30/07/2010
un étranger qui demeurerait trois mois chez moi ne s'apercevrait pas qu'il y a deux religions différentes
Jetez-vous sans retenue sur cette revue qui vous rappelle (vous fait découvrir ? ) Volti !
Si vous lisez un peu les lettres que j'ai déjà mises en ligne, si vous lisez le blog de LoveVoltaire, c'est-à-dire monsieurdevoltaire dont le lien est ici, à côté, vous vous rendrez compte que les titres de couverture sont fondés.
Aujourd'hui, une lettre qui expose la validité de la tolérance .
"...dans le siècle éclairé où nous vivons, cette tolérance ne peut avoir aucun effet dangereux."
Siècle éclairé ?
Oui! nous pouvons dire que nous avons des lumières pour nous gouverner ! Dommage que ce soient des feux follets, des clignotants, des feux d'artifice ( = discours, écrits brillants, mais qui n'ont pas de fond ! ), des quinquets de taverne (comme disait Aragon par la voix de Jean Ferrat), des lanternes-sourdes ... Eclat bling-bling ! De phares, point!
Quelques lueurs d'espoir, Gandhi, l'abbé Pierre, Théodore Monod, Voltaire, voici ceux que je mets au premier plan . Vous pourrez y ajouter tous ceux qui ont joint le geste à la parole pour améliorer la coexistence humaine .
A l'heure où les juristes ne savent plus où donner de la tête pour pondre de nouveaux textes répressifs (-je m'aperçois que ce n'est pas avec la tête qu'habituellement pond un oiseau, mais plutôt avec le c.. !-), à l'heure où des cervelles obtuses croient faire plaisir à Dieu en imposant leurs rites, lâches qui veulent acheter leur paradis et imposent leur religion, ennemis de la liberté et de la tolérance, à cette heure, vous êtes en retard sur la vie, la vraie vie . Vous êtes petits, minuscules, microscopiques dans cet univers et vous disparaitrez en laissant un goût de fiel .
Allez, je me console, il y a de belles choses encore :
http://www.youtube.com/watch?v=-CA2L_LQLmM
« A Pierre-Samuel Dupont de Nemours
Ferney ce 16 juillet 1770
M. Bérenger m'a fait le plaisir, Monsieur, de m'apporter votre ouvrage, qui est véritablement d'un citoyen [Éphémérides du citoyen , 1768-1772]. Bérenger l'est aussi, et c'est ce qui fait qu'il est hors de sa patrie. Je crois que c'est lui qui a rectifié un peu les première idées qu'on avait données d'abord sur Genève [@]. Pour moi qui suis citoyen du monde, j'ai reçu chez moi une vingtaine de familles genevoises, sans m'informer ni de quel parti, ni de quelle religion elles étaient. Je leur ai bâti des maisons, j'ai encouragé une manufacture assez considérable [manufacture de montres], et le ministère et le roi lui-même m'ont approuvé. C'est un essai de tolérance, et une preuve évidente que dans le siècle éclairé où nous vivons, cette tolérance ne peut avoir aucun effet dangereux ; car un étranger qui demeurerait trois mois chez moi ne s'apercevrait pas qu'il y a deux religions différentes. Liberté de commerce et liberté de conscience, Monsieur, voilà les deux pivots de l'opulence d'un État petit ou grand.
Je prouve par les faits dans mon hameau ce que vous et M. l'abbé Roubaud [Pierre-Joseph Roubaud auteur de Représentations aux magistrats, contenant l'exposition raisonnée des faits relatifs à la liberté du commerce des grains , 1769] vous prouvez éloquemment par vos ouvrages.
J'ai lu avec l'attention que mes maladies me permettent encore tout ce que vous dites de curieux sur la Compagnie des Indes et sur le système [Dupont a écrit Du commerce et de la Compagnie des Indes, 1769]. Tout cela n'est ni à l'honneur de la nation ni à celui du Régent. Vous m'avouerez au moins que cet extravagant système n'aurait pas été adopté du temps de Louis XIV, et que Jean-Baptiste Colbert avait plus de bon sens que Jean Law.
