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24/07/2010

Il vous admire d'avoir su réduire les prêtres à être utiles et dépendants.

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« A Catherine II, impératrice de Russie


24è juillet 1765, près de Genève


Madame,


Je n'ai pas manqué de chercher le neveu de l'abbé Bazin [§] pour lui communiquer la lettre dont Votre Majesté Impériale m'a honoré. C'est un homme retiré et obscur , mais votre gloire est venue jusqu'à lui ; elle lui est chère, il connait l'étendue de votre génie, de votre esprit, de votre courage. Il vous admire d'avoir su réduire les prêtres à être utiles et dépendants. Si je n'étais pas si vieux que je suis, je demanderais à Votre Majesté la permission, d'assister avec lui au premier carrousel qu'on ait vu dans vos climats [§§]. Talestris ne donna jamais de carrousel, elle alla cajoler Alexandre, mais Alexandre serait venu vous faire sa cour.


On n'a point encore incendié le livre de l'abbé Bazin [§§§]. On croit qu'il l'a composé dans vos États, car la vérité vient du Nord, comme les colifichets viennent du Midi.


Au reste, madame, le neveu de Bazin m'a dit qu'il avait été très attaché à Mme la princesse de Zerbst, mère de Votre majesté [§§§§], il dit qu'elle était aussi fort belle et pleine d'esprit ; et que si elle vivait, elle serait prête à mourir de joie en voyant le succès de sa fille.


Il y a un meilleur parti à prendre, c'est celui d'en être longtemps témoin. Que Votre Majesté Impériale me permette de me joindre au petit Bazin pour me mettre à vos pieds.


Je suis avec un profond respect,

Madame

de Votre majesté Impériale

le très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

 

§Pseudonyme de V* pour l'édition de La philosophie de l'histoire

Catherine écrivit : « L'impératrice de Russie est très obligée au neveu de l'abbé Bazin de ce qu'il lui a bien voulu dédier l'ouvrage de son oncle (La Philosophie de l'histoire ) … Comme le neveu de l'abbé Bazin a gardé un profond silence sur le lieu de sa résidence, on adresse cette réponse à M. de Voltaire si reconnu pour protéger … les jeunes gens …; cet illustre auteur est prié de faire parvenir à sa destination ses (sic) peu de lignes. »


§§ Le 22 août (2 septembre n. s.), Catherine répond : « Je serais bien aise de vous voir tous deux (Bazin et neveu)assister à mon carrousel …, vous en auriez tout le temps, la pluie … m'a obligée de renvoyer cette fête jusqu'au mois de juin de l'année prochaine. »


§§§ Elle a écrit : « … ce livre (La Philosophie de l'histoire) … sera infailliblement purifié par le feu à paris, ce qui lui donnera un lustre de plus . »


§§§§ V* a été en correspondance avec elle, surtout quand il était en Prusse en 1751-1752 ; elle était amie de la comtesse Bentinck [cf; lettre du 17 mai 1753] et elle vécut plusieurs années en France.

vous avez donné une furieuse secousse à mes entrailles paternelles

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

A Lunéville ce 24 [juillet 1749]



Enfin,je respire. J'ai des nouvelles de mes anges. Je tremblais pour la santé de Mme d'Argental, je tremblais sur tout. Figurez-vous ce que c'est d'être un mois entier sans recevoir un seul mot de ceux qui sont notre consolation, et nos guides sur la terre. La lettre adressée à Cirey ne m'est jamais parvenue. La santé de Mme d'Argental était languissante. Mais je craignais aussi que M. d'Argental ne fût malade. Je craignais encore qu'il ne fût fâché contre moi pour quelques opiniâtreté que j'aurais eue sur Nanine,[] pour quelques mauvais vers d'Adélaïde [Adélaïde du Guesclin, qui devient Le Duc de Foix]. Je faisais mon examen de conscience . J'étais au désespoir . J'avais écrit à ma nièce, je les avais priées d'envoyer chez vous . Mon ange, ne me laissez jamais dans ces tourments là, tant que la santé de Mme d'Argental ne sera pas raffermie.



