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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

vous favoriserez une entreprise qui n’est pas indigne de vos secours

... Messieurs, mesdames les syndicalistes, plutôt que de semer le désordre et la discorde ; vos enfants ne vous remercieront pas de votre position rétrograde et néfaste, juste faite pour protéger vos ridicules avantages que vous osez nommer pompeusement acquis sociaux . Il y en a assez de vos grèves à la noix, mettez vous au boulot , au vrai, si vous savez encore ce que c'est .

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« A Jean Capperonnier

Monsieur, je compte dans quelque mois avoir l’honneur de vous envoyer, pour la Bibliothèque du roi, un manuscrit unique et curieux 1. C’est l’Ezour-Veidam, commentataire du Veidam, lequel est chez les Indiens ce qu’est le Sadder chez les Guèbres 2.

Cet Ezour-Veidam est traduit de la langue du hanscrit 3 par un brame de beaucoup d’esprit 4, qui est correspondant de notre compagnie des Indes, et qui a très bien appris le français. Il l’a donné à M. de Maudave 5, commandant pour le roi dans un petit fort de la côte de Coromandel. Ce livre est fait vraisemblablement avant l’expédition d’Alexandre.

Ce que je vous dis là, monsieur, n’est pas un artifice pour obtenir de vous quelques livres dont j’ai besoin. Je vous les demanderais hardiment quand il n’y aurait point d’Ezour-Veidam au monde, tant je compte sur vos bontés.

Je fais imprimer les tragédies de Pierre Corneille avec un commentaire perpétuel, historique et critique, qui sera peut-être utile aux étrangers qui apprennent nos langues par règle, et à quelques Français qui la parlent par routine. L’édition sera ornée des plus belles gravures, et faite avec beaucoup de soin. Nous la faisons à l’anglaise, c’est-à-dire par souscription, pour le bénéfice des seules personnes qui restent du grand nom de Corneille. Le roi a la bonté de souscrire pour deux cents exemplaires ; M. le duc de Choiseul pour vingt. Je me flatte que M. le baron de Thiers 6 voudra bien que son nom soit dans la liste.

Mais vous me rendriez, monsieur un plus grand service si vous vouliez bien me prêter une édition de Corneille qui doit être à la Bibliothèque du roi, dans laquelle on trouve toutes les imitations de Guillain de Castro, de Lucain, de Sénèque, et de Tite-Live. Corneille donna lui-même cette édition. Je n’ai que le tome du Cid ; il y manque la première page, qui contenait le titre et la date. Il y a d’ailleurs beaucoup de pièces fugitives sur la Médée, les Horaces, le Cid, et Cinna. Je vous renverrai fidèlement, monsieur, et promptement, ce que vous aurez bien voulu me communiquer. Vous rendez service aux belles-lettres ; la famille de Corneille et moi nous vous serons également  obligés ; vous favoriserez une entreprise qui n’est pas indigne de vos secours ; et le nom du grand Corneille justifie la liberté que je prends.

J’ai l’honneur d’être avec tous les sentiments que je vous dois,

monsieur,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

Au Château de Ferney en Bourgogne,

par Genève 13è juillet 1761.

N.B. – Je reçois en ce moment une lettre de M. Cramer, qui me dit que vos bontés ont prévenu mes demandes. Souffrez seulement, monsieur, que j’ajoute à mes remerciements la requête pour cette édition de Corneille dont j’ai l’honneur de vous parler dans ma lettre. »

3 C'est une ancienne forme du mot sanscrit ; du reste , le manuscrit n'est pas en sanscrit, mais dans le dialecte moderne ; voir l'article Brachmanes dans le Dictionnaire philosophique .Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Dictionnaire_philosophique/Garnier_(1878)/Brachmanes,_Brames

5 Sur Louis-Laurent de Féderbe, chevalier puis plus tard comte de Maudave, voir B. Foury, Maudave et la colonisation de Madagascar, 1956 , voir : http://www.persee.fr/doc/outre_0399-1385_1955_num_42_148_1244

et : http://www.persee.fr/doc/outre_0399-1385_1956_num_43_150_1252 . Voir aussi  : https://fr.wikipedia.org/wiki/Fayd%27herbe_de_Maudave

6 Louis-Antoine de Crozat, baron de Thiers : https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Antoine_Crozat

 

