Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

C'est à ceux qui se portent bien à venir chez les malades

... Mon cher Voltaire, ton bon coeur te perdra , connais-tu le virus du Covid 19-version omicron ? Jamais si petite lettre, zéro minuscule, n'a fait sur nous le dessin d'un centre de cible . Seul blindage salvateur : le vaccin . Par sécurité, ajoutons le masque et évitons la foule .

Geluck, Gallo, Gorce... Les conseils des humoristes pour se soigner par  l'humour

Les pères Noël de supermarchés sont-ils masqués sous leurs barbes ? Sinon, touchent-ils une prime de risque ? Si malades, maladie professionnelle ?

 

 

« A Théodore Tronchin

16è septembre 1766 1

Je ne peux rien écrire de ma main à mon Esculape, c'est un tribut que je paie régulièrement au changement des saisons . Je m'étais mis cependant à un excellent régime . Je n'ai pu résister à l'envie de voir jouer Henri IV sur mon petit théâtre de Ferney ; il faut pardonner à l'auteur de La Henriade l'insolence qu'il a eue de faire venir toute la troupe de Genève chez lui . J'ai pleuré une partie de la pièce et j'ai ri l'autre . Si on la jouait à Paris je crois qu'elle serait jouée un an de suite .

Ne nous hâtons pas, je vous en conjure, de condamner M. de Beaumont . Le fond de l'affaire est que le bien revendiqué par Mme de Beaumont avait été vendu à trop vil prix . Elle est héritière naturelle . La lésion est manifeste . Voilà pour les procédés . À l'égard des procédures, je pense comme vous qu'il est fort triste d'être dans la dure nécessité de réclamer une loi cruelle contre laquelle on s'était élevé dans d'autres affaires . Mais il n'y a pas, je crois, d'autre moyen de revenir contre la lésion dont on se plaint . C'est une affaire fort désagréable, et qu'on devrait, ce me semble accommoder .

Ne confondez point , je vous en supplie, vos parents avec d'autres personnes de Genève . Soyez très sûr que je serai attaché du fond de mon cœur à toute votre famille jusqu'au dernier moment de ma vie . Mais il faut se voir et se parler pour s'entendre , et vous savez qu'il y a plus de deux ans que je ne peux sortir . Je vous répète encore que je ne me mêlai un petit moment des affaires de votre ville que sur la prière de plusieurs personnes des deux partis . Je me débarrassai de tous dès que M. Hennin arriva . M. le duc de Choiseul, malgré la multitude de ses affaires, me rend plus de justice que vous . Je reçois une lettre de lui en même temps que je reçois la vôtre 2, et j'aurais souhaité que vous n'eussiez parlé avec autant de confiance et de bonté que lui . Vous affligez encore une fois mon amitié par le soupçon que vous semblez avoir que je ne préfère pas l'intérêt de votre famille à tout autre intérêt . Si quelqu'un avait à se plaindre, ce serait moi, peut-être . C'est à ceux qui se portent bien à venir chez les malades . M. l'ambassadeur me fait l’honneur d'y venir assez souvent pour qu'un de vos parents daignât l'accompagner . Je n'en dirais pas autant de quelques perruques . MM. Tronchin ont toujours été les seuls avec qui j'aie été lié . Au reste, soyez très sûr qu'ils ne peuvent être sacrifiés à personne, et que les partisans les plus outrés du peuple ne leur ôteront jamais rien de leur considération . Je sais bien que la concorde ne sera jamais dans Genève, mais les lois en tiendront lieu et c'est tout ce qu’on peut attendre .

Pour Jean-Jacques, je tiens toujours qu'il faut le montrer à Bartholomey fair pour un scheling . Cela devient trop comique, et la folie est trop forte pour qu'on s'en fâche . Il est très physiquement mentis non compos 3, et je parie ce qu'on voudra qu'il sera enfermé à Bedlam avant deux ans .

Je ne saurais cesser de dicter sans vous demander si vous êtes instruit qu'on a flétri d'une voix unanime à la cour des aides le nommé Broutet, l'un des juges du chevalier de La Barre . Ce scélérat s'étant porté pour juge n'était pas même gradué . Il s'était acharné contre le chevalier, et il avait animé tous les autres juges . Le voilà désormais incapable d’exercer aucune charge de judicature .

Je finis de peur de trop parler, les malades doivent ménager leur poitrine . Mon cœur vous dit tout ce que le secrétaire n'écrit point . »

1 Edition André Delattre « Lettres à Théodore Tronchin par Voltaire », Mercure de France, 1er octobre 1950 . La lettre, comme celle du 3 septembre 1766 a été très mal éditée par Tronchin B.

Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9odore_Tronchin

et : https://archives.bge-geneve.ch/archive/fonds/tronchin_141_397

2 Cette lettre n'est pas connue ; pour celle de Choiseul, voir lettre du 14 septembre 1766 à Mme de Saint-Julien : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/12/17/soyez-sure-madame-que-vous-n-etes-pas-faite-seulement-pour-p-6355537.html

3 Non maître de son esprit ; réminiscence de Quinte-Curce .

Lire la suite

23/12/2021 | Lien permanent

Si l'on peut fermer les écoles de théologie, et établir à leur place des écoles de morale, tout ira bien.

