28/01/2015
La France a besoin d'une belle campagne pour sa gloire, mais elle a encore plus besoin de la paix pour son argent
... La France se dispenserait bien de toute campagne militaire à vrai dire , gloire ou pas gloire à la clé . Existe -t-il ou a-t-il jamais existé une seule guerre qui ne soit pas une défaite tant du vainqueur que du vaincu ?
Ou "comment garnir des cimetières"
« A Jean-Robert Tronchin
à Paris
23 janvier 1760
Vous êtes bien bon,mon cher monsieur, de songer à votre fermier des Délices, au milieu de toutes vos affaires et même des affaires générales, sur lesquelles je ne doute pas que vous n'ayez donné de bons conseils, quoique vous ne vous en vantiez pas 1. La France a besoin d'une belle campagne pour sa gloire, mais elle a encore plus besoin de la paix pour son argent .
Je vois bien,monsieur, que le paiement de mes coupons est un tour de votre amitié ; je vous reconnais bien là ; je n'ai jamais que des grâces à vous rendre . Quant à MM. Tourton et Baure 2, il me semble qu'ils pourraient bien me faire le petit plaisir de me payer ; le ministre de Mgr l’Électeur palatin m'a mandé, de la part de son maître, qu'ils avaient ordre de me payer toujours aux échéances, sans aucun délai . Si vous rencontrez ces messieurs ne pourriez-vous pas avoir la bonté de leur dire que je les supplie d'écrire un petit mot en conformité à M. le baron de Beckers, à Manheim ; je serais fort aise de savoir cette petite affaire en règle . Je vous demande pardon de vous importuner de ces bagatelles, lorsque vous avez tant de choses importantes sur les bras .
Je vous embrasse de tout mon cœur .
Votre très humble obéissant serviteur
V.
M. le duc de Choiseul m'a accordé une grâce pour un de vos citoyens 3 de Genève, dont je suis très touché . »
1 A la cour ; voir lettre du 22 décembre 1759 à JR Tronchin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/01/01/il-me-semble-que-si-tous-ceux-qui-ont-ete-a-la-tete-des-affaires-avaient-et.html
2 Banquiers parisiens , dont on entendra parler encore dans la défense de la famille Calas (voir par ex. : http://www.monsieurdevoltaire.com/pages/En_direct_par_VOL... ).
3 Prévost ; voir aussi lettre du 22 décembre 1759 à Tronchin .
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27/01/2015
La posterita ne dira ciò che vorrà / La postérité en dira ce qu'elle voudra
... La solidarité envers la Grèce, demandée par François Hollande, confirmée devant un représentant de la Colombie, et par bien des pays de la CEE, fait partie de ces engagements dont on reparlera, immanquablement .
On verra également, -en parlant de la Colombie,- ce qu'il adviendra de la Miss Univers 2015 , autre -petite, toute petite- histoire ... Notre président François alias Rain Man appréciera l'abri de ce parapluie sans doute
« A Louis-François-Armand du Plessis, maréchal duc de RICHELIEU.
Aux Délices, 23 janvier 1760.
J'ai laissé passer les fêtes de la nativité del divino Bambino 1, et sa circoncision. Je n'ai point voulu interrompre mon héros dans la foule des occupations graves ou gaies qu'il a pu avoir à Paris et à Versailles ; mais je ne suis pas homme à laisser passer le mois de janvier sans renouveler mes hommages à celui qui sera toujours mon héros. Je ne sais pas si, en 1760, son pays aura beaucoup de lauriers et beaucoup d'argent; mais je sais bien que la statue de Gênes 2 subsiste, que la signature du fils 3 du roi d'Angleterre, forcé à mettre bas les armes, subsiste encore ; et que les bastions du roc de Port-Mahon rendent un témoignage immortel. J'avoue que je ne conçois guère comment on laisse inutile le seul homme qui ait rendu de vrais services. Je devrais pourtant le concevoir très-bien, car je ne vois que de ces exemples, (moi historiographe), dans les histoires que je lis et que je compile. Je dis à présent un petit mot de ce siècle, de ce pauvre siècle, de ce siècle des billets de confession, des querelles pour un hôpital 4, des refus d'un parlement de rendre justice, des assemblées des chambres pour condamner un dictionnaire 5 qu'on n'a pas lu ; de ce beau siècle où, en trois ans de temps, l'État a été ruiné quand nos armées devaient vivre aux dépens de l'Allemagne, etc.
