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13/05/2022

Nous sommes précisément à Ferney comme dans une ville assiégée... Cela serait bien plaisant, si cela n’était pas insupportable

... Voyons où nous en étions il y a trois ans : https://www.ferney-voltaire.fr/wp-content/uploads/FerneyM...

Et aujourd'hui : https://www.ferney-voltaire.fr/vivre-a-ferney-voltaire/cadre-de-vie/urbanisme/

Bilan : "Laisse béton !" [ laid ce béton !]

Garden Park & Dynacite - Ferney Voltaire (01) - ERM

 

 

 

« A Antoine-Jean-Gabriel Le Bault

A Ferney, 19 janvier 1767

Monsieur,

Il y a environ six semaines que j’ai reçu cent bouteilles de vin sans aucun avis, et comme nous sommes bloqués actuellement de tous côtés par les soldats et par les neiges, il ne m’est pas possible de savoir d’où ce vin nous est venu. Je soupçonne que c’est vous qui me l’avez envoyé, et je voudrais savoir ce que je vous dois. Plût à Dieu que votre bonté pût nous consoler dans la disette extrême où nous sommes de tout ce qui est nécessaire à la vie ; nous manquons de tout sans aucune exagération. Nous sommes précisément à Ferney comme dans une ville assiégée. Je ne m’attendais pas à soutenir ici les horreurs de la guerre dans mes derniers jours. Cela serait bien plaisant, si cela n’était pas insupportable.

Je vous supplie de me mettre aux pieds de Mme Le Bault, de monsieur le premier président, et de monsieur le procureur général.

J’ai l’honneur d’être, avec bien du respect, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Voltaire. »

Vous êtes trop généreux pour n’avoir pas pour moi plus de pitié que de colère

... C'est la prière de Jean Castex au pape François en présentant le bilan de son activité ministérielle ; il sera pardonné, son purgatoire se termine .

À Rome, Castex refuse la séparation de l'Église et de la loi

 

 

 

« A Jean-Chrysostome Larcher, comte de La Touraille 1

Au château de Ferney, 19è janvier 1767

Je suis vieux, monsieur, malade, borgne d’un œil, et maléficié de l’autre. Je joins à tous ces agréments celui d’être assiégé, ou du moins bloqué. Nous n’avons, dans ma petite retraite, ni de quoi manger, ni de quoi boire, ni de quoi nous chauffer . Nous sommes entourés de soldats de six pieds, et de neiges hautes de dix ou douze ; et tout cela parce que Jean-Jacques Rousseau a échauffé quelques têtes d’horlogers et de marchands de draps. La situation très triste où nous nous trouvons ne m’a pas permis de répondre plus tôt à l’honneur de votre lettre . Vous êtes trop généreux pour n’avoir pas pour moi plus de pitié que de colère.

Nous avons ici M. et Mme de La Harpe, qui sont tous deux très aimables. M. de La Harpe commence à prendre un vol supérieur ; il a remporté deux prix de suite à l’Académie, par d’excellents ouvrages 2. J’espère qu’il vous donnera à Pâques une fort bonne tragédie. Il eut l’honneur de dédier à M. le prince de Condé sa tragédie de Warwick, qui avait beaucoup réussi. J’ai vu une ode 3 de lui à S. A.S., dans laquelle il y a autant de poésie que dans les plus belles de Rousseau. Il mérite assurément la protection du digne petit-fils du grand Condé ; il a beaucoup de mérite, et il est très-pauvre, il ne partage actuellement que la disette où nous sommes.

Adieu, monsieur ; agréez les assurances de mes tendres et respectueux sentiments, et ayez la bonté de me mettre aux pieds de Son Altesse sérénissime 4.

V... »

2 La Délivrance de Salerne , et Le Poète. Voir : https://data.bnf.fr/fr/documents-by-rdt/11910286/te/page3

4 La Touraille est écuyer du prince de Condé ; voir lettre du 10 mars 1760 à Larcher : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/03/11/les-faibles-ouvrages-qui-ont-pu-echapper-a-mon-loisir-et-a-l-inutilite-ou-j.html

 

12/05/2022

Il me semble que si j'avais de l'argent, je le mettrais à la banque royale

... God save the Q.u.e.e.n ! https://www.youtube.com/watch?v=HgzGwKwLmgM

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

19 janvier 1767 1

Je n'ai rien à vous mander, mon cher ami, sinon que je suis toujours bloqué par les neiges et par des soldats, que nous manquons de tout à Ferney, que nous n'avons nulle nouvelle de l'affaire de la Doiret, que je suis très malade et très affligé et que votre amitié me console . Il me semble que si j'avais de l'argent, je le mettrais à la banque royale .

Cette opération de finances me paraît belle et bonne .

Je vous supplie de vouloir bien donner cours à l'incluse . »

1 L'édition Correspondance littéraire ajoute la dernière phrase .

Vous pouvez venir sur mon territoire et je ne puis aller sur le vôtre

... Pense et dit le président Macron à ses opposants ; "Le monde ne vaut que par les extrêmes mais ne tient que par les modérés " dit Paul Valéry . Advienne que pourra .

