23/09/2012
Où pourrais-je être mieux que dans le repos, la liberté, et l'abondance ?
... Dans la peau d'un homme sans maladie, je suppose ! mon cher Volti !
Il me semble qu'à chaque fois que vous écrivez à Marie-Ursule, vous ne pouvez vous empêcher de frimer un peu, tout comme un jeune qui fait sa cour et veut épater sa belle . Je dis jeune en pensant aussi à ceux qui, plus murs,(suivez mon regard), gardent une belle jeunesse d'esprit et aiment la vie et leurs proches . De toute façon, il est une chose qui vous démasque ici, c'est votre satisfaction affichée pour le repos, vous qui n'êtes jamais aussi vivant et gaillard qu'au travail .
Si toutefois un gain au loto m'apporte l'abondance, j'aurai du même coup du repos et profiterai de ma liberté à l'égal de mon maître Volti . Et à propos, je pourrais sponsoriser l'achat des manuscrits d'Emilie du Châtelet, récemment retrouvés .
http://fonds-voltaire.org/index.php/patrimoine/cirey
« A madame Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de Lutzelbourg.
A Monrion, 20 janvier [1757].
J'ai eu cinquante relations, madame, de cette abominable entreprise d'un monstre 1 qui, heureusement, n'était qu'un insensé. Si l'excès de son crime ne lui avait pas ôté l'usage de la raison, il n'aurait pas imaginé qu'on pouvait tuer un roi avec un méchant petit canif à tailler des plumes. Ce qu'il y a de plus frappant, c'est que ce bâtard de Ravaillac avait trente louis d'or en poche. Ravaillac n'était pas si riche. Vous savez qu'il avait été laquais chez je ne sais quel homme de robe nommé Maridor, et que son frère servait actuellement chez un conseiller des enquêtes. Ce conseiller a dénoncé ce frère de l'assassin, et ce frère est probablement très-innocent. Le monstre est un chien qui aura entendu aboyer quelques chiens des enquêtes, et qui aura pris la rage. C'est ainsi que le fanatisme est fait. A peine le roi a-t-il été blessé. Cette abominable aventure n'aura servi qu'à le rendre plus cher à la nation, et pourra apaiser toutes les querelles. C'est un grand bien qui sera produit par un grand crime. Fontenelle est mort à cent ans 2. Je vous souhaite une vie encore plus longue.
Je passe mon hiver à Monrion près de Lausanne. Cela me fait retrouver mes Délices beaucoup plus délices au printemps. Où pourrais-je être mieux que dans le repos, la liberté, et l'abondance ? »
1 Damiens; voir page 389 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411331n/f392.image
et page 92 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4113321/f95.image
2 Moins un mois et deux jours ; voir page 71 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4113308/f88.image
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Mais comment me justifierai-je d'avoir tant assuré que ces horreurs n'arriveraient plus, que le temps du fanatisme était passé,...? Je voudrais que dans quelque temps on rejouât Mahomet
... En disant que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles actuellement .
Pauvre réponse que je donne .
Voltaire, plus intelligemment, demandera qu'on remette en lumière une de ses dénonciations du fanatisme religieux, "Mahomet ou Le Fanatisme" ; cette tragédie n'a toujours pas l'heur de plaire de nos jours et fut interdite de représentation il y a peu d'années dans l'hypocrite et cosmopolite ville de Genève . Evidemment l'argent des pays arabes prime sur la liberté de pensée et de parole, sans pudeur, et ce n'est pas près de changer .
http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Fanatisme_ou_Mahomet
Hélas,Charlie Hebdo n'a été capable que de faire dans "l'énorme", juste dans le principe, sot dans l'exécution , dommage . N'est pas Voltaire qui veut !
Petit rappel :
http://fonds-voltaire.org/index.php/patrimoine/cirey
« A M. le comte d'ARGENTAL.
A Monrion, 20 janvier [1757].