Si l'on pouvait cesser de gonfler la tête du vulgum pecus de croyances religieuses aberrantes et surtout de pratiques dogmatiques invraisemblables et ridicules, pour simplement éduquer à la morale, ce serait un progrès supérieur à celui d'être capable d'aller sur Mars .

Toujours est-il que l'on profite encore de cette période du ramadan pour trucider l'ennemi sunnite ou chiite pour la plus grande gloire d'Allah et son mal inspiré prophète (je dis mal inspiré, mais je ne parle pas de son sens des affaires et de son intérêt personnel ). Si tant est que l'on puisse croire aux dires de cet auto-proclamé porte-parole de Dieu ...

De nos jours, si vous flanquez un coup de pied dans un gros tas de billets de banque, pour un trader il en sort dix prophètes-évangélistes de tout crin-gourous (coucou!).

L'amoralité faisant très bon ménage avec la religiosité de façade .

 


 

 

 

 

« A Jacob Vernes


19è auguste 1768


Je vous renvoie, Monsieur le philosophe prêtre, les Remontrances du Gévaudan [i] que vous avez eu la bonté de me prêter ; votre ami Rustan est un peu brutal, c'est dommage, car il ne manque pas d'esprit. Il est vrai qu'il ne sait ni ce qu'il dit ni ce qu'il veut. L'âge le murira peut-être ; mais surtout il faut qu'il prenne des leçons de politesse soit de Jean-Jacques, soit de sa paroisse de Londres [ii].


Je n'ai point la Profession de foi dont vous parlez [iii] ; je me souviens de l'avoir vue. Je crois que vous la trouverez chez Chirol où je l'ai fait acheter.


Je crois avec vous que le temps des usurpations papales est passé, c'est-à-dire qu'on n'en fera pas de nouvelles ; mais une partie des anciennes durera encore longtemps. Le christianisme, dites-vous, est aboli chez tous les honnêtes gens ; oui, le christianisme de Constantin, le christianisme des Pères ; mais le christianisme de Jésus subsistera. Vous avez grande raison d'appeler Jésus le premier des théistes, car il ne connaissait qu'un seul Dieu, et comme vous avez fort bien dit, si on lui impute des sottises, ce n'est ni sa faute ni la vôtre.


Je vous remercie des sermons de Samuel Bourn sur la religion naturelle [iv]. Il n'y a pas un mot dans ces quatre volumes du christianisme d'aujourd'hui. La religion se décrasse tous les jours, le dogme est sifflé, et la vérité reste. Il s'est fait depuis quinze ans une étrange révolution dans l'esprit humain. Si l'on peut fermer les écoles de théologie, et établir à leur place des écoles de morale, tout ira bien.


Soyez toujours libre et heureux. »




 


iLes Remontrances du corps des pasteurs du Gévaudan à Antoine-Jean Rustan, 1768, sont une réponse de V* aux Lettres sur l'état présent du christianisme et la conduite des incrédules, de Roustan, 1768.

http://books.google.be/books?id=oFcVAAAAQAAJ&pg=PA112...

ii Roustan est ministre de l'Eglise suisse à Londres.

iii La Profession de foi des théistes, de V*.

iv A series of discourses , 1760, 1768.

 

Lire la suite

19/08/2010 | Lien permanent

Il faut que la guerre soit par elle-même quelque chose de bien vilain

Pendant un instant, « un instant seulement » comme disait le Grand Jacques, j’ai eu la sensation de lire du Proust (par sa longueur) en parcourant cette phrase sur la guerre avec une vision « philosophique ». A cette différence près, qu’en bon béotien qui persiste et signe, Proust m’a laissé froid (comme une vieille madeleine rassie dans un thé de la veille) et m’est tombé des mains alors que Volti* m’emballe !

« Il faut que la guerre soit par elle-même quelque chose de bien vilain puisque les détails en sont si ennuyeux » : doux euphémisme !! La presse d’aujourd’hui, sans doute en réponse au public, ou forçant le public (selon mon avis !), nous inonde inutilement de ces « détails… si ennuyeux ». Inutilement, oui, cent fois oui, mille fois oui !! L’ONU, « le machin » du Grand Charles, n’est pas en état de s’interposer valablement entre les belligérants, juste capable de compter les morts et les estropiés. Juste capable d’héberger certains représentants « faux-culs » défenseurs de leurs chefs d’états qui les ont nommés ; quelle indépendance d’esprit peut-on en attendre ? bien sûr, aucune ! Quel pas vers la paix ? Aucun ! « tout le monde criant la paix, la paix, et faisant la guerre à outrance » : toujours vrai ! Bla-bla et Cie !

 le machin recherché.jpg

Je passe la parole à un roi du bon sens.

