Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné
Il est vrai qu’elle n’est que la patronne de Paris : mais enfin, je ne veux me brouiller avec personne
... Et c'est largement suffisant, limite superflu . Si elle a les moyens financiers de se présenter à la présidentielle, il lui reste à trouver l'essentiel : un programme . Je trouve qu'elle a un lourd passé ...
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
6è janvier 1766
Mes divins anges, j’ai réfléchi que quelque chanoine de Sainte Geneviève pourrait trouver mauvais qu’on dît que sa sainte n’est pas la protectrice de la France. Il est vrai qu’elle n’est que la patronne de Paris : mais enfin, je ne veux me brouiller avec personne. Voici donc la pièce corrigée que j’ai l’honneur de vous envoyer. Vous m’avouerez que l’auteur de la Henriade n’a pas dû apprendre la nouvelle des cierges portés à la statue de Henri IV, sans que le cœur lui ait palpité.
Voici un petit imprimé suisse1 pour vous réjouir, et vous y verrez que le Conseil genevois ne doit point du tout être alarmé de ces plaisanteries. Respect et tendresse.
V. »
1 Les éditeurs ont cru jusqu'ici que cet « imprimé suisse » était la Lettre curieuse de M. Robert Covelle, or celle-ci ne fut publiée qu'après le milieu de 1766 ; il doit s'agir du Précis impartial de nos divisions ( Genève , décembre 1765 : voir page 152/601 https://doc.rero.ch/record/10655/files/Bibliographie_Geneve_XVIIIe_Rivoir_volume1.pdf) qui est un mémorandum abrégé de la thèse des représentants . Il fut, apparemment par erreur , attribué à V*, notamment injustement par Hennin qui écrit à Praslin le 8 janvier 1766 : « Je joins encore ici, monseigneur, un écrit de M. de Voltaire qui s'est déguisé le mieux qu'il a pu . Il est intitulé Précis impartial . Pour précis on ne peut rien de plus court, mais aussi l'auteur a enjambé par-dessus les principales difficultés . Quant à l'impartialité c'est autre chose . M. de Voltaire s'est jeté un peu trop dans le parti de la bourgeoisie, flatté de se voir caressé par des gens qui l'avaient insulté . Il est persuadé qu'il pourra avoir la gloire de réparer le mal qu'a fait Rousseau . Les magistrats commencent à se plaindre de cette conduite . Je me garderai bien de me jeter à la traverse . »
28/04/2021 | Lien permanent
Le paquet que j'ai l'honneur de vous envoyer n'est point juridique
... Je ne suis pas Marine Le Pen qui fait agresser des Femen et se paye le luxe de les attaquer en justice .
Pour qui se prend-elle pour autoriser ses nervis à violer une propriété privée ?
Quelle gloire pour ses gros bras à petite quéquette et deux neurones à eux tous ? Marine , garde- les bien, ils ajoutent à ton aura de femme influente, à n'en pas douter , tout comme papy Le Pen qui appelle au secours (les cendres de) Jeanne d'Arc . Ridicule encore une fois, quand il ne se rend pas ignoble !
Tout cela laisse augurer du bien et du bon pour toute opposition si jamais le FN venait au pouvoir . Les journalistes du Petit Journal de Canal+ et ceux de France 5 ont déjà pu le tester à corps défendant .
ça donne vraiment envie de voter FN ! Non ?
« A Jean-François JOLY DE FLEURY,
intendant de Bourgogne 1
Aux Délices, 2 mai 1760.
Voici, monsieur, l'écrit que MM. les commissaires Moussard 2 et Saladin (délégués de la république de Genève pour signer le traité de 1749 3 avec les commissaires du roi) m'avaient remis, et qu'ils étaient prêts à signer lorsqu'on les a fait apercevoir qu'il fallait une délibération du conseil pour délivrer un acte en chancellerie concernant les traités de la république 4. Le paquet que j'ai l'honneur de vous envoyer n'est point juridique, mais il est de la main du syndic Moussard. Je ne peux avoir un certificat dans les formes que moyennant un ordre signé de vous, qui m'autorise à le demander.
En attendant, monsieur, que je puisse remplir cette formalité, cet écrit de la main de M. Moussard vous convaincra au moins qu'avant la transaction passée en 1749 entre le roi et Genève, cette ville avait la haute justice de tous les fiefs de Saint-Victor, et par conséquent de la Perrière. Le roi est haut justicier de cet endroit depuis 1749, et jamais le seigneur de Tournay n'a pu avoir cette juridiction.
