29/08/2010
je détourne autant que je peux les yeux de toutes ces horreurs, il est plus doux de bâtir, de planter et d'écrire
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Brigitte Fontaine , interprète géniale mais que je serais incapable de garder à la maison plus d'une journée, je ne suis pas encore assez stone ...
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Après cet intermède contemporain, voyons les horreurs du noir Tartare au XVIIIè:
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« A Nicolas-Claude Thiriot
rue Couture-Sainte-Catherine
29 août 1760
Je crois que c'est vous, mon cher correspondant, qui m'avez envoyé un très bon ouvrage sur la satire intitulée Comédie des philosophes [i]. Mais en général, on a pris Palissot trop sérieusement ; si ces pauvres philosophes avaient été plus tranquilles, si on avait laissé jouer la pièce de Palissot sans se plaindre, elle n'aurait pas eu trois représentations : Jérôme Carré [ii] a été plus madré, il ne s'est point plaint, et il a fait rire ; il est comme l'amant de ma mie Babichon [iii] qui aimait tant à rire, que souvent tout seul il riait dans sa grange.
L'Écossaise a été jouée dans toutes les provinces, avec autant de succès qu'à Paris,[iv] et le tranquille Jérôme ricane dans sa retraite. Il a des tracasseries avec des prêtres, pour l'église qu'il fait bâtir,[v] mais il s'en tirera, et il en rira, et il écrira au Pape, quoique Rezzonico ne soit pas si goguenard que Lambertini [vi]. Jean-Jacques a force d'être sérieux est devenu fou ; il écrivait à Jérôme dans sa douleur amère [vii]: Monsieur, vous serez enterré pompeusement, et je serai jeté à la voirie ; pauvre Jean-Jacques ! Voilà un grand mal d'être enterré comme un chien, quand on a vécu dans le tonneau de Diogène ! Ce pauvre Diable a voulu jouer un rôle bien difficile à soutenir ; il est bien loin de rire. Envoyez-moi donc la lettre écrite à ce braillard d'Astruc . J'imagine que les fermiers généraux des postes ne veulent pas contresigner de petites lettres dont le port doit entrer dans la masse commune ; ils veulent bien contresigner les gros paquets, parce que sans cela on ne s'aviserait pas de les envoyer par la poste, et qu'ils n'y gagneraient rien ; mais en les priant d'affranchir les lettres, c'est les prier de donner vingt ou trente sous de leur poche, ce qui étant trop multiplié, fait à la longue une diminution dans la ferme.[viii]
On a dit le Roi de Prusse vainqueur en Silésie [ix]; nous en aurons des nouvelles demain , je détourne autant que je peux les yeux de toutes ces horreurs, il est plus doux de bâtir, de planter et d'écrire . Écrivez-moi donc, et je vous écrirai tant que je pourrai.
Farewell my friend.
V. »
i Gabriel-François Coyer : Discours sur la satire contre les philosophes représentée par une troupe qu'un poète philosophe fait vivre, et approuvée par un académicien qui a des philosophes pour collègues, 1760. La satire est la pièce de Palissot, Les Philosophes, le poète, Voltaire et l'académicien, Crébillon.
ii Le prétendu traducteur du prétendu auteur de la pièce de V* L'Écossaise.
iii Vieille chanson française.
iv Lyon, Bordeaux, Marseille indiquera-t-il ce jour à Damilaville.
v V* fait bâtir une église à Ferney.
vi Rezzonico = Clément XIII ; Lambertini = Benoit XIV.
vii Lettre reproduite dans Les Confessions, adressée à V* le 17 juin 1760.
viii Dans sa lettre du 22 juillet, V* demandait à Thiriot la raison du refus de Villemorien.
ix A Liegnitz le 5 août 1760.
Finissons-en avec les horreurs : celles-ci font rire ! Ouf !!
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