Je reçois donc Nanine, et je la mets dans le fond d'une armoire pour y travailler à loisir. Je n'interromprai point notre tragédie. Ce n'est pas une pièce tout à fait nouvelle, ce n'est pas non plus Adélaïde, c'est quelque chose qui tient des deux, c'est une maison rebâtie sur d'anciens fondements . Adélaïde française ne pouvait réussir en France. On ne souffrira jamais qu'un prince du sang fasse assassiner son frère, surtout quand ce fait odieux n'est point attesté par l'histoire. Il faut mettre la scène ailleurs ; il faut tirer parti de ce qui pouvait être possible dans la première façon, et en donner une seconde qui soit meilleure. Vous aurez dans un mois cette esquisse et vous y donnerez cent coups de crayon à votre loisir.



Savez-vous bien que vous avez donné une furieuse secousse à mes entrailles paternelles en me faisant entrevoir qu'on pourrait jouer Mahomet ? Je serais bien content surtout si Rosely jouait Séide. Mais je vous conjure de ne pas oublier Sémiramis ; je vais écrire aux Sloth [les décorateurs, les frères Slodtz, que V* appelle « sloth » qui signifie paresseux en anglais; cf. lettre à d'Argental du 1er septembre 1749], et leur recommander un beau mausolée [pour Sémiramis]. Adam en a fait ici un pour la reine de Pologne [l'épouse du roi Stanislas, Catherine Opalinska est morte le 19 mars 1747] qui est digne de Girardon. Pourquoi faut-il que Ninus soit enterré comme un gredin ? Il faudra que le Cury [Bay de Cury, intendant des menus Plaisirs , que V* appelle « intendant des menus tombeaux » le 29 juillet] fasse de son mieux , et qu'il y mette au moins la dixième partie de l'activité avec laquelle il habilla ce magnifique sénat de Catilina [le Catilina de Crébillon]. Je voudrais bien avoir Sémiramis pour le retour à Fontainebleau. Au reste quand vous aurez ma pièce nouvelle, je reprendrai notre Nanine. Savez-vous bien que je pourrais en faire cinq actes ? Le sujet le comporte [Sujet tiré de la Paméla de Richardson, tout comme la pièce de Nivelle de La Chaussée (qui tomba dès la première représentation de décembre 1743)]. La Chaussée avait bien fait cinq actes de sa Paméla, dans laquelle il n'y avait pas une scène ? Vous me direz que voilà bien de la besogne, que je fais trop de choses à la fois ; cependant je joue à la comète et je me priverai encore de ce noble plaisir pour vous plaire.



 Pourquoi permet-on que ce coquin de Fréron succède à ce maraud de Desfontaines [] , pourquoi souffrir Raffiat [voleur célèbre] après Cartouche ? Est-ce que Bicêtre est plein ?



Adieu, divins anges, mes tendres respects à tout ce qui vous entoure, Mme du Châtelet vous fait mille compliments. Je souhaite sa santé et son ventre [Mme du Châtelet attend un enfant de Saint-Lambert, en s'arrangeant pour faire croire au marquis du Châtelet qu'il est de lui] à Mme d'Argental. Je suis inconsolable que vous ne laissiez pas de votre race.



V.



 Mais que Mme d'Argental se porte bien, il vaut mieux de la santé que des enfants. »

 

humblement François-Marie Arouet de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, historiographe de France etc.

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"Le vent pleure "Mary" dit Jimi Hendrix, Marie dont Volti ne reconnaitra pas la sainte durable virginité  .

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Cool ! Cool ! j'en reste baba !

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« A Nicolas-René Berryer de Ramenoville

[¥]

[24 juillet 1747]


Supplie humblement François-Marie Arouet de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, historiographe de France etc. , disant qu'en un procès pendant actuellement entre lui et les nommés Antoine Travenol, et Louis Travenol père et fils [¥¥], par-devant MM. de la Tournelle [¥¥¥], sa partie adverse le veut rendre responsable de l'emprisonnement d'Antoine Travenol fait par ordre du roi le 7 juin 1746 [¥¥¥¥], et qu'ainsi il se trouve obligé de requérir que M. le lieutenant de police se fasse représenter cet ordre du roi existant dans son dépôt, et qu'il veuille bien interroger le commissaire et l'exempt chargés de cet ordre du roi, afin que sur l'inspection de cet ordre, et sur le rapport du commissaire et de l'exempt, comme aussi sur le dépouillement des registres, M. le lieutenant de police puisse certifier au dos de cette requête 1° si Antoine Travenol a été constitué prisonnier en vertu d'un ordre du roi, 2° si cet ordre, ou ordonnance de police a été précédé de plainte contre Antoine Travenol, dénonciation ou requête, de la part du suppliant, afin que la cour puisse faire droit. [¥¥¥¥¥

¥Il succède à Marville le 28 mai comme lieutenant de police ; V* a écrit une lettre quasi identique à Marville le 8 décembre 1746.


