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24/01/2023

Il faut bien à la fin confondre un pervers

... Poutine, on ne t'oublie pas ! https://www.la-croix.com/Debats/Vladimir-Poutine-obsessio...

 

 

« A Charles Bordes

8 juillet [1767] à F.

J'aurai peut-être demain jeudi de vos nouvelles, mon cher confrère, et je saurai à quoi m'en tenir avec les frères Périsse. En attendant, voici un mémoire que je vous prie de lire 1. Vous sentez assez que je n'ai pu me dispenser de le publier. Il faut bien à la fin confondre un pervers. Voilà le secret des lettres anonymes découvert.

Je vous prie d'éclairer de vos lumières un solitaire qui ne voit les choses que de loin, qui doit toujours redouter le public, mais qui a été forcé de parler. Dites-moi ce que vous pensez, et soyez bien persuadé de tout ce que je sens pour vous.

V. »

23/01/2023

Vous savez que j'ai soixante-quatorze ans, et que ma constitution est bien faible

... Sénateur ? https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/quel-est...

 

 

« A Cosimo Alessandro Collini Secrétaire

Intime, historiographe et bibliothécaire

de Son Altesse Électorale, etc.

à Manheim

7è juillet 1767, à Ferney

Il est vrai, mon cher ami, que j'ai eu la faiblesse de jouer un rôle de vieillard dans la tragédie des Scythes; mais je l'ai tellement joué d'après nature que je n'ai pu l'achever . J'ai été obligé d'en sauter près de la moitié, et encore ai-je été malade de l'effort. Vous savez que j'ai soixante-quatorze ans, et que ma constitution est bien faible. Il y a aujourd'hui quatre années révolues que je ne suis sorti de l'ermitage que j'ai bâti. Mon cœur est à Schwetzingen mais mon corps n'attend qu'un petit tombeau fort modeste que je me suis élevé auprès d'une petite église de ma façon. Hélas ! comment oserai-je me présenter devant Leurs Altesses électorales, ayant presque perdu la vue, et n'entendant que très-difficilement ? Il faut savoir subir sa destinée. Nous avons à Ferney d'excellents acteurs , leurs talents me consolent quelquefois dans ma décrépitude . Le climat est dur, mais la situation est charmante . J'achève doucement ma vie entre une nièce et Mlle Corneille, que j'ai mariée, et quelques amis qui viennent partager ma retraite. Mais rien ne me dédommage de Schwetzingen. Je me ferais un plaisir bien vif de vous voir à Manheim, dans le sein de votre famille. J'embrasse de loin votre femme et vos enfants ; je m'intéresserai à votre bonheur jusqu'au dernier moment de ma vie.

Mettez-moi, je vous prie, aux pieds de Leurs Altesses. Plaignez-moi, et que votre amitié soit ma consolation. 

V.»

 

22/01/2023

vous savez mieux que personne combien les bons citoyens rendent justice au mérite, non lasciar la magnanima impresa

... Grève par ci, manif' par là et coups de gueules à qui mieux-mieux, vive la France !

 

 

« A Pierre-Laurent Buirette de Belloy

6è juillet 1767, à Ferney 1

Il y a quelques années , monsieur, que je ne lis aucun papier public ; j'ignore dans ma retraite qui se fait sur la terre . Je sais pourtant ce qui se passe à Moscou ; mais ce n'est pas par Le Mercure . L'impératrice de Russie daigna me mander 2 l'année passée qu’elle avait converti Abraham Chaumeix, et qu'elle en avait fait un tolérant . Si depuis ce temps là cet Abraham a fait cette sottise, s'il a vendu sa femme à quelque boyard comme le père des croyants vendit la sienne au roi d’Égypte et au roitelet de Gérar 3, si au lieu d'obtenir des bœufs, des vaches, des moutons, des serviteurs et des servantes il est tombé dans la misère, c'est probablement parce qu'il est ivrogne, et que le vin coûte fort cher en Scythie .

Il n'en est pas de même dans votre Paris où l'ami Fréron gagne de l'argent à bon marché, et s'enivre de même . Je fais mon compliment à ma chère patrie du privilège exclusif qu'on a donné à cet homme de vilipender son pays ; cela manquait à notre siècle .

