pastorale%20l'avait%20assez%20malmen%C3%A9&f=false

Voir aussi à ce sujet le lettre de V* du 29 juin 1764 à Chatillard de Montillet-Grenaud .

5 Pierre-Louis d'Acquin de Château-Lyon a en effet des liaisons avec L'Avant-coureur ; voir lettre du 10 août 1760 à d'Argental . Il devait écrire un peu plus tard à V*, le 5 juin 1764 pour accuser réception du Corneille ; il lui envoie une feuille de L'Avant-coureur et lui donne une foule de nouvelles malignes concernant divers auteurs . Voir : https://data.bnf.fr/fr/12207503/pierre-louis_d__aquin_de_chateau-lyon/

et : http://dictionnaire-journaux.gazettes18e.fr/journal/0129-lavant-coureur-3

6 Jean-Baptiste-Jacques Élie de Beaumont , Question sur la légitimité du mariage des protestants français célébré hors du royaume, 1764 .

04/07/2019

Dites-lui du moins comment il faut s’y prendre pour obtenir l’honneur de brailler en allemand pour de l’argent

...

 

« A Cosimo Alessandro Collini 1

Mon cher confrère en historiographerie 2, je crois que vous avez [été 3] très content de notre confrère M. Mallet, qui s’en va historiographer le landgraviat 4 . Je vous présente toujours quelque étranger . En voici un 5 qui a une autre sorte de mérite ; mais vraiment il n’est point étranger à Manheim . C’est un Palatin . Il est vrai qu’il est luthérien et qu’il demande une cure luthérienne 6 Vous ne vous mêlez pas de ces œuvres pies ou impies, ni moi non plus. Il m’est fortement recommandé, et je vous le recommande autant que je peux. Dites-lui du moins comment il faut s’y prendre pour obtenir l’honneur de brailler en allemand pour de l’argent . Indiquez-lui la route qu’en vérité je ne connais pas. Je vous écris de ma main ; mais c’est avec une difficulté extrême . Ma fluxion s’est jetée sur la gorge, et m’empêche de dicter. Je ne sais pas comment je suis en vie avec tous les maux qui m’assiègent . Ils n’ont point encore pris sur l’âme, et ils laissent surtout des sentiments à un cœur qui est à vous.

V. 

Délices 28 mai [1764]»

1 L'édition Collini présente la lettre par ces mots : « Il m'adressait un jeune candidat de la communion réformée, qui se nommait Hilspach. »

3 Mot ajouté par Collini sur le manuscrit .

4 Suivi dans les éditions par de Hesse, selon l'habitude de Collini d'introduire des gloses dans le texte même .

5 Sur la recommandation de Voltaire, Hilspach fut fait ministre réformé à Beaumenthal. (Note de Colini.)

6 Collini a corrigé sur le manuscrit luthérien et luthérienne en réformé et réformée que l'on retrouve dans les éditions ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/07/correspondance-annee-1764-partie-18.html

03/07/2019

Il est bon de l’accoutumer aux grandes affaires

... Dit Emmanuel à propos de Brigitte .

 

 