Mon cher ange, je sens tout le prix de votre souvenir dans un temps où vous êtes si consterné de l'horrible aventure, et si occupé à remplir le vide immense laissé dans le parlement 1. Votre assiduité à des devoirs nouveaux dont vous êtes dispensé est un mérite dont le parlement, le public, et la cour, doivent vous tenir compte. Je me flatte, pour l'honneur de la nation et du siècle, et pour le mien, qui ai tant célébré cette nation et ce siècle, qu'on ne trouvera nulle ombre de complicité, nulle apparence de complot dans l'attentat aussi abominable qu'absurde de ce polisson d'assassin, de ce misérable bâtard de Ravaillac. J'espère qu'on n'y trouvera que l'excès de la démence il est vrai que cette démence aura été inspirée par quelques discours fanatiques de la canaille c'est un chien mordu par quelques chiens de la rue, qui sera devenu enragé. Il paraît que le monstre n'avait pas un dessein bien arrêté, puisque, après tout, on ne tue point des rois avec un canif à tailler des plumes. Mais pourquoi le scélérat avait-il trente louis dans sa poche ?2 Ravaillac et Jacques Clément n'avaient pas un sou. Je n'ose importuner votre amitié sur les détails de cet exécrable attentat. Mais comment me justifierai-je d'avoir tant assuré que ces horreurs n'arriveraient plus, que le temps du fanatisme était passé, que la raison et la douceur des mœurs régnaient en France? Je voudrais que dans quelque temps on rejouât Mahomet 3. Je n'ose vous parler à présent de cette Histoire générale, ou plutôt de cette peinture des misères humaines, de ce tableau des horreurs de dix siècles mais, si vous avez le loisir de recueillir les opinions de ceux qui auront eu le courage d'en lire quelque chose, vous me rendrez un vrai service de m'apprendre ce qu'on en pense et ce que je dois corriger en général: car c'est toujours à me corriger que je m'étudie. Que fais-je autre chose avec l'ancienne Zulime ? Le travail a fait toujours ma consolation: le rabot et la lime sont toujours mes instruments. Est-il vrai que M. de Sainte- Palaye 4 succédera à Fontenelle dans l'Académie? Je lui souhaite sa place et sa longue vie. Adieu, mon cher et respectable ami.
Mille tendres respects à tous les anges. Les deux Suisses vous embrassent. »
1 Louis XV venait d'exiler seize conseillers, du nombre desquels était l'abbé de Chauvelin. . A la demande du roi,le pape avait promulgué un bref aux évêques de France, que le Parlement avait condamné et supprimé, et le roi supprima le Parlement le 15 décembre 1756 ; ceux qui ne furent pas renvoyés résignèrent leur charge .
4 Jean-Baptiste de La Curne de Sainte Palaye : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Baptiste_de_La_Curne_de...
Il succèdera à Louis de Boissy, poète comique, en mai 1758 . C'est Antoine-Louis Séguier qui succéda à Fontenelle .
16:22 | Lien permanent | Commentaires (0)
Réjouissez-vous à Lyon, avec la meilleure des femmes
... Car vous avez la chance d'héberger Mam'zelle Wagnière , qui peut compter sur "l'inviolable attachement " d'un solitaire gessien .
A vous ces jolies fleurs, à votre image, épanouies et tendres
BON ANNIVERSAIRE LOVEVOLTAIRE
Autre femme remarquable, Emilie du Châtelet, compagne et amie de Voltaire. On a retrouvé un certain nombre de manuscrits de cette savante et ils vont être mis en vente aux enchères le mois prochain . Pour permettre leur maintien en France, leur étude et sauvegarde , il est fait appel aux donateurs .
http://fonds-voltaire.org/index.php/patrimoine/cirey
URGENCE
http://fonds-voltaire.org/edc1/
« A M. Pierre PICTET,
[Professeur en droit.]
Magistrat de Genève, chez le sieur Le Blanc à Lyon
Monrion, 16 janvier [1757].
Mon très-aimable voisin, les Délices ne sont plus Délices quand vous n'êtes plus dans le voisinage; il faut alors être à Monrion. Votre souvenir me console; et l'espérance de vous revoir, au printemps, me donne un peu de force.
Je suis bien honteux pour ma nation qu'il y ait encore des Ravaillac; mais Pierre 1 Damiens n'est heureusement qu'un bâtard de la maison Ravaillac, qui a cru pouvoir tuer un roi avec un méchant petit canif à tailler des plumes. C'est un monstre, mais c'est un fou. Cet horrible accident ne servira qu'à rendre le roi plus cher à la nation, le parlement moins rétif, et les évêques plus sages.
