07/06/2009
J’ai tâché au moins de ne point me contredire dans ma manière de penser
Oh ! la merveilleuse excuse pour ne point manifester mon attachement à quelque parti que ce soit : ce jour je travaille, ou plutôt, j'ai travaillé avec plaisir .
Point d'isoloir pour moi, au contraire j'ai eu le plaisir de rencontrer des suédois,sri lankais,suisses, anglais,allemands,....
Européen oui, partisan non (au sens membre d'un parti), européen comme le concevait mon digne grand-père paternel qui ne concevait pas qu'on puisse se battre pour la conquête et qui désirait la suppression de toutes frontières. Il savait, lui qui a connu physiquement ce qu'est la guerre, qu'une ligne bleue fut-elle celle des Vosges, ne mérite pas tant de morts.
Une frontière : quelles peurs garde -t-elle de chaque côté ?
« A Jean Le Rond d’Alembert
Il [le duc de Richelieu] me mande, mon cher ami, que c’est un malentendu et un mensonge infâme, débité par un histrion [Lekain, affaire des pièces de Voltaire refusées par Richelieu].Il y a d’ailleurs dans cette affaire de petits secrets très intéressants pour ce pauvre vieillard qui vous aime de tout son cœur.
Je vous ai déjà dit que je devais me taire et je me tais.
La grande femme [Catherine II à qui d’Alembert avait demandé la libération des Français faits prisonniers par les Russes en Pologne] est très irritée contre certains prisonniers qui ont dit d’elle des choses affreuses ; ils sont courageux, mais ils ne sont pas discrets : voilà tout ce qu’elle me fait entendre sur cette affaire, qui aurait fait un honneur infini à la philosophie et à vous.
Le jugement de ce pauvre Morangiés me paraît une de ces contradictions dont le monde est plein. S’il n’était pas suborneur de témoins, pourquoi le mettre en prison ? Si les juges sont assez romanesques pour croire qu’il a reçu les cent mille écus [il a signé le reçu avant de les avoir effectivement reçus, semble-t-il ; il est en prison pour dettes], pourquoi ne l’ont-ils pas condamné comme calomniateur, et comme ayant voulu faire pendre ceux dont il a volé l’argent ? Le feu et l’eau dont les comètes nous menacent, ne sont pas plus contradictoires [Lettre sur la prétendue comète, 17 mai 1773, « …une comète passerait aujourd’hui 20é de mai au bord de notre globule et le mettrait en miettes… Il me semble que Mesieurs de Paris jugnet de toutes choses comme de la prétendue comète que M. de Lalande n’a point annoncée. »].
Encore une fois il faut cultiver son jardin. Ce monde est un chaos d’absurdités et d’horreurs, j’en ai des preuves. J’ai tâché au moins de ne point me contredire dans ma manière de penser. Soyez sûr que je ne me contredirai jamais dans ma tendre amitié pour vous, et dans ma vénération pour vos grands talents et pur votre caractère ferme et inébranlable.
Mes compliments, je vous en prie, à ceux qui se souviennent de moi dans l’Académie .J’espère trouver un moyen d’envoyer des Crétois [ des Lois de Minos].
V.
A Ferney ce 7è juin 1773. »
19:09 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : voltaire, alembert, catherine, lalande, comète, académie