A l'égard de la Compagnie des Indes je doute fort que ce commerce puisse jamais être florissant entre les mains de particuliers. J'ai bien peur qu'il n'essuie autant d'avanies que de pertes, et que la Compagnie anglaise ne regarde nos négociants comme de petits interlopes qui viennent se glisser entre ses jambes. Les vraies richesses sont chez nous ; elles sont dans notre industrie. Je vois cela de mes yeux. Mon blé nourrit tous mes domestiques ; mon mauvais vin qui n'est point malfaisant les abreuve ; mes vers à soie me donnent des bas ; mes abeilles me fournissent d'excellent miel et de la cire ; mon chanvre et mon lin me fournissent du linge. On appelle cette vie patriarcale, mais jamais patriarche n'a eu de grange telle que la mienne ; et je doute que les poulets d'Abraham fussent meilleurs que les miens. Mon petit pays que vous n'avez vu qu'un moment est entièrement changé en très peu de temps.
Vous avez bien raison, Monsieur, la terre et le travail sont la source de tout, et il n'y a point de pays qu'on ne puisse bonifier. Continuez à inspirer le goût de la culture, et puisse le gouvernement seconder vos vues patriotiques.
Mettez-moi, je vous prie aux pieds de M. le duc de Saint-Mégrin [auteur du Portrait de Mgr le dauphin, 1766, fort admiré, qui vint voir V* à l'automne 1768,V* qui lui envoya ensuite le 4 novembre une lettre flatteuse] qui m'a paru fait pour rendre un jour de véritables services à sa patrie, et dont j'ai conçu les plus grandes espérances [effectivement il deviendra ministre des Affaires étrangères de Louis XVI].
J'ai l'honneur d'être avec la plus haute estime et tous les autres sentiments que je vous dois, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire.
P.-S. Voulez-vous bien, Monsieur, faire mes tendres compliments à M. l'abbé Morellet, quand vous le verrez ? »
@J.-P. Était un des Natifs de Genève bannis par l'édit du 22 février 1770. il avait écrit la Lettre circulaire des natifs de Genève sur la dernière révolution de cette république. Il devait encore publier un Mémoire justificatif pour les citoyens de Genève connus sous le nom de Natifs.
Pour les idées données sur les natifs : cf. lettre du 4 juin1770 à d'Argental ; et au sujet des violences qui ont provoqué cette émigration, cf. lettres depuis le 16 février.
Après lecture, que dites-vous des pensées et actions de Volti ?
Qu'attend- on pour y adhérer encore ?
PS . Petit rajout du 31 juillet : Voltaire menant à tout et l'actualité présidentielle sarkozienne menant à l'impasse (remplaçant le cul-de-sac que V* n'aimait pas ), un article de 2007 qui montre que ce n'est pas d'hier que couvaient le malaise et la violence qui l'accompagne :
Laïcité : un héritage en péril
Au pays de Voltaire, il est désormais interdit de ne pas croire. Tel est le credo des religieux fondamentalistes qui veulent imposer leurs propres règles à une République aux valeurs mises à mal.
http://www.historia.fr/content/recherche/article?id=16433
09:43 | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
Je vois, Mister James, que vous aussi avez aimé ces articles. Me trompè-je ? :))
Un petit bémol, cependant : Marcelo Wesfreid cite le Site "Forum intégral" comme étant gratuit, hors pour avoir accès à la correspondance de Voltaire, il faut quand même débourser 50e...
C'est d'ailleurs pour cela que je me suis lancé dans cette grande aventure, à l'époque, car je trouvais tout à fait injuste que ces lettres ne soient qu'à la portée des "riches".
Il est vrai que je suis loin d'avoir terminé de mettre les 20 0000 lettres environ en ligne, mais je m'y applique un peu plus tous les jours.
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En tout cas, bravo à ce journaliste, qui a mis en grande lumière, Voltaire. Ces articles sont justes et excellents pour découvrir ou redécouvrir Voltaire.
Merci aussi à Charles Dantzig (auteur du Dictionnaire égoïste de la littérature française) pour son playdoyer sur le retour aux textes de Voltaire.
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Vive Volti ! :)
L.V
Écrit par : lovevoltaire | 31/07/2010
LoveV , je vous vois comme si j'y étais, toutes affaires cessantes, aller aux pages 50 et suivantes et faire des bonds de cabri . Puis apprécier le journaliste, qui, je me suis renseigné, est venu au château il y a une quinzaine de jours.
puis flanquer une petite claque à "Voltaire intégral" qui demande 50 euros pour son CD .
C'est vrai, le rapport qualité-prix est en votre faveur, chère Love, et je reste fan, et je ne suis pas le seul, de votre blog. Je vous souhaite encore longue et heureuse vie pour mettre en ligne l'oeuvre de Volti ; mais pas toute, sinon nous arriverions au XXIIème siècle . N'est pas Jeanne Calment qui veut !
Au plaisir de vous lire, le plus souvent possible ...
Écrit par : james | 31/07/2010
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