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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Si je ne consultais que moi, je n’aurais assurément aucune répugnance ; mais tout le monde n’est pas aussi philosophe q

... En toute franchise, quel est le père d'une jeune fille qui n'a pas un jour fait cette réflexion , -debout sur les freins d'un mariage qui semble inenvisageable ,-  qui ressemble à cette fameuse dénégation "moi, hostile à l'émigration ? s'il ne tenait qu'à moi, il n'y aurait plus de contrôle aux frontières , oui monsieur !".

Sacré Voltaire, père ( même adoptif)  jusqu'au bout des ongles .

 Plein droit 2010/1

A propos d'immigration , un peu d'info , ça ne fait pas de mal : https://www.cairn.info/revue-plein-droit-2010-1-page-12.h...

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d’Argental

29è janvier 1763 1

Vraiment, mes anges, j’avais oublié de vous supplier d’empêcher François Corneille, père, de venir à la noce. Si c’était l’oncle Pierre, ou même l’oncle Thomas, je le prierais en grande cérémonie, mais pour François, il n’y a pas moyen . Il est singulier qu’un père soit un trouble-fête dans une noce ; mais la chose est ainsi, comme vous savez . On prétend que la première chose que fera le père, dès qu’il aura reçu quelque argent, ce sera de venir à Ferney. Dieu nous en préserve ! Nous nous jetons aux ailes de nos anges, pour qu’ils l’empêchent d’être de la noce . Sa personne, ses propos, son emploi 2 , ne réussiraient pas auprès de la famille dans laquelle entre Mlle Corneille 3 . M. le duc de Villars et les autres Français qui seront de la cérémonie feraient quelques mauvaises plaisanteries . Si je ne consultais que moi, je n’aurais assurément aucune répugnance 4   ; mais tout le monde n’est pas aussi philosophe que votre serviteur, et patriarcalement parlant, je seras fort aise de rendre le père et la mère témoins du bonheur de leur fille.

C’est bien de la faute du père de M. de Colmont , si un autre que lui épouse Mlle Corneille . Il a été un mois sans lui répondre, et enfin sa mère a écrit à M. Micault 5 quand il n’était plus temps . Il faut avouer aussi que ce Colmont s’est conduit de la manière la plus gauche ; enfin il n’était point aimé, et notre petit Dupuits l’est ; il n’y a pas à répondre à cela.

Je ne cesse d’importuner mes anges, et de leur demander pardon de mes importunités ; c’est ma destinée, mais que M. d’Argental me parle donc de ses yeux ; car comme je suis en train de perdre les miens, je voudrais savoir en quel état les siens se trouvent . Il ne m’en dit jamais mot ; cela vaut pourtant la peine qu’on en parle.

Est-il vrai que M. de Courteilles est assez mal  ? J’en serais bien fâché . Mme Denis, Mlle Corneille et moi nous baisons vos ailes.

V. »

1 L'édition de Kehl ,d' après la copie Beaumarchais donne une version incomplète du dernier paragraphe, suivie par les autres éditions .

2 Jean-François Corneille était « facteur de la petite poste dans les rues de Paris » dit V*

3 Voir lettre du 24 janvier à Damilaville

4 Cependant V* écrivit aux d’Argental le 10 janvier : « Mlle Clairon ayant dit qu’elle allait marier Mlle Corneille, Lekain nous écrivit qu’elle épouserait un comédien … J’estime les comédiens quand ils sont bons, et je veux qu’ils ne soient ni infâmes dans ce monde, ni damnés dans l’autre, mais l’idée de donner la cousine de M. de La Tour du Pin à un comédien est un peu révoltante… »

5 Micault, aide-major dans l’armée d’Estrées, neveu de Paris-Montmartel, était venu se faire soigner par T. Tronchin

 

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25/12/2017 | Lien permanent

ce n'est pas la vénérable compagnie qui a déféré la sottise en question . Je dois supposer que la personne qui s'en est

... Avis que ne partage pas Jean-Luc Mélenchon qui voit des complots et des pièges partout . A l'heure où il doit rendre compte de ses imbécilités et mensonges, il prend la défense de Richard Ferrand qui n'en a surement pas besoin . Disqualifier la justice, c'est tout ce qu'il a trouvé pour s'innocenter,  et promettre des révélations pour impressionner qui ? Cet homme n'est qu'une enflure, une outre, grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf : il aura la même fin "pafffff "

Résultat de recherche d'images pour "grenouille et  le boeuf"

 

 

« A François Tronchin

[22 juillet 1764] 1

Mon cher ami j'ai fait ce que j'ai pu pour avoir un exemplaire de cette misère et je n'ai pu y parvenir . On dit qu'il n'y en a qu’un . On disait auparavant qu'il y en avait au moins trois ou quatre . Cette petite manœuvre est un tour de la faction qui a prétendu que c'était à Ferney qu'on avait résolu de condamner Jean-Jacques . Depuis ce temps presque toutes les remontrances ont roulé en partie sur la sévérité exercée conte J.-J. , et sur le silence observé à mon égard . Mais les factieux auraient pu observer que je suis français établi en France et non à Genève . Ce dernier effort de vos ennemis vous paraît sans doute aussi méprisable qu'à moi . Je crois comme vous qu'il faut laisser tomber ce petit artifice . Un éclat qui me compromettrait, m'obligerait à faire un autre éclat . On sait assez que je n'ai opposé jusqu'à présent qu'un profond silence à toutes ces clabauderies, et aux entreprises du parti opposé . Le fond de l'affaire est qu'un certain nombre de vos citoyens est outré qu’un citoyen soit exclu de sa patrie, et un étranger ait un domaine dans votre territoire . Voilà la pierre d'achoppement . Je vois que vous pensez très sagement et que vous ne voulez pas accorder à des ennemis du repos public une victoire dont ils abuseraient . Je vois que vous avez parlé à monsieur le premier syndic et à vos amis suivant vos principes équitables et prudents . Je sens bien aussi que votre amitié va aussi loin que votre sagesse, et j'en suis bien touché . Je vous demande en grâce de me mettre un peu au fait et d'être bien sûr que vous ne serez pas compromis . Maman vous embrasse de tout son cœur .

L'affaire du Virtemberg est un peu plus sérieuse et je risque de tout perdre .

