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30/05/2011

Voltaire, le bon Dieu te doit un grand merci

Vers onze heures du soir ce samedi 30 mai 1778, la plus brillante des Lumières du XVIIIè siècle change de monde .

Houdon-Volt tete marbre national gallery of art washington.jpg

J'aime les bustes de Volti, emperruqué ou  à l'antique, mais j'ai un faible pour cette tête réalisée par le génial Houdon qui nous montre l'homme qui sut allier, comme on le voit, l'ironie (parfois mordante ) à une extrême bonté . Il eut la grandeur d'affronter le doute, de reconnaître humblement, lucidement que l'Homme ne saura jamais tout . A mes yeux, et selon mon coeur, et je ne suis certainement pas le seul, il est un modèle d'homme de bonne volonté .

 

Il y a deux cent trente trois ans , Volti (ceux qui fréquentent ce blog connaissent déjà ce surnom affectueux que je donne à François-Marie Arouet de Voltaire ) cessa de souffrir et put enfin échapper à ses ennemis qui sont les dogmes religieux, l'intolérance, le fanatisme et l'imbécilité malveillante .

"Mon Dieu, rendez mes ennemis bien ridicules !" disais-tu, et je ris avec toi .

Mais aussi, tu dis avec une grande foi et sincérité, cette prière qui devrait être universelle pour tous ceux qui se targuent de croire en Dieu :

http://www.litteratureaudio.net/Voltaire_-_La_Priere_a_Di...

 

Plutot que la lettre d'un homme dit "mort pour la France", j'aimerais qu'on lise plutôt l'article sur la "Tolérance" du Dictionnaire philosophique :

http://www.voltaire-integral.com/Html/20/tolerance.htm

"Qu’est-ce que la tolérance? c’est l’apanage de l’humanité. Nous sommes tous pétris de faiblesses et d’erreurs; pardonnons-nous réciproquement nos sottises, c’est la première loi de la nature."

Et extrait du Traité sur la Tolérance :

"Il ne faut pas un grand art, une éloquence bien recherchée, pour prouver que des chrétiens doivent se tolérer les uns les autres. Je vais plus loin : je vous dis qu'il faut regarder tous les hommes comme nos frères.
Quoi ! mon frère le Turc ? mon frère le Chinois ? le Juif? le Siamois ?

Oui, sans doute ; ne sommes-nous pas tous enfants du même père, et créatures du même Dieu ?


Mais ces peuples nous méprisent ; mais ils nous traitent d'idolâtres !

Hé bien ! je leur dirai qu'ils ont grand tort. Il me semble que je pourrais étonner au moins l'orgueilleuse opiniâtreté d'un iman ou d'un talapoin, si je leur parlais à peu près ainsi :

« Ce petit globe, qui n'est qu'un point, roule dans l'espace, ainsi que tant d'autres globes ; nous sommes perdus dans cette immensité. L'homme, haut d'environ cinq pieds, est assurément peu de chose dans la création. Un de ces êtres imperceptibles dit à quelques-uns de ses voisins, dans l'Arabie ou dans la Cafrerie : "Écoutez-moi, car le Dieu de tous les mondes m'a éclairé : il y a neuf cents millions de petites fourmis comme nous sur la terre, mais il n'y a que ma fourmilière qui soit chère à Dieu ; toutes les autres lui sont en horreur de toute éternité ; elle sera seule heureuse, et toutes les autres seront éternellement infortunées." »


Ils m'arrêteraient alors, et me demanderaient quel est le fou qui a dit cette sottise.

Je serais obligé de leur répondre : « C'est vous-mêmes. » Je tâcherais ensuite de les adoucir ; mais cela serait bien difficile.


Je parlerais maintenant aux chrétiens, et j'oserais dire, par exemple, à un dominicain  inquisiteur pour la foi : « Mon frère, vous savez que chaque province d'Italie a son jargon, et qu'on ne parle point à Venise et à Bergame comme à Florence. L'Académie de la Crusca a fixé la langue ; son dictionnaire est une règle dont on ne doit pas s 'écarter, et la Grammaire de Buonmattei est un guide infaillible qu'il faut suivre ; mais croyez-vous que le consul de l'Académie, et en son absence Buonmattei, auraient pu en conscience faire couper la langue à tous les Vénitiens et à tous les Bergamasques qui auraient persisté dans leur patois? »

 

Je me permettrai d'ajouter mon frère athée ! qui, s'il ne croit pas en Dieu, peut croire en l'Homme en toute fraternité .