¥¥ Libelles diffusés contre V* ; cf. lettres à Marville des 17 mai, 3 juillet et 16 novembre 1746.


¥¥¥ = Chambre du parlement de Paris chargée des affaires criminelles.


¥¥¥¥ Après la fuite du fils, Louis, le père de quatre-vingts ans Antoine a été arrêté le 7 juin au grand scandale de beaucoup ; il a été libéré le 12, notamment grâce à l'intervention de V* conseillé par d'Olivet.


¥¥¥¥¥ C'est le commissaire qui avait décidé d'arrêter Antoine Travenol après une perquisition où il avait trouvé des libelles , mais ce n'est pas Antoine Travenol, c'est louis Travenol qui a été dénoncé. V* avait demandé la perquisition suite à la dénonciation de Louis Travenol par Phélizot.

 

 

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23/07/2010

Croyez-moi, il faut que les sages qui ont de l'humanité se rassemblent loin des barbares insensés.

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« A Denis Diderot


23 juillet 1766


On ne peut s'empêcher d'écrire à Socrate quand les Melitus et les Anitus [Anytos et Meletos : accusateurs de Socrate] se baignent dans le sang et allument des bûchers. Un homme tel que vous ne doit voir qu'avec horreur le pays où vous avez le malheur de vivre. Vous devriez bien venir dans un pays [Clèves] où vous auriez la liberté entière non seulement d'imprimer ce que vous voudriez, mais de prêcher hautement contre des superstitions aussi infâmes que sanguinaires. Vous n'y seriez pas seul, vous auriez des compagnons et des disciples . Vous pourriez y établir une chaire qui serait la chaire de la vérité. Votre bibliothèque se transporterait par eau et il n'y aurait que quatre lieues de chemin par terre. Enfin vous quitteriez l'esclavage pour la liberté. Je ne conçois pas comment un cœur sensible et un esprit juste peut habiter le pays des singes devenus tigres. Si le parti qu'on vous propose satisfait votre indignation et plait à votre sagesse, dites un mot et on tâchera d'arranger tout d'une manière digne de vous, dans le plus grand secret et sans vous compromettre. Le pays qu'on vous propose est beau et à portée de tout. L'Uranibourg de Tycho Brahé [Frédéric II de Danemark donna à l'astronome Tycho Brahé l'île de Hveen où il construisit l'observatoire de Uraniborg] serait moins agréable. Celui qui a l'honneur de vous écrire est pénétré d'une admiration respectueuse pour vous, autant que d'indignation et de douleur. Croyez-moi, il faut que les sages qui ont de l'humanité se rassemblent loin des barbares insensés. [V* sera déçu par la réaction de Diderot]»

... se venger, ou du moins de quitter un pays où se commettent tous les jours tant d'horreurs

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« A Jean Le Rond d'Alembert


Aux eaux de Rolle en Suisse par Genève 23 de juillet [1766]


Oui, vraiment, je le connais ce mufle de bœuf et ce cœur de tigre [], qui mérite par ses fureurs ce qu'il a fait éprouver à l'extravagance [#¶¶]; et vous voulez prendre le parti de rire, mon cher Platon [#¶¶¶! Il faudrait prendre celui de se venger, ou du moins de quitter un pays où se commettent tous les jours tant d'horreurs. N'auriez-vous pas déjà lu la relation ci-jointe [#¶¶¶¶]? Je vous prie de l'envoyer à frère Frédéric, quoiqu'elle ne soit pas tout à fait exacte, il est de la plus grande importance qu'il l'ait de cette façon, afin qu'il soit plus irrité, et qu'il accorde une protection plus marquée et plus durable à cinq ou six hommes de mérite qui veument se retirer dans une province méridionale de ses Etats, et y cultiver en paix la raison, loin du plus absurde fanatisme qui ait jamais avili le genre humain, et loin des scélérats qui se jouent ainsi du sang des hommes [#¶¶¶¶¶]. L'extrait de la première relation est d'une vérité reconnue ; je ne suis pas sûr de tous les faits contenus dans la seconde, mais je sais bien qu'en effet il y a une Consultation d'avocats [cf. lettres du 14 juillet à Damilaville et 28 juillet à Florian], et si je puis par votre moyen parvenir à l'avoir, vous ferez une oeuvre méritoire. Je sais que vous n'êtes pas trop lié avec le barreau, mais voilà de ces occasions où il faut sortir de sa sphère. L'abbé Morellet, M. Turgot pourraient vous procurer cette pièce, vous pourriez me la faire tenir par Damilla, qui cherche de son côté. Pourquoi faut-il n'avoir que de telles armes contre des monstres qu'il faudrait assommer ? C'est bien dommage encore une fois, que Jean-Jacques soit un fou et un méchant fou, sa conduite a fait plus de tort aux belles-lettres et à la philosophie que Le Vicaire savoyard ne leur fera jamais de bien. Non, encore une fois, je ne puis souffrir que vous finissiez votre lettre en disant : je rirai [Dans sa lettre, d'Alembert parlait de la « brouillerie » de Rousseau et Hume et concluait : « Pour moi je rirai comme je fais de tout, et je tâcherai que rien ne trouble mon repos et mon bonheur. »]. Ah ! Mon cher ami, est-ce là le temps de rire ? Riait-on en voyant chauffer le taureau de Phalaris [Tyran d'Agrigente qui brûlait ses victimes dans un taureau d'airain, comme on brûla le chevalier de La Barre]? Je vous embrasse avec rage. »