 

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17/06/2016 | Lien permanent

à cet âge de 66 ans on joue contre ceux de 60 ans qui auraient dix chances contre moi quatre . Ce n'est pas le jeu

... Heureusement ce cher Volti a vécu encore 18 ans et a inversé la cote en sa faveur, quelques uns en ont fait les frais et ce n'est que justice ; ceux qui se sont réjoui en voyant "Le Viager" avec Serrault comprendront le plaisir de gagner contre ceux qui comptent sur votre mort prochaine .

 viager-1972.jpg

 

 

« A Ami Camp

banquier

à Lyon

Aux Délices 28 décembre [1759]

Je crois, monsieur, que votre cher et estimable associé sera parti avant que vous ayez reçu ma lettre 1. Je lui souhaite un heureux voyage, et je crois que pour le bien des affaires il faut lui souhaiter un long séjour .

Voici un petit reçu qui nous vaudra 6500 livres en son temps pour joindre à notre magot . M. Tronchin me propose de mettre à la tontine 5200 livres de coupons et 5200 d'argent . Je prendrais ce parti si je n'avais pas soixante et six ans avec une santé faible . De plus à cet âge de 66 ans on joue contre ceux de 60 ans qui auraient dix chances contre moi quatre . Ce n'est pas le jeu . On pourra traiter de la paix cet hiver quoiqu'on ne la fasse pas . On pourra même envoyer des plénipotentiaires et alors les effets publics reprendront faveur . On pourrait alors vendre mes coupons avec une perte médiocre à ceux qui voudront acquérir des tontineries ; et dès qu'on pourra sans beaucoup de perte vendre mes autres effets royaux et verreux 2, on me fera plaisir . C'est ce que je vous prie de mander à notre cher ami . Vous pourriez même lui envoyer ce feuillet . Je n'aime que les prés, et point du tout les loteries et annuités, et suis de tout mon cœur

votre très humble et très obéissant serviteur

V. »

2 Ancienne forme d'orthographe pour vereux .

 

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05/01/2015 | Lien permanent

Quoique vous n'ayez jamais tort avec moi, j'oserai cependant vous dire que le Tout est bien n'est pas mal

 ... Mais cependant exagérément optimiste , n'est-il pas ? 

 

jamais tort.jpg


« A M. DUPONT

Avocat.

Aux Délices, 16 avril [1756]

Le Suisse Voltaire envoie au philosophe de Colmar, pour ses œufs de Pâques, ces deux petits sermons 1 de carême. Mme Denis et lui l'aimeront toujours. »

 

« DE M. DUPONT 2

J'ai reçu vos deux sermons, qu'ils sont beaux, mon révérend père . Ah ! que j'aurais de goût pour le pain de la parole, si ceux qui le distribuent savaient le pétrir comme vous . Vous faites ressusciter en moi des germes de sentiments qui languissaient. Vous remontez les ressorts de mon âme, et je m'aperçois que si vous vouliez, vous pourriez bien faire mon esprit, comme il me souvient que vous faisiez votre corps. Quoique vous n'ayez jamais tort avec moi, j'oserai cependant vous dire que le Tout est bien n'est pas mal. Il serait assez gentil que cette leçon fit des progrès. Les conséquences en sont admirables; mais vous voulez faire votre paix, et vous sacrifiez une assez bonne citadelle dont le parti peut se passer. Votre Loi naturelle est divine. Si les législateurs hébreux et autres parlaient ainsi, quel charme de les écouter . Je ne vous en dirai pas davantage, mon révérend père, crainte de vous mal louer. Il faudrait savoir parler comme vous pour s'en acquitter dignement. Adieu.
Prêchez de temps en temps, et n'attendez pas la fin du carême pour m'envoyer vos sermons, sans quoi je pourrai bien aller en Suisse pour les entendre.
Je ne sais rien dire autre chose à Mme Denis, sinon que je l'admire, et que j'ose l'aimer. »

1 M. de Voltaire m'a écrit ce billet en m'envoyant ses deux poêmes sur le Désastre de Lisbonne et la Loi naturelle. ( Note de Dupont.)