J'attends vos ordres, et suis avec respect, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.
Voltaire. »
1 Jean-François Joly de Fleury de La Valette, intendant de Bourgogne de 1749 à 1761. Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Fran%C3%A7ois_Joly_de_Fleury
2 Pierre Moussard .
3 Traité concernant le statut du territoire de Gex .
4 Dans le cours de l'année 1758, un Suisse nommé Panchaud, qui habitait la Perrière, près de Prégny, sur la frontière de France et de Genève, donna un coup de sabre à un Savoyard qu'il avait surpris en flagrant délit de vol de noix. Panchaud fut poursuivi devant le bailliage de Gex, qui le condamna au bannissement et à 100 livres d'amende envers le seigneur haut justicier de Prégny et Tournay, c'est-à-dire envers Voltaire. Celui-ci fit d'abord peu d'attention à la sentence, mais lorsqu'on lui présenta la carte à payer, ou en d'autres termes un mémoire de 600 livres de frais occasionnés par la procédure, qui retombaient naturellement à la charge du seigneur sur la terre de qui l'attentat avait été commis, il se récria vivement, et soutint que la Perrière ne dépendait pas de Tournay, mais relevait directement du roi, à qui ce lambeau de terre avait été cédé, selon lui, par la république de Genève en 1749.
02/05/2015 | Lien permanent
la tolérance est d’accord avec la religion et avec la politique. Apparemment que ce qui convient à la Russie n’est pas p
... On en veut pour preuve l'actualité ukrainienne : https://www.20minutes.fr/monde/3214067-20220110-ukraine-americains-russes-entament-pourparlers-cruciaux-lundi
Kanye West bouffi de suffisance ne doute pas de pouvoir rencontrer Poutine et de devenir résident russe . Osera-t-il demander la nationalité russe comme l'a obtenue notre Gérard Depardieu national ? Les Ukrainiens ne doivent pas compter sur une quelconque prise de position en leur faveur, le rappeur milliardaire U.S. ne les a pas choisi pour en faire ses compatriotes d'adoption : https://www.20minutes.fr/arts-stars/people/3215303-202201...
« A Etienne-Noël Damilaville
10 octobre 1766 1
Mon cher ami, j’ai trouvé dans une de vos lettres, reçue le 4 octobre, un paquet de Russie. L’impératrice daigne m’écrire qu’elle établit la tolérance universelle dans tous ses États . Elle a la bonté de me communiquer la teneur de l’édit. Cet article, écrit de sa main, porte ces propres mots 2 : Que la tolérance est d’accord avec la religion et avec la politique. Apparemment que ce qui convient à la Russie n’est pas praticable dans d’autres États. Vous savez que nous ne nous piquons ni vous ni moi, dans notre obscurité, de raisonner sur les volontés des souverains. Je vous mande seulement le fait tel qu’il est. Je crois vous avoir instruit que le sieur Deodati m’a écrit. J’attends aussi des certificats de plusieurs autres personnes ; et, quand je les aurai, je ferai un petit mémoire 3 pour le passé, le présent, et l’avenir. La justification est si claire que je n’aurai pas besoin de me mettre en colère ; j’userai de la plus grande modération, et tous les journaux pourront se charger de ce mémoire. Je crois seulement que nous serons obligés de supprimer quelque chose du commencement de votre déclaration, qui pourrait effaroucher les ennemis des lettres.
Je me flatte, mon cher frère, que je recevrai bientôt le mémoire de feu M. de La Bourdonnais 4, avec tout ce que j’attends.
Je suis très curieux, je vous l’avoue, de lire la lettre de Jean-Jacques à M. Hume 5. On dit que c’est un chef-d’œuvre d’impertinence.
L’intérêt que vous prenez à M. et à Mme de Beaumont ne vous a-t-il pas engagé à lire le factum de son adverse partie ? Un seul mémoire ne met jamais au fait. Si le mémoire de M. de La Roque pouvait se trouver dans votre paquet, je serais bien content.
Vous n’avez rien reçu par M. de La Borde ; mais l’ainé Calas doit arriver à Paris avant cette lettre, et M. de La Borde devait aller de Ferney en Anjou.
Ô qu’il serait doux de vivre ensemble, et de se rassembler cinq ou six sages loin des méchants et loin des obstacles ! Comme on est bridé et garrotté de tous côtés !
