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19/12/2022

Vous conservez votre gloire, mais la France a un peu perdu la sienne

... Est-ce ce que le président Macron a dit à Didier Deschamps après avoir fait des calinous à MBappé ?

 

 

« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu

27è mai 1767 à Ferney

Il me paraît, monseigneur, que le royaume du prince noir m'a été plus favorable que les Velches de Paris. J'en ai uniquement l'obligation au maître de l'Aquitaine 1. Il faut qu'il ait lui-même ordonné des répétitions sous ses yeux, et que l'envie de lui plaire ait mis les acteurs au-dessus d'eux-mêmes. Vous connaissez Paris il n'est rempli que de petites cabales en tout genre. Zaïre Oreste, Sémiramis, Mahomet, Tancrède, l'Orphelin de la Chine, tombèrent à la première représentation elles furent accablées de critiques, elles ne se relevèrent qu'avec le temps. On se faisait un plaisir de me mettre fort au-dessous de Crébillon, pour plaire à Mme de Pompadour, qui disait que le Catilina de ce Crébillon était la seule bonne pièce qu'on eût jamais faite. Voilà comme on juge de tout, jusqu'à ce que le temps fasse justice. S'il est permis de comparer les petites choses aux grandes, vous savez que le maréchal de Villars ne jouit de sa réputation qu'à l'âge de près de quatre-vingts ans. Le favori de Vénus, de Minerve, et de Mars, sait lui-même quelles contradictions il a essuyées dans sa carrière de la gloire. Il faut se soumettre à cette loi générale qui existe dans le monde, depuis le péché originel ; il mit dans le cœur humain l'envie et la malignité, qui sans doute n'y étaient pas auparavant.

Je vous avertis que nous avons ici la meilleure troupe de l'Europe, et que l'envie n'est point entrée dans notre tripot. Nous avons un jeune M. de La Harpe, auteur du Comte de Warwick. Il est, par sa figure et par la beauté de son organe, beaucoup plus fait que Lekain pour jouer Athamare. Jamais je n'ai rien vu de plus parfait qu'un M. de Chabanon, qui a joué Indatire. La femme de M. de La Harpe était Obéide. Sa figure est fort supérieure à celle de Mlle Clairon; elle a une voix aussi théâtrale, elle sait pleurer et frémir. Les deux vieillards étaient de la plus grande vérité. Je ne me suis pas mal tiré du rôle de Sozame; et surtout, quand je me plaignais des cours, je puis me vanter d'avoir fait une impression singulière. La pièce n'a point été ainsi jouée à Paris; il s'en faut de beaucoup. A qui en est la faute? à mon séjour en Scythie. M. d'Argental ne s'en est point mêlé il est très malade, et je crains même que sa maladie ne soit trop sérieuse.

J'avais vu chez moi Mlle Durancy, il y a quelques années je lui avais trouvé du talent, elle me demanda le rôle d'Obéide. On dit qu'elle le joua très mal à la première représentation, mais qu'à la troisième et quatrième elle fit un très grand effet. On me mande qu'elle joue avec beaucoup d'intelligence et de vérité, mais qu'elle n'est pas d'une figure agréable, et qu'elle n'a pas le don des larmes. On dit que les autres actrices n'ont point de talent, et que le théâtre tragique n'a jamais été dans un état plus pitoyable. On me mande que, lorsqu'un acteur de province se présente pour doubler les premiers rôles, ceux qui sont chargés de ces rôles ne manquent pas de les accabler de dégoûts et de les faire renvoyer 2. Si on est aussi malin dans ce tripot qu'à la cour, je vous réponds que vous n'aurez d'autre théâtre que celui de l'Opéra-Comique. C'est à vous, qui êtes doyen de l'Académie et premier gentilhomme de la chambre, de protéger les beaux-arts, ils en ont besoin. Vous savez dans quelle décadence est ma chère patrie dans tous les genres.

Vous conservez votre gloire, mais la France a un peu perdu la sienne. Il faut espérer que nous aurons du moins encore quelques crépuscules des beaux jours du siècle de Louis XIV. Agréez, monseigneur, mon tendre et profond respect.

