25/04/2023
je tâcherai de tout réparer
... C'est une bonne intention mister Président .
« A Mme Nicolas-Bonaventure Duchesne
A la réception de votre lettre, madame, je commençai une révision exacte des tragédies que vous imprimez 1, ainsi que des comédies et du poème épique. Étant tombé malade trois jours après, j'ai été obligé de discontinuer l'ouvrage; et en cas que je me porte mieux, je le reprendrai avec la plus grande exactitude. Si votre mari en avait usé avec 2 la même circonspection et la même franchise, il ne nous 3 aurait pas jetés, vous et moi, dans l'embarras où nous sommes. J'en suis encore très mortifié; je tâcherai de tout réparer, et de vous fournir de quoi donner une édition complète et correcte.
Je suis, madame, bien véritablement votre très humble et très obéissant serviteur.
Voltaire.
12è septembre à Ferney. »
1 La veuve Duchesne a publié en 1764 les Œuvres de théâtre de M. de Voltaire, 1763-1764, en cinq volumes . Elle en préparait une autre édition en six volumes, comprenant Charlot, ce qui fixe la date aux derniers mois de 1767 . Thieriot avait recommandé cette entreprise à V* par une lettre du 27 août 1767 .
2 avec ajouté au-dessus de la ligne par V*.
3 vous corrigé en nous sur le manuscrit .
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Tous les étrangers sont très fâchés
... Et voici pourquoi : https://www.ouest-france.fr/economie/tourisme/le-top-10-d...
« A Etienne-Noël Damilaville
12 septembre 1767 1
Mon cher ami, votre Ingénu accompagné de cinq autres pour différentes personnes n'est point parti . Le frère du résident de Genève qui devait s'en charger, était déjà en route quand on les lui envoya . Vous m'apprenez que le mal n'est pas grand, et qu'on réimprime à Paris cette petite brochure . Il faut absolument que ce soit M. Marin qui ait favorisé le sieur Lacombe, ou que le sieur Lacombe lui-même se la soit fait adresser en droiture, car il est très certain que je n'en ai fait tenir que la moitié à Lacombe et je crois même que cette moitié n'est partie qu'après son édition faite . Cette première partie lui a été envoyée corrigée, et très inutilement, puisque son édition fourmille de fautes . J'espère qu'au moins il m'en fera tenir un exemplaire . Malgré tous mes maux, je m'égaie à voir embellir par des acteurs qui valent mieux que moi une comédie qui ne mérite pas leur peine . Nous avons trois auteurs dans notre troupe . Vous m'avouerez que cela est unique dans le monde ; et ce qu'il y a de plus beau encore, c'est que ces trois auteurs ne cabalent point les uns contre les autres ; nous sommes plus unis que la Sorbonne . Tous les étrangers sont très fâchés 2 que cette faculté de grands hommes ait supprimé sa censure ; elle aurait édifié l'Europe et mis le comble à sa gloire .
J'ai reçu les belles pièces de théâtre qu'on m'a envoyées depuis peu 3 ; c'est Racine et Molière tout pur. Il y a quelque temps que l'on m'adressa un livre intitulé le Siècle de Louis XV 4. Les principaux personnages du siècle sont trois joueurs d'orgue et deux apothicaires 5. Il manquait à ce siècle l'ouvrage que la Sorbonne annonçait; mais j'ose espérer que nous verrons ce chef-d'œuvre. Je ne peux concevoir comme on a permis en France l'impression du livre de du Laurent, intitulé L'Ingénu . Cela me passe.
Je finis, car j'ai la fièvre. Je vous embrasse du meilleur de mon cœur. Vos deux billets ont été rendus à leur adresse .
A propos, je soupçonne fort qu'on aura tronqué L'Ingénu . »
1 Édition de Kehl ; voir note de lettre du 10 septembre 1767 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/04/24/la-consolation-du-travail-consolation-necessaire-a-tout-etre-6439794.html
2 Fâchés et non tâchés (édition Besterman ).
3 Sans doute celles qui sont mentionnées dans la lettre précédente ; mais on soupçonne que l'observation qui suit est alors fortement ironique .
4 Il s'agit de Lettres sur les hommes célèbres […] sous le règne de Louis XV, 1752, de Pierre-Louis d'Aquin de Château-Lyon, republiées sous le titre Le Siècle littéraire de Louis XV, 1753 . Voir : https://books.google.fr/books?id=Yc1bAAAAcAAJ&printse... https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3169178.texteImage#
5 Ironique . Deux organistes, dont l'un est le père de l'auteur, sont appelés « génies rares », mais aucun apothicaire ne semble mentionné : https://books.google.fr/books?id=Yc1bAAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q=organiste&f=false
Note de Beuchot : D'Aquin de Châteaulyon (à qui est adressée la lettre 5683, voir https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411359c/f251.image... ), est auteur de Lettres sur les hommes célèbres dans les sciences, la littérature et les arts, sous le règne de Louis XV, 1752, deux parties in-12, qu'on reproduisit (sans les avoir réimprimées) sous le titre de Siècle littéraire de Louis XV, 1754, deux parties in-12. Les deux organistes d'Aquin, le père de l'auteur, et Calvière, sont appelés des génies rares; mais on n'y parle pas d'apothicaires. (B.)
Voir : https://www.musicologie.org/Biographies/d/daquin_louis_claude.html
et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Guillaume-Antoine_Calvi%C3%A8re
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