J'aurai du moins le plaisir d'avoir eu raison quand je vous ai regardé comme un homme aussi supérieur qu'aimable. Je crois, à l'âge de soixante et six ans, voir les choses comme elles sont.
Je les dirai comme je les vois. La posterita ne dira ciò che vorrà.6
Je m'imagine que vous devez être l'ami de M. le duc de Choiseul. Je n'en sais rien, mais je le crois, parce qu'il me paraît avoir quelque chose de votre caractère. Il pense noblement, il rend service sans balancer, il aime le plaisir, il a beaucoup d'esprit, et la hauteur qui s'accorde avec les grâces. Il me semble que c'est l'homme de votre pays le plus fait pour vous.
Il s'est passé bien des choses tristes, extravagantes, comiques, depuis que je n'ai eu l'honneur de vous faire ma cour; mais c'est à peu près l'histoire de tous les temps : c'est la même pièce qui se joue sur tous les théâtres, avec quelques changements de noms. Quoi qu'il en soit, votre rôle est beau. Conservez-moi vos bontés, monseigneur, et soyez persuadé que si j'avais en main la trompette de la Renommée, ce serait pour vous que je l'emboucherais. Je vous souhaite la continuation de votre gaieté. Jouissez de votre gloire, et riez des sottises d'autrui.
Mille respects.
V.»
1 Le petit Jésus Christ .Circoncis 8 jours après sa naissance, soit le 1er janvier , selon le Nouveau Testament .
2 Voir la lettre du 28 mars 1756 à Richelieu : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/06/16/vraiment-vous-avez-bien-autre-chose-a-faire-qu-a-lire-mes-re.html . « Il est venu à mon ermitage des Délices des anglais qui ont vu votre statue à Gènes et qui disent qu'elle est belle et ressemblante . »
3 Le duc de Cumberland, fils de George II. Richelieu, en septembre 1757 l'avait forcé à capituler à Closter-Sewern . Voir la convention de reddition de Klosterzeven, le 10 septembre 1757, qui, on l'a vu, n'a pas été honorée par les Anglais . Voir dans : http://www.histoireeurope.fr/RechercheLocution.php?Locutions=Louis+Fran%E7ois+Armand+de+Vignerot+du+Plessis
4 L'affaire remonte à 1751 ; voir le Précis du siècle de Louis XV, XXXVI [http://fr.wikisource.org/wiki/Pr%C3%A9cis_du_si%C3%A8cle_... ]et l'Histoire du parlement , LXV,[https://books.google.fr/books?id=cSw-AAAAYAAJ&pg=PA330&lpg=PA330&dq=Histoire+du+parlement+,+LXV+voltaire&source=bl&ots=p0wHbpc4Ov&sig=twqnaevFN7U_AQtZh70zlaRwT8I&hl=fr&sa=X&ei=VILGVO3lO4nSaOOqgIAI&ved=0CCYQ6AEwAQ#v=onepage&q=Histoire%20du%20parlement%20%2C%20LXV%20voltaire&f=false ] ainsi que la lettre à Marie-Louise Denis du 24 août 1751 : voir http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-annee-1751-partie-11-110089060.html
5 L’Encyclopédie .
6 La postérité en dira ce qu'elle voudra .
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26/01/2015
je vais selon le temps, et ce n'est pas assurément le temps de décorer des châteaux. J'ai peur que cette année la paix ne soit un château en Espagne
... Sauf ceux de cette architecture
« A Elie BERTRAND
premier pasteur de l'Eglise
française
à Berne
22 janvier 1760
Mon cher ami, j'aurais été bien étonné si Leurs Excellences, qui pensent si noblement, et qui ont tant de sagesse, s'étaient laissé surprendre aux insinuations d'un scélérat tel que Grasset 1.