 

N'a-t-on pas là de quoi faire un monde meilleur ?

 

Mam'zelle Wagnière, j'aime à penser que vous , fidèle entre les fidèles, êtes de coeur avec moi . Je vous dédie ce qui suit :

http://www.litteratureaudio.com/livre-audio-gratuit-mp3/v...

PS .- Hier, Volti m'a demandé de vos nouvelles, quand je lui ai rendu visite  en n'omettant pas la caresse que vous savez pour lui, et la grimace que nous réservons à son sinistre voisin !

 

 

nous sentons bien qu'on peut lui reprocher un petit manque de modestie

"... et qu’il n'est pas honnête de chanter ainsi ses louanges" !

N'est ce pas heureux(ses) candidat(e)(s) au trône républicain ?

 

Sophie_Arnould02.jpg


http://www.deezer.com/listen-695598

http://www.deezer.com/listen-765208

Moi aussi, j'aime bien Gluck !

Ich bin sehr glücklich !

Und Geluck, auch !

Geluck-Fourmi.jpg

 

 

 

« A Jean-Baptiste-Nicolas de Lisle

Capitaine de dragons, etc.

à Mousson

 

30è mai [1774]

 

Nous sommes tous Gluck à Ferney 1, Monsieur ; nous sommes aussi Arnould 2. Nous sommes encore plus De Lisle ; et pour vous en convaincre nous avons sauvé un pauvre diable de moine défroqué qui osait porter votre nom 3.

 

A l'égard de Mlle Arnould qui chante si bien que de grâces, que de beauté !4 nous sentons bien qu'on peut lui reprocher un petit manque de modestie, et qu’il n'est pas honnête de chanter ainsi ses louanges . Elle se tirera de cette critique comme elle pourra .

 

Pour Mme du Deffand nous ne lui pardonnons pas de s'être ennuyée à cette musique 5.

 

En vous remerciant de toutes vos bontés .

 

Il court une petite oraison funèbre de Louis XV, prononcée par un monsieur de Chambon, dans l'académie de Valence 6. Elle est courte, nous vous enverrons le premier exemplaire qui nous tombera sous la main .

V[otre] t[rès] h[umble] [et] obligé

 

Le vieux malade. »


2 Madeleine-Sophie Arnould créa les rôles d'Iphigénie et d'Eurydice dans les opéras de Gluck . http://roglo.eu/roglo?lang=fr&m=NG&n=Madeleine+Sophie+Arnould&t=PN

3 Le 6 mai, V* demandait à P.-J. Franck, banquier, de donner de sa part « dix louis d'or à M. Delille » . « C'était un moine défroqué qui avait enlevé une fort jolie fille . Ses supérieurs couraient après lui pour le faire brûler ; nous avons envoyé le moine et sa demoiselle en Russie », écrira V* le 18 juillet à De Lisle .

4 Vers chanté par le chœur (I, 5 : http://www.deezer.com/listen-695631)à l'arrivée d'Iphigénie dans Iphigénie en Aulide (musique de Gluck, livret adapté par le bailly du Roullet).

5 A la représentation d'Iphigénie en Aulide créée le 12 avril .

6 L’Éloge funèbre de Louis XV prononcé dans une académie le 25 mai 1774, de V*. http://books.google.com/books?id=jKMGAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

De Lisle dira : « M. de Chambon n'existe pas plus que l'académie de Valence » . Le 6 juin, V* envoie à Mme du Deffand « le petit ouvrage de M. de Chambon » ; « (il) m'a paru mériter que je vous l'envoie, non pas à cause de son éloquence, car je le crois un peu trop simple, ... » ; voir page 337 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f342.image.r... . Il ajoutera : « Ce M. de Chambon ne brûle pas beaucoup d'encens quand il dit sa grand-messe. »