J'apprends dans ce moment que ce n'est pas la vénérable compagnie qui a déféré la sottise en question . Je dois supposer que la personne qui s'en est chargée n'a eu que de bonnes intentions . »

1 Le mois et l'année sont de la main de Tronchin ; le jour se déduit du fait que cette lettre répond à un billet de Tronchin qui éclaire la présente : « Votre dénonciation est entre les mains de monsieur Le Premier mais il n'en a fait jusqu'ici aucun usage:les recherches chez le libraire n'ont rien produit ; et jusqu’ici nous ne connaissons point par nous-mêmes cette infamie ; et je souhaite que nous ne la connaissions pas pour n'être pas obligés à quelque résolution de celles qui, selon moi, ne servent qu'à donner plus de publicité, et qu'à irriter la curiosité ; et qui par conséquent en sont point de mon goût tant qu'il est possible de les éviter . Vous avez très bien fait d'écrire à MM. les d[ucs] de Choiseul et de Pr[aslin] . / 21 juillet 1764. »

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13/09/2019 | Lien permanent

Malheur à tous ceux qui viennent les derniers, dans quelque genre que ce puisse être ! l’attention du public n’est plus

... Permettez-moi de mettre en vedette un qui n'est pas dernier et qui  me semble ne plus être écouté, surtout pour ses oeuvres engagées . Passez un bon moment avec Pierre Perret : https://www.youtube.com/watch?v=FrQSxMIGSHg

Humour Liberté" : Pierre Perret estime vivre dans "un monde qui l'inquiète"

Merci Pierrot et bravo .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ArgentaI

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

9 septembre 1765

Notre résident Montpéroux vient de mourir 1 ; à qui donnera-t-on cette place ? Je voudrais bien que ce fût à un philosophe. Plusieurs personnes la demandent. Je ne connais point du tout par moi-même M. Astier, qui est en Hollande, et qui a, dit-on, bien servi ; mais je sais qu’il est fort sage et fort paisible. Il est sans doute convenable de ne pas envoyer dans cette ville un bigot fanatique.

Je songe à ce pauvre Tercier, qui a perdu si mal à propos sa place 2 pour avoir approuvé un livre médiocre , qui n’était que la paraphrase des Pensées de [La] Rochefoucauld. Si nous pouvions l’avoir, ce serait une grande consolation. Quoi qu’il en soit, je supplie instamment mes anges de nous envoyer un résident philosophe.

M. de Chauvelin, l’ambassadeur à Turin, m’a mandé qu’il vous enverrait la petite drôlerie de l’ex-jésuite : mais à quoi vous servira-t-elle, mes divins anges ? Cet exemplaire est, à la vérité, un peu plus complet que le vôtre ; mais il y a encore beaucoup de choses à corriger. Ne vaudrait-il pas mieux renvoyer au petit prêtre sa guenille en droiture ? Je vous ai déjà dit 3 que je recevais sans difficulté les paquets contresignés qui m’étaient adressés. Et où serait le mal quand on enjoliverait ce paquet d’une demi-feuille de papier, dans laquelle on écrirait :  Voilà ce que M. le duc de Praslin, vous envoie ; il trouve vos vers fort mauvais, et vous recommande de les corriger,  ou telle autre chose semblable ? Il me semble que cette grande affaire d’État peut se traiter très facilement par la poste ; on renverra le tout avec une préface des plus honnêtes, et toutes les indications nécessaires à l’ami Lekain.

Je suis toujours très émerveillé de la défense qu’on a faite au roi de donner le privilège à madame Calas de vendre une estampe. J’ai déjà fait quelques souscriptions dans ma retraite, et M. Tronchin en a fait bien davantage, comme de raison. Je plains bien mes pauvres Sirven. Malheur à tous ceux qui viennent les derniers, dans quelque genre que ce puisse être ! l’attention du public n’est plus pour eux. Il faudrait à présent avoir eu deux hommes roués dans sa famille pour faire quelque éclat dans le monde.

Je m’imagine que l’affaire des dîmes sera décidée à Fontainebleau. Il en est de cette besogne comme de celle de l’ex-jésuite ; il n’importe en quel temps elles finissent, pourvu que mes anges et M. le duc de Praslin les favorisent toutes deux.

Tout ce qui est dans ma petite retraite se met au bout des ailes de mes anges.

V. »



1 Mort le 7 septembre ; son successeur est Hennin ; voir lettre du 29 septembre 1765 à Hennin : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/10/correspondance-annee-1765-partie-29.html

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07/01/2021 | Lien permanent

Il faudrait être le maître absolu de son terrain pour fonder une colonie . Ce n’est pas où les Français réussissent le m

... La preuve ? Citez au moins une colonie française qui mérite ce titre encore existante  : faites votre choix http://drapeaufree.free.fr/COLONIESFR/coloniesfr.htm

Ce fut !

 

 

 

« A Daniel-Marc-Antoine Chardon 1

Au château de Ferney par Genève, 2è février 1767

Monsieur, le mémoire sur Sainte-Lucie 2 ne me donne aucune envie d’aller dans ce pays-là, mais il m’inspire le plus grand désir de connaître l’auteur. Je suis pénétré de la bonté qu’il a eue, je lui dois autant d’estime que de reconnaissance.

Voilà comme les mémoires des intendants 3en 1698 auraient dû être faits .On y verrait clair, on connaîtrait le fort et le faible des provinces. Le pays sauvage où je suis, monsieur, ressemble assez à votre Sainte-Lucie ; il est au bout du monde, et a été jusqu’à présent un peu abandonné à sa misère.

Je suis trop vieux pour rien entreprendre ; et, après ma mort, tout retombera dans son ancienne horreur. Il faudrait être le maître absolu de son terrain pour fonder une colonie . Ce n’est pas où les Français réussissent le mieux. Nous trouverons toujours cent filles d’opéra contre une Didon.

Je serai très affligé si le mémoire pour les Sirven n’est digne ni de l’avocat ni de la cause . Mais je me console, puisque c’est vous, monsieur, qui rapporterez l’affaire. L’éloquence du rapporteur fait bien plus d’impression que celle de l’avocat. Vous verrez, quand vous jugerez cette affaire, que la sentence qui a condamné les Sirven, qui les a dépouillés de leurs biens, qui a fait mourir la mère, et qui tient le père et les deux filles dans la misère et dans l’opprobre, est encore plus absurde que l’arrêt contre les Calas. Il me semble que les juges des Calas pouvaient au moins alléguer quelques faibles et malheureux prétextes ; mais je n’en ai découvert aucun dans la sentence contre les Sirven. Un grand roi 4 m’a fait l’honneur de me mander, à cette occasion, que jamais on ne devrait permettre l’exécution d’un arrêt de mort qu’après qu’elle aurait été approuvée par le conseil d’État du souverain. On en use ainsi dans les trois quarts de l’Europe. Il est bien étrange que la nation la plus gaie du monde soit si souvent la plus cruelle.