Je suis toujours enchanté des bontés inaltérables de M. de Freydenrick. Si tous les hommes d'État lui ressemblaient, les choses en iraient mieux, et maître Pangloss trouverait avec moins de peine
le meilleur des mondes possibles. Je ne sais ce que c'est que les pauvretés de Fréron, et toutes ces misérables brochures dont on est chargé, rassasié, dégoûté à l'excès, et qui tombent, au bout de
deux jours, dans l'éternel oubli qu'elles méritent. Nos affaires de France sont un objet plus intéressant ; on n'a point encore de topique pour les blessures faites à nos finances. Je me ralentis
sur mes bâtiments ; je vais selon le temps, et ce n'est pas assurément le temps de décorer des châteaux. J'ai peur que cette année la paix ne soit un château en Espagne.
A propos, je me suis mis à lire Litteras obscurorum virorum, que je n'avais daigné jamais regarder, par préjugé contre le siècle de barbarie où elles furent faites 2. Je suis émerveillé, cela vaut mieux que Rabelais. C'est dommage que notre sainte Église romaine y soit tournée en ridicule. Mais quelle naïveté ! quelle bonne plaisanterie ! je pouffe de rire. Je vois qu'à la fin du XVe siècle on savait déjà du grec en Allemagne, et rien en France.
Nous sommes venus les derniers en tout, et nous sommes actuellent ultimi hominum. Interim vale 3.
V. »
1 Voir lettre du 7 janvier 1760 à Bertrand : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/01/13/la-moitie-de-l-ouvrage-est-un-tissu-de-calomnies-mais-ce-qu-5533135.html
2 Les Epistolae obscurorum virorum (Lettres des hommes obscurs) , satire de l'ignorance monastique, avaient été publiées en 1515 ; elles étaient , au moins en partie l'oeuvre d'Ulrich van Hutten .
3 Les derniers des hommes . En attendant porte-toi bien .
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25/01/2015
ce n'est qu'avec des lauriers que vous aurez de bonnes olives
... Je ne connaissais pas ce bienfait du laurier sur les olives, à moins que,... à moins qu'il ne s'agisse d'olives animales et non végétales . Depuis l'antiquité, on sait que le laurier-sauce réveille l'appétit et redonne du tonus aux organismes affaiblis , de plus il est bénéfique pour ralentir le réchauffement climatique, car anti-flatulences, que n'en donne-t-on pas aussi aux herbivores péteurs et roteurs ( et à tous les végétariens ? ) .
Et ainsi, plutôt que des épinards, Popeye the sailor man, pour satisfaire son Olive Oyl devrait prendre du laurier .
« A Charlotte-Sophie von Altenburg, comtesse Bentinck
Madame, le Suisse malade entouré de neiges, a l'honneur de vous écrire . Pouvez-vous me faire la grâce de me mander si vous avez à Vienne un chambellan de l'empereur nommé Pignatelli 1, comte de Bizaerre ? famille papale, ce qui n'est pas trop respectable pour une comtesse de l'empire huguenotte ; mais qui le sera beaucoup pour Vansuiten 2.
Il n'y a pas d'apparence, madame, que dans le temps que toutes les troupes sont à la glace, vous puissiez m'envoyer si tôt de vos belles feuilles de laurier ; mais enfin, j'en attends dès que le temps sera un peu plus doux ; il m'en faut absolument, car ce n'est qu'avec des lauriers que vous aurez de bonnes olives ; aucune plante ne prospère en France, depuis deux ou trois ans, excepté les chardons . Heureusement, nous avons à présent un excellent jardinier, qui s’appelle M. le duc de Choiseul, et qui a appris son métier à Vienne .
S'il fait aussi froid sur les bords du Danube que sur les bords de mon lac, je crains bien que la santé de M. l'ambassadeur de France, et de Mme l’ambassadrice ne soit altérée ; M. le comte de Choiseul n'avait pas à Paris un corps tout à fait digne de son âme ; je ne sais actuellement comment il est ; je vous prie instamment, madame, de me mettre à ses pieds, et à ceux de Mme la comtesse de Choiseul .
