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25/07/2010

Je n'aurais pas à présent de quoi me faire enterrer. Je prie Messieurs d'attendre.

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C'est dimanche, un peu de soleil exotique ne fait pas de mal et si vous suivez le rythme vous aurez la pêche !

 

 

 

« A Marie-Louise Denis


22 juillet [1769]


Ma chère amie, mon indignation redouble chaque jour sur l'aventure des lettres [®] et des derniers chapitres [®®]. Comment n'avez-vous pas remarqué que dans une de ces lettres il semble que le comte du Châtelet soit mon fils ? Il était pourtant né avant que je connusse sa mère [né le 20 novembre 1727]. Vraiment, ce serait là le dernier coup dans les circonstances où la fortune se plait à me placer. Plus je réfléchis sur cette complication d'infidélités et de dangers, plus je me dis qu'il faut me taire car si je crie : « On m'a volé, on m'a falsifié ! -Ah! Ah! me répondra-t-on, ces choses là sont donc de vous ! » Que faire donc encore une fois ? Ne se plaindre de personne pour ne point faire de nouveaux ennemis ; mieux serrer ses papiers, ; condamner hautement des chapitres détestables auxquels il est impossible qu'un homme instruit et qui sait un peu écrire ait la moindre part.


Peut-être faudra-t-il un jour engager doucement l'infidèle [®®®] à rendre d'autres papiers plus importants, dont il s'est emparé [®®®®]. Mais je suis très sûr qu'à présent il ne faut pas le pousser à bout. Il faut même avoir pitié de lui . M. le duc de Choiseul lui ôterait la pension dont il l'honore et qui est sa seule ressource pour lui et pour sa femme. L'indiscrétion, la mauvaise éducation, la pauvreté et non la mauvaise volonté lui ont fait commettre une assez méchante action [®®®®®]. Ensevelissons-la dans le plus profond oubli. Il sera comme Crispin [personnage de valet peu scrupuleux, peut-être inventé par Raymond Poisson, ou alors celui de Le Sage dans Crispin rival de son maître], quelquefois honnête homme et quelquefois fripon. D'ailleurs je n'ai que ma certitude, mais nulle preuve que je puisse alléguer. Quand j'en aurais, je me tairais encore. Ce serait un fracas de tracasseries, une source d'horreurs qu'on ferait naître, si on laissait seulement tomber sur lui des soupçons. Tout cela est triste, me direz-vous. Oui, sans doute, mais il me semble qu'on peut s'en tirer avec son innocence, des amis, et un peu d'attention. Il me semble qu'on peut tout réparer en peu de temps [accréditer son reniement]; et qu'on a pris toutes les précautions nécessaires. MM. de Jaucourt et de Schomberg, favoris de M. le duc de Choiseul, lui ont écrit de Ferney sans même m'en prévenir. M. Marin parlera sans doute à M. de Sartines et monsieur le chancelier.


Votre neveu [d'Hornoy, conseiller au parlement] peut aisément désabuser ses confrères. Mon petit billet à M. Marin me paraît très convenable [®®®®®®]. On peut en faire cent copies. Il en faut surtout aux avocats généraux. Voilà, je crois, les emplâtres qu'on doit mettre sur les blessures que ma facilité et le hasard m'ont faites. J'ajuste sans peine l'affaire de la Duchesne [®®®®®®®].


J'espère qu'on n'annotera rien [®®®®®®®®]. Je n'aurais pas à présent de quoi me faire enterrer. Je prie Messieurs d'attendre. Bonsoir ma chère amie. J'oubliais de vous dire que j'ai fait pour M. d'Argental ce que j'ai pu [un prêt d'argent].


V. »

 


® Lettres de V* « à Mme de La Neuville, etc » que la veuve Duchesne a achetées, que « bonne imbécile » elle voulait imprimer, sur lesquelles elle avait « consulté Mme Denis » qui les avait envoyées à son oncle.


®® Ceux de l'Histoire du parlement que V* renie plus particulièrement ; cf. lettre à d'Alembert du 9 juillet.


®®® La Harpe .

V* dans sa précédente lettre à Mme Denis est plus précis : « Vous savez qu'on me vola beaucoup (de papiers) , vous n'ignorez pas qui me les vola. J'ai perdu un très gros manuscrit de recherches sur l'histoire de France dont je vois bien qu'on extrait tout ce qui regarde le parlement. Le voleur a compilé tout à sa mode... »


®®®® Sans doute s'agit-il d'un manuscrit de ses Mémoires qui avait disparu et qu'on accusera La Harpe d'avoir volé ; il ne le montrait à personne et il devait n'être imprimé qu'après sa mort et celle de Frédéric II.



®®®®® La Harpe a volé à coup sûr le deuxième chant de La Guerre civile de Genève, qu'il diffusa à Paris à l'automne 1767, ce qui mécontenta fort Théodore Tronchin (dont il était question dans ce chant) … et surtout provoqua le départ de Mme Denis (de Ferney) qui soutenait La Harpe ; cf. lettres de mars-avril 1768.


®®®®®® Le 19 juillet, à Marin : « … les derniers chapitres (de l'Histoire du parlement) (lui) ont paru aussi indécents que faux et mal écrits » et en relève quelques exemples de « mauvais style » et ne déduit qu'ils « ne paraissent pas de la m^me plume que les premiers », « ils sont si mauvais en tout sens qu'ils ne méritent pas qu'on les réfute » et conclu en affirmant que « rien ne peut égaler l'indignation où (il est) ».


®®®®®®® « l'affaire » du carton, à mettre dans La France littéraire où on lui attribuait un certain nombre d'œuvres qu'il désavoue, les unes à tort, d'autres à raison ; cf. lettre du 17 avril.


®®®®®®®® En vue d'une saisie ; il demandera le 24 juillet à Christin l'avocat, entre autres, si le Parlement de Paris peut décréter de prise de corps « un jeune homme » domicilié dans un parlement de province à qui on attribue sans preuves une histoire du parlement de Paris...

 


Indignation, dit-il ?

Indignation, j'écoute :

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Indignation - 2.jpg

Et maintenant c'est vous qui allez être indignés ?!

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