Avez-vous des nouvelles d’Élie ? Ce pauvre Sirven se désespère. Je lui ai donné vingt fois des espérances qui l’ont trompé. Je suis la cause innocente de ses larmes ; il fait pitié.
Adieu, mon cher frère . Vos lettres sont ma plus grande consolation. »
1 L'édition Correspondance littéraire ne donne pas le destinataire .
2 Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome44.djvu/342
ou https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6393
3 C’est l’Appel au public : https://fr.wikisource.org/wiki/Appel_au_public/%C3%89dition_Garnier
4 Mémoire pour M. de La Bourdonnais (avec le Supplément par de Gennes), 1750-1751, deux volumes in-4°, ou quatre volumes in-12.
5 Elle est du 10 juillet 1766.
12/01/2022 | Lien permanent
On dit que cet écrit est bon, par conséquent il a dû être fort inutile
... Triste constat, ou victoire de la nullité : bad is good !
« A Paul-Claude Moultou
à Genève
[vers le 15 février 1764]
Mon cher et aimable philosophe, n'auriez-vous point, ou ne pourriez-vous point déterrer un petit ouvrage intitulé Traité sur le rappel des protestants sous des conditions sages et honorables pour la religion et pour le gouvernement ?1
On dit que cet écrit est bon, par conséquent il a dû être fort inutile . Le malheur de tous ces livres-là, c'est qu'ils ne sont lus que par des protestants . Il en faut qui soient lus par les catholiques, et qui soient appuyés auprès des ministres ; un livre de cette espèce ne doit jamais paraitre sans avoir un parti qui le soutienne, mais il est plus aisé encore d'écrire que d'agir . Avouez que je travaille un peu pour des ingrats . La même chose pourra vous arriver un jour . Vous exciterez l'envie en méritant la reconnaissance . Comptez que vous n'exciterez jamais chez moi que la plus sincère estime et la plus véritable amitié .
V. »
1 Principes politiques sur le rappel des protestants en France, 1764, de Turmeau de La Morandière ; voir :https://data.bnf.fr/fr/12134741/denis-laurian_turmeau_de_la_morandiere/
27/02/2019 | Lien permanent
pour ne pas effaroucher une nation frivole, qui rit sottement, et qui croit rire gaiement de tout ce qui n'est pas dans
... les candidats à l'élection mentent effrontément, par pensées, par paroles et par actions (et comme faute avouée est théoriquement à demi pardonnée, les mensonges inavoués seront doublement condamnés, dans les urnes , d'abord, et au tribunal si besoin ! ).
Prétexte à leur lâcheté : surtout "ne pas effaroucher" l'électeur, de droite ou de gauche , une place en or en dépend .
Si vous hésitez à toucher un bulletin de vote, voici un autre remède possible , je dis bien "possible" SGDG :
Ce ne sera pas de trop avec de tels postulants , Nicolas S. et Marine LeP., Jacques C., je vous le dis, point besoin de faire brûler des "pastilles à Confucius" en action de grâces, point besoin non plus de dragées Fuca car ces élections sont assez chi... comme ça .
Et s'il vous reste un fond de naïveté (et une âme de gogo invétéré) encore intact après tout ce cirque , tentez le coup :
« A M. DUMARSAIS 1
à PARIS.
Aux Délices, le 12 octobre [1755]
Je bénis les Chinois, et je brûle des pastilles à Confucius, mon cher philosophe, puisque mon étoffe de Pékin vous a encore attiré dans le magasin d'Adrienne 2 Nous l'avons vue mourir, et le comte de Saxe devenu depuis un héros, et presque tous ses amis. Tout a passé; et nous restons encore quelques minutes sur ce tas de boue, où la raison et le bon goût sont un peu rares.
Si les Français n'étaient pas si Français, mes Chinois auraient été plus Chinois, et Gengis encore plus Tartare. Il a fallu appauvrir mes idées, et me gêner dans le costume, pour ne pas effaroucher une nation frivole, qui rit sottement, et qui croit rire gaiement de tout ce qui n'est pas dans ses mœurs, ou plutôt dans ses modes.
M. le comte de Lauraguais 3 me paraît au-dessus des préjugés, et c'est alors qu'on est bien. Il m'a écrit une lettre dont je tire presque autant de vanité que de la vôtre. Il a dû recevoir ma réponse 4, adressée à l'hôtel de Brancas. Il pense, puisqu'il vous aime. Cultivez de cet esprit-là tout ce que vous pourrez c'est un service que vous rendez à la nation. Vivez, inspirez la philosophie.
