15/11/2009
Mes tentations sont allées au diable d’où elles venaient

« A Pierre-Louis Moreau de Maupertuis
Pardon, Monsieur. . Votre première lettre m’a baptisé dans la religion newtonienne, votre seconde m’a donné la confirmation. En vous remerciant de vos sacrements. Brûlez, je vous prie mes ridicules objections, elles sont d’un infidèle. Je garderai à jamais vos lettres. Elles sont d’un grand apôtre de Newton. Lumen ad revelationem gentium.[Luc, évangile ]. Je suis avec bien de l’admiration, de la reconnaissance et de la honte votre très humble et indigne disciple [Maupertuis vient de publier le Discours sur les différentes figures des astres … avec une exposition abrégée des systèmes de M. Descartes et de M. Newton . V* et Maupertuis se brouilleront pendant le séjour en Prusse vingt ans plus tard ]
Voltaire.
A Fontainebleau ce samedi [15 novembre 1732]. »
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14/11/2009
quand James ne peut, LoveV le fait
O rage ! O documentation ennemie !
Que n'ai-je donc cherché avec ma mie !
J'eusse trouvé sans peine cette lettre
Qui se dérobe, et ne peut mettre
En ligne, ce quatorze novembre,
Qu'un lien . Nul ne peut le distendre ,
Pas plus que celui qui nous unit,
Et fait de nous des amis.
Belle sans fard, vive sans méchanceté,
Elle aime Voltaire , et depuis l'été, peut-être,
Un peu James , grand copieur de lettres.
Du moins, le rêve-t-il !

Lettre à M. l’Abbé Desfontaines
A Cirey,le 14 Novembre.
http://www.monsieurdevoltaire.com/pages/Annee_1735_Partie...
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13/11/2009
je tremble toutes les fois que je vous présente un article
http://www.wat.tv/video/ray-charles-for-mama-1jd8u_18ept_...
Si vous n’avez pas les larmes aux yeux, vous êtes des cœurs de pierre !
Seul le hasard m’a fait trouver cette version de La Mamma, et mon affection pour Ray ne fait qu’en grandir, si c’était encore possible .

«A Jean Le Rond d’Alembert
Aux Délices, où nous voudrions bien vous tenir, 13 novembre 1756
Mon cher Maître, je serai bientôt hors d’état de mettre des points et des virgules à votre grand trésor des connaissances humaines [l’Encyclopédie]. Je tâcherai pourtant, avant de rejoindre l’archimage Yebor [anagramme de Boyer mort en 1755, et nom d’un personnage de Zadig] et ses confrères, de remplir la tâche que vous vouliez me donner.
Voici Froid et une petite queue à Français [les deux dernières colonnes de l’article qui traitent de l’histoire de la langue.] par un a, Galant et Garant ; le reste viendra si je suis en vie.
Je suis bien loin de penser qu’il faille s’en tenir aux définitions et aux exemples [le 9 octobre V* lui avait écrit : « Je suis encore fâché qu’on fasse des dissertations … Je voudrais partout la définition et l’origine du mot avec des exemples. »] ; mais je maintiens qu’il en faut partout, et que c’est l’essence même de tout dictionnaire utile. J’ai vu par hasard quelques articles de ceux qui se font, comme moi les garçons de cette grande boutique ; ce sont, pour la plupart, des dissertations sans méthode. On vient d’imprimer dans un journal l’article Femme, qu’on tourne horriblement en ridicule. Je ne peux croire que vous ayez souffert un tel article dans un ouvrage si sérieux : Chloé presse du genou un petit-maître, et chiffonne les dentelles d’un autre [le texte exact est : « … à une table de jeu… elle (Chloé) répond du genou à l’un , serre la main d’un autre en louant ses dentelles , et jette en même temps quelques mots à un troisième. » L’article est signé par Desmahis.]. Il semble que cet article soit fait par le laquais de Gil Blas.
J’ai vu Enthousiasme [de Cahusac], qui est meilleur ; mais on n’a que faire d’un si long discours pour savoir que l’enthousiasme doit être gouverné par la raison. Le lecteur veut savoir d’où vient ce mot, pourquoi les anciens le consacrèrent à la divination, à la poésie, à l’éloquence, au zèle de la superstition ; le lecteur veut des exemples de ce transport secret de l’âme appelé enthousiasme ; ensuite il est permis de dire que la raison qui préside à tout, doit aussi conduire ce transport. Enfin je ne voudrais dans votre Dictionnaire que vérité et méthode. Je ne me soucie pas qu’on me donne son avis particulier sur la Comédie, je veux qu’on m’en apprenne la naissance et les progrès chez chaque nation : voilà ce qui plait, voilà ce qui instruit. On ne lit point ces petites déclamations dans lesquelles un auteur ne donne que ses propres idées qui ne sont qu’un sujet de dispute. C’est le malheur de presque tous les littérateurs d’aujourd’hui. Pour moi, je tremble toutes les fois que je vous présente un article. Il n’y en a point qui ne demande le précis d’une grande érudition. Je suis sans livres, je suis malade, je vous sers comme je peux. Jetez au feu ce qui vous déplaira.
Pendant la guerre des parlements et des évêques [le roi devra tenir un lit de justice le 13 décembre ], les gens raisonnables ont beau jeu, et vous aurez le loisir de farcir l’Encyclopédie de vérités qu’on n’eût pas osé dire il y a vingt ans ; quand les pédants se battent, les philosophes triomphent.
S’il est temps encore de souscrire, j’enverrai à Briasson l’argent qu’il faut : je ne veux pas de son livre autrement. Mme Denis vous fait les plus tendres compliments ; je vous en accable. Je suis fâché que le philosophe Duclos ait imaginé que j’ai autrefois donné une préférence à un prêtre sur lui [V* a certainement soutenu l’abbé La Ville –protégé du marquis d’Argenson- contre Duclos lors d’une élection à l’Académie en juin 1746]; j’en étais bien loin, et il s’est bien trompé. Adieu, achevez le plus grand ouvrage du monde.
Voltaire. »
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11/11/2009
Nous nous ramentevons ici qu’il y a six semaines en ça que nous prîmes la liberté
http://www.dailymotion.com/video/x6pvib_erroll-garner-196...
Entre quelques pots de confiture (que je fais de mes rouges mains ) et pendant le repassage, je ne sais quelle idée m'a pris de réécouter du bon vieux jazz , d'où ce morceau d'Errol Garner qui me donne envie de sautiller et qui en tout cas ne rend pas morose. J'aimerais bien toucher le clavier du PC aussi lestement que lui, celui de son piano !

