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19/04/2022

n’ayant rien, on ne peut rien m’ôter ; j’ai tout donné

... Paroles de perdants du premier tour de la présidentielle en dessous des 5% nécessaires pour le remboursement des frais de campagne ?

Quelle est la réponse des banquiers , eux qui refusent si facilement et promptement les demandes des particuliers ? Deux poids, deux mesures ...

A moins que ce ne soit un débitant d'huile qui rode devant ses cuves vides : nouvelle affaire tournesol ! Les grossistes encore pourvus "arnaquent" les particuliers, le terme n'est que trop juste . Rappelons-nous quand même qu'il existe d'autres huiles, et basta girasol ! https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-e...

 

 

 

« De Voltaire et Marie-Louise Denis

à Antoine-Jean-Baptiste-Robert Auget, baron de Montyon 1

Ferney, par Genève, 9 janvier [1767]

Monsieur, c’est une grande consolation que vous soyez le juge de ma nièce, Mme Denis : car, pour moi, n’ayant rien, on ne peut rien m’ôter ; j’ai tout donné. Le château que j’ai bâti lui appartient ; les chevaux, les équipages, tout est à elle. C’est elle que les cerbères de bureau d’entrée persécutent ; nous avons tous deux l’honneur de vous écrire pour vous supplier de nous tirer des griffes des portiers de l’enfer.

Vous avez sans doute entre les mains, monsieur, tous nos mémoires envoyés à monsieur le vice-chancelier, qui sont exactement conformes les uns aux autres, parce que la vérité est toujours semblable à elle-même.

Il est absurde de supposer que Mme Denis et moi nous fassions un commerce de livres étrangers : il est très aisé de savoir de la dame Doiret de Châlons, à laquelle les marchandises sont adressées par une autre Doiret, toute la vérité de cette affaire, et où est la friponnerie.

Nous n’avons jamais connu aucune Doiret, y en eût-il cent : il y a une femme Doiret qui est venue dans le pays en qualité de fripière ; elle a acheté des habits de nos domestiques, sans que nous l’ayons jamais vue ; elle a emprunté d’eux un vieux carrosse et des chevaux de labourage de notre ferme, éloignée du château, pour la conduire ; et nous n’en avons été instruits qu’après la saisie.

Loin de contrevenir en rien à la police du royaume, j’ai augmenté considérablement la ferme du roi sur la frontière où je suis, en défrichant les terres, et en bâtissant onze maisons ; et, loin de faire la moindre contrebande, j’ai armé trois fois mes vassaux et mes gens contre les fraudeurs. Je ne suis occupé qu’à servir le roi, et j’ai trouvé dans les belles-lettres mon seul délassement à l’âge de soixante-treize ans.

Nous avons encore beaucoup plus de confiance en vos bontés, monsieur, que nous n’avons de chagrin de cette aventure inattendue. M. d’Argental peut vous certifier sur son honneur que nous n’avons aucun tort, Mme Denis, ni moi ; et mon neveu l’abbé Mignot, en est parfaitement instruit.

Nous espérons recouvrer incessamment des pièces qui prouveront bien que nous n’avons jamais eu la moindre connaissance du commerce de la femme Doiret, ni de sa personne : nous vous demandons en grâce d’attendre, pour rapporter l’affaire, que les pièces vous soient parvenues. Mme Denis est trop malade pour avoir l’honneur de vous écrire ; et moi, qui l’ai été beaucoup plus qu’elle, j’espère que vous pardonnerez à un vieillard presque aveugle si j’emploie une main étrangère pour vous présenter le respect avec lequel j’ai l’honneur d’être, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Voltaire,

gentilhomme ordinaire du roi.



Je me joins à mon oncle avec les mêmes sentiments, monsieur. Votre très humble et très obéissante servante.

Denis. »

1 Jean-Baptiste-Robert Auget, baron de Montyon, mort le 19 décembre 1820 âgé de quatre-vingt-sept ans, a légué des sommes considérables aux hôpitaux de Paris, et a fait les fonds de différents prix que distribuent annuellement des classes de l’Institut.(Garnier.)

Voir : https://data.bnf.fr/fr/11887021/antoine-jean-baptiste-robert_auget_montyon/

et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Baptiste_de_Montyon

Si votre tête repose sur les deux oreillers de la justice et delà compassion, daignez répandre la rosée de vos faveurs sur notre disette

... Petite prière au/à la futur.e président.e de la/le France .

Petit problème : il y a un "Si".

 

 

« A Etienne-François de Choiseul-Stainville, duc de Choiseul

9è janvier 1767 1

Mon héros, mon protecteur, c’est pour le coup que vous êtes mon colonel. Le satrape Elochivis 2 environne mes poulaillers de ses innombrables armées, et le bonhomme qui cultive son jardin au pied du mont Caucase 3 est terriblement embarrassé par votre funeste ambition.

Permettez-moi la liberté grande 4 de vous dire que vous avez le diable au corps. Maman Denis et moi, nous nous jetons à vos pieds. Ce n’est pas les Genevois que vous punissez, c’est nous, grâce à Dieu. Nous sommes cent personnes à Ferney qui manquons de tout, et les Genevois ne manquent de rien. Nous n’avons pas aujourd’hui de quoi donner à dîner aux généraux de votre armée.

À peine l’ambassadeur de votre Sublime Porte eût-il assuré que le roi de Perse prenait les honnêtes Scythes sous sa protection et sauvegarde spéciale, que tous les bons Scythes s’enfuirent 5. Les habitants de Scythopolis peuvent aller où ils veulent, et revenir, et passer, et repasser, avec un passe-port du chiaoux 6 Hennin ; et nous, pauvres Persans, parce que nous sommes votre peuple, nous ne pouvons ni avoir à manger, ni recevoir nos lettres de Babylone, ni envoyer nos esclaves chercher une médecine chez les apothicaires de Scythopolis.