Nous ne nous verrons plus mais se voit-on dans Paris ? Nous voilà morts l'un pour l'autre j'en suis bien fâché. Je trouve quelques philosophes au pied des Alpes toute la terre n'est pas corrompue.
Vous vivez sans doute avec les encyclopédistes, ce ne sont pas des bêtes que ces gens-là; faites-leur mes compliments, je vous en prie. Conservez-moi votre amitié jusqu'à ce que notre machine végétante et pensante retourne aux éléments dont elle est faite.
Je vous embrasse en Confucius; je m'unis à vos pensées; je vous aime toujours au bord de mon lac, comme lorsque nous soupions ensemble. Adieu. On n'écrivait ni à Platon ni à Socrate
Votre très-humble serviteur. »
1 Voir note de V* dans les Ecrivains du Siècle de Louis XIV , page 69 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4113308/f86.image
3 Voir lettre à Thieriot du 1er octobre 1755 :http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/04/05/il-y-a-peu-de-ces-grandes-ames-qui-conservent-si-longtemps-l.html
06/04/2012 | Lien permanent
Siccitas viscerum nulla arte curari potest / Il n'est pas d'art qui puisse guérir la sécheresse des humeurs
... C'est ainsi que je trouve moi aussi que Marine Le Pen, humainement, est inguérissable , et son discours qui "... forme une diarrhée ; ensuite l'érésipèle succède à la diarrhée, puis la diarrhée à l'érésipèle", choses peu appétissantes qu'elle ose nous présenter comme choses désirables . Heureusement cette maladie brune ne sera pas épidémique , si nous nous lavons soigneusement les mains par un vote réaliste .
« A Théodore Tronchin,
docteur à Genève
Vendredi matin 18è juin [1762] 1
Mon cher confrère, n'est-il pas vrai que tout corps animal est un laboratoire de chimie, beaucoup plus qu'une simple machine hydraulique ? Toutes nos liqueurs sont si âcres, si virulentes, si enflammées, qu'on en fait du phosphore . Le résidu de notre nourriture ne peut s'échapper que quand il a acquis un degré de corruption capable d'aiguillonner le mouvement péristaltique des intestins .
Heureux le mortels dont les entrailles sont souples, lubrifiées, entourées d'une graisse douce qui rend le jeu des ressorts facile ! Malheureux les mortels qui ont des entrailles sèches, dures ! Siccitas viscerum nulla arte curari potest 2! Je connais un de vos clients, dont les tristes viscères sont dans un funeste état . Il a eu une espèce d'érésipèle après avoir pris le lait d'ânesse . Cet érésipèle diminue, et disparaît même quand le résultat de la nourriture imprégné des parties corrosives qui sont dans la masse des humeurs force les intestins à lui livrer passage . Cela forme une diarrhée ; ensuite l'érésipèle succède à la diarrhée, puis la diarrhée à l'érésipèle , et voilà un pauvre homme bien accommodé .
Ma pathologie ainsi faite, mon pronostic est qu'on n'a pas longtemps à souffrir sur ce globule . Mon avis est qu'on tâche de souffrir le moins qu'on peut, et qu’on prenne les aliments les plus doux en la plus petite quantité . C'est ce que je fais en tâchant de dompter l'infâme passion de la gourmandise .
Si vous avez quelque secret meilleur que celui-là, dites-le moi, car il faut s'aider les uns les autres .
Mettez-moi aux pieds de Mme la duchesse d'Anville . Je me suis fait faire une paire de souliers, et un beau justaucorps exprès pour lui faire ma cour, mais je n'ai pu me parer encore . Je n’ai pu même aller chez Mme Constant ma voisine quand vous y étiez ; jugez si j'ai pu aller dans votre ville hérétique en risquant de rencontrer le consistoire dans les rues .
Mandez-moi je vous prie comment on prend à Genève le petit accident arrivé à Jean-Jacques 3, ce cruel ennemi de la médecine . Vos prêtres n'avaient pas le nez assez fin quand ils l'ont pris pour leur apôtre . Bonjour mon divin Esculape .