 

 

 

 

 

 

 

« A Frédéric II, roi de Prusse

 

 

                Sire,

 

                Eh bien vous aurez Sémiramis [pièce de théâtre « ordonnée » pour les relevailles de la dauphine qui mourut le 21 août 1746 le jour où la pièce fût achevée]. Elle n’est pas à l’eau rose, c’est ce qui fait que je ne la donne pas à notre peuple de sybarites, mais à un roi qui pense comme on pensait en France du temps du grand Corneille et du Grand Condé, et qui veut qu’une tragédie soit tragique et une comédie comique.

 

                Dieu me préserve, Sire, de faire imprimer l’histoire de la guerre de 1741. Ce sont de ces fruits que le temps seul peut murir ; je n’ai fait assurément ni un panégyrique ni  une satire. Mais plus j’aime la vérité, et moins je dois la prodiguer. J’ai travaillé sur les mémoires et sur les lettres des généraux et des ministres .Ce sont des matériaux pour la postérité. Car sur quels fondements bâtirait-on l’histoire, si les contemporains ne laissaient pas de quoi élever l’édifice ? César écrivit ses Commentaires, et vous écrivez les vôtres [Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps], mais où sont les acteurs qui puissent ainsi rendre compte du grand rôle qu’ils ont joué ? Le maréchal de Broglie était-il homme à faire des Commentaires ? Au reste , Sire, je suis très loin d’entrer dans cet horrible et ennuyeux détail de journaux de siège, de marches, de contremarches, de tranchées relevées, et de tout ce qui fait l’entretien d’un vieux major et d’un lieutenant-colonel retiré dans sa province. Il faut que la guerre soit par elle-même quelque chose de bien vilain puisque les détails en sont si ennuyeux. J’ai tâché de considérer cette folie humaine un peu en philosophe ; j’ai représenté l’Espagne et l’Angleterre dépensant cent millions à se faire la guerre pour quatre-vingt mille livres portées en compte, les nations détruisant réciproquement le commerce pour lequel elles combattent, la guerre au sujet de la pragmatique devenue comme une maladie qui change trois ou quatre fois de caractère [ la Pragmatique Sanction signée en 1713 pour régler la succession d’Autriche ], et qui de fièvre devient paralysie, et de paralysie convulsion, Rome qui donne sa bénédiction et qui ouvre ses portes aux têtes de deux armées ennemies en un même jour [ en novembre 1744, entrée des Napolitains par une porte et sortie des Autrichiens par une autre ; « Quand le bonhomme de saint Père / Donne sa bénédiction / A plus d’une armée étrangère … »], un chaos d’intérêts divers qui se croisent à tout moment, ce qui était vrai au printemps devenu faux en automne, tout le monde criant la paix, la paix, et faisant la guerre à outrance, enfin  tous les fléaux qui fondent sur cette pauvre race humaine ; au milieu de tout cela un prince philosophe qui prend toujours bien son temps pour donner des batailles et des opéras, qui sait faire la guerre, la paix, et des vers et de la musique, qui réforme les abus de la justice, et qui est le plus bel esprit de l’Europe . Voilà à quoi je m’amuse, Sire, quand je ne meurs point, mais je me meurs fort souvent et je souffre beaucoup plus que ceux qui dans cette funeste guerre ont attrapé de grands coups de fusil.

 

                J’ai revu M. le duc de Richelieu qui est au désespoir de n’avoir pu faire sa cour [lors de sa mission à Dresde en décembre 1746] au grand homme de nos jours. Il ne s’en console point. Et moi je ne demande à la nature un ou deux mois de santé que pour voir encore une fois ce grand homme avant d’aller dans le pays où Achille et Thersite, Corneille et Danchet sont égaux ; je serai attaché à Votre Majesté jusqu’à ce beau moment où l’on va savoir à point nommé ce que c’est que l’âme, l’infini, la matière , et l’essence des choses . Et tant que je vivrai, j’admirerai et j’aimerai en vous l’honneur et l’exemple de cette pauvre espèce humaine.

 

                Voltaire

                A Paris, ce 9 février 1747. »

 

Lire la suite

11/02/2009 | Lien permanent

Je le répète, monsieur, si on avait fait cet outrage à la fille d'un procureur, l'auteur de l'insulte serait puni

...

 

« A Ponce-Denis Ecouchard Le Brun

Aux Délices , 26 mars 1761

Je confie, monsieur, à votre probité, à votre zèle et à votre prudence qu'un gentilhomme d'auprès de Gex, nommé M. de Crassy, capitaine au régiment de Deux-ponts, nous a demandé Mlle Corneille en mariage pour un gentilhomme de ses parents .