Les triangles, madame, sont une belle figure de géométrie ; trois beaux côtés, bien unis par trois bons angles . Celui qui a inventé cette figure était un grand homme 3.
Je vous suis attaché jusqu'au tombeau avec le plus tendre respect .
V.
Au château de Ferney par Genève 22 janvier [1760] »
1 Le pape Innocent XII se nommait Antoine Pignatelli ; http://fr.wikipedia.org/wiki/Innocent_XII
2 Gérard van Swieten, médecin de Marie-Thérèse ; voir lettre du 29 juin 1758 à la comtesse Bentinck : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/09/06/malgre-l-oubli-de-l-usage-ou-l-on-est-de-charger-ces-paquets.html
Voir aussi : http://fr.wikipedia.org/wiki/Gerard_van_Swieten
3 Toujours Kaunitz, instigateur de la Triple Alliance ; voir lettre du 9 septembre 1758 à la comtesse Bentinck : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/10/22/tout-le-monde-avoue-qu-il-faut-etre-philosophe-qu-il-faut-et.html
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24/01/2015
je ne puis m'empêcher de dicter ce petit billet de malade pour vous remercier tendrement de tout ce que vous avez fait
... pour moi, mon cher Volti et chère Mam'zelle Wagnière .
« A Nicolas Pierron
à Tournay par Genève
21 janvier 1760 1
Le froid me tue, les neiges me désespèrent, mon cher monsieur, mais je ne puis m'empêcher de dicter ce petit billet de malade pour vous remercier tendrement de tout ce que vous avez fait pour mon cher Collini . Comptez que vous l'avez fait pour vous-même ; vous vous êtes acquis un ami reconnaissant , il vous est attaché pour la vie ; il ne me parle dans ses lettres que des obligations qu'il vous a .
Mettez-moi, je vous prie, aux pieds de son Altesse Électorale . Réservez à Schwetzingen une chambre à cheminée pour un pauvre malingre qui fait du feu à la Saint-Jean . J'ose croire que mon cœur est fait pour le sien , mais mon corps en est bien loin . Je respecterai et j'adorerai ce prince jusqu'au dernier moment de ma vie .
Votre très humble et obéissant serviteur et ami .
VOLTAIRE
Comte de Tournay . »
1 Copie par Collini, avec une note de celui-ci : « Copie de lettre à M. Pierron à Mannheim »
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Vous me ferez un grand plaisir de m'écrire quelquefois
... Quelque commentaire de votre goût .
« A Cosimo Alessandro Collini
A Tournay par Genève
21 janvier [1760]
Mon cher secrétaire intime de Son Altesse électorale, je reconnais votre bon cœur, à la manière tendre et pathétique dont vous me parlez de M. Pierron 1, et surtout à votre attachement pour le meilleur prince qu'il y ait sur la terre . Vous voilà heureux, puisque vous êtes auprès de lui ; j'espère 2, tout malingre que je suis, partager votre bonheur cet été . Vous me ferez un grand plaisir de m'écrire quelquefois, surtout quand les braves troupes palatines auront remporté quelque avantage .
Je vous embrasse de tout mon cœur .
V. COMTE DE TOURNAY 3
Mettez un petit pain 4 à la lettre pour M. Pierron . »
1 Voir lettre du 16 décembre 1759 à Pierron : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/12/26/mon-cher-ami-je-vous-envoie-mon-precurseur-5520636.html
2 Le mot suivant qui est peut-être « aussi » a été soigneusement biffé .
3 Voici ce que dit Colini, dans ses Mémoires, au sujet de cette signature : « Voltaire signa quelque temps de la sorte, après avoir acquis la terre de Tournay. Ses ennemis ne virent pas que c'était une plaisanterie, et accusèrent ce grand homme d'une vanité ridicule. Il avait pris ce titre de comte comme il prit ensuite celui de frère Voltaire, capucin indigne, lorsque les capucins du pays de Gex l'eurent nommé (1770) leur père temporel. »
4 Cachetez (petit pain de cire ).
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23/01/2015
I am indeed yr friend, since you are a man without prejudices, a man of every country / Je suis, à la vérité, votre ami, depuis que vous êtes un homme sans préjugés, un citoyen de tous pays
... "Sans préjugés", "de tous pays" : quel rêve pour quiconque aime la paix et l'union fraternelle .