V. »

1 Le maréchal de Richelieu était gouverneur de la Guyenne .

2 L'accord est fait non d'après la grammaire, mais d'après le sens ; on attendait de l'accabler de dégoûts et de le faire renvoyer .

18/12/2022

il m’a dit qu’il s’était donné tous les mouvements possibles pour prévenir l’exécrable catastrophe qui a indigné tous les gens sensés de l’Europe

... Paroles d'un confident d'Emmanuel Macron suite à l'agression de l'Ukraine par le despote Poutine ?

https://www.parismatch.com/lmnr/r/375,250,FFFFFF,forcex,center-middle/img/var/pm/public/media/image/2022/12/18/02/indira.jpg?VersionId=BwpGCYtsAv0O2RCs.OBU5biua5KjYeqq

Des reines de beauté pour des républicains admiratifs, dont je suis .

Longue vie à Indira Ampiot !

 

 

 

« A Jacques-Marie-Bertrand Gaillard d'Etallonde

26 Mai 1767

Je fus très consolé, monsieur, quand le roi de Prusse daigna me mander 1 qu’il vous ferait du bien. Il a rempli sur-le-champ ses promesses, et j’ai l’honneur de lui écrire aujourd’hui 2 pour l’en remercier du fond de mon cœur. Il est assurément bien loin de penser comme vos infâmes persécuteurs. Je voudrais que vous commandassiez un jour ses armées, et que vous vinssiez assiéger Abbeville. Je ne sais rien de plus déshonorant pour notre nation que l’arrêt atroce rendu contre des jeunes gens de famille, que partout ailleurs on aurait condamnés à six mois de prison.

Le nonce 3 disait hautement à Paris que l’inquisition elle-même n’aurait jamais été si cruelle. Je mets cet assassinat à côté de celui des Calas, et immédiatement au-dessous de la Saint-Barthelémy. Notre nation est frivole, mais elle est cruelle. Il y a peut-être dans la France sept à huit cents personnes de mœurs douces et de bonne compagnie qui sont la fleur de la nation, et qui font illusion aux étrangers. Dans ce nombre il s’en trouve toujours dix ou douze qui cultivent les arts avec succès. On juge de la nation par eux ; on se trompe cruellement. Nos vieux prêtres et nos vieux magistrats sont précisément ce qu’étaient les anciens druides, qui sacrifiaient des hommes : les mœurs ne changent point.

Vous savez que M. le chevalier de La Barre est mort en héros. Sa fermeté noble et simple, dans une si grande jeunesse, m’arrache encore des larmes. J’eus hier la visite d’un officier de la légion de Soubise 4, qui est d’Abbeville ; il m’a dit qu’il s’était donné tous les mouvements possibles pour prévenir l’exécrable catastrophe qui a indigné tous les gens sensés de l’Europe. Tout ce qu’il m’a dit a bien redoublé ma sensibilité. Quelle religion, monsieur, qu’une secte absurde qui se ne soutient que par des bourreaux, et dont les chefs s’engraissent de la substance des malheureux !

Servez un roi philosophe, et détestez à jamais la plus détestable des superstitions. »

2 On ne sait rien de cette lettre à Frédéric II, pas même si elle a jamais existé, du moins à cette date .

17/12/2022

si populus dives, rex dives / si le peuple est riche, le souverain est riche

... Il serait bon que l'inverse soit vrai : un riche roi pour un peuple riche lui aussi , n'est-ce pas Charles ?

 

 

"A Catherine II, impératrice de Russie

26 Mai [1767] 1

Un voyage en Asie ! Allez-vous l’entreprendre,

Belle et sublime Thalestris ?

Que ferez-vous dans ce pays ?