Je vous demande pardon, monsieur ; je suis assez comme les autres vieillards qui se plaignent toujours ; mais je sais qu’heureusement le corps des maîtres des requêtes n’a jamais été si bien composé qu’aujourd’hui, que jamais il n’y a eu plus de lumières, et que la raison l’emporte sur la forme atroce et barbare dont on s’est quelquefois piqué, à ce qu’on dit, dans d’autres compagnies. Vous m’avez inspiré de la franchise ; je la pousse peut-être trop loin, mais je ne puis pousser trop loin les autres sentiments que je vous dois, et le respect infini avec lequel j’ai l’honneur d’être, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

2 Essai sur la colonie de Sainte-Lucie, par un ancien intendant de cette île ; imprimé en 1779, in-8°. Cet ouvrage est attribué à Chardon par Beuchot ,et le CTHS de l’École nationale des Chartes .

4 Le roi de Prusse ; voir lettre du 3 novembre 1766 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6557

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01/06/2022 | Lien permanent

Le temps n’est pas trop favorable pour une pièce nouvelle ; mais vous savez que vous êtes les maîtres de tout

... Ou plutôt vous pourriez l'être, si vous aviez un peu plus de coeur, messieurs et mesdames du gouvernement .

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On n'est pas loin de la vérité : "ils sont du parti des péteurs alors qu'ils n'ont pas de cul "

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

22 juin [1764] 1

Je crois, mes divins anges, toutes réflexions faites, qu’il faut que le roi de Pologne se contente du paquet qui est chez M. de Laleu depuis plus d’un mois, et qu’il fasse comme le roi son gendre et moi chétif ; car s’il prend les 25 exemplaires, il n’en restera plus pour ceux à qui j’en destinais. C’est une négociation que vous pouvez très bien faire avec M. de Hulin, qui est sans doute un ministre conciliant.

Je vous conjure, mes divins anges, de recommander le plus profond secret 2 à messieurs de la Gazette littéraire. Je ne fais pas grand cas des vers de Pétrarque ; c’est le génie le plus fécond du monde dans l’art de dire toujours la même chose ; mais ce n’est pas à moi à renverser de sa niche le saint de l’abbé de Sade.

S’il fait d’aussi grandes chaleurs à Paris que dans ma grande vallée entre les Alpes, la glace de nos roués sera de saison. Le temps n’est pas trop favorable pour une pièce nouvelle ; mais vous savez que vous êtes les maîtres de tout. Je conseille toujours aux acteurs de s’habiller de gaze. L’ex-jésuite qui m’est venu voir, comme vous savez, m’a prié de vous engager à faire une correction importante ; c’est de mettre je me meurs au lieu de je succombe. Je lui ai dit que l’un était aussi plat que l’autre, et que tout cela était très indifférent. C’est au 2è acte, c’est Julie qui parle à Fulvie :

A peine devant vous je puis me reconnaître.

Je me meurs.3

Ce je me meurs est en effet plus supportable que je succombe, et sert mieux la déclamation. De plus, il y a un autre succombe dans la même scène, et il ne faut pas succomber deux fois. L’auteur pourra bien succomber lui-même, mais j’espère qu’on n’en saura rien.

Grandval grasseye-t-il dans la pièce ? À qui donnez-vous Octave ?4

Notez s'il vous plait qu'au troisième acte dans la scène entre Julie et Octave , il y a :

Disposez de la main d'un de maîtres du monde.

Je prie Octave de 5 dire :

Disposez de la foi d'un des maîtres du monde 6.

Voilà deux terribles corrections .

Il m'en vient d'autres encore dans la tête en vous écrivant ; voilà une plaisante lettre : je dicte, je corrige des vers, j'écris quatre lignes, et puis des vers encore . Les gens de mon métier sont drôles .

Tenez donc mes divins anges, voici d'amples changements qui me paraissent fort raisonnables . N'est-il pas vrai que Pompée en arrivant sur le théâtre au troisième acte ne parlait pas assez de Julie ? Il l'a perdue, il la cherche et il ne parle que de Caton et de Cicéron . Ce n'est pas là un véritable amant comme dit Pierre 7. Vous verrez donc comme j'ai rapiéceté ce petit morceau .

Vraiment, mes anges, il faut confier à beaucoup de bavards que je fais Pierre-le-Cruel, et qu’elle sera prête pour le commencement de l’hiver . Rien ne sera plus propre à dérouter les curieux qui parlent des Roués, et qui les attribuent déjà à Helvétius, à Saurin. Il faut les empêcher de venir jusqu’à nous.

Dites-moi un mot, je vous prie, de ces Roués, et recommandez bien au fidèle Lekain d’empêcher qu’on étrique l’étoffe, qu’on ne la coupe, qu’on ne la recouse avec des vers welches . Il en résulte des choses abominables, un Guy Duchesne achète le manuscrit mutilé, écrit à la diable , et on est déshonoré dans la postérité, si postérité y a . Cela dessèche le sang et abrège les jours d’un pauvre homme. Quoi qu’il en soit, je baise le bout de vos ailes avec respect et tendresse.

V. » 

1 Date complétée par d'Argental ; le passage Grandval grasseye-t-il ….. j'ai rapièceté ce petit morceau, biffé sur la copie Beau marchais, manque dans les éditions : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/08/correspondance-annee-1764-partie-21.html

2 Il s’agit de l’article sur les Mémoires pour servir à la vie de Pétrarque. (Georges Avenel.)

4 Grandval ne joua pas dans cette pièce ; le rôle d'Octave fut créé par Lekain .

5 Par un lapsus, V* a oublié ce de dans le manuscrit original .

6 Cette correction fut faite, mais tout le passage fut transformé , Octave , III, 6 .

7 Allusion au rôle de Pauline dans Polyeucte, elle emploie cette expression à la scène 3 de l'acte I.

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05/08/2019 | Lien permanent

ce n'est que la rage de nuire, et la folle espérance de se faire une réputation en attaquant ceux qui en ont

... Trop tristement d'actualité !