Lettre du 16 juillet de d'Alembert : « Avez-vous connu un certain M. Pasquier, conseiller de la cour …? On a dit de lui que sa tête ressemblait à une tête de veau, dont la langue était si bonne à griller. Jamais cela n'a été plus vrai qu'aujourd'hui ; car c'est lui qui par ses déclamations a fait condamner à la mort des jeunes gens qu'il ne fallait mettre qu'à St Lazare. »


#¶¶ Le chevalier de La Barre avait été exécuté le 1er juillet 1766, cf. lettre du 14 juillet à Damilaville et 28 juillet à Florian.


#¶¶¶ Conclusion réelle de d'Alembert : « Je ne veux plus parler de tout cet auto-dafé …. car cela me donne de l'humeur, et je ne veux que me moquer de tout. »


#¶¶¶¶ Sans doute la prétendue lettre d'Abbeville sur l'affaire de La Barre que V* envoyait le 14 juillet à Damilaville [cf. lettre du 14]


#¶¶¶¶¶ Le 25, à Damilaville : « Le roi de Prusse vient d'envoyer 500 livres à Sirven … il ne l'a fait qu'à ma prière … Je ne doute pas … que, si vous vouliez vous établir à Clèves avec Platon (Diderot) et quelques amis, on ne vous fit des conditions très avantageuses ; on y établirait une imprimerie …, on y établirait une autre manufacture plus importante, ce serait celle de la vérité. »

22/07/2010

et je conclus que si j'avais un fils qui dût éprouver les mêmes traverses je lui tordrais le cou par tendresse paternelle.

http://www.dailymotion.com/video/x6icl5_beaumarchais-lins...

Voici un extrait de ce film d'Edouard Molinaro que j'ai eu le plaisir de voir hier soir dans un cadre qui me tient à coeur, le parc du chateau de Voltaire .

Je peux vous assurer qu'Edouard Molinaro, à 82 ans, garde une clarté d'esprit égale à sa simplicité, simplicité et complicité également partagée par son épouse.

Donc grands plaisirs, avec une visite nocturne, très chiche en lumignons (le CMN n'aurait-il pas de budget pour quelques bouts de chandelles qu'il sait parfois brûler par les deux bouts ) , ce qui est un comble pour illustrer la vie d'un homme des Lumières, mais talent des acteurs qui campaient (avec plus ou moins d'exactitude) des proches de Voltaire.

Accompagnement par de jeunes guides qui n'ont eu qu'une journée pour mettre au point leur intervention, pour ceci bravo, grand bravo ! mais pour certains détails de la vie voltairienne, à corriger impérativement.

C'est à l'image de la vie, du bon et du moins bon ! A reconnaitre ! Progresser et s'améliorer .

