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25/03/2024

On juge plus à son aise quand il n’y a point de ratures, point d’écriture différente, point de renvois, point de petits brimborions à rajuster, et qui dispersent toutes les idées

... Les députés, sénateurs, ministres et président feraient bien de s'en inspirer avant de dégoiser leurs projets de lois et avalanches irréalistes d'amendements tous plus idiots les uns que les autres [les amendements, quoiqu' on puisse aussi le dire des législateurs eux-mêmes !].

Voyez ce qui se trame de A comme Abattage des animaux de boucherie immédiatement suivi de Abrogation de la loi portant réforme des retraites  , rapprochement qui peut  inquiéter les futurs retraités,  à Z comme :  Zones à faibles émissions mobilité     en passant par  I comme Importation de trophées de chasse ...

Plus fort que les contes des Mille et une nuits .

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Je suis d'accord sans réserve, bonne décision

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

5 septembre 1768 1

Je tiens ma parole à mes anges. Je reçus leur paquet hier, et j’en fais partir un autre aujourd’hui. On juge plus à son aise quand il n’y a point de ratures, point d’écriture différente, point de renvois, point de petits brimborions à rajuster, et qui dispersent toutes les idées. J’ai appris enfin le véritable secret de la chose ; c’est que cette facétie est de feu M. Desmahis 2, jeune homme qui promettait beaucoup, et qui est mort à Paris de la poitrine, au service des dames. Il faisait des vers naturels et faciles, précisément comme ceux des Guèbres, et il était fort pour les tragédies bourgeoises. Celle-ci est à la fois bourgeoise et impériale. Enfin Desmahis est l’auteur de la pièce ; il est mort, il ne nous dédira pas.

Le possédé, ayant été exorcisé par vous, a beaucoup adouci son humeur sur les prêtres. L’empereur en faisait une satire qui n’aurait jamais passé. Il s’explique à présent d’une façon qui serait très fort de mise en chancellerie. Je commence à croire que la pièce peut passer, surtout si elle est de Desmahis ; en ce cas, la chose sera tout à fait plaisante.

Il y a une insipide comédie sans sel ni sauce, qui s'appelle, je crois Le Philosophe sans le savoir 3. Si Les Guèbres sont joués de même, ils feront un beau fracas, il y a des attitudes pour tout le monde . À genoux, mes enfants 4 doit faire un grand effet, et la déclaration de César 5 n’est pas de paille.

Melpomène avait besoin d’un habit neuf ; celui-ci n’est pas de la friperie.

Que cela vous amuse, mon cher ange, c’est là mon grand but : vous êtes tous deux mon parterre et mes loges.

V. »

1 L'édition de Kehl amalgame cette lettre et celle du 15 septembre 1768 ; plaçant le tout le 15 septembre 1768 . Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1768/Lettre_7335

2 Joseph-François-Edouard de Corsembleu Desmajis, né en 1722, mort le 25 février 1761 . ses oauvres ont été recueillies en 1762 en un volume in-12 . Bien enendu, il n'a rien à voir avec Les Guèbres que V* tente de mettre sur son compte .

Voir : https://data.bnf.fr/12779741/joseph-francois-edouard_corsembleu_desmahis/

et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph-Fran%C3%A7ois-%C3%89douard_de_Corsembleu

3 La phrase a été, on s'en doute supprimée dans l'édition de Kehl . Sur la pièce de Sedaine, voir lettre du 22 novembre 1765 au marquis de Florian : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/03/18/je-ne-sais-si-les-spectacles-ont-cesse-a-paris-dans-la-crise-6304229.html

4 Les Guèbres, ac. V, sc. 5, vers 1533 : https://theatre-classique.fr/pages/pdf/VOLTAIRE_GUEBRES.pdf

5 Ibid., ac. V, sc. 6 , voir en particulier vers 1605-1610 : Qu'ils jouissent en paix de leurs droits, de leurs biens ; Qu'ils adorent leur dieu, mais sans blesser les miens : Que chacun dans sa loi cherche en paix la lumière ; Mais la loi de l'État est toujours la première. Je pense en citoyen, j'agis en empereur : Je hais le fanatique et le persécuteur.

La litote n'est pas de paille vient de l'expression homme de paille, bonhomme de paille, signifiant mannequin, épouvantail à moineaux .

Les Droits des hommes et les Usurpations des autres

... Hey ! Poutine le menteur-tricheur, tu es démasqué !

 

 

« A Michel-Paul-Guy de Chabanon

9è septembre 1768 1

Mon cher ami, mon cher confrère, il y a tantôt deux mois que je n’ai écrit à personne. J’avais fait un travail forcé qui m’a rendu longtemps malade. Mais, en ne vous écrivant point, je ne vous ai pas oublié, et je ne vous oublierai jamais.

Vous avez eu tout le temps de coiffer Eudoxie, et je m’imagine qu’à présent c’est une dame des mieux mises que nous ayons. Pour Pandore, je ne vous en parle point. Notre Orphée 2 a toujours son procès à soutenir, et son père mourant à soigner 3. Il n’y a pas moyen de faire de la musique dans de telles circonstances. Est-il vrai que celle du Huron 4 soit charmante ? Elle est d’un petit Liégeois que vous avez peut-être vu à Ferney 5. J’ai bien peur que l’opéra-comique ne mette un jour au tombeau le grand opéra tragique. Mais relevez donc la vraie tragédie, qui est, dit-on, anéantie à Paris. On dit qu’il n’y a pas une seule actrice supportable. Je m’intéresse toujours à ce maudit Paris, du bord de mon tombeau.

On dit que l’oraison funèbre 6 de notre ami Jean-George est un prodige de ridicule ; et, pendant qu’il la débitait, on lui criait : « Finissez donc ! » C’est un terrible Welche que ce Jean-George. On dit qu’il est pire que son frère. Les Pompignans ne sont pas heureux. Je n’ai point vu la pièce ; mais on m’en a envoyé de petits morceaux qui sont impayables.

J’ai lu une brochure assez curieuse, intitulée Les Droits des hommes et les Usurpations des autres 7. Il s’agit des usurpations de notre Saint-Père le pape sur la suzeraineté du royaume de Naples, sur Ferrare, sur Castro et Ronciglione, etc., etc. Si vous êtes curieux de la lire, je vous l’enverrai, pourvu que vous me donniez une adresse. Adieu, mon cher ami, aimez toujours le vieux solitaire, qui vous aimera jusqu’au temps où l’on n’aime personne. »

1 Le 10 Seigneux de Correvon écrit à Bertrand : « M. de Voltaire me mande qu'il vient de recevoir une lettre de M. de Chauvelin qui lui apprend qu'il espère de s'accommoder bientôt avec le célèbre Paoli […].»

2 Le musicien La Borde .

3 Le fermier-général Jean François de Laborde .

4 Le Huron, opéra-comique de Marmontel, d'après le roman de V*, a été joué à la Comédie-Italienne le 20 août 1768 .

6 Jean-George Lefranc de Pompignan a prononcé l'oraison funèbre de la reine qui fut publiée sous le titre  :
Oraison funèbre de Très-Haute et Très-Puissante et Très-Excellente Princesse Marie, Princes se de Pologne, Reine de France et de Navarre prononcée le II août 1768 par M. Lefranc de Pompignan .

 L’oraison funèbre contient des portraits satiriques des philosophes, en retour des brocards dont quelques-uns l’avaient accablé ; voir page 562 https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome12.djvu/572#cite_ref-1

Voir : https://data.bnf.fr/fr/12341346/jean-george_le_franc_de_pompignan/fr.pdf