« A Bernard-Louis Chauvelin

Aux Délices 28 mai 1764

Voilà Votre Excellence associée à la conjuration. Si quelque curieux ouvre ce gros paquet, il croira, à ce grand mot, qu’il s’agit d’une affaire bien terrible, et quand il apprendra que votre ami M. le duc de Praslin est un des principaux conjurés, il ne doutera pas que vous n’alliez mettre le feu en Italie. Mais, après tout, il n’y a que moi de méchant homme dans tout ceci, en y comprenant mes méchants vers . Pour vous mettre bien au fait du plan des conjurés, il faut que je vous dise ce que vous savez peut-être déjà aussi bien que moi. M. de Praslin, qui veut s’amuser, et qui en a besoin, et M. et Mme d’Argental, ont fait serment qu’on ne saurait point le nom de l’auteur ; vous ferez, s’il vous plaît, le même serment avec madame l’ambassadrice. Il est bon de l’accoutumer aux grandes affaires . On a lu une esquisse de la pièce à nos seigneurs les comédiens ; on leur a fait croire que l’auteur était un jeune pauvre diable d’ex-jésuite dont il fallait encourager le talent naissant. Les comédiens ont donné dans le panneau ; et voilà la première fois de ma vie qu’on m’a pris pour un jésuite. Je me confie à vous ; je suis bien sûr que le secret des conjurés est en bonnes mains. Je n’ai qu’un remords, et il est grand . C’est que la pièce ne soit pas tendre, et que les beaux yeux de madame de Chauvelin demeureront à sec. Je lui en demande mille pardons, mais, en qualité d’ambassadrice, elle trouvera du raisonner 1 et de fort vilaines actions qui peuvent amuser des ministres. Enfin j’envoie ce que j’ai et ce que j’ai promis. Si je ne vous ai pas ennuyé plus tôt, c’est que la pièce n’était pas faite, et que j’ai été obligé de donner tout mon temps à mon maître Pierre, que j’ai si mal imité . Je crois que, du temps de la Fronde, les marauds que j’ai l’honneur de vous présenter auraient fort réussi.

Je suis étonné d’écrire une lettre de ma main ; mais c’est que ma fluxion, qui désolait mes yeux, s’est jetée ailleurs. Je n’ai rien perdu . On dit que vous avez à Turin une belle épidémie qui fait mourir les Piémontais. Je me flatte que les ambassadeurs n’ont rien à craindre, et que l’épidémie respecte le droit des gens. J’ai eu l’honneur de voir votre ami, que vous avez bien voulu charger d’une lettre pour moi. Il m’a paru digne de votre amitié.

Que Vos Excellences reçoivent avec amitié les respects du vieux de la montagne. 

V.»

02/07/2019

Voici mon cher frère, la clef de l'aventure de frelon et du seigneur étranger

...

 

« A Etienne-Noël Damilaville

[vers le 25] mai [17]64

Voici mon cher frère, la clef de l'aventure de frelon et du seigneur étranger . Pardonnez à un malade s'il ne vous en dit pas davantage . Faites de ces deux lettres 1 tout ce qui vous plaira .

Écr l'inf . – Vale . »

01/07/2019

Si je pouvais écrire longtemps je ne finirais pas sur votre mérite, sur vos talents, sur l'amitié que vous me témoignez et qui m'est bien chère

... On croirait lire du Sarkozy s'adressant à Fillon et la réponse tout aussi aimable du premier ministre choisi au temps d'une politique de nantis malhonnêtes .

 

 

« A Philibert-Charles-Marie Varenne de Fénille

Aux Délices près de Genève

25è mai 1764

Ma fluxion sur les yeux monsieur qui m'a privé neuf mois de la vue, et une extinction de voix qui m’empêche de dicter ne peuvent rien contre les remerciements que je vous dois . Vous faites des vers comme j'aime qu'on en fasse . Votre Idoménée est à celui de Crébillon ce que Cinna est à Pertharite 1. Si je pouvais écrire longtemps je ne finirais pas sur votre mérite, sur vos talents, sur l'amitié que vous me témoignez et qui m'est bien chère . Tous les gens de lettres doivent être unis . Il n'y a que les Fréron qui sèment la zizanie dans les champs d'Apollon . Je prie monsieur de Varenne de vouloir bien que cette lettre soit pour vous deux 2. J'écris avec une peine extrême . Partagez tous deux mes sentiments . Il fait de jolis vers comme vous en faites de beaux . Vous êtes amis, pardonnez-moi tous deux de ne vous pas dire le quart de ce que je voudrais vous dire, et comptez l'un et l'autre sur la parfaite estime de votre très humble et très obéissant serviteur

V. »

1 Le malheur est que Varenne de Fénille n'a jamais écrit d'Idoménée ! V* fait une confusion avec l'Idoménée de Lemierre ; en voulant la corriger, il en fera une seconde un peu plus tard (voir lettre du 28 mai 1764 à Damilaville ). Par ailleurs le compliment qu'il fait ici n'a pas grande valeur tant l'Idoménée de Crébillon lui déplait .Voir aussi : https://www.cairn.info/revue-d-histoire-litteraire-de-la-...#