Réjouissez-vous à Lyon, avec la meilleure des femmes et la plus aimable des filles, et comptez sur l'inviolable attachement des deux solitaires suisses. »
14:28 | Lien permanent | Commentaires (0)
22/09/2012
On ne doit pas me reprocher du moins d'avoir tant écrit contre le fanatisme je n'en ai pas encore assez dit
... Et vous pouvez compter sur moi, modeste scribe/scribouillard, pour vous informer au jour le jour des pensées et actions de Voltaire contre le fanatisme .
Et Fesses de bouc, le grand frère protecteur des petits n'enfants trop bien connu, par trouille s'est permis de bloquer la page du Point pour épargner le pauvre lecteur heurté par la caricature de Mohammed issue de Charlie hebdo . On dit "merci à FdB !"
Me voici rassuré à tout jamais sur la sauvegarde du droit de penser de mes petits enfants ; aucune aventure sordide , aucune nouvelle sexuelle , aucune information pertinente ne peut les toucher : FESSES de BOUC LES PROTEGE !
« A madame de FONTAINE,
A PARIS.
A Monrion, 16 janvier [1757]
Ceci est pour ma nièce, ma compagne en maladies; pour mon neveu le juge et le prédicateur, pour mon petit-neveu, pour M. de Florian, que j'embrasse tous du meilleur de mon cœur. Nous sommes un peu malades, Mme Denis et moi, à Monrion.
Les bons Suisses me reprochent d'avoir trop loué une nation et un siècle qui produisent encore des Ravaillac. Je ne m'attendais pas que des querelles ridicules produiraient de tels monstres.
Je crois bien que Robert-François Damiens n'a point de complices; mais c'est un chien qui a gagné la rage avec les chiens de Saint-Médard; c'est un reste des convulsions. On ne doit pas me reprocher du moins d'avoir tant écrit contre le fanatisme je n'en ai pas encore assez dit. S'il y a quelque chose de nouveau, nous prions instamment M. de Florian, qui n'épargne pas ses peines, de se souvenir de nous.
Songez à votre santé, ma chère nièce; j'ai fait un fort beau présent 1 au grand Tronchin le guérisseur il en est très-content. Voici ce Testament 2 que vous demandez, ma chère enfant; je vous prie d'en donner copie sur-le-champ à M. d'Argental et à Thieriot. Ce nouveau Testament est meilleur que l'ancien qui court sous mon nom. »
1 Il lui a offert des flambeaux en décembre 1756 : le 22 décembre il écrit à Jean-Robert Tronchin : « Voici pour les payer deux petits billes de change, l'un de 3200 livres tournois 6, l'autre de 4028 livres tournois 16 . »
2 Voltaire désigne ainsi son poème de la Religion naturelle, dans la lettre à Thieriot du 12 avril 1757 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/06/21/quoique-j-y-aie-dit-tout-ce-que-je-pense-je-me-flatte-pourta.html
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21/09/2012
Pourquoi faut-il que les fanatiques s'épaulent tous les uns les autres
... Parce qu'ils sont lâches et minoritaires .
Lire sans délai : http://blog.lefigaro.fr/rioufol/2012/09/pourquoi-charlie-hebdo-sauve-l.html
Un brin de bon sens !
Voir : http://www.courrierinternational.com/article/2012/09/18/une-culture-de-la-haine-fort-contagieuse
« A M. D'ALEMBERT.
A Monrion, 16 janvier [1757].
Je vous envoie, mon cher maître, l'article Imagination, comme un boiteux qui a perdu sa jambe la sent encore un peu. Je vous demande en grâce de me dire ce que c'est qu'un livre contre ces pauvres déistes, intitulé la Religion vengée 1, et dédié à monseigneur le dauphin, dont le premier tome parait déjà, et dont les autres suivront de mois en mois, pour mieux frapper le public.
Savez-vous quel est ce mauvais citoyen qui veut faire accroire à monsieur le dauphin que le royaume est plein d'ennemis de la religion? Il ne dira pas au moins que Pierre 2 Damiens, François Ravaillac, et ses prédécesseurs, étaient des déistes, des philosophes. Pierre Damiens avait dans sa poche un très-joli petit Testament 3 de Mons. Je crois l'auteur parent de Pierre Damiens. Mandez-moi le nom du coquin, je vous prie, et le succès de son pieux libelle. Votre France est pleine de monstres de toute espèce. Pourquoi faut-il que les fanatiques s'épaulent tous les uns les autres, et que les philosophes soient désunis et dispersés! Réunissez le petit troupeau, courage. J'ai bien peur que Pierre Damiens ne nuise beaucoup à la philosophie.