Mais comme on est loin de cela quand on voit tant d'envie de divisions chez ces humains qui revendiquent quelques arpents d'une terre qui n'a ni Dieu ni maître en réalité et qui aura le dernier mot en recyclant leurs misérables carcasses . Comme on est loin de l'humanisme d'un mien grand-père, né en 1880, et qui a toujours trouvé stupide la notion de frontières territoriales, qui sont loin d'être des garants de paix, qui sont bonnes seulement pour ceux qui ont peur de "l'autre".
C'est mieux comme ça !
http://www.lepartenariat.org/?option=com_content&view=article&id=15&Itemid=115
« A George Keate
You are not, dear Sir, like most of yr countrymen, who forget their friendships contracted in terra so soon as they are pent up in their island. You remember me. I am indeed yr friend, since you are a man without prejudices, a man of every country. Had I not fixed the seat of my retreat in the free corner of Geneva, I would certainly live in the free kingdom of England ; for though I do not like the monstrous irregularities of Shakespear, though I admire but some lively and masterly strokes in his performances, yet I am confident no body in the world looks with a greater veneration on yr good philosophers, on the croud of yr good authors ; and I am these thirty years the disciple of yr way of thinking. Yr nation is at once a people of warriours and of philosophers. You are now at the pitch of glory, in regard to publick affairs ; but I know not whether you have preserv'd the reputation yr island enjoy'd in point of litterature when Addison, Congreve, Pope, Swift, were alive. However, you kan not be so low as we are. Poor France, at the present time, has neither navy, nor money, nor plate, nor fame, nor wit. We are at the ebb of all. I have read the life of Mme de Pompadour, printed at London 1. Indeed, Sir, t'is a scurrilous book. I assure you there is not one page of truth.
Pray, in case some good book appears into yr world, let me be inform'd of it 2.
Adieu, mon cher jeune philosophe, je compte sur votre souvenir, et je vous aimerai toujours.
Yr for ever,
Voltaire
Aux Délices 16 janvier 1760 n.s. ».
1 Communiquée à l'Illustrated London News, par M. John Henderson, esq. (voir la lettre du 20 juin 1759 à Keate : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/08/07/i... ). L'original, en anglais, est de la main de Voltaire.
2 Traduction: « Vous n’êtes pas, cher monsieur, comme beaucoup de vos compatriotes, qui oublient leurs amitiés contractées sur le continent aussitôt qu'ils sont rentrés dans leur ile. Vous vous souvenez de moi. Je suis, à la vérité, votre ami, depuis que vous êtes un homme sans préjugés, un citoyen de tous pays. Si je n'avais pas fixé le lieu de ma retraite près du libre territoire de Genève, j'aurais certainement voulu vivre dans le libre royaume d'Angleterre : car, quoique je n'aime pas les monstrueuses irrégularités de Shakespeare, je ne laisse pas d'admirer les traits de génie qui brillent dans ses créations; j'ai la certitude que personne n'a plus de vénération pour vos bons philosophes, pour la foule de vos bons auteurs. Voici trente ans que je suis votre disciple dans la manière de penser. Votre nation est à la fois un peuple de guerriers et de philosophes. Vous êtes maintenant au faite de la gloire, quant aux affaires publiques. Mais je ne sais si vous avez gardé la réputation dont votre ile jouissait, sous le rapport de la littérature, lorsque Addison, Congrève, Pope, Swift, étaient vivants. En tout cas vous ne pouvez être aussi bas que nous. Pauvre France! aujourd'hui elle n'a plus ni marine, ni monnaie, ni vaisselle d'argent, ni renommée, ni esprit. Nous sommes au déclin de tout.
J'ai lu la Vie de Mme de Pompadour, imprimée à Londres. En vérité, monsieur, c'est un livre bouffon. Je vous certifie qu'il ne s'y trouve pas une page de vérité.
Je vous prie, si quelque bon ouvrage parait parmi vous, de m'en informer. »
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