V. »
1 L'édition Tronchin B. est limitée à deux extraits .
2 Il n'est pas d'art qui puisse guérir la sécheresse des humeurs .
3 Comme on l'a vu, l'Émile fut condamné à Paris le 9 juin 1762 ; Genève condamna l'ouvrage le 11 . quatre jours avant cette lettre, Théodore Tronchin écrit à Vernes : « Je voudrais que ce malheureux homme [Rousseau] mourût […] car ses deux derniers ouvrages feront bien du mal ; on les a défendus ici ; mais à quoi sert une défense qui ne sert qu'à exciter la curiosité ? »
07/05/2017 | Lien permanent
Chacun a son diable, madame, dans cet enfer de la vie
...Ces diables sont plus aisés à trouver que des saints, la liste est déjà longue et éternellement renouvelée, depuis le dealer du coin de la rue jusqu'au dictateur sanguinaire en passant par le mari violent et les passeurs/assassins de migrants . Comment vivent ces fléaux ? Actuellement, il en est un qui est au premier rang des malfaisants : le Hezbollah, hydre mortelle alimentée de toute part , y compris l'Afrique de l'Ouest : https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/10/04/l-afriq...
« A Marie de Vichy de Chamrond , marquise Du Deffand
3è avril 1769 à Ferney 1
Chacun a son diable, madame, dans cet enfer de la vie. Le mien m’a affublé de onze accès de fièvre, et me voilà ; mais ce n’est pas pour longtemps 2. En vérité, c’est dommage que la nature m’ayant fait, ce me semble, pour vivre avec vous, me fasse mourir si loin de vous. Quand je dis que nos deux 3 espèces d’âmes étaient modelées l’une pour l’autre, n’allez pas croire que ma vanité radote. Le fait est clair. Vous me dites par votre dernière lettre 4 que les choses qui ne peuvent nous être connues ne nous sont pas nécessaires . Grand mot, madame, grande vérité, et, qui plus est, vérité très consolante. Où il n’y a rien le roi perd ses droits, et Dieu 5 aussi. Faites-vous lire, s’il vous plaît, l’article « Nécessaire » dans un certain livre alphabétique 6, vous y verrez votre pensée.
C’est un dialogue entre Selim et Osmin, deux braves musulmans ; et Osmin 7 conclut que la nature n’ayant pas favorisé le genre humain, en tout temps et en tout lieu, du divin Alcoran, l’Alcoran n’est pas nécessaire à l’homme.
Au reste, je sens très bien que le siècle de Louis XIV est si prodigieusement supérieur au siècle présent que les athées de ce temps-ci ne valent pas ceux du temps passé. Il n’y en a aucun qui approche de Spinosa. Ce Spinosa admettait, avec toute l’antiquité, une intelligence universelle ; et il faut bien qu’il y en ait une, puisque nous avons de l’intelligence. Nos athées modernes substituent à cela je ne sais quelle nature incompréhensible, et je ne sais quels calculs impossibles. C’est un galimatias qui fait pitié.
J’aime mieux lire un conte de La Fontaine, ( quoique, par parenthèse, ses Contes soient autant au-dessous de l’Arioste que l’écolier est au-dessous du maître ). Cependant ces philosophes ont tous quelque chose d’excellent. Leur horreur pour le fanatisme et leur amour de la tolérance m’attache à eux 8. Ces deux points doivent leur concilier l’amitié de tous les honnêtes gens.
Je passe des athées à Sémiramis. Que voulez-vous, s’il vous plaît, que je fasse ? Je ne saurais, en vérité, prendre le parti de Moustapha contre elle. Son fils l’aime, son peuple l’aime, sa cour l’idolâtre . Elle m’envoie le portrait de son beau visage, entouré de vingt gros diamants, avec la plus belle pelisse du Nord et un Code de lois aussi admirable que notre jurisprudence française est impertinente. On parle français à Moscou et en Ukraine. Ce n’est ni le parlement de Paris ni la Sorbonne qui a établi des chaires de professeurs en notre langue dans ces pays autrefois si barbares. Peut-être y ai-je un peu contribué. Permettez-moi d’avoir quelque condescendance pour un empire de deux mille lieues d’étendue, où je suis aimé 9, tandis que je ne suis pas excessivement bien traité dans la petite partie occidentale de l’Europe où le hasard m’a fait naître 10.
Je vous avoue que j’aimerais mieux avoir l’honneur de souper avec vous dans votre couvent de Saint-Joseph 11 que de rester au milieu des neiges de l' épouvantable 12 chaîne des Alpes, ou de courir de roi en impératrice. Soyez très sûre, madame, que vos lettres ont fait de mon envie extrême de vous revoir une très grande passion. Comptez que mon âme court après la vôtre.