 

 

« A Jean-François Marmontel, de

l'Académie française

7è auguste 1767 1

Mon cher confrère, vous savez sans doute que ce malheureux Coger a fait une seconde édition 2 de son libelle contre vous , et qu'il y a mis une nouvelle dose de poison. Ne croyez pas que ce soit la rage du fanatisme qui arme ces coquins-là, ce n'est que la rage de nuire, et la folle espérance de se faire une réputation en attaquant ceux qui en ont. La démence de ce malheureux a été portée au point qu'il a osé compromettre le nom du roi dans une de ses notes, page 96. Il dit, dans cette note, que « vous répandez le déisme, que vous habillez Bélisaire des haillons des déistes 3que les jeunes empoisonneurs et blasphémateurs de Picardie condamnés au feu l'année dernière, ont avoué que c'était de pareilles lectures qui les avaient portés aux horreurs dont ils étaient coupables; que le jour que MM. le président Hénault, Capperonnier et Le Bault, eurent l'honneur de présenter au roi les deux derniers volumes de l'Académie des belles-lettres, Sa Majesté témoigna la plus grande indignation contre M. de V., etc. ».

Vous saurez, mon cher confrère, que j'ai les lettres de M. le président Hénault et de M. Capperonnier, qui donnent un démenti formel à ce maraud 4. Il a osé prostituer le nom du roi, pour calomnier les membres d'une académie qui est sous la protection immédiate de Sa Majesté.

De quelque crédit que le fanatisme se vante aujourd'hui, je doute qu'il puisse se soutenir contre la vérité qui l'écrase, et contre l'opprobre dont il se couvre lui-même.

Vous savez que Coger, secrétaire de Riballier, vous prodigue, dans sa nouvelle édition, le titre de séditieux 5 mais vous devez savoir aussi que votre séditieux Bélisaire vient d'être traduit en russe, sous les yeux de l'impératrice de Russie. C'est elle-même qui me fait l'honneur de me le mander 6. Il est aussi traduit en anglais et en suédois cela est triste pour maître Riballier.

On s'est trop réjoui de la destruction des jésuites. Je savais bien que les jansénistes prendraient la place vacante. On nous a délivrés des renards, et on nous a livrés aux loups. Si j'étais à Paris, mon avis serait que l'Académie demandât justice au roi. Elle mettrait à ses pieds, d'un côté, les éloges donnés à votre Bélisaire par l'Europe entière, et de l'autre les impostures de deux cuistres de collège 7. Je voudrais qu'un corps soutînt ses membres quand ses membres lui font honneur.

Je n'ai que le temps de vous dire combien je vous estime et je vous aime. »

1 Édition Lettre de M. de Voltaire à M. Marmontel, 1767 . Curieusement Marmontel écrit le même jour à V*.

2 Sur cette seconde édition, voir lettre du 27 juillet 1767 à Coger : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/03/21/il-ne-vous-reste-qu-a-vous-repentir.html

3 Ce qui précède n'est pas une citation mais un résumé .

4 On peut se demander pourquoi V* n'a jamais publié ces démentis.

5 Voir l'Examen de Bélisaire, p. 52 .

6 Dans la lettre du 9 juin 176, dont V* fait état auprès de différents correspondants depuis le 25 juillet . La voici : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-35175925.html

« A Casan, le 18/29 Mai.

Je vous avais menacé d’une lettre, de quelque bicoque de l’Asie ; je vous tiens parole aujourd’hui.

Il me semble que les auteurs de l’Anecdote sur Bélisaire, et de la Lettre sur les Panégyriques, sont proches parents du neveu de l’abbé Bazin. Mais, monsieur, ne vaudrait-il pas mieux renvoyer tout panégyrique des gens après leur mort, crainte que tôt ou tard ils ne donnent un démenti, vu l’inconséquence et le peu de stabilité des choses humaines ? Je ne sais si, après la révocation de l’édit de Nantes, on a fait beaucoup de cas des panégyriques de Louis XIV : les réfugiés, au moins, n’étaient pas disposés à leur donner du poids.

Je vous prie, monsieur, d’employer votre crédit auprès du savant du canton d’Uri (1), pour qu’il ne perde pas son temps à faire le mien avant mon décès.

Ces lois dont on parle tant, au bout du compte, ne sont point faites encore. Eh ! Qui peut répondre de leur bonté ? C’est la postérité, et non pas nous, en vérité, qui sera à portée de décider cette question. Imaginez, je vous prie, qu’elles doivent servir pour l’Europe et pour l’Asie : et quelle différence de climat, de gens, d’habitudes, d’idées même !

Me voilà en Asie ; j’ai voulu voir cela par mes yeux. Il y a dans cette ville vingt peuples divers, qui ne se ressemblent point du tout. Il faut pourtant leur faire un habit qui leur soit propre à tous. Ils peuvent  se bien trouver des principes généraux ; mais les détails ? Et quels détails ! J’allais dire : C’est presque un monde à créer, à unir, à conserver. Je ne finirais pas, et en voilà beaucoup trop de toutes façons.

Si tout cela ne réussit pas, les lambeaux de lettres que j’ai trouvés cités dans le dernier imprimé (2) paraîtront ostentation (et que sais-je, moi !) aux impartiaux et à mes envieux. Et puis mes lettres n’ont été dictées que par l’estime, et ne sauraient être bonnes à l’impression. Il est vrai qu’il m’est bien flatteur et honorable de voir par quel sentiment tout cela a été cité chez l’auteur de la Lettre sur les panégyriques ; mais Bélisaire dit que c’est là justement le moment dangereux pour mon espèce. Bélisaire, ayant raison partout, sans doute n’aura pas tort en ceci. La traduction de ce dernier livre est finie, et va être imprimée. Pour faire l’essai de cette traduction, on l’a lue à deux personnes qui ne connaissaient point l’original. L’un s’écria : Qu’on me crève les yeux, pourvu que je sois Bélisaire, j’en serai assez récompensé ; l’autre dit : Si cela était, j’en serais envieux.

En finissant, monsieur, recevez les témoignages de ma reconnaissance pour toutes les marques d’amitié que vous me donnez ; mais, s’il est possible, préservez mon griffonnage de l’impression. Caterine. »

1 – C’est sous le nom d’un professeur en droit du canton d’Uri qu’avait paru la Lettre sur les panégyriques. (G.Avenel)

2 – L’instruction pour la réforme des lois. (G.A.)

