28/02/2022
je suis un homme exact, quoique les faiseurs de tragédies n’aient pas cette réputation
... Oui, effectivement Vlad tu es exact comme un tir de missile balistique les armes à la main , et faux comme un jeton à une table de négociations, Trump en est tout ému et t'encense ; ça sent le faisandé .
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
28è novembre 1766
Je reçois la lettre de mes anges datée du 22. J’envoie à M. le duc de Praslin un second exemplaire du livre de jurisprudence 1 qu’il m’a ordonné de lui faire parvenir. Je le mets dans un paquet à son adresse. J’envoie ce paquet à M. Jeannel avec un autre exemplaire du même livre en feuilles, que j’ai reçu de Franche-Comté, et dont je lui fais présent.
La perte du paquet de M. le duc de Praslin me fait craindre pour la tragédie que j’avais eu l’honneur de lui envoyer. Le manuscrit lui fut dépêché dans le paquet de M. le chevalier de Beauteville. Je vous ai envoyé des corrections depuis, les unes adressées à M. le duc de Praslin, les autres à M. Marin, sous le couvert de M. de Sartines. J’envoie aujourd’hui au même M. Marin l’avis sur le procès des Sirven, dont les exemplaires sont devenus très rares.
Vous voyez, mes chers anges, que je suis un homme exact, quoique les faiseurs de tragédies n’aient pas cette réputation. M. du Clairon, qui n’a fait que la moitié d’une tragédie 2 n’est point exact. Il ne serait pas mal que M. le duc de Praslin eût la bonté de l’engager à faire les recherches nécessaires. Je suis convaincu que c’est un nommé La Beaumelle qui a envoyé à Amsterdam, au libraire nommé Schneider, mes prétendues lettres, avec les additions et les notes les plus criminelles contre le roi et contre les ministres. Cela est si vrai que dans une édition d’Avignon, sous le nom de Lausanne, l’éditeur dit : Nous n’imprimons pas les autres lettres, parce que M. La Beaumelle les a déjà données au public.3
Ce La Beaumelle est un petit huguenot, autrefois réfugié, confiné actuellement en Languedoc, sa patrie. Il travaille toujours de son premier métier . Il avait falsifié ainsi le Siècle de Louis XIV ; il l’avait chargé de notes horribles contre la famille royale ; il fut enfermé à Bicêtre, où il devrait être encore. Le fou de Verberie 4 n’était pas assurément si coupable que lui.
Mais mon alibi 5 me tient bien plus au cœur. Je suis en peine de savoir si mes anges ont reçu tous mes paquets gros et petits.
Si d’ailleurs ils trouvent le nom de Smerdis trop désagréable pour des Français, il n’y a qu’à prononcer Serdis aux deux premières représentations ; après quoi on restituera au prince d’Ecbatane, fils de Cyrus, son nom propre.
J’écris en droiture à mes anges toutes ces petites lettres, afin qu’il n’y ait point de temps perdu. Je me recommande à mon ordinaire à leurs extrêmes bontés, qui font la consolation de ma vie.
V. »
1 Le Commentaire sur le livre des délits et des peines, de Beccaria.
2 Cromwell, que Morand, disait-on, avait commencé.
3 On lit dans un « Nota » à la fin de Monsieur de Voltaire peint par lui-même , II, 63 : « Nous aurions pu grossir cet ouvrage, si M. D. L.B. ne nous avait prévenu en publiant les Lettres secrètes de Voltaire, que nous avons retranchées de notre recueil , afin de ne le pas grossir . »La référence n'est donc pas aux Lettres […] à ses amis du Parnasse comme le dit V* . Du reste la formule même prouve que ce nouveau recueil n'est pas de La Beaumelle .
Voir page 6 : https://voltaire-lire.msh-lse.fr/IMG/pdf/RV_11_1_4_CMervaud.pdf
4 J. Rinquet, condamné à mort en 1762 ; voir lettre du 9 janvier 1763 à Cideville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2017/11/22/vous-etes-a-paris-a-la-source-de-tout-et-nous-ne-sommes-dans-6001833.html
5 Les Scythes , bien sûr .
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