Je serais peut-être un peu décontenancé devant Mme la duchesse de Choi... Quand le vieux chevalier Des Touches Canon 13, père putatif de d’Alembert 14, voyait une jolie femme, bien aimable, il lui disait : « Passez, passez vite, madame ; vous n’êtes pas de ma sorte. » Je suis devenu un peu grossier dans ma retraite 15.
Que m’importe que la nature,
En dessinant ses traits chéris,
Pour modèle ait pris la figure
De la Vénus de Médicis ?
Je suis berger, mais non Pâris.
Un vieux berger n’est pas un homme.
Je pourrais lui donner la pomme
Sans que mon cœur en fût épris,
Et sans que la maligne engeance
Des déesses de son pays
Reprochât à mes sens surpris
D’être séduits par l’apparence.
Je sais que son esprit orné
A toute la délicatesse
Que l’on vanta dans Sévigné,
Avec beaucoup plus de justesse,
Qu’elle aime fort la vérité,
Mais ne la dit qu’avec finesse.
Ma grossière rusticité
Et mon impudence suissesse
Auraient grand-peine à se prêter
À tant de grâce et de souplesse.
Il faut que, pour bien s’ajuster,
Les gens soient d’une même espèce.
Vous, dont l’esprit et les bons mots,
L’imagination féconde,
La repartie et l’à-propos
Font toujours le charme du monde ;
Vous, ma brillante Du Deffand,
Conversez 16 dans votre retraite,
Vivez avec la grand’maman :
C’est pour vous que les dieux l’ont faite.
Si j’allais très imprudemment
Troubler vos séances secrètes,
Que diriez-vous d’un chat-huant
Introduit entre deux fauvettes ?
Cependant je veux savoir qui soupe entre Mme de Choi... et vous ; qui en est digne, qui soutient encore l’honneur du siècle 17.
Que voulez-vous que je vous dise ? Hélas ! toutes nos petites consolations ne sont encore que des emplâtres sur la blessure de la vie. Mais, dans votre malheur, vous avez du moins le meilleur des remèdes ; et, puisque vous existez, qu’y a-t-il de mieux que de consumer quelques moments de cette existence douloureuse et passagère avec des amis qui sont au-dessus du commun des hommes ? Vous m’avez donné une grande satisfaction en m'apprenant que le président a repris son âme.
Hélas ! qu’a-t-il pu ressaisir
De cette âme qui sut vous plaire ?
Quelque faible ressouvenir,
Et quelque image bien légère,
Qui ne revient que pour s’enfuir !
A-t-il du moins quelque désir,
Même encor sans le satisfaire ?
A-t-il quelque ombre de plaisir ?
Voilà notre importante affaire.
Qu’on a peu de temps pour jouir !
Et la jouissance est un songe 18.
Du néant tout semble sortir,
Dans le néant tout se replonge.
Plus d’un bel esprit nous l’a dit ;
Un autre Hénault19 et Deshoulière,
Chapelle et Chaulieu, l’ont écrit ;
L’antiquité, leur devancière,
Mille fois nous en avertit ;
La Sorbonne dit le contraire :
À ces messieurs rien, n’est voilé ;
Et quand la Sorbonne a parlé,
Les beaux esprits doivent se taire.
Dites, je vous en conjure, au délabré président combien je m’intéresse à son âme aimable. La mienne prend la liberté d’embrasser la vôtre. Adieu, madame ; vivons comme nous pourrons.
V.
P.-S. La lettre à Guillemet 20 à Versailles, de Versailles à Lyon, de Lyon à Genève, et m'a enfin été rendue . Elle est charmante 21. »
1 Original . On dispose en outre pour cette lettre dont V* a particulièrement soigné le texte, de la première minute olographe et d'une seconde minute qui seront désignées respectivement par les sigles Min 1 et Min 2, et d'une copie corrigée de la main de V* sans doute en vue d'une publication qui aura pour sigle Cop 3 ; édition de Kehl.
2 Cette phrase manque dans Op 3.
3Ce mot manque dans Cop3.
4 Voir lettre du 21 mars 1769 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1769/Lettre_7512
5 Dans Min 1 V* a écrit Dieu ; dans Min 2, Dieu figure dans un premier jet puis a été corrigé en la nature et enfin restitué . Dans Cop 3 V* a de sa main corrigé Dieu en la nature .