Celui qui avait cette alliance en vue demandait une fille noble, bien élevée, et dont les mœurs convinssent à la simplicité d'un pays qui tient beaucoup à la Suisse . Le hasard a fait que la feuille de Fréron, dans laquelle Mlle Corneille est déshonorée, a été lue par ce gentilhomme . Il y a lu que le père de la demoiselle est une espèce de petit commis de la poste à deux sous, à cinquante livres par mois de gages, et que sa fille a quitté son couvent pour venir recevoir chez moi son éducation d'un bateleur de la foire . Cette insulte a fait beaucoup de bruit à Genève où les feuilles du nommé Fréron sont lues . On a les yeux sur notre maison . Le scandale a circulé dans toute la province . Le gentilhomme qui se proposait pour Mlle Corneille a été très refroidi, et il est vraisemblable que cet établissement n'aura pas lieu . Enfin Mlle Corneille a été instruite des lignes diffamatoires de Fréron . Jugez de son état et de son affliction . Elle a pris le parti d'envoyer un mémoire de dix ou douze lignes à M. le comte de Saint-Florentin, à M. Séguier, avocat général, et à monsieur le lieutenant de police . Nous lui avons conseillé cette démarche . Ce mémoire est aussi simple que court ; et pour peu qu'il y ait encore de justice et d'honneur chez les hommes, la plainte de Mlle Corneille doit faire une grande impression . Nous savons bien que M. Séguier ne se mêlera pas directement de cette affaire, mais étant informé qu’il est personnellement outré contre ce monstre de Fréron , nous avons cru qu'il était bon de lui adresser un mémoire . Nous pensons, Mme Denis et moi, que si vous voulez bien, monsieur, appuyer les justes plaintes d'une demoiselle qui porte le nom de Corneille , qui vous a déjà tant d'obligations, et qui se trouve publiquement déshonorée par un scélérat, enfin qui est sur le point de perdre un établissent avantageux, vous réussirez infailliblement en présentant à M. de Saint-Florentin et à M. de Sartine , déjà instruits de l'atrocité du nommé Fréron, l'impudence avec laquelle il diffame en six lignes une famille entière, le tort irréparable qu'il fait à une demoiselle d'un nom respectable ; vous engagerez aisément M. Séguier a protéger cette victime que Fréron immole à sa méchanceté . Je le répète, monsieur, si on avait fait cet outrage à la fille d'un procureur, l'auteur de l'insulte serait puni . Vous communiquerez sans doute ma lettre à M. du Tillet, qui doit ressentir plus vivement que personne l'affront et le tort faits à Mlle Corneille . Il me semble que vous pouvez parler fortement à M. de Saint-Florentin et à M. de Sartine . J'ose même présumer que Mgr le prince de Conti accordera sa protection à la vertu et à la noblesse insultées . Je ne sais par quelle méprise on a pu confondre la diffamation de cette demoiselle avec des critiques de vers . Il s'agit ici de l'honneur . Nous attendons tout de vous, et de l'auguste maison où vous êtes .

Votre très humble et très obéissant serviteur

V. »

 

Lire la suite

14/03/2016 | Lien permanent

il me semble que les vices de son âme ainsi que que de ses écrits ne sont venus que d'un fond d'orgueil ridicule . L'env

... M. Zemmour , Voltaire vous a  démasqué, et je suis d'accord avec lui  !

 

 

« A Théodore Tronchin

3è septembre 1766 1

Votre dernière lettre, mon cher Esculape, m'a sensiblement affligé . Vous n'êtes point fait pour donner des maladies c'est à vous de les guérir . Mes neveux du Grand Conseil et du Parlement m'ont instruit de tout . Je suis bien persuadé que loin de parler à d'autres du faux bruit qui a couru, vous l’avez détruit dès sa naissance . Je suis très sûr aussi que votre cœur a été aussi sensible que le mien à l'abominable aventure qui a été la cause de tous ces vains discours répandus dans le public .

Je vous répète encore qu'il y plus d'un an que je n'ai écrit à M. le duc de La Vallière .

Vous me faites une peine bien cruelle en prétendant que je vous ai dit que je prenais le parti du peuple contre le conseil des Vingt-Cinq . Je vous ai dit que j'étais impartial sur le fond des demandes, comme je dois l'être , mais que je ne l'étais pas sur l'amitié que j'avais vouée à ceux des Vingt-Cinq qui sont liés avec vous . Je vous ai dit que je trouvais deux des demandes du peuple très justes, et les autres insoutenables . C'est sur ce plan que j'avais travaillé, quand après la mort de M. de Montpéroux on me pria de concilier les esprits . J'envoyai un mémoire que je fis consulter par des avocats de Paris . Je remis ce mémoire à monsieur l'ambassadeur quand il arriva . Le premier point a déjà été réglé tel que les avocats l'avaient décidé . Je ne me suis mêlé depuis ce temps-là en aucune manière du procès des représentants avec le Petit Conseil ; et je me suis contenté de faire des vœux pour la paix .