2 Lettres inédites de Voltaire, etc., 1871.

 

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23/06/2012 | Lien permanent

à la cour, on n’est pas si bien informé. La calomnie y arrive en poste, et la vérité, qui ne marche qu’à pas comptés, a

... On en a la confirmation en ce jour pourri par des syndicats qui ne répugnent jamais à travestir la vérité pour prouver qu'ils existent en prétendus défenseurs des salariés, n'est-ce pas M. Martinez ! https://www.lepoint.fr/economie/retraites-les-petits-arra...

Et d'autre part, comment ne pas pleurer sur le sort de ces "pauvres" cheminots usés avant l'âge , tant et tant, qu'il est bien juste qu'ils reçoivent plus qu'ils n'ont donné, non ? https://www.lepoint.fr/economie/le-regime-de-retraite-des-cheminots-est-il-si-special-04-12-2019-2351459_28.php

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T'ar ta gueule à la récré !

 

 

« A Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

19è octobre 1764 aux Délices

Vous avez écrit, madame, une lettre charmante à madame Denis ; j’y ai vu la beauté de votre âme et la bienfaisance de votre caractère : tous les Corneille seront heureux. Il ne m’appartient pas de l’être à mon âge de soixante-onze ans, malingre et presque aveugle au pied des Alpes ; cependant je le serais, je conserverais encore ma gaieté, et je travaillerais avec l’ex-jésuite pour vous plaire, si je n’étais un peu assommé par la persécution. La clique Fréron, la clique Pompignan crie que je suis l’auteur de je ne sais quel Dictionnaire philosophique portatif, tout farci de citations des Pères de l’Eglise et des rêveries des rabbins. On sait très bien, dans le pays que j’habite, que c’est un recueil de plusieurs auteurs, rassemblés par un libraire ignorant qui a fait des fautes absurdes ; mais à la cour, on n’est pas si bien informé. La calomnie y arrive en poste, et la vérité, qui ne marche qu’à pas comptés, a la réputation de n’y être pas trop bien reçue.

Cependant, comme M. d’Argental est à Fontainebleau, la vérité a là un bon appui. Je compte sur les bontés de M. le duc de Praslin. Pourquoi m’attribuer un livre que je renie , un recueil de dix ou douze mains différentes ? Condamne-t-on les gens sans preuve, et sur des soupçons aussi mal fondés ? Le roi est juste, il ne me jugera pas sans doute sur des présomptions si légères ; et puisqu’il fait élever une statue à Crébillon, il ne me fera pas brûler au pied de la statue, car enfin ce Crébillon a fait cinq tragédies, et j’en ai fait environ trente, et sûrement je n’ai point fait le Portatif.

Il est si vrai que le livre est de plusieurs auteurs, que j’ai en main l’original d’un des articles connus depuis quelques années.

On dit qu’un nommé l’abbé d’Estrées, autrefois associé avec Fréron, depuis généalogiste et faussaire, et qui a un petit prieuré dans mon voisinage, a donné le Portatif au procureur-général, lequel instrumente. Je vous supplie, madame, de communiquer cette lettre à M. d’Argental, qui est à Fontainebleau.

Je n’ai pas un moment à moi ; mais tous les moments de ma vie vous sont consacrés à tous deux avec le plus tendre respect. 

V.»

 

 

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05/12/2019 | Lien permanent

je vois beaucoup de raisons d'être bien traité, et aucune d'être exilé de ma patrie cela n'est fait que pour des coupabl

... La peste soit des censeurs !

Fuyons ! mais pas trop loin, dans un pays "propre en ordre" !

 

suisse france drapeaux exilés.png

 

 

« A M. Charles-Augustin Ferriol, comte d'ARGENTAL.