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental
Le vieux ministre de Statira [personnage de la tragédie intitulée Statira ou Cassandre ou Olympie] ci-devant épouse d’Alexandre ayant reçu très tard la déduction du comité [les critiques de d’Argental et ses amis] , ne peut aujourd’hui que remercier Leurs Excellences, et leur faire les plus sincères protestations de la reconnaissance qu’il leur doit. Mais n’ayant pu consulter encore sa cour il est très fâché de ne pas apporter un aussi prompt redressement qu’il le voudrait, aux griefs de Leurs Excellences. Son auguste souveraine Statira a pris le mémoire ad referendum mais comme elle est malade d’une suffocation qui la fera mourir au quatrième acte, son conseil aura l’honneur d’envoyer incessamment à votre cour les dernières volontés de cette auguste autocratrice.
J’aurai l’honneur de vous donner part que j’envoyai il y a onze jours la feuille importante concernant les intérêts de la demoiselle Dangeville, attachée à la cour de France [c’est_à-dire : actrice de la Comédie française ; elle aurait été mécontente de n’avoir pas le premier rôle], et pour laquelle nous aurons tous les égards à elle dus ; que cette pièce importante était adressée à M. de l’Amilaville [Damilaville] avec un gros paquet de Grizel,[Conversation de M. l’intendant des menus en exercice avec M. l’abbé de Grizel, datée du 20 mai 1761 ; elle répond au réquisitoire de maître de Dains qui attaquait le théâtre, les comédiens et leur défenseur Huerne ; voir lettres des 6 mai, 31 mai, 21 juin, 7 août 1761], de Car, de Ah ah [qui attaquent Lefranc de Pompignan (et ses œuvres) qui avait prononcé un discours de réception à l’Académie antiphilosophique], et de chansons intitulées Moïse Aaron [à savoir la Chanson en l’honneur de maître Lefranc de Pompignan, qui commence par : « Moîse, Aaron, / Vous êtes des gens d’importance » ; Lefranc aurait « prié M. Dupré de Saint-Maur, qui (le) recevait à l’Académie , de (le) comparer à Moïse …, et M. (son) frère à Aaron. ». Tous ces pamplets sont de V*]. Nous craignons que malgré la bonne harmonie et correspondance des deux cours on n’ait saisi notre paquet comme trop gros, et qu’on l’ait porté à Sa Majesté Très Chrétienne qui sans doute en aura ri, et auquel nous souhaitons toutes sortes de prospérités.
Nous avons aussi dépêché à Vos Excellences copie des dits mémorials intitulés Grizel, Gouju [La Lettre de Charles Gouju à ses frères au sujet des révérends pères jésuite], Car, Ah ah, Moïse et Aaron ; et nous sommes en peine de tous nos paquets, pour lesquels nous réclamons le droit des gens.
Et pour n’avoir rien à nous reprocher, non seulement nous vous expédions par le présent courrier les lettres patentes pour le cinquième acte de la demoiselle Dangeville au confident Damilaville, recommandant expressément que le tout soit intitulé Le Droit du Seigneur.
Nous nous ramentevons ici qu’il y a six semaines en ça que nous prîmes la liberté de vous adresser un paquet énorme pour Mme du Deffand duquel paquet et de laquelle dame nous n’avons depuis entendu parler.
Nous laissons le tout à considérer à votre haute prudence et nous vous renouvelons les assurances de notre sincère et respectueux attachement ; donné à Ephèse dans la cellule de sœur Statira.
Voltaire
Le 11 novbre 1761 au soir. »