Lorsqu'une vingtaine de natifs vinrent me prier de vouloir bien rédiger un compliment et un mémoire qu'ils voulaient présenter aux ambassadeurs, j’eus cette condescendance ; ils demandaient la chose du monde la plus équitable , c'était de ne payer leurs maîtrises que quand ils étaient passés maîtres . Les bourgeois qui s'y opposaient me paraissaient avoir tort , et les natifs avoir très grande raison . Aussi ont-ils ce qu'ils demandaient . M. le chevalier de Beauteville est l'équité même ; quand les natifs ont demandé des choses moins justes, je ne les ai pas écoutés . Je les ai renvoyés aux médiateurs, sans vouloir lire leurs mémoires, et je ne me suis mêlé absolument de rien depuis le premier mémoire des natifs . M. le duc de Choiseul et M . le duc de Praslin sont très contents de ma conduite, et m'honorent d'une bonté inaltérable, dont ils daignent me donner des marques tous les jours . M. le chevalier de Beauteville , M. de Taulès et M. Hennin me rendent la même justice . Ils me font l'honneur de venir quelquefois dans ma retraite dont je ne suis pas sorti depuis plus de deux ans, et dont probablement je ne sortirai que pour aller au cimetière de l'église que j'ai bâtie . Je tâcherai de faire du bien jusqu'à ce moment là . Ma consolation est la sûreté où je suis que votre âme bienfaisante secondera mes faibles efforts en faveur de la famille Sirven beaucoup plus infortunée que la famille Calas puisqu'elle n'a jusqu’ici d'autre appui que moi, et que les Calas ont été favorisés par toute la France . Le factum de M. de Beaumont en faveur des Sirven me paraît un chef-d’œuvre, je me flatte que vous lui donnerez votre suffrage et celui de vos amis . Vous êtes compté parmi ceux qui peuvent diriger l'esprit du public dans des affaires qui intéressent l'humanité . Votre voix peut beaucoup, et vous ne nous la refuserez pas .

Quant au malheureux Rousseau, je ne le crois pas au fond un scélérat ; je pense que vous allez un peu trop loin ; je peux me tromper , mais il me semble que les vices de son âme ainsi que que de ses écrits ne sont venus que d'un fond d'orgueil ridicule . L'envie de jouer un rôle a corrompu son cœur ; je le tiens à présent un des êtres les plus infortunés qui respirent . Vous êtes un des plus heureux et vous méritez de l'être . Vous savez à quel point je me suis toujours intéressé à votre félicité et à votre gloire . Ma famille qui est rassemblée à Ferney s'unit avec moi dans le mêmes sentiments, et nous vous embrassons tous avec l’amitié la plus sincère et la plus inaltérable .

V. »

1 L'édition Tronchin B. donne une version consistant en quatre fragments datés des 3 et 16 septembre 1766 ; on a ici la version André Delattre : « Voltaire Correspondance avec les Tronchin » , Mercure de France, 1930, CCCX, 201-205

Lire la suite

03/12/2021 | Lien permanent

vous pourriez me permettre d’associer à cet ouvrage quelque savant laborieux dont je reverrai la besogne . Vous sentez b

... C'est bien connu, depuis toujours, "point d'argent, point de Suisse" !

 

 

« A César-Gabriel de Choiseul, duc de Praslin

Aux Délices 21è mai 1763

Monseigneur,

Mes anges m’ayant envoyé de votre part la copie de votre lettre circulaire, et m’ayant appris que vous protégez la Gazette littéraire, que même vous ne seriez pas fâché que je fournisse quelques matériaux à cet ouvrage, j’ai senti sur-le-champ mon zèle se ranimer plus que mes forces. J’ai broché un petit essai sur les productions qui sont parvenues à ma connaissance ce mois-ci . Je l’ai envoyé à M. de Montpéroux, à qui j’ai voulu laisser une occasion de vous servir, loin de la lui disputer . Je connais trop l’envie qu’il a de vous plaire pour vouloir être dans cette occasion autre chose que son secrétaire.

Je me trouve heureusement plus à portée que personne de contribuer à l’ouvrage que vous favorisez, et qui peut être très utile . J’ai des correspondances en Italie, en Angleterre, en Allemagne, et en Hollande. Si vous l’ordonnez, je ferai venir les livres nouveaux imprimés dans tous ces pays ; j’en ferai et enverrai des extraits très fidèles, que vous ferez rectifier à Paris, et auxquels les auteurs que vous employez à Paris donneront le tour et le ton convenables.

Si ma santé ne me permet pas d’examiner tous les livres et de dicter tous les extraits, vous pourriez me permettre d’associer à cet ouvrage quelque savant laborieux dont je reverrai la besogne . Vous sentez bien qu’il faudrait payer ce savant, car il serait Suisse.

J’ajoute encore qu’il faudrait pour être servi promptement, et pour que l’ouvrage ne fût point interrompu, faire venir les livres par la poste : en ce cas, je crois qu’on pourrait écrire de votre part aux directeurs des postes de Strasbourg, de Lyon et de Genève, qui me feraient tenir les paquets. En un mot, je suis à vos ordres . Je serai enchanté d’employer les derniers jours de ma vie, un peu languissante, à vous prouver mon tendre attachement et mon respect.