Aux Délices, 19 novembre 1757
Vous avez un cœur plus tendre que le mien, mon cher ange; vous aimez mieux mes tragédies que moi. Vous voulez qu'on parle d'amour, et je suis honteux de nommer ce beau mot avec ma barbe grise. Toutes mes bouteilles d'eau rose sont à l'autre bout du grand lac, à Lausanne. J'y ai laissé Fanime et la Femme qui a raison, et tout l'attirail de Melpomène et de Thalie; c'est à Lausanne qu'est le théâtre. Nous plantons aux Délices, et actuellement je ne pourrais que traduire les Géorgiques. Cependant je vous envoie à tout hasard le petit billet que vous demandez 1. Je croyais l'avoir mis dans ma dernière lettre; j'ai encore des distractions de poète, quoique je ne le sois plus guère.
Je serais bien fâché, mon divin ange, de donner des spectacles nouveaux à votre bonne ville de Paris, dans un temps où vous ne devez être occupé qu'à réparer vos malheurs et votre humiliation; il faut qu'on ait fait ou d'étranges fautes, ou que les Français soient des lévriers qui se soient battus contre des loups. Luc n'avait pas vingt-cinq mille hommes, encore étaient-ils harassés de marches et de contre-marches. Il se croyait perdu sans ressource, il y a un mois; et si bien, si complétement perdu, qu'il me l'avait écrit; et c'est dans ces circonstances qu'il détruit une armée de cinquante mille hommes. Quelle honte pour notre nation ! elle n'osera plus se montrer dans les pays étrangers. Ce serait là le temps de les quitter, si malheureusement je n'avais fait des établissements fort chers, que je ne peux plus abandonner.
Ces correspondances 2, dont on vous a parlé, mon cher ange, sont précisément ce qui devrait engager à faire ce que vous avez eu la bonté de proposer, et ce que je n'ai pas demandé. Je trouve la raison qu'on vous a donnée aussi étrange que je trouve vos marques d'amitié naturelles dans un cœur comme le vôtre. Si Mme de Pompadour avait encore la lettre que je lui écrivis 3 quand le roi de Prusse m'enquinauda 4 à Berlin, elle y verrait que je lui disais qu'il viendrait un temps où l'on ne serait pas fâché d'avoir des Français dans cette cour. On pourrait encore se souvenir que j'y fus envoyé en 1743, et que je rendis un assez grand service 5; mais M. Amelot, par qui l'affaire avait passé, ayant été renvoyé immédiatement après, je n'eus aucune récompense. Enfin je vois beaucoup de raisons d'être bien traité, et aucune d'être exilé de ma patrie cela n'est fait que pour des coupables, et je ne le suis en rien.
Le roi m'avait conservé une espèce de pension que j'ai depuis quarante ans 6, à titre de dédommagement; ainsi ce n'était pas un bienfait, c'était une dette comme des rentes sur l'Hôtel de Ville. Il y a sept ans que je n'en ai demandé le payement; vous voyez que je n'importune pas la cour. Le portrait que vous daignez demander, mon cher ange, est celui d'un homme qui vous est bien tendrement uni, et qui ne regrette que vous et votre société dans tout Paris. L'Académie aura la copie du portrait peint par La Tour. Il faut que je vous aime autant que je fais pour songer à me faire peindre à présent. Quant au roman que vous m'envoyez 7, il faudrait en aimer l'auteur autant que je vous aime, pour le lire et vous savez que je n'ai pas beaucoup de temps à perdre. Il faut que je démêle dans l'Histoire du monde, depuis Charlemagne jusqu'à nos jours, ce qui est roman et ce qui est vrai. Cette petite occupation ne laisse guère le loisir de lire les Anecdotes syriennes et égyptiennes. Puisque vous avez un avocat nommé Doutremont, je changerai ce nom dans la Femme qui a raison; j'avais un Doutremont 8 dans cette pièce. Je me suis déjà brouillé avec un avocat qui se trouva par hasard nommé Grifon 9 il prétendit que j'avais parlé de lui, je ne sais où.
M. le maréchal de Richelieu me boude et ne m'écrit point. Il trouve mauvais que je n'aie pas fait cent lieues pour l'aller voir. »

 1 Compliment pour deux acteurs ; voir lettre du 8 novembre 1757 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/01/26/mettons-nous-a-l-eau-de-rose-pour-leur-plaire.html

2 Avec Frédéric que V* engageait au mois d'août précédent, à faire la paix .

3 Lettre non retrouvée .

4 Ce mot est dans Le Florentin de La Fontaine et signifie « rendre quinaud », à savoir « dupe ». Voir : http://www.lettres-persiennes.net/textes-extraits/jean-fontaine/florentin.php

5 V* se rendit en Prusse auprès de Frédéric II afin de connaître ses intentions ; il ne fût pas très efficace dans cette mission « d'espionnage ».