Vous n’y verrez point d’Alexandre

Hélas ! Votre Majesté Impériale ferait le tour du globe, qu’elle ne rencontrerait guère de rois dignes d’elle. Elle voyage comme Cérès la législatrice, en faisant du bien au monde. Je ne sais point la langue russe ; mais par la traduction que vous daignez m’envoyer 2, je vois qu’elle a des inversions et des tours qui manquent à la nôtre. Je ne suis pas comme une dame de la cour de Versailles, qui disait : « C’est bien dommage que l’aventure de la tour de Babel ait produit la confusion des langues, sans cela tout le monde aurait toujours parlé français ».

L’empereur de la Chine, Camhi, votre voisin, demandait à un missionnaire si on pouvait faire des vers dans les langues de l’Europe . Il ne pouvait le croire.

Je remercie Votre Majesté de la bonté qu'elle a de daigner s'intéresser pour deux paquets 3 envoyés de Suisse à l'Académie économique . Ils sont de deux Français qui demeurent entre la Franche-Comté et l’État de Berne .

Je reçois en ce moment une lettre de l'un d'eux . Elle m'apprend que la devise de l'un d'eux est ex tellure omnia 4, et celle de l'autre si populus dives, rex dives 5. Mais leur véritable devise est leur admiration pour votre personne . C'est assurément la mienne.

Que Votre Majesté Impériale daigne agréer mes sentiments et le très profond respect de ce vieux Suisse

Voltaire »

1L'édition de Kehl est incomplète des deux paragraphes qui précèdent le dernier ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-35175925.html

2 Il s’agit ici du Manifeste qui convoquait les députés pour la réforme des lois, et la politique à l'égard de la Pologne .

3Ces deux paquets ne sont pas, comme le dit Besterman l'Anecdote sur Bélisaire et la Lettre sur les panégyriques . Il s'agit de mémoires envoyés à la Société économique de Saint-Pétersbourg, comme l'indique clairement le texte de la lettre de Catherine II à laquelle V* répond ici .

Voir lettre de Catherine, du 26 mars 1767 (6 avril nouveau style ) : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-35175925.html

et sa version complète : « Monsieur, j’ai reçu votre lettre du 27 Février, où vous me conseillez de faire un miracle pour changer le climat de ce pays. Cette ville-ci était autrefois très accoutumée à voir des miracles, ou plutôt les bonnes gens prenaient souvent les choses les plus ordinaires pour des effets merveilleux ; j’ai lu dans la préface du concile du tzar Ivan Basilewitz, que lorsque le tzar eut fait sa confession publique, il arriva un miracle ; le soleil parut en plein midi, et que la lueur donna sur lui, et sur tous les pères rassemblés ; notez que ce prince, après avoir fait une confession générale à haute voix, finit par reprocher au clergé, dans des termes très vifs, tous ses désordres, et conjura le concile de le corriger, lui, et son clergé aussi. A présent les choses sont changées. Pierre-le-Grand a mis tant de formalités pour constater un miracle, et le synode les remplit si strictement, que je crains d’exposer celui dont il vous plaît de me charger avant votre arrivée. Cependant, je ferai tout ce qui sera en mon pouvoir pour procurer à la ville de Pétersbourg un meilleur air ; il y a trois ans qu’on est après à saigner par des canaux les marais qui l’entourent, à abattre les forêts de sapins qui la couvrent au midi , et dès à présent il y a déjà trois grandes terres occupées par des colons, là où un homme à pied ne pouvait passer sans avoir de l’eau jusqu’à la ceinture : les habitants ont semé, l’automne dernier, leurs premiers grains.

Comme vous paraissez, monsieur, prendre intérêt à ce que je fais, je joins à cette lettre la moins mauvaise traduction française du Manifeste que j’ai signé le 14 décembre de l’année passée et qui a été si fort estropié dans les gazettes de Hollande, qu’on ne savait pas trop ce qu’il pouvait signifier ; en russe, c’est une pièce estimée : la richesse et les expressions fortes de notre langue l’ont rendue telle , la traduction en a été d’autant plus pénible. Au mois de juin, cette grande assemblée commencera ses séances, et nous dira ce qui lui manque , après quoi on travaillera à aux lois que l’humanité, j’espère, ne désapprouvera pas ; d’ici à ce temps-là, j’irai faire un tour dans différentes provinces, le long du Volga ; et au moment peut-être que vous vous y attendrez le moins, vous recevrez une lettre datée de quelque bicoque de l’Asie. Je serai là, comme partout ailleurs, remplie d’estime et de considération pour le seigneur du château de Ferney.