Volt. »

Lire la suite

20/05/2018 | Lien permanent

Vous êtes bien peu curieux de ne pas demander Les Droits des hommes et les Usurpations des papes

... Ouvrage tout à fait recommandable .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

31 auguste 1768

Mon cher ange, j’ai montré votre lettre du 23 août ou d’auguste, au possédé 1. Il vous prie encore de lui renvoyer sa facétie, et donne sa parole de démoniaque qu’il vous renverra la bonne copie au même instant qu’il recevra la mauvaise. Son diable l’a fait raboter sans relâche depuis qu’il fit partir son croquis ; mais il jure, comme un possédé qu’il est, qu’il ne fera jamais paraître l’empereur deux fois ; qu’il s’en donnera bien de garde ; que cela gâterait tout ; que l’empereur n’est en aucune manière deus in machina, puisqu’il est annoncé dès la première scène du premier acte, et qu’il est attendu pendant toute la pièce de scène en scène, comme juge du différend entre le commandant du château et les moines de l’abbaye. S’il paraissait deux fois, la première serait non-seulement inutile, mais rendrait la seconde froide et impraticable. C’est uniquement parce qu’on ne connaît point le caractère de l’empereur qu’il doit faire un très grand effet lorsqu’il vient porter à la fin un jugement tel que n’en a jamais porté Salomon. Le bon de l’affaire, c’est que c’est un jardinier qui fait tout ; et cela prouve évidemment qu’il faut cultiver son jardin, comme dit Candide.

Comme cette facétie ne ressemble à rien, Dieu merci, mon possédé croit qu’il faut de la naïveté, que vous appelez familiarité ; et il croit que cette naïveté est quelquefois horriblement tragique.

Ne trouvez-vous pas qu’il y a dans cette pièce du remue-ménage comme dans l’Écossaise. Je suis persuadé que cela vous aura amusés, vous et Mme d’Argental, pendant une heure. Il est doux de donner du plaisir, à cent lieues de chez soi, à ceux à qui on est attaché.

Je ne répondrais pas que la police ne fît quelques petites allusions qui pourraient empêcher la pièce d’être jouée ; mais, après tout, que pourra-t-on soupçonner ? que l’auteur a joué l’Inquisition sous le nom des prêtres de Pluton ? En ce cas, c’est rendre service au genre humain ; c’est faire un compliment au roi d’Espagne, et surtout au comte d’Aranda ; c’est l’histoire du jour avec toute la bienséance imaginable, et tout le respect possible pour la religion.

Voyez, mon divin ange, ce que votre amitié prudente et active peut faire pour ces pauvres Guèbres ; mais je n’ai point abandonné les Scythes : ils ne sont pas si piquants que les Guèbres, d’accord ; mais, de par tous les diables, ils valent leur prix. La loi porte qu’ils soient rejoués, puisque les histrions firent beaucoup d’argent à la dernière représentation. Les comédiens sont bien insolents et bien mauvais, je l’avoue ; mais il faut obéir à la loi. J’ignore quel est le premier gentilhomme de la loi cette année 2 ; mais, en un mot, j’aime les Scythes. J’ai envie de finir par les Corses ; je suis très fâché qu’on en ait tué cent cinquante d’entrée de jeu ; mais M. de Chauvelin m’a promis que cela n’arriverait plus 3.

Vous êtes bien peu curieux de ne pas demander Les Droits des hommes et les Usurpations des papes ; c’est, dit-on, un ouvrage traduit de l’italien 4, dont un envoyé de Parme doit être très friand.

Une chose dont je suis bien plus friand, mon cher ange, c’est de vous embrasser avant que je meure. Je suis, à la vérité, un peu sourd et aveugle ; mais cela n’y fait rien. Je recommence à voir et à entendre au printemps ; et j’ai grande envie, si je suis en vie au mois de mai, de venir présenter un bouquet à Mme d’Argental. Je devais aller cet automne chez l’électeur palatin ; mais je me suis trouvé trop faible pour le voyage. Je me sentirai bien plus fort quand il s’agira de venir vous voir. Il est vrai que je n’y voudrais aucune cérémonie. Nous en raisonnerons quand nous aurons fait les affaires des Scythes et des Guèbres. Vous êtes charmant de désirer de me revoir ; j’en suis pénétré, et mon culte de dulie en augmente. Je trouve plaisant qu’on ait imaginé que j’irais voir ma Catau, moi âgé de septante-quatre  ! Non, je ne veux voir que vous.

V. »

2 C’est depuis 1741 André-Hercule de Rosset , duc de Fleury .

3 Bernard-Louis Chauvelin est arrivé le 25 août en Corse pour prendre le commandement des troupes et achever la pacification de l'île . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Corse

 

Lire la suite

19/03/2024 | Lien permanent

il n’a rien fait, rien écrit, que muni de la permission expresse de son héros, et de son ordre positif, qu’il garde soig

... Edouard Philippe ? Le saura-t-on un jour ? Qui peut être le "héros" de ce barbu qui rêve d'être le premier dans sa ville  plutôt que second dans l'Etat ?

 

 

« A Louis-François-Armand du Plesssis, duc de Richelieu

19è décembre 1764 à Ferney

Remontre très humblement François de V. l’aveugle à son héros :

1° Que son héros n’a pas autant de mémoire que d’imagination et de grâces ; qu’il daigna mander le 1er de septembre à son vieux courtisan : « Vous êtes et serez toujours le maître des rôles de toutes vos pièces ; c’est un droit qui vous serait moins disputé qu’à personne, et une loi où l’on obéira en vous battant des mains ; je le veux absolument. »

Voilà les propres paroles de monseigneur le maréchal.

