22/03/2020
Je suis bien las d'être homme public, et de me voir condamné aux bêtes comme les anciens gladiateurs et les anciens chrétiens
... Ce que doivent penser nos gouvernants en temps normal, et plus encore en notre temps de crise .
Tremblez humains !
« A Etienne-Noël Damilaville
12è janvier 1765 1
J'ai fais chercher hier dans Genève la brochure dont vous m'avez parlé ; je n'ai pu encore la trouver . On dit que ce n'est qu'une seule feuille, et qui a été oubliée presque en naissant, qu'on attribue à un ministre nommé Vernes ou Vernet, lequel a déjà écrit une autre brochure contre Jean-Jacques, oubliée tout de même . Je n'ai vu ni l'un ni l'autre écrit , Dieu merci, et je n'ai fait que parcourir les livres ennuyeux faits à cette occasion . Je serais assurément bien fâché d'avoir la moindre part à toutes ces tracasseries . J'ai resté constamment dans mes campagnes depuis dix ans, et j'y mourrai sans me mêler dans ces sottes querelles . Le nom de Rousseau n'est pas heureux pour la bonne morale et la bonne conduite .
Au reste, mon cher frère, je serais très fâché que mes lettres prétendues secrètes fussent débitées à Paris, quelle rage de publier des lettres secrètes ! J'ai prié instamment M. Marin 2 de renvoyer ces rogatons en Hollande d'où elles sont venues . Je suis bien las d'être homme public, et de me voir condamné aux bêtes comme les anciens gladiateurs et les anciens chrétiens . L'état où je suis ne demande que le repos et la retraite ; il faut mourir en paix ; mais afin que je meure gaiement écr l'inf. »
1 L'édition de Kehl amalgame des extraits de cette lettre avec les lettres du 15 janvier 1765 et du 18 janvier 1765 à Damilaville .
2 Voir lettre du 10 janvier 1765 à Rieu : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/03/20/cette-requete-en-produira-rien-mais-elle-fera-voir-au-public-que-j-ai-fait.html
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Je suis fâché d'applaudir de si loin au bon parti que vous avez pris , je ne suis plus qu'une ombre, et pas même une ombre ambulante
... Confiné, con in fine !
A noter, ce matin, chez Intermarché, il n'y avait plus de beurre, ni argent du beurre, ni main de la crémière, ni autres matières grasses ! Why ? Dernier tango à Paris ?
« A Davis-Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches
Major etc.
à Landrecy
Flandre
12è janvier 1765 à Ferney
Je vous écris de mon lit, mon cher colonel français 1. Vous devez être regretté à La Haye, et bien accueilli chez nous, vous nous défendez et vous plairez, voilà ce qu'il nous faut . Je suis fâché d'applaudir de si loin au bon parti que vous avez pris , je ne suis plus qu'une ombre, et pas même une ombre ambulante .
L’extrême faiblesse qui me fait languir, et la perte presque entière de mes yeux, ne me font pas espérer le bonheur de vous revoir . Il ne me reste que le tendre intérêt que je prendrai jusqu'à mon dernier moment à votre félicité et à vos succès . Je sens que je suis encore en vie par la vivacité de mes sentiments pour vous . Mme Denis se porte mieux que moi, mais elle ne vous aime pas davantage . Souffrez que M. de Besenval 2 trouve ici les assurances de mon respect .
V. »
1 Grâce aux efforts de V* , Constant a été admis colonel dans le régiment français d'Eptingen .
2 Sur Pieter Joseph Victor, baron de Besenval, inspecteur des troupes suisses dans l'armée française , voir lettre du 13 mars 1757 à Constant : « Auguste sultan , […] Nous nous prosternons aux pieds de votre trône, et nous prions le Dieu miséricordieux qu'il vous conserve les sublimes talents dont le bacha Buzanval fait un si bel éloge . » Et : https://gw.geneanet.org/pierfit?lang=fr&n=de+besenval&oc=0&p=pierre+joseph+victor
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