Catherine .

P.S. – Le comte Schouvallow m'a montré une lettre par laquelle vous lui demandez, monsieur, des nouvelles de deux écrits envoyés à la Société économique de Pétersbourg . Je sais que parmi une douzaine de mémoires qui lui ont été envoyés pour résoudre sa question, il y en a un en français qui est adressé par Schaffouse . Si vous pouviez m'indiquer les devises de ceux pour lesquels vous vous intéressez, je ferai demander à la Société si elle les a reçus . »

4 Nous corrigeons le texte de Besterman, ex tellusa omnia, les mots du texte signifient tous les biens proviennent de la terre . C'est une des thèses favorites des physiocrates, voir L'Homme aux quarante écus .

5 Traduction : si le peuple est riche, le souverain est riche .

16/12/2022

L'affaire est importante, elle mérite qu'on la discute ; pour cela il faut qu'on s'entende, et pour s'entendre il faut se voir

... Est-ce réellement pour le foot qu'Emmanuel Macron est allé au Qatar, ou n'est-ce pas un moyen de mettre un pied dans l'embrasure, se faire bien voir en félicitant les émirs pour leur organisation, et par ricochet, pendant qu'on y est, demander la fourniture de gaz à un prix raisonnable ? Il faut bien rentabiliser ce couteux voyage ; empreinte carbone ? mes fesses !

France-Maroc : l'analyse très pointue d'après-match d'Emmanuel Macron -  Quotidien | TMC

Une tête de ravi de la crèche !

 

 

« A Charles-Frédéric-Gabriel Christin

Je viens de recevoir une lettre de M. Leriche, mon cher ami ; je lui fais réponse . Il faudrait absolument qu'il se donnât la peine de venir chez moi . On peut tirer de son manuscrit quelque chose de très utile et de très intéressant, mais il est essentiel de le refondre, sans quoi on ne fera rien de bien . L'affaire est importante, elle mérite qu'on la discute ; pour cela il faut qu'on s'entende, et pour s'entendre il faut se voir .

Je vous embrasse de tout mon cœur.

On fait actuellement une nouvelle édition des Scythes qu'on vous enverra .

A Ferney 25è mai [1767] »

15/12/2022

j’avais un besoin extrême du succès de cet ouvrage

... Non pas le vote du budget de la France qui se règle  à coups de 49.3, mais, selon notre président-supporter de foot (hélas ! ) le match France-Maroc : 2-0, inch Allah !

J'aime pas le foot

Hier soir j'ai passé une soirée formidable en regardant Manon des Sources, et aucun de ceux qui ont fait de même ne sont allés dans la rue pour semer le désordre et même la mort .

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

25 Mai 1767 1

 Je commence, mon cher ange, ma réplique à votre lettre du 14, par vous dire combien je suis étonné que vous ayez de la bile . C’est donc pour la première fois de votre vie. Il n’y a pourtant nulle bile dans votre lettre ; au contraire, vous m’y comblez de bontés, et vous compatissez à mes angoisses. C’est à moi qu’il appartient d’avoir de la bile ; je ne peux ni rester où je suis, ni m’en aller. Vous savez que j’ai donné la terre de Ferney à Mme Denis. J’ai arrangé mes affaires de famille de façon qu’il ne me reste que des rentes viagères qu’on me paie fort mal, et M. le duc de Virtemberg surtout me met, malgré toutes ses promesses, dans l’impuissance de faire une acquisition auprès de Lyon.

Mme Denis, qui est très commodément logée, se transplanterait avec beaucoup de peine. Tout notre pauvre petit pays est si effarouché, qu’il est impossible de trouver un fermier ; nous sommes donc forcés de rester dans cette terre ingrate.