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10/11/2009
La justice rendue gratuitement...
"La justice rendue gratuitement..." : ça ne vous épate pas un tel projet ?
Et c'est Voltaire, au dix-huitième siècle qui demande celà . C'est un gaillard qui, - bec et ongles-, se bat contre l'injustice ( le bec et ongles est voulu, il se battait avec son arme favorite : la plume ! ), qui est outré par les frais de justice (si on peut encore parler de justice ! ) . Il serait encore malheureusement outré de nos jours .
Point de pognon, point de défense !
Point de défense = croupir dans des prisons qui font la honte d'un pays prétendu civilisé ! Songez-y, braves bloggers et lecteurs ! Pas besoin d'aller dans des pays exotiques pour connaitre l'école de la haine et du crime par l'enfermement !
Pauvre France ! Ta justice fout le camp !!! Ta justice est foutue !!!

« Au chevalier Jacques de Rochefort d’Ally
9 novembre 1771
Vous pardonnerez sans doute, mon cher militaire philosophe [allusion au Militaire Philosophe de Naigeon, imprimé d’après un ancien manuscrit ], au vieux malade qui parait si négligent, mais il sera toujours pénétré pour vous de la plus tendre amitié. Je prends la liberté d’en dire autant à Mme Dix-neuf ans [jeune femme du chevalier que V* appelait auparavant « madame Dix-huit ans »] qui est tout aussi philosophe que vous.
Je ne vous ai point envoyé La Méprise d’Arras [La Méprise d’Arras (Lausanne 1771), composée en faveur de Monbailli et de sa femme accusés d’avoir tué la mère de Monbailli]. Premièrement le paquet était trop gros ; en second lieu, ayant été mieux informé j’ai su que l’avocat avait fait un roman plutôt qu’un factum [Le Mémoire à consulter pour François-Joseph Monbailli, daté du 8 janvier 1771, et signé Louis ], et qu’il avait joint au ridicule de la déclamation puérile le malheur de mentir en cinq ou six endroits importants. Ce bavard m’avait induit en erreur. Ainsi on est obligé de supprimer La Méprise. Le malheureux qui a été condamné à la roue était assurément très innocent. Sa femme condamnée à être brûlée était plus innocente encore ; mais l’avocat n’en est qu’un plus grand sot d’avoir affaibli une si bonne cause par des faussetés, et d’avoir détruit des raisons pitoyables. J’ignore actuellement où cette affaire abominable en est ; je sais seulement que la malheureuse veuve de Monbailli n’a point été exécutée [elle fut acquittée et son mari réhabilité]. Il est arrivé à cette infortunée la même chose qu’aux prétendus complices du chevalier de La Barre : le supplice de ce jeune officier qui serait certainement devenu un homme de très grand mérite arracha tant de larmes et excita tant d’horreur, que les misérables juges d’Abbeville n’osèrent jamais achever le procès criminel de ces pauvres jeunes gens qui devaient être sacrifiés au fanatisme. Ces fatales catastrophes qui arrivent de temps en temps, jointes aux malheurs publics, font gémir sur la nature humaine. Mais que mon militaire philosophe soit heureux avec Mme Dix-neuf ans : il est de l’intérêt de la Providence que la vertu soit quelquefois récompensée.
On vient de réformer le parlement de Dijon ; on en fait autant de Rennes et à Grenoble. Celui de Dombes, qui n’était qu’une excroissance inutile, est supprimé. Voilà toute cette grande révolution finie plus heureusement et avec plus de tranquillité qu’on avait osé l’espérer. La justice rendue gratuitement, et celle des seigneurs exercée aux dépens du roi, seront une grande époque et la plus honorable de ce siècle. Il y a de quoi se consoler de tant de malheurs attachés à notre pauvre espèce.
Vous ne retournerez à Paris qu’à la fin de décembre ; il faudra que vous alliez servir votre quartier, vous n’aurez guère le temps de voir M. d’Alembert ; mais si vous le voyez, je vous prie de lui dire que je voudrais passer le reste de ma vie entre vous et lui.
Notre ermitage vous renouvelle les sincères assurances de l’amitié la plus inviolable.
Voltaire »
12:27 | Lien permanent | Commentaires (0)