Ce que vous me mandez, monsieur, de la générosité des comédiens de Paris ne m'étonne point . Ils sont si riches de leur propre fonds qu'ils peuvent se passer aisément des vers charmants de Racine . Mais ce n'est pas assez qu'ils tronquent des scènes entières de ce grand homme, il faudrait pour rendre la chose encore plus touchante qu'ils substituassent des vers de leur façon à ceux qu'ils retranchent . La copiste de la comédie doit être le premier poète du royaume, et c'est à lui qu'on doit s'en rapporter .

Il me parait que les imprimeurs en savent autant que les comédiens de votre bonne ville . Ils ont plaisamment accommodé l'endroit dont vous me parlez ; il y avait : Ennemis des lois et de la science, et ils ont mis : Ennemis des lois et de la sienne . Cela vaut le trompe[ 4]sonnette, au lieu de sonnez trompette . Que cela ne vous rebute pas, monsieur,vous savez mieux que personne combien les bons citoyens rendent justice au mérite, non lasciar la magnanima impresa 5.

Sans compliment et avec autant d'amitié que d'estime, votre très humble et très obéissant serviteur

V. »

1Collection privée ; édition Lefèvre . Voir aussi : https://drouot.com/l/13435638-voltaire-francois-marie-arouet

3 Genèse, XII, 15-16: https://www.aelf.org/bible/gn/12

4 Wagnière a écrit trompette et rayé les trois dernières lettres, sans penser à compléter le mot .

5 D'après Pétrarque, Sonnets, VII, 14 : Il ne faut pas abandonner cette magnanime entreprise .

21/01/2023

Toutes ces fatalités réunies laissent peu d'espérance

... Peu : c'est heureusement encore un peu .

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

A Ferney , 4 juillet 1767

Vous savez, mon cher ami, que ce fut vous qui, dans le temps du triomphe de la famille Calas et de M. de Lavaysse, m'apprîtes que M. de Lavaysse était beau-frère de ce malheureux La Beaumelle 1. Monsieur son père m'écrivit de Toulouse quelque temps après, que mademoiselle sa fille, veuve d'un homme assez riche, avait en effet épousé La Beaumelle, malgré toutes ses représentations. Je fus affligé qu'une famille à laquelle je m'intéresse fût alliée à un homme si coupable mais je n'en demeurai pas moins attaché à cette famille,

Vous n'ignorez pas que j'ai reçu un nombre prodigieux de lettres anonymes dans ma retraite . J'en ai reçu quatre-vingt-quatorze de la même écriture, et je les ai toutes brûlées. Enfin j'en ai reçu une quatre-vingt-quinzième qui ne peut être écrite que par La Beaumelle, ou par son frère 2, ou par quelqu'un à qui il l'aura dictée, puisque, dans cette lettre, il n'est question que de La Beaumelle même. J'ai pris le parti de l'envoyer au ministère. J'avais d'ailleurs dessein d'instruire le public littéraire de cette étrange manœuvre, et de faire connaître celui qui outrageait ma vieillesse avec tant d'acharnement, pour récompense des services rendus à la famille dans laquelle il est entré.

J'ai même envoyé à M. de Lavaysse le père cette déclaration que je devais rendre publique, et que j'ai supprimée, en attendant que je prenne une résolution plus convenable.

Dans ces circonstances, M. de Lavaysse de Vidou m'a écrit le 25 juin 3 ; il ignore apparemment la conduite de son beaufrère je le plains beaucoup. Je vous prie de lui faire part de mes sentiments, et de lui montrer cette lettre.

Je crains bien que nous n'ayons d'autre parti à prendre, au sujet des Sirven, que celui de la douleur et de la résignation. Ils sont innocents, on n'en peut douter. On leur a ôté leur honneur et leurs biens, on les a condamnés à la mort comme parricides on leur doit justice. Mais, d'un côté, le malheureux procès de M. de Beaumont; de l'autre, la présence de monsieur le procureur général du Languedoc, qui soutiendra les droits de son parlement enfin les bruits affreux qui courent sur les protestants des provinces méridionales, ne permettent pas de se flatter qu'on puisse s'adresser au Conseil avec succès. Les nouvelles horreurs de La Beaumelle sont encore un obstacle. Toutes ces fatalités réunies laissent peu d'espérance. Vous voyez les choses de plus près; je m'en rapporte à vous ; je vous supplie de m'instruire de l'état des choses.