Mme Denis et le solitaire Voltaire vous embrassent tendrement. »
1 La Religion vengée, ou Réfutation des auteurs impies, par une société de gens de Lettres (Soret, le père Hayer, etc.), t. 1, 1757, in-12. il en a paru, depuis, vingt autres volumes. Le premier cahier a paru en janvier 1757 . http://books.google.fr/books?id=HokUAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false
3 Voltaire veut donner à entendre que Damiens était l'instrument des jansénistes, en supposant qu'il était porteur du N. T. de Mons, dont voici le titre Nouveau Testament traduit sur la Vulgate, avec les différences du grec, Mons, Gaspard Migeot (Amsterdam, Elzevier), 1667, deux volumes in-12, que le père Colonia a compris dans sa Bibliothèque janséniste. Le livre trouvé sur Damiens était intitulé Instruction chrétienne. (Beuchot.)
17:34 | Lien permanent | Commentaires (0)
de bons ridicules et de grands seaux d'eau, c'est la seule façon d'apaiser tout.
... Si au moins c'était possible !
Mais je crois qu'il faudra plus que ça pour apaiser les fanatiques islamistes . Ils sont pauvres doublement, pécunièrement et en esprit, donc doublement faciles à duper . "S'il y a un complot, je n'ai rien à dire" dit Voltaire, et moi au contraire j'affirme que s'il y a complot, et j'en suis sûr malheureusement, il ne reste qu'à trouver à qui profite le crime pour trouver les véritables coupables de ces tueries .
Inch Allah, mais attache bien ton chameau !
« A M. de CIDEVILLE. 1
A Monrion, le 16 janvier [1757].
Nous vous sommes très-obligés, monsieur, de nous avoir rassurés sur l'état du roi, après nos justes alarmes. Toutes les nouvelles s'accordent à dire qu'il est très-bien, et que cette affreuse catastrophe ne peut avoir aucune suite fâcheuse. Il est fort à désirer qu'on puisse faire parler ce monstre.
C'est certainement un fou fanatique; mais, s'il a des complices, il est bien essentiel de les connaitre. Mandez-moi tout ce que vous saurez. Nous sommes fort étonnés que vous n'ayez pas encore l'édition de mon oncle et l'Histoire générale. Il écrit positivement à M. Cramer pour qu'elle vous soit envoyée sur-le-champ. Nous sommes à Monrion depuis huit jours, et nous ne nous y portons pas trop bien l'un et l'autre. Ecrivez-nous toujours aux Délices, car peut-être y retournerons-nous bientôt.
J'espère qu'après tant d'alarmes tout sera tranquille dans Paris avant quinze jours. Si l'on avait fait des petites-maisons pour le clergé et le parlement, et qu'on eût jeté sur leurs querelles tout le ridicule qu'elles méritent, il y aurait eu moins de têtes échauffées, et par conséquent moins de fanatiques. Le public a mis trop d'importance à ces misères; de bons ridicules et de grands seaux d'eau, c'est la seule façon d'apaiser tout.
Mon oncle a fait à notre siècle plus d'honneur qu'il ne mérite, quand il a dit que la philosophie avait assez gagné en France, et que nos mœurs étaient trop douces actuellement pour craindre que les Français pussent dorénavant assassiner leur roi. Il est désespéré de s'être trompé, car il aime véritablement et la France et son roi; mais un fou ne fait pas la nation. Le roi est aimé, et mérite de l'être, à tous égards.
Adieu, monsieur; songez quelquefois à vos amis des Délices, et soyez persuadé qu'ils ont pour vous la plus tendre et la plus inviolable amitié. Il faut, mon cher et ancien ami, que la tête ait tourné à ce huguenot de Cramer, qui m'avait tant promis de vous apporter mes guenilles.
