24/09/2014
Oh quelle consolation pour un pauvre profane à moitié damné, de voir le nom sacro-saint d'un souverain pontife au frontispice d'un drame !
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« Au comte Francesco Algarotti
à Bologne
16 août [1759]1
M'avete favorito di due lettere mio caro cigno d'Italia, et di due tragedie una delle quali é dedicata a un papa . Oh che consolation per un povero profano mezzo donnato , di vedere il sacro santo nome d'un sommo pontefice nel' frontispizio d'un dram ! Miseri calvinisti, e jansenisti siate istrutti da questo exempio . Barbari riverite le muse .
Vi ringrazio caro signor mio tutti j vostri favori, et dell' onor che il signor' Agostino Paradi[si] 2 si compiace di far mi . Se il destin' a ordinato che io mora senza aver veduto la bella Italia, sono un poco confortato col' sentir che un de' vostri belli ingegni si degna di rivestire di fregi toscani il moi Cesare franceze . Si placeo, tuum est . Il vostro libraio non e tanto cortese come voi siete . Sospiro in vano per la raccolta dele vostre dilettevole oper .
Remember me while I am alive and remember I ouve all my happiness to liberty . Le roi de France a comblé mon bonheur en déclarant libres les terres que j'ai en France auprès des Délices . There I do not bewail the lost of Argaleon, who writes to me pretty often .3
Nisi quid non simul esses , coetera laetus 4.
V. »
1 On ne connait pas les lettres d'Algarotti .
2 Le mot suivant a provoqué l'omission de la dernière syllabe . Agostino Paradisi avait écrit à V* le 5 août pour lui annoncer qu'il traduisait Tancrède en italien avec La Mort de César et Mahomet .
3 " Vous m'avez favorisé de deux lettres mon cher cygne d'Italie, et de deux tragédies dont une est dédiée à un pape . Oh quelle consolation pour un pauvre profane à moitié damné, de voir le nom sacro-saint d'un souverain pontife au frontispice d'un drame ! Misérables calvinistes, et jansénistes, soyez instruits par cet exemple . Barbares recevez les muses . Je vous rends grâces, mon cher monsieur, de toutes vos faveurs, et de l'honneur que le sieur Agostino Paradisi a la complaisance de me faire . Si le destin a ordonné que je meure sans avoir vu la belle Italie, je suis un peu consolé à la pensée qu'un de vos beaux génies daigne embellir d'ornements toscans mon César français . Si par lui je vous plais, il est à vous . Votre libraire n'est pas aussi honnête homme que vous ; je soupire en vain après le recueil de vos œuvres délectables . Souvenez-vous de moi aussi longtemps que je serai en vie, et rappelez-vous que je dois tout mon bonheur à la liberté […] Là je ne pleure pas la perte d'Argaleon, qui m'écrit fort souvent .[...] »
4 Horace , Épîtres, I, x, 30 : Si ce n'est que nous ne sommes pas ensemble, au demeurant je suis heureux .
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23/09/2014
Vous êtes parti dans le temps où nous avions le plus besoin de vous
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« A Joseph-Louis de Ponte, comte d'Albaret 1
Aux Délices , 16 août [1759]2
L'oncle et la nièce, monsieur, devraient avoir répondu plus tôt à la lettre dont vous les avez honorés, mais l'oncle était malade et la nièce apprenait son rôle . Vous êtes parti dans le temps où nous avions le plus besoin de vous . Nous avons un petit théâtre à Tournay, et hors moi tous les acteurs se portent bien . Tous vous regrettent, tous disent que sans vous on n'aura qu'une troupe médiocre . Mais on vous regrette encore davantage dans la société . Vous en faisiez l’agrément . La bonne compagnie de Turin qui vous possède, ne vous permettra pas de la quitter pour venir nous voir . Nous le sentons avec douleur, mais si jamais vous revenez sur les bords de notre lac, n'oubliez pas ceux qui sont pénétrés pour vous de tous les sentiments que vous méritez . Comptez nous parmi ceux qui vous sont le plus dévoués , et soyez persuadé surtout de l'attachement tendre et respectueux du solitaire et du malade .
V. »
1Le comte d'Albaret est vraisemblablement Joseph-Louis de Ponte, comte d'Albaret (fils d'Antoine-Marie, intendant de Roussillon, mort en 1750) ; il a été l'hôte de Voltaire en 1758.
2 Date fixée, entre autres considérations, par une lettre de Théodore Tronchin à d'Albaret, du 16 octobre 1759, où on peut lire : « On jouera samedi à Tournay la tragédie de Cassandre . M. de Chauvelin vous en dira des nouvelles », ce qui indique que le comte est un des familiers du théâtre de Voltaire .
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22/09/2014
Finalement je suis toujours disposé à sauver cet imbécile
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« A Jean Vasserot de Châteauvieux
[août 1759]
Voici une autre affaire . Mme de La Bâtie fait subhaster 1 tout le domaine Valavran .
Puis-je avoir au moins en antichrèse 2 les prés de Betens sans que Mme de La Bâtie m'attaque ?
Si je prends ces prés, la terre de Valavran ne vaut plus rien . Avec quoi pourrait-on y entretenir des bestiaux ?
Acheter tout Valavran, cela m'est impossible . Je ne veux point payer des lods et ventes, des centièmes deniers, etc.