La multitude de lettres que j'ai à écrire aujourd'hui, et ma santé, qui baisse tous les jours, me mettent hors d'état de répondre aussi au long que je le voudrais à M. Lavaysse de Vidou. Le peu que je vous écris, mon cher ami, suffira pour le convaincre de mes sentiments, et de l'état où je me trouve. Ayez donc la bonté, encore une fois, de lui faire lire cette lettre c'est tout ce que je puis vous dire, dans l'incertitude où je suis, et dans les souffrances de corps que j'éprouve.

Je vous embrasse tendrement, et j'attends mes consolations de votre amitié. »

1 Cette lettre n'est pas connue .

2 Ces quatre mots manquent sur le manuscrit .

3 Lettre D 14242 Besterman .

20/01/2023

Si j'étais une jeune et jolie femme, je sais bien comment je récompenserais un homme qui m'aurait adressé de si jolis vers 

... Fi du 49-3 !

 

 

« A Adrien-Michel-Hyacinthe Blin de Sainmore etc.

rue Neuve-des-Capucines

à Paris

Je vous fais bien tard mes remerciements, monsieur ; ils n'en sont pas assurément moins sincères . Un petit voyage et les maladies qui accablent ma vieillesse ne m'ont pas permis de vous dire plutôt 1 avec quelle satisfaction j'ai relu votre héroïde, et le plaisir extrême que m'a fait votre épître 2 . Si j'étais une jeune et jolie femme, je sais bien comment je récompenserais un homme qui m'aurait adressé de si jolis vers ; il n'aurait pas à se plaindre de moi . Je n'ai rien vu d'écrit avec plus de grâce . Je suis persuadé que la dame vous a bien payé de vos peines . Les amants malheureux ne font pas des vers si agréables . Plus je lis ces ouvrages qui sont du meilleur ton, plus j'ai bonne opinion de votre commentaire sur Racine qui était le poète du sentiment . J’espère que nous aurons bientôt l'édition que vous nous avez promise . Ce sera un grand service que vous rendrez à la littérature ; je l'attends avec la plus grande impatience ; elle sera l'ornement de ma bibliothèque et l'occupation de mes journées .

J’ai l'honneur d'être, avec tous les sentiments que je vous dois, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire.

4è juillet 1767 à Ferney. »

1 C'est-à-dire plus tôt .

2 Une note de Blin de Sainmore sur une copie faite par lui de la lettre de V* précise qu'il s’agit d’une « nouvelle édition de l'héroïde de Calas précédée d'une épître à Mme*** [Élie de Beaumont) sur le sentiment », c'est-à-dire la Lettre de Jean Calas à sa femme et à ses enfants, 1767, tournée en « héroïde » à la mode du temps ; voir : https://www.revuedesdeuxmondes.fr/wp-content/uploads/2016/11/2879b220932eff741dc05174d5803a45.pdf

19/01/2023

elle est toute à l'honneur des dames,... Il est juste de prendre la défense de la plus jolie partie du genre humain, que des pédants ont cruellement attaquée

...

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

4 juillet [1767]