2° Que ces propres paroles étaient en réponse d’un placet présenté par l’aveugle, dans lequel ledit aveugle avait supplié son héros de lui permettre de faire une nouvelle distribution de ces rôles .

3° Que ledit suppliant a été, depuis environ quarante ans en çà, berné par son dit héros, lequel lui a donné force ridicules le plus gaiement du monde .

4° Que ledit pauvre diable ne mérite point du tout le ridicule d’être accusé d’avoir entrepris quelque chose de sa tête dans cette importante affaire, et qu’il n’a rien fait, rien écrit, que muni de la permission expresse de son héros, et de son ordre positif, qu’il garde soigneusement .

5° Qu’il écrivit en conséquence au grasseyeur  Grandval, qu’il instruisit ledit grasseyeur de la permission de monseigneur le maréchal, et que, partant, il est clair que le berné n’a manqué à aucun de ses devoirs envers son héros le berneur .

6° Qu’il n’a consulté en aucune manière Parme et Plaisance 1 sur les acteurs et actrices du tripot de Paris ; mais que, sur le rapport de plusieurs farceurs, grands connaisseurs, barbouilleurs de papier, et autres grands personnages, il a distribué ses rôles, selon toute justice, selon le bon plaisir de monseigneur le maréchal et des autres gentilshommes de la chambre ; ce qu’il a expressément recommandé dans toutes ses lettres aux connaisseurs représentant le parterre .

7° Qu’il n’a envoyé au grasseyeur ses dernières dispositions, sous une enveloppe parmesane, que pour éviter les frais de la poste au grasseyeur, et pour faire parvenir la lettre plus sûrement, une première ayant été perdue.

Ces sept raisons péremptoires étant clairement exposées, le suppliant espère en la miséricorde de son héros et en ses plaisanteries.

Il supplie son héros d’examiner la chose un moment de sang-froid, sans humeur et sans bons mots, et de lui rendre justice.

Il y a plus de quinze jours que j’ai écrit pour faire venir quatre exemplaires de ce cher Julien l’apostat 2, pour vous en faire parvenir un par la voie que vous m’avez ordonnée.

Vous croyez bien que j’ai reçu de mon mieux l’ambassadeur de Mme d’Egmont. Je vois que votre voyage dans mon pays des neiges est assez éloigné encore ; mais si jamais madame d’Egmont veut passer le mont Cenis et aller à Naples, je me ferai prêtre pour l’accompagner en qualité de son aumônier Poussatin 3.

Je suis honteux de mourir sans avoir vu le tombeau de Virgile, la ville souterraine, Saint-Pierre de Rome et les facéties papales.

Je me mets aux pieds de mon héros avec une extrême colère, un profond respect, et un attachement sans bornes.

V. »

1 Allusion à d'Argental, représentant de Parme à Paris .

2 La Défense du paganisme, traduit par d’Argens : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k61992d.texteImage

Lire la suite

22/02/2020 | Lien permanent

Il serait bien odieux que pour seule récompense du bien que j'ai fait, et d'un bien dont il n'y a point d'exemple, je ne

...Et oui, détestable ersatz de président, Sarkozy tu oserais/oses te présenter en victime ; passe ton chemin et va escroquer qui le veut bien, mais fiche la paix à la France .

 difficultés.png

 

 

 

 

« A Jean-Charles Girod 1

[vers le 15 novembre 1759]

Vous auriez bien dû, monsieur, me parler et m'instruire avant de m'exposer à des discussions avec M. De Brosses .

1° Je vous donne avis que j'en suis avec lui en marché de la vente totale de la terre, marché que j'aurais fait d'abord si j'avais pu prévenir les bontés du roi 2. Ainsi je composerai une terre de Ferney et de Tournay, dans laquelle les domaines intermédiaires seront incorporés .

2° Vous avez dû voir les bonifications immenses que j'ai faites à la terre de Tournay . Ce que j’ai entrepris dans la lisière de la forêt est peut-être la meilleure amélioration . Car , excepté la petite avance du bois qui intercepte les prés, le reste de cette lisière est très clairsemé ; il n'y a presque que des pins ; ils ôtent le soleil à un grand champ qui n'a jamais rien produit . Je couvre ce champ de la terre des fossés que je tire dans la forêt ; je l'augmente du terrain qu'occupaient ces pins , et j'en fais une pièce d’un excellent rapport .

Quant à cette petite langue de bois qui intercepte les prairies, je sais que le projet a toujours été de la couper pour bonifier et agrandir ces prés . J'ai fait en conséquence creuser un profond fossé pour sécher ces bas prés qui, avec le temps et par la négligence des fermiers, sont devenus des marais ; en un mot, j'ai fait des dépenses immenses, uniquement pour le bien de la terre .