6 La pension était de 2000 livres, et datait de 1719.

8 Le marquis d'Outremont : voir : http://books.google.fr/books?id=dig6AAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

Le nom de ce personnage apparaitra parmi ceux des signataires du factum de Linguet (avocat) en faveur du chevalier de La Barre .

9 Autre personnage de La femme qui a raison ; Grifon sera changé en Gripon, mais d'Outremont restera inchangé .

 

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31/01/2013 | Lien permanent

bien faire connaître ma façon de penser, qui n’est ni d’un superstitieux, ni d’un athée

 http://www.youtube.com/watch?v=JnjTpzNdeoo

 

 Des Enfoirés qui se bougent le cul : je dis respect ! et merci !

Volti les aurait encouragés, faute de chanter avec eux.

Volti a été de cette trempe des véritables philanthropes qui ont aidé sur le terrain les démunis : je dis bravo et merci Volti !

Par delà le temps, il reste un exemple !

magnolia.JPG

 

« A Pierre-Robert Le Cornier de Cideville

 

Aux Délices près de Genève

12 avril 1756

 

             J’ai tant fait de vers, mon cher et ancien ami, que je suis réduit à vous écrire en prose [Cideville le 11 mars lui a envoyé une épître en vers et demandé des vers à V*]. J’ai différé à vous donner de mes nouvelles comptant vous envoyer à la fois le poème sur le désastre de Lisbonne, sur le tout est bien, sur la loi naturelle : ouvrages dont on a donné à Paris des éditions toutes défigurées [Cf. lettres du 22 mars à la duchesse de Saxe-Gotha et d’Argental]. Obligé de faire imprimer moi-même ces deux poèmes, j’ai été dans la nécessité de les corriger [une édition spéciale de ceux-ci parait à Genève ; vite épuisée, on réédite en mai, conforme à la première ; entre-temps, ils paraitront en Supplément aux Mélanges dans les Œuvres Complètes par  Cramer et imprimés aussi à Paris]. Il a fallu dire ce que je pense et le dire d’une manière qui ne révoltât ni les esprits trop philosophes, ni les esprits trop crédules. J’ai vu la nécessité de bien faire connaître ma façon de penser, qui n’est ni d’un superstitieux, ni d’un athée. Et j’ose croire que tous les honnêtes gens seront de mon avis.

 

             Genève n’est plus le Genève de Calvin, il s’en faut beaucoup. C’est un pays rempli de vrais philosophes. Le christianisme raisonnable de Locke est la religion de presque tous les ministres, et l’adoration d’un Etre suprême jointe à la morale est la religion de presque tous les magistrats. Vous voyez par l’exemple de Tronchin que les Genevois peuvent apporter en France quelque chose d’utile [Théodore Tronchin , médecin genevois, est allé à Paris et pratique l’inoculation, en particulier sur le duc de Chartres. Ce 12 avril, V* écrit à la comtesse de Lutzelbourg les noms des grands qui vont être inoculés : les enfants de La Rochefoucauld et du maréchal de Belle-Isle, Mme de Villeroy]. Vous avez eu cette année des bords de notre lac l’insertion de la petite vérole, Idamé [personnage de L’Orphelin de la Chine], et La Religion naturelle.

 

             Mes libraires se sont donné le plaisir d’assembler dans leurs villes les chefs du Conseil et de l’Eglise et de leur lire mes deux poèmes. Ils ont été universellement approuvés dans tous les points. Je ne sais si la Sorbonne en ferait autant. Comme je ne suis pas en tout de l’avis de Pope, malgré l’amitié que j’ai eue pour sa personne et l’estime sincère que je conserverai toute ma vie pour ses ouvrages, j’ai cru devoir lui rendre justice dans ma préface aussi bien qu'a notre illustre ami M. l’abbé du Resnel [qui n’est pas nommément cité par V* ; il dit que l’ouvrage a été « traduit par des hommes dignes de le traduire. »] qui lui a fait l’honneur de le traduire, et souvent lui a rendu le service d’adoucir les duretés de ses sentiments. Il a fallu encore des notes. J’ai tâché de fortifier toutes les avenues par lesquelles l’ennemi pouvait  pénétrer. Tout ce travail a demandé du temps. Jugez, mon cher et ancien ami, si un malade chargé de cette besogne, et encore d’une Histoire universelle qu’on imprime, et qui plante, et qui fait bâtir, et qui établit une espèce de petite colonie, a le temps d’écrire à ses amis. Pardonnez-moi donc si je parais si paresseux dans le temps que je suis le plus occupé. Mandez-moi comment je peux vous adresser mon tout n’est pas bien, et ma Religion naturelle. J’ignore si vous êtes encore à Paris ; je ne sais où est M. l’abbé du Resnel. Je vous écris presque au hasard sans savoir si vous recevrez ma lettre. Mme Denis vous fait mille compliments.