 

 

« A Gabriel Cramer

[19 janvier 1767]1

Je ne sais pas, mon cher Caro, si M. le duc de Choiseul vous fait du bien, mais il me fait beaucoup de mal . Vous êtes libre et je suis bloqué . Vous pouvez venir sur mon territoire et je ne puis aller sur le vôtre . Vous mangez des truites, mais je me suis dépiqué en mangeant des soles .

Je vous répète que vous me ferez un très sensible plaisir de vouloir bien dire à M. Dupan combien je partage sa douleur 2. Je suis malade dans mon lit, je n'en peux plus . Envoyez-lui ce billet si vous n'avez pas le temps de lui écrire vous-même . »

1 La date est fixée par la mention des soles dans la lettre du 19 janvier 1767 à Beauteville : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/04/correspondance-annee-1767-partie-8.html

2 Allusion quasi certaine à la mort de Gabriel du Commun dont le testament fut ouvert le 20 janvier 1767, ce qui signifie qu'il dut mourir quelques jours auparavant ; voir lettre du 20 janvier 1767 à Claire Cramer : « Je suis très affligé par la mort de M. du Commun . Oui c'était un philosophe ; […].»

Vous allez recevoir un homme pour qui j’ai la plus grande estime

... D'autant plus que ce premier ministre est une femme  !

Les paris sont ouverts ...

 

 

« A Pierre-Joseph Thoulier d'Olivet

J’ai voulu attendre, mon cher maître, que ma réponse à votre prosodie fût imprimée, pour vous dire en quatre mots combien je vous aime. Grâces à Dieu, nos académiciens ne tombent point dans les ridicules dont je me plains dans ma réponse, et le bon goût sera toujours le partage de cette illustre compagnie, à qui je présente mon profond respect.

Vous allez recevoir un homme 1 pour qui j’ai la plus grande estime. Au reste, je vous renvoie à M. d’Alembert pour les eu 2  . Il les contrefaisait autrefois le plus plaisamment du monde.

Adieu ; conservez-moi les bontés dont je me vante dans ma lettre imprimée.

V.

18è janvier 1767 à Ferney. »

1 Thomas ; voir lettre du 20 décembre 1766 à Marmontel : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/03/20/m-6372387.html

2 Les e muets prononcés dans la déclamation lyrique, voir lettre du 5 janvier 1767 à d'Olivet : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/04/12/le-deplace-le-faux-le-gigantesque-semblent-vouloir-dominer-a-6376206.html

11/05/2022

Le mal est que beaucoup d'imbéciles sont gouvernés par des gens de cette espèce, et qu'on les croit souvent sur leur parole

... Beaux parleurs, vous avez encore de beaux jours à vivre , la race des gogos n'est pas en voie de disparition . Notre période électorale est propice aux charlatans qui se targuent d'exploits "historiques" et promettent une vie de Cocagne : bienvenue à la Foirfouille et bravo à NUPES qui recrute larga manu, y compris des gibiers de potence. Ah ! les beaux députés que nous risquons d'avoir !

 

 

« A François-Louis-Henri Leriche

18 janvier 1767

Mes fréquentes maladies, monsieur, et des affaires non moins tristes que les maladies, m'ont privé longtemps de la consolation de vous écrire .

Il y a un paquet pour vous à Nyon en Suisse depuis plus de quinze jours . Les neiges ne lui permettent pas de passer, et je ne sais même par quelle voie il pourra vous parvenir, à moins que vous ne m'en indiquiez une .

Je vous suis très obligé des éclaircissements historiques que vous avez bien voulu me donner sur un des plus grands génies qu'ait jamais produits la Franche-Comté, Nonotte 1. Le mal est que beaucoup d'imbéciles sont gouvernés par des gens de cette espèce, et qu'on les croit souvent sur leur parole . Les honnêtes gens qui pourraient les écraser ne font point un corps, et les fanatiques en font un considérable . Si on ne se réunit pas, tout est perdu . Il est bien juste que les esprits raisonnables soient amis ; et votre amitié, monsieur, fait une de mes consolations . »

1 Certainement ceux que V* a demandé et qu'il utilise dans les Honnêtetés littéraires, XXII pour cibler Nonotte : https://fr.wikisource.org/wiki/Les_Honn%C3%AAtet%C3%A9s_litt%C3%A9raires/%C3%89dition_Garnier/22

 

ces deux rogatons... il en fera sa cour à son correspondant d’Allemagne

... L'un des rogatons est  le projet de créer une "communauté politique européenne", et il est bien accueilli par Olaf Scholz . L'autre rogaton, plus protocolaire et banal , est le rendez-vous pris pour un conseil des ministres franco-allemand en juillet ; ça ne mange pas de pain . Conclusion : on se téléphone et on se fait un casse-mie (comme on dit en pays gessien ).

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

18 janvier 1767 1

Je n’ai que le temps, mon cher ami, de vous envoyer ces deux rogatons. Ils ont fait diversion dans mon esprit quand j’ai été accablé de chagrins. Envoyez-en un exemplaire de chacun à Thieriot ; il en fera sa cour à son correspondant d’Allemagne.

J’attends de vos nouvelles, mon cher ami, sur l’affaire des Sirven et sur tout le reste. »

1 Copie contemporaine Darmstadt B. qui comporte la troisième phrase, absente dans le manuscrit .