6 Le Dictionnaire philosophique .
7 Dans Cop 3 , tout le début de ce paragraphe a été remplacé simplement par Un Turc y .
8 Dans Cop 3 les mots m'attache à eux ont été remplacés par en font de bons citoyens.
9 Les mots où je suis aimé ont été ajoutés au-dessus de la ligne dans Min 2 mais n'ont pas été transcrits dans l'original .
10 Ce paragraphe tout entier est omis dans Cop 3.
11 Les mots dans votre cuvent de Saint-Joseph sont omis dans Cop 3.
12 des neiges dans la belle et épouvantable (Min 2 et Cop 3).
13 Tel est le surnom du chevalier Des Touch
05/10/2024 | Lien permanent
Rien n'est pire qu'une infortune ridicule
Oui ! à mes yeux , Napoléon Buonaparte, outre enflée de suffisance mérita son exil , son infortune ridicule .
Bien fait ! pour lui qui n'aima pas Voltaire !
Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-jugement-sur-voltaire-de-napoleon-bonaparte-57403155.html
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
Octobre [1754]
J'écris au président Hénault, et je le prie d'engager Royer, qu'il protège, à supprimer son détestable opéra , ou du moins à différer . Vous connaissez, mon cher ange, cette Pandore imprimée dans mes œuvres . On en a fait une rhapsodie de paroles du Pont-Neuf ; cela est vrai à la lettre . J’avais écrit à Royer une lettre de politesse, ignorant jusqu'à quel point il avait poussé son procédé et sa bêtise . Il a pris cette lettre pour un consentement ; mais à présent que M. de Moncrif m'a fait lire le manuscrit, je n'ai plus qu'à me plaindre . Je vous conjure de faire savoir au moins par tous vos amis la vérité . Faudra-t-il que je sois défiguré toujours impunément, en prose et en vers, qu'on partage me dépouilles, qu'on me dissèque de mon vivant ! Cette dernière injustice aggrave tous mes malheurs . Rien n'est pire qu'une infortune ridicule .
Je demande , que si on laisse Royer le maître de m'insulter et de me mutiler , on intitule au moins son Prométhée : Pièce tirée des fragments de Pandore, à laquelle le musicien a fait faire les changements et les additions qu'il a cru convenables au théâtre lyrique . Il vaudrait mieux lui rendre le service de supprimer entièrement ce détestable ouvrage ; mais comment faire ? Je n'en sais rien ; je ne sais que souffrir et vous aimer . »
30/09/2011 | Lien permanent
cette pièce n'est en aucune manière dans le goût de la nation
... Deux personnages, une plaie pour la France, un vote, heureusement pas de deus ex machina en faveur de l'un ou l'autre
« A Jacques Lacombe, Libraire
Quai de Conti
à Paris
1er septembre 1766
L'auteur m'est venu voir, monsieur . Il est actuellement chez moi, il me paraît très flatté qu’un homme de votre métier imprime son ouvrage . Il dit que je lui ai rendu un très grand service en vous le confiant . Il veut absolument garder l'incognito en dépit de tous ceux qui voudraient deviner .
Au reste, mon ami a la bonne foi de convenir avec moi que cette pièce n'est en aucune manière dans le goût de la nation . Je ne crois pas que vous en deviez tirer plus de sept cents exemplaires, et en ce cas vous ne donnerez d'honoraires à personne . Il ne vous avait prié de faire un petit présent à un comédien que dans la supposition d'un grand débit . Mais on ne vend guère une pièce qu'on ne peut jouer .
Si par un hasard que je ne prévois pas vous débitiez en peu de temps votre édition, l'auteur vous prierait alors d'en faire une seconde pour laquelle il vous donnerait des changements auxquels il se prépare . Pour moi, je vous avoue que les anecdotes sur les proscriptions me paraissent devoir attirer plus de lecteurs que la tragédie . L'auteur vous prie d'intituler l'ouvrage Octave ou le jeune Pompée , ou le Triumvirat, avec des remarques sur les proscriptions .
L'auteur m'a dit qu'il augmenterait encore ces remarques si elles plaisent aux hommes instruits .
M. de Beaumont fait un excellent factum en faveur de la famille Sirven qui se trouve dans le cas à peu près de la famille Calas ; je voudrais que vous pussiez l'imprimer .
Je vous renouvelle, monsieur, tous les sentiments qui m'attachent bien véritablement à vous sans aucun compliment .