On notera que le « savant du canton d'Uri » est V* lui-même ; sa Lettre sur les panégyriques a été publiée sous le nom d'  « Irénée Aléthès, professeur en droit dans le canton suisse d'Uri ».

7 Riballier et Coger .

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17/03/2023 | Lien permanent

On m’a fait étranger, et puis on me reproche de penser comme un étranger . Cela n’est pas juste

... Paroles de bi-national le lundi 8 juillet 2024 après la chasse aux sorcièr.e.s déclenchée par Jordan Bardella, pilier de cette extrême droite détestable qui a enjôlé tant de citoyens à la courte vue et qui vont faire morfler la France entière .

Heureusement qu'il y a les bi-nationaux à tous les postes possibles pour soutenir notre pays .

Et malheureusement on va se retrouver avec des haineux, pseudo-rassembleurs, aux postes "sensibles" . Combien de temps va-t-il falloir pour que les Français ouvrent les yeux et les vident ?

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Probable

 

 

« A Pierre-Jacques-Claude Dupuits

[26 décembre 1768] 1

En vous remerciant, mon cher capitaine, de m’avoir envoyé copie de la jolie lettre de cette dame que Mme du Deffand appelle sa petite mère 2. Je dirais volontiers à Mme du Deffand :

Il se peut bien qu’elle soit votre mère .
Elle eut un fils assez connu de tous :
Méchant enfant, aveugle comme vous,
Dont vous aviez, soit dit sans vous déplaire,
Et la malice et les attraits si doux,
Quand vous étiez dans l’âge heureux de plaire.

Quoi qu’il en soit, je sais que la petite mère et la petite fille sont la meilleure compagnie de l’Europe.

Cette dame prétend qu’elle a volé le Siècle de Louis XIV ; elle ne sait donc pas que c’était son bien . J’avais d’abord imaginé que M. le D[uc] de Ch[oiseul] pourrait avoir la bonté d’en faire présenter un exemplaire à quelqu’un qui n’a pas le temps de lire 3. Mais j’envoyai ce même exemplaire pour être donné à celle qui daigne lire, et il y avait même quatre petits versiculets 4 qui ne valent pas grand’chose. Cela sera perdu dans l’énorme quantité de paperasses qu’on reçoit à chaque poste. La perte n’est pas grande.

Il est vrai que je lui ai envoyé Le Marseillais 5 de Saint-Didier, et que je n’ai pas osé risquer les Trois Empereurs en Sorbonne 6, de l’abbé Caille, à cause des notes.

Dieu me garde d’avoir la moindre part à l’A, B, C ! C’est un ouvrage anglais, traduit et imprimé en 1762 7. Rien n’est plus hardi et peut-être plus dangereux dans votre pays. C’est un cadran qui n’est fait que pour le méridien de Londres. On m’a fait étranger, et puis on me reproche de penser comme un étranger . Cela n’est pas juste.

On m’a su mauvais gré, par exemple, d’avoir dit des fadeurs à Catau. Je crois qu’on a eu très grand tort. Catau avait fourni 5000 livres pour le Corneille de madame votre femme. Catau m’accablait de bontés, m’écrivait des lettres charmantes . Il faut un peu de reconnaissance . Les muses n’ont rien à démêler avec la politique. Tout cela m’effarouche. Cependant, si on le veut, si on l’ordonne, s’il n’y a nul risque, je chercherai un A, B, C, et j’en ferai tenir un à la personne du monde qui fait le meilleur usage des vingt-quatre lettres de l’alphabet quand elle parle et quand elle écrit.

Pour La Bletterie, il est très-certain qu’il a voulu me désigner en deux endroits, et qu’il a désigné cruellement Marmontel dans le temps qu’il était persécuté par l’archevêque et par la Sorbonne. Il a attaqué Linguet ; il a insulté de même le président Hénault page 235, tome II :  En revanche, fixer l’époque des plus petits faits avec exactitude, c’est le sublime de plusieurs prétendus historiens modernes. Cela leur tient lieu de génie et des talents historiques.  Peut-on appliquer un soufflet plus fort sur la joue du président ? Et puis comment trouvez-vous les talents historiques ? Ne reconnaissez-vous pas à tous ces traits un janséniste de l’Université, gonflé d’orgueil, pétri d’âcreté [...], et qui frappe à droite et à gauche ?

Je ne savais point du tout qu’il eût surpris la protection de Mme la duchesse de Choiseul. Quelqu’un a dit de moi que je n’avais jamais attaqué personne, mais que je n’avais pardonné à personne. Cependant je pardonne à La Bletterie, puisqu’il est protégé par l’esprit et par les grâces . J’ai même proposé un accord. La Bletterie veut qu’on m’enterre, parce que j’ai soixante-quinze ans . Rien ne paraît plus plausible au premier aspect . Je demande qu’il me permette seulement de vivre encore deux ans. C’est beaucoup, dira-t-il ; mais je voudrais bien savoir quel âge il a, et pourquoi il veut que je passe le premier ?

Mon cher capitaine, vous qui êtes jeune, riez des barbons qui font des façons à la porte du néant.

Je vous embrasse, vous et votre petite femme.

V. »

1 Minute olographe ; copie par Wyart datée du 26 décembre ce qui est certainement correct ; édition Kehl qui date à tort du 21 décembre .

2 La lettre de Mme de Choiseul à Dupuits est conservée ; en fait c'est à elle que V* répond  . Voici le texte :

«  A Versailles ce 14 décembre 1768

« Je suis bien fâchée, monsieur, de n'avoir pas eu le plaisir de vous voir à Paris, quand vous avez pris le peine de m'y venir chercher . J'ai depuis le voyage de Fontainebleau à vous faire part d'une bonne fortune pour laquelle je voulais que vous fussiez l’interprète de ma reconnaissance . Après une longue disgrâce, j'ai été aussi surprise que flattée de recevoir la charmante fable du Marseillais et du lion dont vous m'aviez fait présent manuscrit . Elle était accompagnée d'un fort joli billet en votre nom . Cette marque de souvenir de la part de M. de Voltaire m’a été d'autant plus sensible que peu de jours auparavant vous aviez été témoin de mon humiliation . Les bornes de l’estime qu'il m'accordait, vous disais-je, ont été posées au point où j'ai osé n'être pas de son avis ; non, monsieur, je n'en serai jamais, quand il croira qu'on lui dit qu'il est un radoteur. Si jamais il y eut un génie immortel, c'est le sien assurément . Il le prouve tous les jours ; La Bletterie en conviendrait, malgré l'injustice dont M. de Voltaire l'accable . Si M. de Voltaire s'était rendu justice à lui-même, il ne se serait point attribué une note contre un Romain qui n'avait point de talents et qui n'eut point son immortalité ; il n’aurait pas cru surtout qu'on l'eût eu en vue dans une citation tirée de Bayle . Bayle un des plus grands hommes de son siècle parce qu'il n'était pas contemporain de M. de Voltaire .