 

             V.

 

    Il y a longtemps que je n’ai vu les paperasses dont les Cramer ont farci leur édition. Ils ont jugé une petite lettre en vers [du 13 mars 1741,de Bruxelles,et qui commence par  « Devers Pâques on doit pardonner/ Aux chrétiens qui font pénitence !/ Je la fais ;… »] qui vous est adressée digne d’être imprimée. Ils se sont trompés, mais le plaisir de voir un petit monument de notre amitié m’a empêché de m’opposer à l’impression.

 

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13/04/2010 | Lien permanent

Je n'ose plus me plaindre de mes coliques depuis cet accident

 

coliques2858.JPG

 

 

 

«  A M. LE COMTE D'ARGENTAL.
Aux Délices, près de Genève, 1er décembre [1755]

 

Je dicte, mon cher ange, mes très-humbles et très-tendres remerciements, car il y a bien des jours que je ne peux pas écrire. Je vous avais envoyé le paquet pour l'Académie avant d'avoir reçu la lettre par laquelle vous m'avertissiez de la noble et scrupuleuse attention de messieurs des postes; je profiterai dorénavant de votre avis. Je vous assure qu'on vous en a donné un bien faux quand on vous a dit que je faisais une nouvelle tragédie. Le fait est que Mme Denis avait promis Zulime à messieurs de Lyon mais, comme monsieur le cardinal votre oncle 1 ne va pas au spectacle, la grosse Mme Destouches 2 se passera de Zulime. Ceux qui ont imprimé la rapsodie 3 dont vous avez la bonté de me parler ont bien mal pris leur temps. L’Europe est dans la consternation du jugement dernier arrivé dans le Portugal. Genève, ma voisine, y a plus de part qu'aucune ville de France; elle avait à Lisbonne une grande partie de son commerce. Cette aventure est assurément plus tragique que les Orphelin et les Mérope. Le Tout est bien de Matthieu Garo 4 et de Pope est un peu dérangé. Je n'ose plus me plaindre de mes coliques depuis cet accident. Il n'est pas permis à un particulier de songer à soi dans une désolation si générale. Portez-vous bien, vous, Mme d'Argental, et tous les anges, et tâchez de tirer parti, si vous pouvez, de cette courte et misérable vie, je suis bien fâché de passer les restes de la mienne loin de vous. S'il y a quelques nouvelles sur Jeanne, je vous supplie de ne me laisser rien ignorer.
Je vous embrasse bien tendrement. »

1 Le cardinal de Tencin qui avait reçu dédaigneusement V* lors de son passage et séjour à Lyon l'année précédente .

2 Directrice du théâtre de Lyon.

3 La Pucelle d'Orléans, poème en quinze chants.

 

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21/04/2012 | Lien permanent

trop heureux de vous procurer des plaisirs que je ne peux partager.

 

melon de lunéville.jpg

J'espère un jour goûter à un de ces melons que Volti a eu l'occasion de déguster, pour son plus grand plaisir je le crois .

 

 

 

« A M. François-Antoine DEVAUX 1

 

[juillet 1755]

Mon très-cher Panpan, votre souvenir ajoute un nouvel agrément à la douceur de ma retraite. Je vous prie de remercier de ma part la très-bonne compagnie que vous dites ne m'avoir pas oublié. Si j'étais d'une assez bonne santé pour voyager encore, je sens que je ferais bien volontiers un tour en Lorraine 2 mais je prendrais trop mal mon temps, lorsque vous en partez.
Je suis bien loin actuellement de songer à des comédies, mais faites-moi savoir le titre de la vôtre, j'écrirai un petit mot à l'aréopage, et je tâcherai de vous faire avoir votre entrée 3 trop heureux de vous procurer des plaisirs que je ne peux partager.
Je vous embrasse tendrement.