Page 5, vers 4è
Antoine me la donne, ô jour de l’infamie !
Corrigez
Antoine me la donne, ô jour d'ignominie !
Même page, vers 7è
J'attends l'indigne écrit, corrigez : J'attends l'infâme écrit .
Même page, vers 9
après le mot parjure, mettez un point d'interrogation ;
page 8, mettez une virgule à la fin du premier vers ;
même page, vers 5, mettez un point après le mot justice à la fin du vers .
page 9, quand Fulvie dit : A quoi me résoudrai-je ? Mettez ainsi :
(à part)
A quoi me résoudrai-je ?
page 10, vers 14è, mettez un point à la fin de ce vers ;
page 11, vers pénultième, mettez aussi un point à la fin du vers après le mot répudie . »
02/12/2021 | Lien permanent
s'il n'est pas ars , il est en lieu où il doit se repentir
... Avec ou sans le curé d'Ars ?
Il est des lieux où le repentir n'est pas permis
« A Charles-Augustin FERRIOL, comte d'ARGENTAL
conseiller d'honneur au parlement à Paris
Des Délices 12 septembre [1757]
Mon divin ange, moi qui n'ai pas pris les eaux de Plombières , je suis bien malade et je suis puni de n'avoir point été faire ma cour à Mme d'Argental . Je voudrais qu'on eût brûlé avec la fausse Jeanne le détestable auteur de cette infâme rapsodie 1: elle est incontestablement de La Beaumelle mais s'il n'est pas ars 2, il est en lieu où il doit se repentir .
On dit que c'est l'abbé de Bernis qui a ménagé le rétablissement du parlement 3. Si cela est, il joue un bien beau rôle dans l'Europe et en France . Je ne lui ai jamais écrit depuis mon absence . J'ai toujours craint que mes lettres ne parussent intéressées et je me suis contenté d'applaudir à sa fortune sans l'en féliciter . Qui eût cru quand le roi de Prusse faisait des vers contre lui 4 que ce serait lui qu'il aurait un jour le plus à craindre !
Les affaires de ce roi , mon ancien disciple et mon ancien persécuteur vont de mal en pis . Je ne sais si je vous ai [fait]5 part de la lettre qu’il m’a écrite il y a environ trois semaines . J'ai appris dit-il que vous étiez intéressé à mes succès et à mes malheurs . Il ne me reste qu'à vendre cher ma vie, etc. Sa sœur, la margrave de Bareith m'en écrit une beaucoup plus lamentable 6. Allons, ferme, mon cœur, point de faiblesse humaine 7 .
Mon cher ange j'écrirai pour Brizard 8 tout ce que vous ordonnerez . Ayez la bonté de m'instruire de son admission dans le rang des héros dès qu'on l'aura reçu . J'espère que l'autre héros de Mahon gouvernera mieux son armée que le tripot de la comédie .
A propos de Mahon savez-vous que l'amiral Byng m'a fait remettre en mourant sa justification ? Me voilà occupé à juger Pierre le Grand et l'amiral Byng . Cela n'empêchera pas que je n'obéisse à vos ordres tragiques . Si qua numina loeva sinunt audit que vocatus Apollo 9.
En voilà beaucoup pour un malade . Mme Denis et le Suisse V. vous embrassent tendrement . »
3 Les membres du parlement qui avaient résigné leurs charges, après des négociations compliquées furent rappelés et le Parlement reprit ses travaux le 29 août avec résignation .
4 V* commentera dans une de ses lettres l'épître de Frédéric au comte Gotter qui contient ces vers imités de Boileau :
Je n'ai pas tout dépeint, la matière est immense,
Et je laisse à Bernis sa stérile abondance .
6 Voir à ce propos les lettres du 29 août 1757 à la margravine de Baireuth : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/12/14/il-est-bien-a-souhaiter-pour-elle-et-pour-l-allemagne-et-pou.html
et du même jour à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/12/13/il-y-a-des-sots-il-y-a-des-fanatiques-et-des-fripons-mais-je.html
8 Jean-Baptiste Britard nommé Brizard a fait ses débuts le 30 juillet 1757 et fut reçu àla Comédie le 1er avril 1758 . Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Brizard_%28acteur%29
9 Virgile, Georgiques , IV, 6-7 : si certains destins contraires le permettent et si Apollon prête l'oreille à nos invocations .
17/12/2012 | Lien permanent