Voilà ce que l'on aurait dit à M. de voltaire, s'il avait bien voulu entendre avant de se fâcher . Mais il n'y a rien à dire à celui qui se fâche .

Qui pardonne a raison et la colère a tort

Ce n’était pas même le cas de pardonner et encore moins celui d'être en colère.

L'orgueil de ma nouvelle faveur ne s'est pas soutenu longtemps . J'ai vu paraître Les Trois Empereurs, le supplément au Dictionnaire philosophique , L'A.B.C et même la nouvelle édition du Siècle de Louis XIV sans que rien de tout cela m'ait été adressé . J'ai pourtant acquis Le Siècle de Louis XIV mais par droit de conquête, c'est-à-dire que je l'ai volé . Je vois que les souverains de l'esprit sont comme les souverians des Empires ; ils ne pardonnent qu'à demi et l'on ne racquiert jamais entièrement auprès d'eux la faveur qu'on a commencé à perdre, mais les uns et les autres ne perdent jamais les droits qu'ils ont acquis sur nos hommages . ».

3 Louis XV.

4 Ce quatrain est perdu.

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03/07/2024 | Lien permanent

je m'aperçois depuis longtemps que rien n'est si rare que de faire ce que l'on veut

... Ah c'est bien vrai, ça !

[Mise en ligne le 4 pour le 6 depuis une médiathèque]

 

 

« A Alexis-Jean Le Bret

Au château de Ferney près Genève

le 18 octobre 1761 1

J'ai parlé aux frères Cramer, monsieur, plus d'une fois, en conformité de ce que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire . Ils me paraissent surchargés d'entreprises, et je m'aperçois depuis longtemps que rien n'est si rare que de faire ce que l'on veut . Je suis très fâché que votre Bayle 2 ne soit pas encore imprimé : on craint peut-être que ce livre, autrefois si recherché, ne le soit moins aujourd'hui . Ce qui paraissait hardi ne l’est plus . On avait crié par exemple contre l'article de David, et cet article est infiniment modéré en comparaison de ce qu'on vient d'écrire en Angleterre 3. Un ministre a prétendu prouver qu'il n'y a pas une seule action de David qui ne soit d'un scélérat digne du dernier supplice , qu'il n'a point fait les psaumes, et que d'ailleurs ces odes hébraïques qui ne respirent que le sang et le carnage 4, ne devraient faire naître que des sentiments d'horreur dans ceux qui croient y trouver de l'édification .

M. l'évêque de Warburton nous a donné un livre 5 dans lequel il démontre que jamais les Juifs ne connurent l'immortalité de l'âme et les peines et les récompenses après la mort , jusqu'au temps de leur esclavage dans la Chaldée . M. Hume 6 a été encore plus loin que Bayle et Warburton ; le Dictionnaire encyclopédique ne prend pas, à la vérité, de telles hardiesses, mais il traite toutes les matières que Bayle a traitées . J'ai peur que toutes ces raisons n'aient retenu nos libraires . Il en est de cette profession comme de celle de marchande de modes : le goût change pour les livres comme pour les coiffures .

Au reste soyez persuadé qu'il n'y a rien que je ne fasse pour vous témoigner mon estime et l'envie extrême que j'ai de vous servir . »

1 La copie manuscrite 1 et Kehl datent du 10 octobre ; la copie 2 Le Bret, limitée à quelques lignes, donne le 18 .

2 Voir lettre du 15 juin 1757 à Le Bret , première mention de cet ouvrage ; c'est Frédéric II qui publia un Extrait du dictionnaire historique et critique de Bayle, en 1765 et Le Bret le soupçonna d'avoir pillé ses manuscrits .Voir aussi lettre du  8 janvier 1758 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/03/15/ce-n-est-que-par-des-choses-nouvelles-qu-on-peut-reveiller-l.html

3 Allusion à un ouvrage de Peter Annet, The History of the man after god's own heart, 1761, qui fut traduit plus tard par d'Holbach sous le titre David ou l'Histoire de l'homme selon le coeur de Dieu, 1768 . Les éditions de Voltaire donnent toutefois pour auteur Huet ou Hut ; le livre a été aussi attribué à d'autres, tels Archibald Campbell et John Noorthouck .

4 Même thème, encore retrouvé dans le Pot pourri .

5 The divine legation of Moses ; voir lettre de janvier-février 1756 aux Cramer et lettre du 26 octobre 1757 à Keate : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/01/15/ni-moise-ni-les-prophetes-ne-connurent-jamais-rien-de-l-immo.html

6 Dans un essai sur le suicide, paru dans Two essays, 1777 ; on se demande comment V* pouvait déjà en avoir connaissance .Voir : http://oll.libertyfund.org/titles/hume-essays-moral-political-literary-lf-ed

 

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06/10/2016 | Lien permanent

tout ce qu’elle fait n’est que pour avoir la gloire d’établir la tolérance

... Anne Hidalgo pour  les piétons contre les motorisés ? Marine Le Pen pour les migrants ? Eva Kaili pour les Qataris corrupteurs ?

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

23 Mai 1767 1

Nous avons reçu, monsieur, le beau discours 2 de M. l’abbé Chauvelin. Je l’ai communiqué à M. de Voltaire, qui en a pensé comme vous. Il est un peu malade actuellement. C’est apparemment de la fatigue qu’il a eue de faire jouer chez lui les Scythes, et d’y représenter lui-même un vieillard. Je n’ai jamais vu de meilleurs acteurs. Tous les rôles ont été parfaitement exécutés, et la pièce a fait verser bien des larmes. Vous n’aurez jamais de pareils acteurs à la comédie de Paris.

Je sais peu de nouvelles de littérature. J’ai ouï parler seulement d’un livre 3 de feu M. Boulanger, et d’un autre de milord Bolingbroke 4, dont on vient de donner en Hollande une édition magnifique. On parle aussi d’un petit livre espagnol dont l’auteur s’appelle, je crois, Zapata. On en a fait une nouvelle traduction à Amsterdam.

