14/04/2021
il faut bien pourtant qu’il y ait quelque chose de très-bon, puisque vous l’approuvez . Après tout, ce n’est qu’à la longue, comme vous savez, que les ouvrages en tous genres peuvent être appréciés
... Mister Président, que d'engagements ! quel optimisme affiché ! quelle belle et saine méthode Coué pour sauver la vie de vos concitoyens, tant sanitaire que pécuniaire . Vous ne pouvez pas avoir tort sur tout, espérons-le (comme vous )!
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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
21è décembre 1765.
Mes anges de paix, j’ai remis à M. Hennin les rameaux d’olivier que vous avez bien voulu m’envoyer. La consultation de vos avocats m’a paru, comme je vous l’ai mandé, pleine de raison et d’équité. Ils se sont trompés sur quelques usages de Genève, qu’ils ne peuvent connaître ; ils ont dit ce qui leur a paru juste ; et M. Hennin conciliera la justice et les convenances. Je crois surtout qu’il ne souffrira pas qu’on donne des soufflets impunément à nos présidents1, et qu’il soutiendra la dignité de résident de France mieux que ne faisait ce pauvre petit Montpéroux.
Berne et Zurich sont près d’envoyer des médiateurs à cette pauvre république qui ne sait pas se gouverner elle-même. On dit, dans Genève, que M. le duc de Praslin enverra M. le marquis de Castres 2. Si c’est un bruit faux, comme je le crois, je ne vois pas pourquoi le résident de France ne serait pas nommé médiateur. Il me semble que les lois en seraient plus respectées et la paix mieux affermie, quand le médiateur, restant résident, serait en état de faire aller la machine qu’il aurait montée lui-même.
De plus, M. Hennin, étant déjà très au fait du sujet des dissensions, serait plus capable que personne de concilier les esprits. Enfin c’est une idée qui me vient ; il ne me l’a point du tout suggérée 3, et je vous la soumets ; voyez si vous voulez en parler à M. le duc de Praslin.
Il y a quelques têtes mal faites dans Genève, qui trouvent mauvais, dit-on, qu’on ait consulté des avocats de la petite ville de Paris sur les affaires de la puissante ville de Genève ; on prétend même qu’elles veulent engager Crommelin à s’en plaindre. Je ne crois pas qu’elles veuillent pousser le ridicule jusque-là. Je n’ai d’ailleurs rien fait que sur les prières des meilleurs citoyens, je n’ai agi que dans des vues d’impartialité et de justice ; et cela est si vrai que je me suis adressé à vous.
En voilà assez pour Genève ; venons à l’autre tripot. Il se peut faire qu’en lisant rapidement la copie d’Adélaïde du Guesclin, que Lekain m’avait envoyée, et la voyant en général assez conforme à un exemplaire que j’avais, je n’aie pas fait assez d’attention à ces deux malheureux vers qui feraient tomber Phèdre et Athalie :
Gardez d’être réduit au hasard dangereux
Que les chefs de l’État ne trahissent leurs vœux4.
Je n’aurais pas fait de pareils vers à l’âge de quatorze ans . On a fait une coupure en cet endroit ; il se peut que cette coupure ait été faite autrefois pour une seconde représentation, et qu’on ait cousu ces deux vers diaboliques pour attraper la rime.
Quand je les ai vus imprimés, j’ai été sur le point de m’évanouir, comme vous croyez bien. Si vous voyez Lekain, je vous prie de lui peindre le juste excès de ma douleur. Je suis bien loin de l’accuser de ce sanglant affront, j’en rejette l’opprobre sur Quinault5, et sur qui on voudra ; mais je prie Lekain instamment de faire mettre à la fin de l’édition, en errata, ce que je lui ai envoyé6. Comptez que ces deux vers-là, et ceux qu’on m’envoie de Paris, contribueront à abréger ma vie.
On m’a mandé que le Philosophe sans le savoir n’avait ni nœud, ni intrigue, ni dénoûment, ni esprit, ni comique, ni intérêt, ni vraisemblance, ni peinture des mœurs ; mais il faut bien pourtant qu’il y ait quelque chose de très-bon, puisque vous l’approuvez 7. Après tout, ce n’est qu’à la longue, comme vous savez, que les ouvrages en tous genres peuvent être appréciés.
Je vous souhaite les bonnes fêtes, comme on dit à Parme ; et puisse le temps des bonnes fêtes ne vous pas faire le même mal qu’il a fait à ma poitrine et à mes yeux .
Vous serez bien aimable de faire valoir un peu auprès de M. le duc de Praslin la manière franche et désintéressée dont je me suis conduit avec mes voisins, avant l’arrivée de M. Hennin.
Respect et tendresse.
V. »
1 Voir lettre du 2 décembre 1765 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/03/30/les-soufflets-degouteraient-les-voyageurs-6306649.html
2 Certainement Charles-Gabriel de La Croix, marquis de Castries : https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Eug%C3%A8ne_Gabriel_de_La_Croix_de_Castries
3 C'est vrai, voir lettre du 18 décembre 1765 de Hennin : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1765/Lettre_6192
4 Voir lettre du 29 novembre 1765 à Lekain : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/03/24/gardez-d-etre-reduit-au-hasard-dangereux-que-les-chefs-de-l-6305364.html
5 Quinault-Dufresne était retiré du théâtre depuis 1741 ; mais c’était lui qui avait, en 1734, créé le rôle de Vendôme, et il pouvait avoir fait ou fait faire des corrections dans la pièce. Les deux vers que Voltaire blâme dans cette lettre étaient acte II, scène vii, où les interlocuteurs sont Vendôme et Coucy. ; voir : https://www.comedie-francaise.fr/fr/artiste/quinault-dufr...#
6 Dans la lettre du 7 décembre 1765 à Lekain : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/04/06/tout-doit-si-je-l-en-crois-ceder-a-son-pouvoir-lui-plaire-es-6308023.html
7 Voir lettre du 22 novembre 1765 à Florian : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/03/18/j....
Le Philosophe sans le savoir est le plus réussi des drames bourgeois . V* attaché à la distinction des genres sous la forme la plus classique ne peut apprécier beaucoup plus le drame bourgeois qu'il n'a apprécié la comédie larmoyante .
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