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08/02/2011

Ils disent tous que j'ai vécu trop longtemps pour être payé

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Le temps n'a pas de prise sur les paroles de Volti . Payons-le de notre reconnaissance pour ses idées lumineuses .

 volti gravé henriquez peint barat.jpg

Gravure de Henriquez dont il est question dans la lettre .

 

 

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol comte d'Argental

 

4è février 1777

 

 

Mon cher ange, votre lettre du 27è janvier me prouve que votre providence bienfaisante a toujours les yeux sur mes misères. Je n'ai point reçu de vers de M. de Sélis i dont vous me parlez, ni de lettre de l'abbé Pezzana ii ni l'estampe de la part du graveur Henriquez iii. J'ai reçu seulement par un libraire de Genève la nouvelle édition de l'Arioste, et j'en ai remercié l'abbé Pezzana par une lettre adressée à l'hôtel garni nommé L'Île d'amour, où il demeurait il y a plusieurs mois lorsqu'il m'écritvit.

 

Vous croyez, vous et M. de Thibouville, que je ne vous ai invités qu'à un petit souper de trois services iv; il faut que je vous avoue que j'en prépare un autre de cinq v. Le rôti est déjà à la broche, mais le menu m'embarrasse . Je crains bien de n'être qu'un vieux cuisinier dont le goût est absolument dépravé. Vous êtes le plus indulgent des convives ; mais il n'y a pas tant de gens qui s'empressent à vous donner à souper ; j'ai tant de rivaux qui me traiteront de gargotier que je tremble de vous donner mes deux repas. Je vois évidemment qu'il faut remettre cette partie à une saison plus favorable . Il suffirait qu'il y eut un ragoût manqué, pour que tout le monde, jusqu'aux valets de l'auberge, me traitât de vieil empoisonneur . Il viendra peut-être un temps où l'on aura plus d'indulgence . Il faut d'ailleurs que je présente quelques rafraichissements à six juifs et à leur aumônier M. l'abbé Guénée vi qui me paraissent un peu échauffés, et qui tirent la langue d'un pied de long.

 

Il résulte de tout cela, mon cher ange, que je ne pourrai vous rien envoyer jusqu'au mois de mars. Vous me pardonnerez sans doute quand vous saurez le triste état où je suis . Ma colonie me prend presque tout mon temps vii. Des débiteurs très grands seigneurs, comme MM. Les ducs de Bouillon et de Richelieu, et M. le duc de Virtemberg, m'ont manqué tous à la fois viii, et me laissent dans l'impossibilité de continuer ma fondation. Il n'y a pas jusqu'à un fermier général ix qui ne me laisse sans aucun secours. Ils disent tous que j'ai vécu trop longtemps pour être payé . Ils me regardent comme un homme mort ; et ce qui me parait très désagréable, c'est qu'ils auront bientôt raison . Or, jugez si dans de telles circonstances je puis hasarder de vous donner à souper surtout quand je suis presque sûr de vous faire une chère détestable.

 

Vous me parlez de Mme du Deffand . Vous sentez bien que la multitude énorme des fardeaux dont j'ai chargé ma faiblesse, et des embarras dont je suis environné ne me permet guère d'agacer les jeunes dames de Paris x. Sufficit diei malitia sua xi. Songez que j'ai presque autant de maladies que d'années et presque autant de chagrins et d'occupations inquiétantes que de maladies . Ayez donc un peu pitié de moi, mon très cher ange, portez-vous bien, réjouissez-vous, et aimez-moi. Vous ferez toujours ma consolation.

 

V. »

 

i Nicolas-Joseph Sélis, auteur de Épîtres en vers sur différents sujets, 1776.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Nicolas-Joseph_S%C3%A9lis...

Il écrira un pamphlet, Relation de la maladie, confession et mort de M. de Voltaire, 1778, -sous le nom de Dubois,- contre Voltaire à la mort de celui-ci.

ii L'abbé Giuseppe Pezzana 1735-1802, demanda en juillet 1776 la permission de lui dédier sa traduction de l'Arioste ; il traduisit aussi L'Orphelin de la Chine.

Chercher Pezzana sur : http://odb-opera.com/modules.php?name=Content&file=pr...

iii Son portrait et ceux de Diderot, d'Alembert et Montesquieu dont il le remerciera le 7 février .

Chercher Henriquez dans : http://www.archive.org/stream/p2lesgraveursdud02portuoft/...

 

iv Irène, en trois actes.

Cf. Lettre du 15 décembre 1776 : page 33 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80043w/f38.image.pa...

 

v Agathocle .

 

vi Un chrétien contre six juifs, 1777,

http://books.google.be/books?id=6jMHAAAAQAAJ&printsec...

aussi intitulé Le Vieillard du mont Caucase aux juifs portugais, allemands et polonais ... qui est une réponse aux Lettres de quelques juifs portugais, allemands et polonais à M. de Voltaire, de Guénée .Cf. lettres à d'Alembert du 8 décembre, à d'Argental du 15 décembre 1776.

http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2008/12/09/a...

et voir page 234 : http://books.google.be/books?id=LZxJAAAAIAAJ&pg=PA234...

Antoine Guénée : http://www.napoleon-juifs.org/Guenee.htm

vii Cf. lettre à Mme de Saint-Julien sur les difficultés qu'il rencontre le 5 décembre 1776 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2008/12/06/g...

viii = Qui ne payent pas leurs dettes .

ix Marchant . Lors de la liquidation de la succession de son notaire, Laleu, fin 1776, V* apprend que Marchant lui doit encore quarante mille francs.

x Mme du Deffand a 80 ans !

xi A chaque jour suffit sa peine . Évangile de Matthieu.

 
 
 

 

 

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