V. »

2 Pour les curieux gourmands : http://tomodori.com/forum/topic5835.html

3 Voir lettre du 18 septembre 1755 où V* se propose d'influer sur les Comédiens Français en faveur de Devaux : « si vous vous contenterez d'un billet aux comédiens, pour vous donner votre entrée. Il se peut faire qu'ils aient cette complaisance pour moi, et je risquerais volontiers ma requête pour vous obliger. Comme je leur ai donné quelques pièces gratis, et, en dernier lieu, des magots chinois, j'ai quelque droit de leur demander des faveurs, ... »

 

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01/03/2012 | Lien permanent

Je suis bien las de cette multitude affreuse de livres écrits par des fanatiques ou par des fripons

... "Michel Houellebecq est l'un des écrivains les plus laids qu'il m'ait été donné de voir ." peut on dire désormais à Niort, ce que je  crois physiquement vrai . Pour son talent d'écrivain, je laisse dire la foule, car je n'ai pas lu une seule ligne de ses ouvrages, et ça ne me manque absolument pas .

 

 

 Image associée

Ni fanatique ni fripon, pour autant que je sache

 

 

 

« A Paul-Claude Moultou

[vers 1763-1764]

Mon cher philosophe, j’imagine que, dans quelque grande bible, on trouvera un livre apocryphe d'Hénoch translaté en mauvais latin . Je vous serais bien obligé de vouloir bien m'en procurer la lecture . J'ignore pourquoi ce livre est plus apocryphe que d'autres ; mais de tous les livres celui que j'ai le plus envie de lire, c'est un certain ouvrage sur quatre premiers siècles d'absurdités, auquel travaille un homme dont l'esprit et la raison sont soutenus par la science, et qui ne veut tromper personne . Je suis bien las de cette multitude affreuse de livres écrits par des fanatiques ou par des fripons . J’aime passionnément le savant dont je vous parle, je ne sais si vous le connaissez . »1

1 Pour info sur Moultou : https://biblioweb.hypotheses.org/11595

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06/01/2019 | Lien permanent

C'est dommage qu'un homme qui écrit si bien, écrive si mal

...Francesco Algarotti (Liotard).jpg

 

« Au comte Francesco Algarotti

Aux Délices 13 juillet 1760

Le lettera sopra la Russia ! Le desidero, le aspetto, le amero ; ma non sono captate al mio ritiro . Il sig. Shellendorf lo ricevero come l'amico del mio Cigno, ma non e venuto .1

Les révolutions de la Russie sont un fatras de déclamations  . Je n'ai point encore la dernière partie des archives ; pendant opera interrupta 2. On dit que les housards ont pris un gros ballot ; quand la guerre ne ferait que ce mal-là, elle serait toujours un fléau de Dieu .

La guerre des rats et des grenouilles continue à Paris . Voilà une Batrachomyomachia, 3 on me l'a envoyée, et je vous l'envoie . Le port sera rude, mais pour le diminuer, je n'écris qu'un mot ; ce mot est que je vous aime et estime, aimerai et estimerai tant que je vivrai .

Mille tendres compliments, je vous en prie, à M. le sénateur Albergati ; je l'aime comme si je l'avais vu .

N.B. - C'est dommage qu'un homme qui écrit si bien, écrive si mal . Vous vous servez de la patte d'un chat, j'ai autant de peine à déchiffrer vos lettres , que de plaisir à les lire, quand je les ai déchiffrées . »

1 Les lettres sur la Russie ! Je les désire, je les attends, je les aimerai ; mais elles ne sont pas parvenues dans ma retraite . Pour M. Schellendorf, je le recevrai comme l'ami de mon Cygne , mais il n'est pas venu .

2 Les travaux interrompus demeurent suspendus ; l'Enéide, IV, 88, de Virgile .

3 La Batrachomyomachia est une parodie burlesque de l'Iliade, jadis attribuée à Homère ; il n'est pas possible de déterminer quel est l'ouvrage envoyé par V* qu'il y compare . Voir le second paragraphe de la lettre du 14 juillet 1760 à Mme du Deffand  où il est question de « la guerre des rats et des grenouilles » : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/01/25/je-n-ai-dit-qu-un-mot-et-ce-mot-a-fait-eclore-vingt-brochure-5750135.html

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13/07/2015 | Lien permanent

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