D'ailleurs que faire de cette terre ? Elle ne rapporte pas 450 livres de France annuellement . Sur ces 450 livres il faut payer le dixième , la capitation et la taille . Il ne revient pas 250 livres par an à ce pauvre Betens . [Avo]uez mon cher Cicéron que Betens a fait de bonnes affaires .
Finalement je suis toujours disposé à sauver cet imbécile . Mais en lui prêtant sans intérêt, en étant subrogé à la dette envers Choudens, je veux être sûr de jouir des prés et de n'avoir point de procès . On me dit que le procès est inévitable .
Il vaudrait beaucoup mieux que le procureur de Mme de La Bâtie s'arrangeât avec Betens . J'ai l'honneur de vous l'envoyer . »
1« Vente à cri public, par autorité de justice, au plus offrant et dernier enchérisseur . »
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21/09/2014
Le patient sera encore quelques jours en prison . Cela ne le rendra pas plus actif
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« A Jean Vasserot de Châteauvieux
[août 1759]
Il faudra donc que Betens m'envoie quelque garçon notaire, mon cher Cicéron . Il est juste qu'au préalable le dit Betens déclare de bonne foi toutes ses dettes, et ce qu'il paye de dixième, et de taille , et d'autres menus droits . Il déclare aujourd'hui une dette, demain, il en déclare une autre, et après-demain on en trouve une troisième . Il ne donne aucune instructions . Il n'a personne qui en donne pour lui . Comment transiger avec un tel homme ?
J'ai fait prier Mme la générale de Donop 1 votre tante par son procureur de vouloir bien différer . J'attends ses ordres . Le patient sera encore quelques jours en prison . Cela ne le rendra pas plus actif . Mon cher Cicéron, v[otre] compassion vous coûte bien des som[mes]. »
1Françoise Vasserot de Vincy, née Turrettini, épousa en 1732 M. de Donop ; voir page 86-87 : http://books.google.fr/books?id=_qKl9IBaZjsC&pg=PA86&dq=g%C3%A9n%C3%A9ral+de+donop&hl=fr&sa=X&ei=OoUdVMS9N5KUauuPgIgF&ved=0CCkQ6AEwAQ#v=onepage&q=g%C3%A9n%C3%A9ral%20de%20donop&f=false
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20/09/2014
Les sottises des hommes vous font perdre un temps précieux
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« A Jean Vasserot de Châteauvieux
[août 1759]
Allons donc, je ferai ce que veut mon Cicéron . Je garderai mon argent, je ne donnerai que les 4375 livres de France . Vous avez fait œuvre pie d'aller consoler un Samaritain incarcéré par un Juif.
Je vous donnerai un billet portant promesse de payer dans un mois ou 15 jours 4375 livres de France moyennant quoi il me cèdera tout le plus de foin qu'il pourra et gardera tout le reste .
Choudens me remettra son contrat usuraire avec Pasteur .
Je crois que Choudens ayant passé en France l'acte de vente de son domaine doit passer l'acte de subrogation en France, ou du moins articuler dans l'acte à Genève qu'il se soumet à la juridiction de France .
Voilà bien des peines que vous vous donnez . Les sottises des hommes vous font perdre un temps précieux . Vous vous payez par le plaisir de faire du bien . Quel exemple [pour ] les prêtres ? Que je vous aime !1
S'il veut me céder tout son foin il y en a je crois pour environ 350 livres de France par an .
Je lui donnerais 2400 livres .
Je serais payé en 7 ans ou à peu près .
Cela serait plus convenable à un homme de mon âge que d'avoir l'insolence de stipuler pour onze ans .
Pauci quos aequus amavit 2. »
1 C'est ici la fin de la première page du manuscrit olographe, et le bas du papier est abimé .
2 Il y en a peu que [Jupiter] a aimés à l'égal de ceux-là . Virgile fait allusion à quelques privilégiés à qui Jupiter a permis de visiter les Enfers ; Enéïde, VI, 129 .
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19/09/2014
en cas que ces propositions lui paraissent convenables
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« A Jean Vasserot de Châteauvieux
[août 1759]
Monsieur de Châteauvieux est prié de vouloir bien examiner cette réponse aux nouvelles instances du sieur Betens, et d'avoir la bonté de la lui faire communiquer, en cas que ces propositions lui paraissent convenables 1. »
1 Réponse affirmative de Betens .
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18/09/2014
il faudrait que tout fût fait dans quinze jours, après quoi nous ferons autre chose
... Oui, mais quoi ?
Peigner la girafe ?
Résorber le chômage, enfin ?
Faire en sorte que les Restos du coeur aient les moyens de secourir les nécessiteux
What else ?
« A Gabriel Cramer
[vers le 15 août 1759]
Pour me consoler de la bataille perdue 1 imprimons vite, la victoire de Pultava 2. Mon cher éditeur russe ne perdons pas un moment, écrivez à Paris pour la carte de Russie, que Brémon dépêche le Prut, il faudrait que tout fût fait dans quinze jours, après quoi nous ferons autre chose . Si vous avez des nouvelles faites-nous en part . »
1 Bataille de Minden .
2 Allusion à un épisode de l'Histoire de l'empire russe sous Pierre le Grand en cours d'édition .
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