Je vous avouerai, de plus, qu’il y a un certain ressort 2 que je n’aime pas . L’affaire d’Abbeville me tient au cœur, je n’oublie rien ; la Saint-Barthélemy me fait autant de peine que si elle était arrivée hier.

Il faut que je vous dise, à propos d’Abbeville, qu’un de ces infortunés jeunes gens qui méritait d’être six mois à Saint-Lazare, et qui a été condamné au plus horrible supplice pour une mièvreté 3, ayant, pour comble de malheur, un père très avare, a été obligé de se faire soldat chez le roi de Prusse. Il a beaucoup d’esprit ; il m’a écrit : j’ai représenté son état au roi de Prusse, qui, sur-le-champ, l’a fait officier. J’espère qu’il sera un jour à la tête des armées, et qu’il prendra Abbeville . Mais, en attendant, je ne crois pas que je doive me mettre dans le ressort ; mon cœur est trop plein, et je dis trop ce que je pense.

Après vous avoir ainsi rendu compte de mon âme et de ma situation, je dois vous parler de M. et de Mme de Beaumont, et de leur procès au conseil. Ils demandent que vous disiez un mot en leur faveur à M. le duc de Praslin et à M. le duc de Choiseul. Le défenseur des Calas et des Sirven mérite vos bontés, et n’a pas besoin de ma recommandation auprès de vous.

Je viens enfin aux Scythes . Ils avancent la fin de mes jours ; ils me tuent comme Indatire et Obéide. Le procédé des comédiens a été pour moi le coup de pied de l’âne . Il faut dix ans pour ressusciter quand on est mort d’un pareil coup, témoin Oreste, témoin Adélaïde du Guesclin, témoin Sémiramis ; j’avais un besoin extrême du succès de cet ouvrage ; j’ai été contredit en tout, et je finis ma carrière par essuyer l’affront et l’injustice inouïe qu’on me fait avec ingratitude. Cela n’empêchera pas que Lekain ne touche le petit honoraire qu’on lui a promis ; il peut y compter : on le portera chez lui au mois de juin.

Je demande à présent en grâce, à mes anges et à M. de Thibouville, de lire le petit mémoire ci-joint. »

1 L'édition de Kehl omet la dernière phrase .

2 Le ressort du parlement de Paris, qui s’étendait sur la plus grande partie de la France, d’Aurillac à Boulogne, et de La Rochelle à Mézières. (Beuchot.)

3 Le mot mièvreté, déjà rare au XVIIIè siècle, ne se confond pas avec mièvrerie, quoique celui-ci s’applique ordinairement à l'époque classique à une « gentillesse malicieuse » . Mièvreté désigne un acte malicieux, une mauvaise plaisanterie ; voir Dancourt, Les Bourgeoises à la mode, Ac. III, sc. 3 : « […] c'est un enfant gâté qui fait quelquefois de petites mièvretés. » ; https://theatre-classique.fr/pages/pdf/DANCOURT_BOURGEOISESALAMODE.pdf

14/12/2022

Les amis doivent passer devant les étrangers

... Et la France avant le Maroc !

 

 

« A Anne-Louise Dumesnil-Morin Élie de Beaumont

et à

Jean-Baptiste-Jacques Élie de Beaumont

24è mai 1767 , à Ferney 1

Vous croyez bien, madame, que je ne perds pas un moment à exécuter vos ordres . J'écris aux personnes à qui vous m'ordonnez d'écrire . Je ne suis pas peut-être trop en droit de prendre cette liberté, mais la cause me paraît si bonne, et je suis si attaché, madame, à M. de Beaumont et à vous que les ministres ne trouveront point ma hardiesse déplacée . Je ne crains que celui qui a fait obtenir des lettres patentes à votre adverse partie . Je ne sais s'il sera comme César qui trouvait très bon qu'on appelât de lui-même à lui-même .

Votre affaire m'intéresse si vivement que j'abandonne celle des Sirven jusqu'à la Pentecôte . Les amis doivent passer devant les étrangers . D'ailleurs, les Sirven sont tellement justifiés aux yeux de l'Europe par l'éloquent mémoire de M. de Beaumont qu'ils peuvent aisément attendre quelques semaines .

