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11/11/2022

Me voilà donc engagé absolument à ne plus rien changer

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Je ne changerai rien à mon régime .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

27 avril 1767

Après vous avoir écrit, mon cher ange, et vous avoir envoyé un exemplaire des Scythes corrigé à la main, je suis obligé de vous écrire encore. La nouvelle édition, à laquelle on travaille à Genève, sera achevée dans deux jours, et il a fallu envoyer la pièce telle qu’elle est en Hollande, pour prévenir l’édition qu’on y allait faire suivant celle de Paris. Me voilà donc engagé absolument à ne plus rien changer. On traduit cette pièce en italien et en hollandais. Les éditeurs et les traducteurs auraient trop de reproches à me faire si je les gênais par de nouveaux changements.

Je vous dirai encore que plus je réfléchis sur l’idée de la nécessité d’un mariage en Scythie, et sur l’addition d’un monologue au deuxième acte, plus je trouve ces additions entièrement opposées au tragique. Tout ce qui n’est pas de convenance est froid ; et ce monologue, dans lequel Obéide s’avouerait à elle-même son amour, tuerait entièrement son rôle ; il n’y aurait plus aucune gradation. Tout ce qu’elle dirait ensuite ne serait qu’une malheureuse répétition de ce qu’elle se serait déjà dit à elle-même. Je préfère à tous les monologues du monde ces quatre vers que vous et madame d’Argental m’avez conseillés :

Au parti que je prends je me suis condamnée

Va, si j’aime en secret les lieux où je suis née,

Mon cœur doit s’en punir ; il se doit imposer

Un frein qui le retienne et qu’il n’ose briser, etc.

 

En un mot, je vous conjure d’engager le premier gentilhomme de la chambre à exiger de Molé une ou deux représentations ; cela ne peut nuire à sa santé. Le rôle d’Indatire n’est point du tout violent, et il n’y a guère de principal rôle comique qui ne demande beaucoup plus d’action. Il serait fort triste et fort déplacé que Lacombe, à qui j’ai rendu service, refusât de sacrifier ce qui peut lui rester de son édition pour en faire une plus complète, surtout lorsqu’il ne lui en coûte que cent écus pour Lekain. Je pense bien donner à Lekain les cent autres écus, puisque, en d’autres occasions, je lui ai donné cinq ou six fois davantage.

J’envoie à Lekain, par cet ordinaire, un exemplaire conforme aux vôtres, à un ou deux vers près. J’ai oublié à la page 45 :

Ils vaincront avec moi. – Qui tourne ici ses pas ?

au lieu de :

Quel mortel tourne vers moi ses pas ?

Je crois aussi qu’à la page 73 il faut :

Connaissez dans quel sang vous plongerez mes mains.

au lieu de :

vous enfoncez mes mains 1.

Je me jette à vos pieds et je vous demande mille pardons de tant de tourments ; mais je vous supplie que je vous aie l’obligation de la représentation que je demande aux comédiens, et de l’édition que je demande à Lacombe, édition d’ailleurs dont je lui achèterai deux cents exemplaires, pour envoyer aux académies dont je suis, et dans les pays étrangers. Je me mets à vos pieds, mon cher ange, toujours honteux de mes importunités, et toujours le plus importun des hommes. »

1 Ici le texte ne fut pas corrigé ; ac. V, sc. 5 .