On calomnie l’impératrice de Russie, quand on dit qu’elle ne favorise les dissidents de Pologne que pour se mettre en possession de quelques provinces de cette république. Elle a juré qu’elle ne voulait pas un pouce de terre, et que tout ce qu’elle fait n’est que pour avoir la gloire d’établir la tolérance 5.

Le roi de Prusse a soumis à l’arbitrage de Berne toutes ses prétentions contre les Neuchâtelois. Pour nos affaires de Genève, elles sont toujours dans le même état ; mais le pays de Gex est celui qui en souffre davantage. On disait que M. de Voltaire allait passer tout ce temps orageux auprès de Lyon, mais je ne le crois pas. Il est dans sa soixante-quatorzième année, et trop infirme pour se transplanter.

J’ai l’honneur, d’être monsieur, bien sincèrement, avec toute ma famille, votre très humble et très obéissant serviteur.

Boursier. »

1 Copie contemporaine Darmstadt B. qui omet dans la formule les mots bien sincèrement ; édition Correspondance littéraire .

2 Prononcé au parlement le 29 Avril, sur l’expulsion des jésuites d’Espagne. (G.Avenel.)

Henri-Philippe Chauvelin : Discours d'un de messieurs de grand-chambre au parlement, toutes les chambres assemblées, du mercredi 29 avril 1767 : . Cette harangue , qui traite de l'expulsion des jésuite d'Espagne, contribua à sceller leur destin en France . Voir : https://data.bnf.fr/fr/see_all_activities/10673856/page1

3 Le Christianisme dévoilé. (G.A.)

Sur cet ouvrage, voir lettre du 23 avril 1766 à Marmontel : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/02/25/il-faut-que-vous-connaissiez-ce-monstre-6368229.html

4 Nouvelle édition de l’Examen important. (G.A.)

Voir lettre du 26 juin 1766 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/09/20/il-examine-d-abord-de-sang-froid-ensuite-il-argumente-avec-f-6338632.html

5Une fois encore un curieux ton de propagande qu'on reproche à V* ; voir lettre du 18 mai 1767 à Mme Du Deffand : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/12/08/m-6416081.html

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13/12/2022 | Lien permanent

et puis n’est-il pas également défendu de forcer une femme à se faire religieuse ?

... Le "mariage" avec Dieu/Jésus/Vishnou/Allah/Yaweh/a.s.o. doit être aussi libre que les épousailles entre tous congénères qui ont l'heur de se plaire . Est-il besoin de préciser que le mariage entre humains, comme celui avec Grand Guignol-qui-est-aux-cieux,  ne doit pas  être le choix de parents ou prétendus supérieurs confits en religion et/ou marchands de filles ? Oui, de nos jours, hélas encore oui .

 

 

« A Pierre Jabineau de La Voute

4è février 1766

Monsieur,

Vous sentez bien que je suis partie dans la cause que vous défendez si bien ; je vous dois autant de remerciements que d’éloges ; votre mémoire me paraît convaincant.

Oserais-je vous supplier seulement de ne point faire sans correctif le triste aveu que les comédiens ont été déclarés infâmes à Rome ?

1°. Je ne vois point de loi expresse, permanente, et publiquement reconnue, qui prononce cette infamie. La loi dont les ennemis des arts triomphent est au tit[re] 2 du 2è livre du digeste 1 ; cette loi ne fait point partie des lois romaines, ce n’est qu’un édit du préteur, et cet édit changeait tous les ans ; c’est Ulpien qui cite cet édit, sans dire à quelle occasion il fut promulgué, et dans quelles bornes il était renfermé. Ulpien est, chez les Romains, ce que sont, chez les Welches, Charondas 2, Rebuffi 3, et autres, qu’on n’a jamais pris pour des législateurs.

2° Il n’y a aucun jurisconsulte romain ni aucun auteur qui ait dit qu’on regardât comme infâmes ceux qui déclamèrent des tragédies et qui récitèrent des comédies sur les théâtres construits par les consuls et par les empereurs. Ne doit-on pas interpréter des édits vagues et obscurs par des lois claires et reconnues qui les expliquent ? Si l’édit rapporté au 2è livre du Digeste parle de l’infamie attachée à ceux qui in scenam prodeunt la loi de Valentin 4, qu’on trouve au tit[re] 4 du 1er livre du code, donne le sens précis de la loi du préteur, citée au Digeste. Elle dit : Mimae, et quae ludibrio corporis sui quæstum faciunt 5, etc. Les mimes et celles qui prostituent leur corps, etc.

Or, certainement, les acteurs qui représentaient les pièces de Térence, de Varus, de Sénèque, n’étaient ni des mimes, ni des danseuses de corde qui recevaient des soufflets sur le théâtre pour de l’argent, comme Théodore, femme de Justinien, qui fit ce beau métier avant que d’être impératrice.

3° La loi du même code, au tit[re] de lenonibus (des maquereaux et maquerelles), défend de forcer une femme libre, et même une servante, à monter sur la scène. Mais sur quelle scène ? et puis n’est-il pas également défendu de forcer une femme à se faire religieuse ?

4° L’article mathematicos déclare les mathématiciens infâmes, et les chasse de la ville. Cela prouve-t-il que l’Académie des sciences est déclarée infâme par les lois romaines ? Il est évident que, par le terme mathematicos, les Romains n’entendaient pas nos géomètres, et que, par celui de mimes, ils n’entendaient pas nos acteurs. La chose est si évidente que, par la loi de Théodose, d’Arcadius, et d’Honorius, si quis in publicis porticibus 6, etc. (livre II, tit. 36), il n’est défendu qu’aux pantomimes et aux vils histrions d’afficher leurs images dans les lieux où sont les images des empereurs. La source de la méprise vient donc de ce que nous avons confondu les bateleurs avec ceux qui faisaient profession de l’art, aussi utile qu’honnête, de représenter les tragédies et les comédies.