Si votre tête repose sur les deux oreillers de la justice et delà compassion, daignez répandre la rosée de vos faveurs sur notre disette.

Dès qu’on eut publié votre rescrit impérial dans la superbe ville de Gex, où il n’y a ni pain ni pâte, et qu’on eut reçu la défense d’envoyer du foin chez les ennemis, on leur en fit passer cent fois plus qu’ils n’en mangeront en une année. Je souhaite qu’il en reste assez pour nourrir les troupes invincibles qui bordent actuellement les frontières de la Perse.

Que Votre Sublimité permette donc que nous lui adressions une requête qui ne sera point écrite en lettres d’or, sur un parchemin couleur de pourpre, selon l’usage, attendu qu’il nous reste à peine une feuille de papier, que nous réservons pour votre éloge.

Nous demandons un passeport signé de votre main prodigue en bienfaits, pour aller, nous et nos gens, à Genève ou en Suisse, selon nos besoins , et nous prierons Zoroastre qu’il intercède auprès du grand Orosmade, pour que tous les péchés de la chair que vous avez pu commettre vous soient remis. »

1 Seconde minute avec le dernier paragraphe et une correction autographe ; première minute avec des corrections autographes ; édition de Kehl . Les deux minutes ont reçu de Wagnière le titre suivant : « A Mgr le duc de Choiseul sur le cordon de troupes autour de Genève. »

2 Anagramme de Choiseul ; voir lettre du 3 janvier 1767 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/04/08/j-emporte-aux-enfers-ma-juste-indignation-6375571.html

4 Expression des Mémoires de Grammont, chap. iii. Voir lettre du 3 janvier 1755 à Hénault : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/11/01/je-suis-impotent-et-rabeti.html

5 Première version dans les deux manuscrits : tout le monde s'enfuit .

6 Dans l'empire ottoman, le chiaoux est une sorte de commissaire de police ou huissier : https://langue-francaise.tv5monde.com/decouvrir/dictionnaire/c/chiaoux

Passe encore pour du bœuf et des perdrix, mais manquer de casse ! cela est intolérable

... Ne nous méprenons pas, ce n'est pas de casse matérielle dont il s'agit, celle ci est plutôt surabondante en ce moment .

Passez-moi la casse et je vous passerai le  séné , telle est la politique de Poutine à ce jour qui renoue avec le grand jeu des échanges de prisonniers, réminiscence de la guerre froide sans doute ( KGB for ever ! ). Ce triste sire, à l'égal des produits sus-nommés nous fait bien ch....

On se dit tout" - Okapi 100% ADO – Le blog des années collège

-MOI d'abord !

-NON, moi !

 

 

« A Pierre de Buisson, chevalier de Beauteville

À Ferney, 9è janvier 1767 1

Monsieur, je comptais avoir l’honneur de venir présenter Les Scythes à Votre Excellence, et je déménageais comme la moitié de Genève ; mais il plut à la Providence d’affliger mon corps des pieds jusqu’à la tête. Je la supplie de ne vous pas traiter de même dans ce rude hiver. Je vous envoie donc les Scythes comme un intermède à la tragi-comédie de Genève.

On a logé des dragons autour de mon poulailler, nommé le château de Tournay. Maman D[enis] ne pourra plus avoir de bon bœuf sur sa [table ]. Elle envoie chercher de la vache à Gex. Je ne sais pas même comment on fera pour avoir les lettres qui arrivent au bureau de Genève. Il aurait donc fallu placer le bureau dans le pays de Gex. Ce qu’il y a de pis, c’est qu’il faudra un passeport du roi pour aller prendre de la casse chez Colladon 2. Passe encore pour du bœuf et des perdrix, mais manquer de casse ! cela est intolérable . Il se trouve à fin de compte que c’est nous qui sommes punis des impertinences de Jean-Jacques et du fanatisme absurde de De Luc le père 3, qu’il aurait fallu bannir de Genève à coups de bâton, pour préliminaire de la paix.

Que les Scythes vous amusent ou ne vous amusent pas, je vous demande en grâce de les enfermer sous cent clefs, comme un secret de votre ambassade. M. le duc de Choiseul et M. le duc de Praslin sont d’avis qu’on joue la pièce avant qu’elle paraisse imprimée. Je ne suis point du tout de leur avis ; mais je dois déférer à leur sentiment autant qu’il sera en moi.

Daignez donc vous amuser avec Obéide 4, et enfermez-la dans votre sérail, après avoir joui d’elle, et que M. le chevalier de Taulès en aura eu sa part.

Le petit couvent de Ferney, faisant très maigre chère, se met à vos pieds.

J’ai l’honneur d’être, avec un profond respect,

monsieur,

de Votre Excellence

le très humble et très obéissant serviteur.

Voltai[re]. »

1 Original signé dont le papier est endommagé .

2 Plusieurs écrivains genevois ont porté le nom de Colladon. Un Théodore Colladon, de Bourges, avait exercé la médecine à Genève au commencement du xviie siècle. Il est à croire qu’il y avait, en 1767, à Genève, un apothicaire de ce nom ; mais les expressions de casse, eau, bouteilles de Colladon, sont employées par Voltaire pour désigner les ouvrages philosophiques. (Beuchot)

Voir aussi lettre du 14 novembre 1757 à Schouvalov : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/01/30/vous-devez-avoir-recu-une-petite-caisse-d-une-liqueur-qu-on.html

3 Jacques-François de Luc, né en 1698, mort en 1780 ; voir une note page 541 du chant IV de la Guerre de Genève : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome9.djvu/551

4 Personnage de la tragédie des Scythes.