 

Régalez-vous :

http://www.allomovies.com/viewf.php?id=YOF8XFVDEOTJMEEG&a...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

A Postsdam 22 juillet [1752]



Mon cher ange, on m'a mandé que vos volontés célestes étaient que l'on représentât incessamment cette Amélie [représentée le 17 août] que vous aimez, et qu'on m'exposât encore aux bêtes dans le cirque de Paris. Votre volonté soit faite au parterre comme au ciel. J'ai envoyé sur-le-champ à M. de Thibouville [le 15 juillet], l'un des juges de votre comité, à qui Madame Denis a remis la pièce, quelques petits vers à coudre au reste de l'étoffe. Il ne faut pas en demander beaucoup à un homme tout absorbé dans la prose de Louis XIV et entouré d'éditions comme vos grands-chambriers le sont de sacs. Je ne sais pas encore quel parti prend ma nièce sur sa Coquette [dans le Journal de la Librairie, le 4 mai, d'Hémery dit qu'elle ne parvenait pas à faire recevoir sa pièce par les Comédiens]. Apparemment qu'elle veut attendre ; vous ne doutez pas que je n'eusse la politesse de lui céder le pas.



J'attends demain de ses nouvelles, je tremble toujours pour elle et pour moi. Un oncle et une nièce qui donnent à la fois des pièces de théâtre donnent l'idée d'une étrange famille. Dancourt n'a-t-il pas fait La Famille extravagante [comédie en un acte de Le Grand, représentée la première fois en 1709]? On la donnera probablement pour petite pièce. Heureusement vos prêtres sont plus fous que nous, et leur folie n'est pas si agréable. Mais vos gredins du Parnasse sont de grands malheureux. On ôte à Fréron le droit qu'il s'était arrogé de vendre les poisons de la boutique de l'abbé Desfontaines [#]. Je demande sa grâce à M. de Malesherbes [en effet, le 13 juin ; d'Hémery note dans le Journal de la Librairie du 4 août 1752 : « … M. de Malesherbes a permis a Fréron de dire partout que les feuilles étaient rendues avant qu'il eut reçu la lettre de Voltaire ; ce qui est vrai. » Les Lettres … ne parurent pas entre fin avril et début octobre.] et le scélérat pour récompense fait contre moi des vers scandaleux qui ne valent rien . Mes anges, si Amélie réussissait après le petit succès de Rome sauvée, moi présent, les gens de lettres me lapideraient ou bien ils me donneraient à brûler aux dévots et allumeraient le bûcher avec les sifflets qu'ils n'auraient pu employer. Il faut vivre à Paris riche et obscur, avec mes amis, mais être à Paris en butte au public ! j'aimerais mieux être une lanterne des rues exposées au vent et à la grêle. Pardon, mes anges, mais quelquefois je songe à tout ce que j'ai essuyé, et je conclus que si j'avais un fils qui dût éprouver les mêmes traverses je lui tordrais le cou par tendresse paternelle.



Je vous ai parlé encore plus à cœur ouvert dans ma dernière lettre, mon cher et respectable ami. Je ne vous ai jamais donné une plus grande preuve d'une confiance sans bornes [##]. Je mérite que vous en ayez en moi.



Je serais bien affligé si la Coquette [La Coquette punie, de Mme Denis] recevait un affront. Je me consolerais plus aisément de la disgrâce d'Amélie et du Duc de Foix. Il y a d'autres évènements sur lesquels il faudra prendre son parti. Voulez-vous voir toute ma situation, et tous mes sentiments ? J'aime passionnément mes amis, je crains Paris, et le repos est nécessaire à ma santé et à mon âge. Je voudrais vous embrasser et je suis retenu par mille chaines jusqu'au mois d'octobre. On m'assure positivement que Le Siècle sera fini dans ce temps-là [la deuxième édition reconnue par V*, faite à Dresde par Walther ; le 8 juillet, à Walther : « Je crains d'être obligé de faire un voyage vers la fin de septembre, et je prévois que votre édition ne sera pas prête pour ce temps-là. »], et que je pourrai faire un petit voyage pour vous aller trouver. Cette idée me console. L'amitié seule remplit le cœur. Mon cher ange, conservez-moi cette amitié précieuse qui fait le charme de la vie. Quelque chose qu'on puisse penser de moi à la cour et à la ville, que les uns me blâment, que les autres regrettent leur victime échappée, que les gredins m'envient, que les fanatiques m'excommunient, aimez-moi et je suis heureux. Je vous embrasse tendrement.



V. »


#A la demande de Mme Denis, la publication des Lettres sur quelques écrits de ce temps a été interdite car Fréron avait donné le 25 mars un portrait satirique de V* et l'avait ensuite accusé le 5 avril d'avoir volé à La Motte le madrigal à la princesse Ulrique.