J'y ai mis en réparations plus de quinze mille livres en six mois, sans compter les frais de l'exploitation . Il serait bien odieux que pour seule récompense du bien que j'ai fait, et d'un bien dont il n'y a point d'exemple, je ne recueillisse que des plaintes et des difficultés .

J'attends , pour terminer toutes ces tracasseries indignes de M. De Brosses et de moi, une procuration de sa part pour la vente absolue de Tournay que je possède à vie . Ce sera probablement à vous qu'il adressera cette procuration .

Mais en attendant, monsieur, je vous prie de me laisser jouir en paix d'une terre qui m'appartient . Je vous prie d'envoyer ma lettre à M. De Brosses .

Votre très humble et très obéissant serviteur .

V. »

2A savoir l'exonération de toutes charges fiscales pour Ferney .

 

 

Lire la suite

26/11/2014 | Lien permanent

Je fais bien pis ; je crois que j’ai raison

... Est-il pire défaut ?

https://www.youtube.com/watch?v=GCTuXHW5vl4

Descartes au lycée : Complots et manipulations

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

1er juillet [1766] 1

Ignis ubique latet, naturam amplectitur omnem,

Cuncta parit, renovat, dividit, unit, alit.2

 

Oui, mon cher philosophe, ces deux, mauvais vers sont de moi. Je suis comme l’évêque de Noyon 3, qui disait dans un de ses sermons : « Mes frères, je n’ai pris aucune des vérités que je viens de vous dire ni dans l’Écriture, ni dans les pères ; tout cela part de la tête de votre évêque. »

Je fais bien pis ; je crois que j’ai raison, et que le feu est précisément tel que je le dis dans ces deux vers. Votre Académie n’approuva pas mon idée, mais je ne m’en soucie guère. Elle était toute cartésienne alors, et on y citait même les petits globules de Malebranche : cela était fort douloureux. Je vous recommande, mon cher frère et mon maître, les Vernet dans l’occasion.

Vous m’enchantez de me dire que Mlle Clairon a rendu le pain bénit ; on aurait bien dû la claquer à Saint-Sulpice. Je m’y intéresse d’autant plus, moi qui vous parle, que je rends le pain bénit tous les ans avec une magnificence de village que peut-être le marquis Simon Lefranc n’a pas surpassée. Je suis toujours fâché que le puissant auteur de la belle Préface 4 ait pris martre pour renard, en citant saint Jean 5. Les pédants tireront avantage de cette méprise, comme Cyrille se prévalut de quelques balourdises de l’empereur Julien ; et de là ils concluront que les philosophes ont toujours tort.

Nous aurons incessamment dans notre ermitage un prince 6 qui vaut un peu mieux que le protecteur 7 de Catherin Fréron.

Êtes-vous homme à vous informer de ce jeune fou nommé M. de La Barre, et de son camarade, qu’on a si doucement condamnés à perdre le poing, la langue, et la vie, pour avoir imité Polyeucte et Néarque ?8 On me mande qu’ils ont dit, à leur interrogatoire, qu’ils avaient été induits à l’acte de folie qu’ils ont commis par la lecture des livres des encyclopédistes.

J’ai bien de la peine à le croire ; les fous ne lisent point, et assurément nul philosophe ne leur aurait conseillé des profanations. La chose est importante. Tâchez d’approfondir un bruit si odieux et si dangereux.

M. le chevalier de Rochefort m’a bien consolé de tous les importuns qui sont venus me faire perdre mon temps dans ma retraite. Dieu merci, je ne les reçois plus ; mais quand il me viendra des hommes tels que M. le chevalier de Rochefort, qui me parleront de vous, mes moments seront bien employés avec eux. Je viens de voir aussi un M. Bergier 9, qui pense comme il faut ; il dit qu’il a eu le bonheur de vous voir quelquefois, et il ne m’en a pas paru indigne.

N’oubliez pas, je vous en supplie, Polyeucte et Néarque ; mais surtout mandez-moi si vous êtes dans une situation heureuse, et si vous vous consolez des niches qu’on fait tous les jours à la philosophie. »

2 Le feu est partout caché, il embrase toute nature, il donne naissance à tout, renouvelle, divise, unit, nourrit toute chose ; ces vers latins sont en épigraphe à l'Essai sur la nature du feu et sur sa propagation, 1738 ; voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Essai_sur_la_nature_du_feu_et_sur_sa_propagation/%C3%89dition_Garnier/Avertissement

3 François de Clermont-Tonnerre , , né en 10-29, mort le !5 février 1701, membre de l'Académie française, et dont le malin d'Alembert a fait l'Apologie. (Beuchot.) ; voir la note : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome26.djvu/559

5 Frédéric a signalé comme apocryphe la passage de Saint Jean I, v, 7-8 alors qu'il s'agit seulement d'une inerpolation .

6 Le prince de Brunswick.

9 Le traducteur Claude-François Bergier, frère du théologien  : https://data.bnf.fr/fr/12268357/claude-francois_bergier/

Lire la suite

22/09/2021 | Lien permanent

Page : 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59