Agréez, madame, mes tendres respects, et vous , généreux protecteur des droits de l'humanité et légitime défenseur des droits de votre femme, vous qui plaidez pour votre maison comme Cicéron, j'espère que vous gagnerez votre cause comme lui . Envoyez-moi, s'il-vous-plait, votre mémoire à deux colonnes par M. Damilaville . Je vous embrasse bien tendrement.

Je vais écrire aussi à M. d'Argental ; mais en vérité vous n'avez pas besoin qu'on sollicite en votre faveur .

V. »

1 Original chez Mme Jean de Mézerac, château de Canon .

13/12/2022

tout ce qu’elle fait n’est que pour avoir la gloire d’établir la tolérance

... Anne Hidalgo pour  les piétons contre les motorisés ? Marine Le Pen pour les migrants ? Eva Kaili pour les Qataris corrupteurs ?

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

23 Mai 1767 1

Nous avons reçu, monsieur, le beau discours 2 de M. l’abbé Chauvelin. Je l’ai communiqué à M. de Voltaire, qui en a pensé comme vous. Il est un peu malade actuellement. C’est apparemment de la fatigue qu’il a eue de faire jouer chez lui les Scythes, et d’y représenter lui-même un vieillard. Je n’ai jamais vu de meilleurs acteurs. Tous les rôles ont été parfaitement exécutés, et la pièce a fait verser bien des larmes. Vous n’aurez jamais de pareils acteurs à la comédie de Paris.

Je sais peu de nouvelles de littérature. J’ai ouï parler seulement d’un livre 3 de feu M. Boulanger, et d’un autre de milord Bolingbroke 4, dont on vient de donner en Hollande une édition magnifique. On parle aussi d’un petit livre espagnol dont l’auteur s’appelle, je crois, Zapata. On en a fait une nouvelle traduction à Amsterdam.

On calomnie l’impératrice de Russie, quand on dit qu’elle ne favorise les dissidents de Pologne que pour se mettre en possession de quelques provinces de cette république. Elle a juré qu’elle ne voulait pas un pouce de terre, et que tout ce qu’elle fait n’est que pour avoir la gloire d’établir la tolérance 5.

Le roi de Prusse a soumis à l’arbitrage de Berne toutes ses prétentions contre les Neuchâtelois. Pour nos affaires de Genève, elles sont toujours dans le même état ; mais le pays de Gex est celui qui en souffre davantage. On disait que M. de Voltaire allait passer tout ce temps orageux auprès de Lyon, mais je ne le crois pas. Il est dans sa soixante-quatorzième année, et trop infirme pour se transplanter.

J’ai l’honneur, d’être monsieur, bien sincèrement, avec toute ma famille, votre très humble et très obéissant serviteur.

Boursier. »

1 Copie contemporaine Darmstadt B. qui omet dans la formule les mots bien sincèrement ; édition Correspondance littéraire .

2 Prononcé au parlement le 29 Avril, sur l’expulsion des jésuites d’Espagne. (G.Avenel.)

Henri-Philippe Chauvelin : Discours d'un de messieurs de grand-chambre au parlement, toutes les chambres assemblées, du mercredi 29 avril 1767 : . Cette harangue , qui traite de l'expulsion des jésuite d'Espagne, contribua à sceller leur destin en France . Voir : https://data.bnf.fr/fr/see_all_activities/10673856/page1

3 Le Christianisme dévoilé. (G.A.)

Sur cet ouvrage, voir lettre du 23 avril 1766 à Marmontel : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/02/25/il-faut-que-vous-connaissiez-ce-monstre-6368229.html

4 Nouvelle édition de l’Examen important. (G.A.)

Voir lettre du 26 juin 1766 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/09/20/il-examine-d-abord-de-sang-froid-ensuite-il-argumente-avec-f-6338632.html

5Une fois encore un curieux ton de propagande qu'on reproche à V* ; voir lettre du 18 mai 1767 à Mme Du Deffand : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/12/08/m-6416081.html