5° Loin que cet art, si différent de celui des histrions et des mimes, fût mis au rang des choses déshonnêtes, il fut compté presque toujours parmi les cérémonies sacrées. Plutarque est bien éloigné de rapporter l’origine de la tragédie à la fable vulgaire que Thespis, au temps des vendanges, promenait sur un tombereau des ivrognes barbouillés de lie, qui amusaient les paysans par des quolibets. Si les spectacles avaient commencé ainsi dans la savante Grèce, il est indubitable qu’on aurait eu d’abord des farces avant que d’avoir des poèmes tragiques . Ce fut tout le contraire, les premières pièces de théâtre, chez les Grecs, furent des tragédies dans lesquelles on chantait les louanges des dieux ; la moitié de la pièce était composée d’hymnes. Plutarque nous apprend que cette institution vient de Minos : ce fut un législateur, un pontife, un roi qui inventa la tragédie en l’honneur des dieux ; elle fut toujours regardée dans Athènes comme une solennité sainte . L’argent employé à ces cérémonies était aussi sacré que celui des temples. Montesquieu, qui se trompe presque à chaque page, regarde comme une folie, chez les Athéniens, de n’avoir pas détourné, pour la guerre du Péloponnèse, l’argent destiné pour le théâtre 7; mais c’est que ce trésor était consacré aux dieux. On craignait de commettre un sacrilège, et il fallut toute l’éloquence de Démosthène (dans sa seconde Olynthienne) pour éluder une loi qui tenait de si près à la religion. Puisque le théâtre tragique était saint chez les Grecs, on voit bien que la profession d’acteur était honorable. Les auteurs étaient acteurs quand ils en avaient le talent : Eschine, magistrat d’Athènes, fut auteur et acteur ; Paulus fut envoyé en ambassade.

Ce spectacle était si religieux que, dans la première guerre punique, les Romains l’établirent pour conjurer les dieux de faire cesser le fléau de la contagion : jamais il n’y eut à Rome de théâtre qui ne fût consacré aux dieux, et qui ne fût rempli de simulacres.

Il est très faux que la profession d’acteur fut ensuite abandonnée aux seuls esclaves. Il arriva que les Romains, ayant subjugué tant de nations, employèrent les talents de leurs esclaves ; il n’y eut guère chez eux de mathématiciens, de médecins, d’astronomes, de sculpteurs, et de peintres, que des Grecs ou des Africains pris à la guerre. Térence, Épictète, furent esclaves. Mais de ce que les peuples conquis exerçaient leurs talents à Rome, on ne doit pas conclure que les citoyens romains ne pussent signaler les leurs.

Je ne puis comprendre comment M. Huerne 8 a pu dire que  Roscius n’était pas citoyen romain ; que Cicéron, son orateur adverse, employa contre lui les lois de la république, sa naissance, et la vénalité des spectacles, et que Roscius n’eut rien de solide à lui opposer 9 . Comment peut-on dire tant de sottises, en si peu de paroles, dans l’ordre des lois, dans l’ordre de la société, et dans l’ordre de la religion, par le secours d’une littérature agréable et intéressante ? Ce pauvre homme a trop nui à la cause qu’il voulait défendre. Comment a-t-il pu ignorer que Cicéron plaida pour Roscius, au lieu d’être son avocat adverse ? qu’il ne s’agissait point du tout de citoyen romain, mais d’argent ? Cicéron dit que Roscius fut toujours très-libéral et très-généreux ; qu’il avait pu gagner trois millions de sesterces, et qu’il ne l’avait pas voulu. Est-ce là un esclave ? Roscius était un citoyen qui formait une académie d’acteurs. Plusieurs chevaliers romains exercèrent leurs talents sur le théâtre. Nous avons encore le catalogue des prêtres qui desservaient le temple d’Auguste à Lyon ; on y trouve un comédien.

Lorsque le christianisme prit le dessus, on s’éleva contre les théâtres consacrés aux dieux. Saint Grégoire de Nazianze leur opposa des tragédies tirées de l’Ancien et du Nouveau Testament 10. Cette mode barbare passa en Italie ; de là nos mystères ; et ce terme de mystère devint tellement propre aux pièces de théâtre que les premières tragédies profanes que l’on fit dans le jargon welche furent aussi appelées mystères.

Vous verrez d’un coup d’œil, monsieur, ce qu’il faut adopter ou retrancher de tout ce fatras d’érudition comique.

Mais je vous prie de ne point mettre dans le projet de déclaration : Voulons et nous plaît que tout gentilhomme et demoiselle puisse représenter sur le théâtre, etc. . Cette clause choquerait la noblesse du royaume. Il semblerait qu’on inviterait les gentilshommes à être comédiens ; une telle déclaration serait révoltante. Contentons-nous d’indiquer cette permission, sans l’exprimer, d’autant plus qu’il n’est point du tout prouvé que Floridor fût gentilhomme 11, il se vantait de l’être, il ne le prouva jamais ; on le favorisa, on ferma les yeux. Ce qui peut d’ailleurs se dire historiquement ne peut se dire quand on fait parler le roi. Il faut tâcher de rendre l’état de comédien honnête, et non pas noble 12.

Je vous demande pardon, monsieur, de tout ce que je viens de dicter à la hâte ; vous le rectifierez. J’insiste sur l’infamie prononcée contre les mathématiciens ; cet exemple me paraît décisif : nos mathématiciens, nos comédiens, ne sont point ceux qui encoururent quelquefois par les lois romaines une note d’infamie ; certainement cette infamie qu’on objecte n’est qu’une équivoque, une erreur de nom.

Je finis comme j’ai commencé, par vous remercier, et par vous dire combien je vous estime : agréez les respectueux sentiments de votre très humble et très obéissant serviteur .»

1Le Digeste, ou Digesta Justiniani Augusti, c'est-à-dire le code de Justinien .Voir : https://archive.org/details/digestaiustinia00kruegoog/page/n14/mode/2up

et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Justinien_Ier

2 Louis Le Caron a publié sous le nom de Loys Charondas Le Caron, les Pandectes, ou Digeste du droit français, 1596, ainsi que de nombreux autres ouvrages de droit ; voir : https://data.bnf.fr/fr/12510806/louis_le_caron/

3 Pierre Rebuffi est un compilateur et commentateur des lois et de la jurisprudence . Son œuvre la plus connue est Ordonnances, lois, statuts et édits royaux de tous les rois de France, 1547 ; voir : https://data.bnf.fr/fr/13006261/pierre_rebuffi/

4 Ou plutôt de Valentinien . Qui in scaenam prodeunt = ceux qui montent en scène .

5Les mimes et celles qui, par dérision, font métier de leur corps : V* traduit lui-même ce membre de phrase mais en omettant le mot ludibtis.

6 Si quelqu'un dans les portiques publics , etc. : premiers mots du décret .

7 Dans De l'esprit des lois, III, 3 . L'objection de V* à Montesquieu est valable . Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62730454/f231.item

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25/05/2021 | Lien permanent

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