Desfontaines est mort le 16 décembre 1745 et Fréron a repris les Jugements sur les écrits modernes (jusqu'en 1746) ; avant la mort de Desfontaines, il le remplaçait déjà aux Observations sur les écrits modernes (jusqu'en 1743). Par ailleurs il lança les Lettres à la comtesse de *** sur quelques écrits modernes (1745-1746), puis en février 1749, Les lettres sur quelques écrits de ce temps.


##A d'Argental, le 11 juillet : « Elle [Mme Denis]me paraît entièrement décidée à livrer bataille( c'est à dire faire jouer sa pièce), elle a une confiance entière en M. d'Alembert. C'est un homme de beaucoup d'esprit, mais connait-il assez le théâtre ? Cette extrême confiance en M. d'Alembert pourrait bien d'ailleurs justifier un peu mon absence. Vous voyez si je vous ouvre mon cœur. »

On pourrait en déduire que V* soupçonnait une liaison entre sa nièce et d'Alembert.

 

 

Petite note sur Gudin, dont il est question dans Beaumarchais l'insolent : http://books.google.fr/books?id=MwHgAAAAMAAJ&pg=PA433...

 

 

21/07/2010

j'ai pris mon pli. Eh ! vieux fou, prends en un autre

http://www.youtube.com/watch?v=nMxKMIC__jo

http://www.youtube.com/watch?v=3lE0Y1xz9C0&feature=re...

http://www.youtube.com/watch?v=g2MH6Pc-emI&feature=re... : j'ignorais tout de ce dernier titre !

 

http://www.youtube.com/watch?v=Ki_K-gcnH4k&feature=re... : relatif au XXème siècle !


Et dédicace spéciale à Johnny (quoique réfugié politique en Suisse !) et consorts, comme quelques sportifs qui gagnent ce que la décence ne me permet pas d'imprimer ici :

http://www.youtube.com/watch?v=03r3S2Rz16w&feature=re...

 

 

 

 

« Au cardinal François-Joachim de Pierre de Bernis


21 juillet [1762] aux Délices


Lisez cela, Monseigneur ,[les Pièces originales ? ; cf. lettre du 5 juillet à d'Argental] je vous en conjure, et voyez s'il est possible que les Calas soient coupables . L'affaire commence à étonner et a attendrir Paris, et peut-être s'en tiendra-t-on là. Il y a d'horribles malheurs qu'on plaint un moment, et qu'on oublie ensuite. Cette aventure s'est passée dans votre province [Bernis, né dans le Vivarais deviendra archevêque d'Albi]. Votre Éminence s'y intéressera plus qu'un autre . Je peux vous répondre que tous les faits sont vrais. Leur singularité mérite d'être mise sous vos yeux.



Cette tragédie ne m'empêche pas de faire à Cassandre toutes les corrections que vous m'avez bien voulu indiquer. Malheur à qui ne se corrige pas, soi, et ses œuvres. En relisant une tragédie de Mariamne que j'avais faite il y a quelque quarante ans [Mariamne créée le 6 mars 1724, sera donnée sous le nom d'Hérode et Mariamne le 10 avril 1725 ; elle est issue d'Artémire créée le 15 février 1720, ébauche de la future Mariamne], je l'ai trouvée plate et le sujet beau. Je l'ai entièrement changée . Il faut se corriger eût-on quatre-vingts ans. Je n'aime point les vieillards qui disent : j'ai pris mon pli. Eh ! Vieux fou, prends en un autre, rabote tes vers si tu en as fait, et ton humeur si tu en as. Combattons contre nous-même jusqu'au dernier moment. Chaque victoire est douce. Que vous êtes heureux Monseigneur ! Vous êtes encore plus jeune et vous n'avez point à combattre [Bernis a quarante sept ans et est en disgrâce].

Natales grate numeras ? Ignoscis amicis ?

[comptes-tu sans chagrin tes anniversaires , pardonnes-tu a tes amis?]



E per fine baccio il limbo della sua sacra porpora.



V. »

 

 

Dédicace à un président qui casse le thermomètre quand la France a de la fièvre, -traduire qui "lourde" un préfet-, quand il met en application sa politique du changement. Que ne se change-t-il  lui-même ?

"Combattons contre nous-même"...

Pas cap' !!

http://www.youtube.com/watch?v=PAwUspkm_xE&feature=re...

On dit bien "changement d'herbage rejouit les veaux " ?!