Vous serez peut-être aussi affligé que moi, mon cher ami, de ne recevoir qu'un maudit livre de prose 1 au lieu des vers scythes que vous attendiez. Ce n'est pas que vous ne soyez bientôt muni de vos vers scythes, mais enfin ils devaient arriver les premiers, puisque vous les aviez ordonnés, et il est triste de ne recevoir que la prose du neveu de l'abbé Bazin quand on attend des couplets de tragédie. Bazin minor vous a adressé sa petite drôlerie 2 par M. Marin, elle est toute à l'honneur des dames, et même des petits garçons, que les ennemis de l'abbé Bazin ont si indignement accusés. Il est juste de prendre la défense de la plus jolie partie du genre humain, que des pédants ont cruellement attaquée. A l'égard de la défense juridique des Sirven, j'ai bien peur qu'elle ne soit pas admise. Le procureur général de Toulouse 3 est à Paris, il réclame vivement les droits de son corps, et ce droit est celui de juger les Sirven, et probablement de les condamner. De plus, on me mande que les protestants ont excité une émeute vers la Saintonge, qu'ils ont poursuivi trois curés, qu'ils en ont tué un, qu'on a envoyé des troupes contre eux, qu'on a tué six-vingts hommes. Je veux croire que tout cela est fort exagéré; mais il faut bien qu'il se soit passé quelque chose de funeste; et vous m'avouerez que ces circonstances ne sont pas favorables pour obtenir contre les lois du royaume une nouvelle attribution de juges en faveur d'une famille huguenote. Pour comble de disgrâce, le huguenot La Beaumelle, beau-frère du jeune huguenot Lavaysse, s'est rendu coupable d'une nouvelle horreur.

J'ai découvert enfin que c'était lui qui m'avait fait adresser quatre-vingt-quatorze lettres anonymes le compte est net, et le fait est rare. J'en ai reçu enfin une quatre-vingt-quinzième qui m'a mis hors de doute. Il y a d'étranges pervers dans le monde.

L'ami Damilaville ira sans doute chez vous pour consulter l'oracle. Il est fâché, aussi bien que moi, du procès de M. de Beaumont. C'est une chose douloureuse que M. de Beaumont, dans ce procès, paraisse en quelque façon comme délateur des protestants, après avoir été leur défenseur qu'il demande la confiscation du bien d'un protestant, et qu'il réclame des lois rigoureuses contre lesquelles il s'est élevé lui-même. Il est vrai qu'il redemande le bien des ancêtres de sa femme mais malheureusement les apparences sont odieuses, il a des ennemis, ces ennemis se déchaînent tout cela fait au pauvre Sirven un tort irréparable.

Pour me consoler, M. de Chabanon achève aujourd'hui sa tragédie ; mais M. de La Harpe n'est pas si avancé; il s'en faut beaucoup. Deux tragédies à la fois, sorties des cavernes du mont Jura, auraient été pour moi une chose bien douce. Je vous assure que j'ai besoin d'être réconforté. Je ne peux plus rien faire par moi-même pour le tripot; j'ai besoin de jeunes gens qui prennent ma place pour vous plaire.

Je me mets aux pieds de Mme d'Argental; je me recommande aux bontés de M. de Thibouville. J'espère que les satrapes Nalrisp et Elochivis 4 ne seront pas regardés à Fontainebleau comme des satrapes de mauvais goût quand ils protégeront des Scythes. Agréez, mon divin ange, les tendres sentiments de tout ce qui habite Ferney, et surtout mon culte de dulie. « 

1La Défense de mon oncle

2Expression du Bourgeois gentilhomme, acte I, scène 2

4Praslin et Choiseul .

18/01/2023

on ne peut se dissimuler que l'énorme quantité de fautes dont le Siècle fourmille ne lui fasse grand tort

... Est-ce de notre président dont il est question ? Si non on pourrait aisément le croire .

 

 

« A Gabriel Cramer

[1767]

Que monsieur Caro ait la bonté de ne point égarer ce nouvel errata qu'on lui envoie .

Il est prié de ne point entamer le quatrième volume du Siècle de Louis XIV avant d'avoir reçu les additions importantes qu'on lui communiquera .

Il y a huit pages entières au troisième tome de l'Histoire générale qu'on ne peut bien corriger et augmenter qu’en les ayant sous les yeux . Il est prié d'envoyer ce troisième tome bien empaqueté, et on le lui renverra le lendemain .

Au reste, on ne peut se dissimuler que l'énorme quantité de fautes dont le Siècle fourmille ne lui fasse grand tort . Il est triste de n'avoir pas dans une imprimerie un bon correcteur . On a oublié dans les tragédies de l'in-quarto jusqu'à des vers entiers . Tout cela se remarque . On est obligé d'en avertir par l’extrême intérêt qu'on prend à monsieur Cramer .

Où en est-il actuellement de son édition in-quarto ? »