Les étrangers me reprochent d'avoir insinué, dans plus d'un endroit, que, vous autres Français, vous êtes doux et philosophes. Ils disent qu'on assassine trop de rois en France pour des querelles de prêtres. Mais un chien enragé d'Arras, un malheureux convulsionnaire de Saint-Médard, qui croit tuer un roi de France avec un canif à tailler des plumes, un forcené idiot, un si sot monstre a-t-il quelque chose de commun avec la nation? Ce qu'il y a de déplorable, c'est que l'esprit convulsionnaire a pénétré dans l'âme de cet exécrable coquin. Les miracles de ce fou de Paris, l'imbécile Montgeron, ont commencé, et Robert-François Damiens a fini. Si Louis XIV n'avait pas donné trop de poids à un plat livre de Quesnel, et trop de confiance aux fureurs du fripon Le Tellier, son confesseur, jamais Louis XV n'eût reçu de coup de canif. Il me parait impossible qu'il y ait eu un complot: en ce cas, je suis justifié des éloges de ma nation; s'il y a un complot, je n'ai rien à dire.
Je vous embrasse tendrement, vous et le grand abbé 2. N'oubliez jamais votre vieux et très-attaché camarade V. »
1 Les quatre premiers alinéas de cette lettre sont de la main de Mme Denis; les trois derniers sont de l'écriture de Voltaire.
2 L'abbé du Resnel : Jean-François du Resnel du Bellay : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Fran%C3%A7ois_Du_Resnel...
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20/09/2012
Je prendrais la liberté de le supplier de m'envoyer des graines de ses melons
... Avant que je mange les pissenlits par la racine ! Certains disent "bâtir, passe encore mais planter à cet âge ", ce qui m'inquiète un peu connaissant la rapidité de la croissance de ces cucurbitacées ; oserait-on insinuer que je ne passerai pas l'été prochain ?
Toujours est-il que les courges et citrouilles qui devaient orner le ventre du géant du château de Voltaire ont dû se métamorphoser en carrosses discrètement, car nous avons eu des fleurs, oui, mais des citrouilles point . Misère à poil, pas de gratin de courge, pas de soupe au potiron .
Cessons ces divagations, ô melon hallucinogène
Hiiipss !!
« A madame Sophie-Frédérique-Wilhelmine de Prusse, margravine de BAIREUTH
A Monrion, janvier (1757).
Madame, souffrez que je vous réitère mes vœux pour la santé de Votre Altesse royale, et que je la remercie de ce qu'elle a bien voulu m'assurer, par M. le marquis d'Adhémar 1, de la continuation de ses bontés. Je prends la liberté de lui envoyer des nouvelles de Paris qui pourront lui paraître extraordinaires, et qui exerceront sa philosophie.
J'ignore si Votre Altesse royale a reçu les exemplaires de l'histoire 2 que je mets à ses pieds. Je me flatte que le roi son frère 3 continuera à fournir les plus beaux monuments de l'histoire moderne. Mais c'est à César qu'il appartient d'écrire ses Commentaires.
Je suis encore persuadé qu'il se souviendra qu'il m'a tiré de ma patrie; que je quittai pour lui mon roi, mon pays, mes charges, mes pensions, ma famille.
Je prendrais la liberté de le supplier de m'envoyer des graines de ses melons 4, et je demanderais la protection de Votre Altesse royale s'il était à Berlin. Mais il a autre chose à faire qu'à honorer de ses melons mes potagers.
Que Votre Altesse royale et monseigneur daignent toujours agréer le profond respect et les prières de
Frère VOLTAIRE »
1 Antoine Honneste de Monteil de Brunier , marquis d'Adhémar, officier dans le régiment d'Heudicourt-cavalerie, dit le Saint et qui selon Mme de Graffigny, semblait tomber toujours des nues et « ne savait pas plus les usages que s'il venait du Monomotapa » . Il était « ami des philosophes ».
4 V* sollicité par Frédéric II de se rendre auprès de lui craignait de perdre dans sa cour sa liberté et son repos . Il refusa d'abord sous prétexte de la rigueur du climat de Berlin . D'Argens, La Mettrie et d'Algarotti furent chargés par le roi de lui écrire et le rassurer sur ce point . Darget , secrétaire du roi, joignit aux lettres un certificat en vers accompagné de deux melons cueillis au mois de juin à Potsdam . Voir lettre (236) du 10 juin 1749 de Frédéric à V* : http://friedrich.uni-trier.de/de/oeuvres/22/text/
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