Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

16/06/2014

Je ne sais pas encore si les ciseaux de M. de Silhouette rogneront d’assez près les ongles des fermiers généraux pour qu'il en revienne quelque chose au peuple

... Ce doute est actuel mais notre ministre des finances et des comptes publics, M. Sapin (ça sent le ...) ne se pose peut-être pas tant de questions quant à ce qui restera dans la poche des plus humbles contribuables .

Arnaud Montebourg-Monte-au-créneau sans économies, redresse la tête improductivement et reste dans le virtuel numérique .

 

impot-.gif

 

Et pendant ce temps, des gugusses font grève , les uns en montrant leurs culs nus, les autres en ne roulant plus, les uns en défendant leur bout de gras, les autres en s'accrochant mordicus à leurs avantages que d'aucuns aimeraient bien partager .

SNCF, déjà tout petit je savais que cela signifiait Société Nourrissant Certains Fainéants, ça se confirme , les fainéants se doublant de fieffés emmerdeurs . 

 

 

« A Jean-Robert Tronchin

Il y a bien longtemps, mon cher monsieur, que je n'ai eu le plaisir de m'entretenir avec vous ; j'ai respecté vos occupations, et de mon côté je n'ai pas été oisif . Je ne sais pas encore si les ciseaux de M. de Silhouette rogneront d’assez près les ongles des fermiers généraux pour qu'il en revienne quelque chose au peuple ; si le première impression que tout changement fait dans le public pouvait donner quelque faveur à nos billets de loterie, et à nos annuités, je crois qu'il faudrait prendre ce moment pour s'en défaire en cas qu'il n'y eût que peu de chose à perdre sur ces effets, et je vous avoue que j'aime mieux des prés que des billets sur la place ; je vous ai beaucoup dégarni . Vous devez payer à la Saint Jean des sommes assez fortes . Pour moi, j'ai acheté encore deux domaines à ma bienséance dont l'un joint la terre de Ferney à celle de Tournay et j'ai payé la moitié de ces deux acquisitions comptant . Mais bientôt il faudra que vous m'aidiez ; j'attendrai vos avis pour me défaire de ces billets de loterie et de ces annuités dont j'ai l'honneur de vous parler . Permettez qu'à présent je vous fasse une autre prière ; on m'a parlé d'une bonne manufacture de drap établie dans votre voisinage, à Vienne ; ne pourrais-je pas avoir une quarantaine d'aunes de bon gros drap vert avec des doublures jaunes , et une vingtaine de gros drap jaune ? Je souhaiterais le vert très foncé et approchant du gris de fer et que le jaune fût aussi très foncé, pour être moins tachant . Il me faudrait aussi du galon d'argent à bon marché pour une douzaine de chapeaux de domestiques . À l'égard des boutons pour habits 1 je ne sais si on n'en fait pas de cuivre à Saint Étienne qui soient bon marché et durables .

C'est toujours avec un peu de honte que je vous fatigue de ces misères et quoique vous m'ayez très enhardi il me reste toujours un petit fond de timidité .

Je ne suis pas si timide pour la casse et quand il s'agit d’obéir aux ordres du Docteur je ne suis plus honteux 2. Il me nourrit de bonne casse, comme vous savez . Une vingtaine de livres me viendraient très à propos, car les vivres me manquent . Voici encore une autre supplication, si jamais deux jeunes et bonnes juments de trait et à bon marché vous passent sous la main, envoyez-les moi au plus vite avec brides, mors et harnais simples . J'aimerais mieux qu'elles vous conduisent aux Délices .

Entre nous il m'a passé par les mains des choses bien extraordinaires depuis peu . Je vous réponds de la plus implacable animosité contre le roi de France et le roi de Prusse . On fera plutôt la paix avec les Anglais (à quelque prix que ce soit ) qu'avec lui . Il faut ou que ce prince soit écrasé ou qu'il écrase . Il me mande qu'il croit que cette campagne sera plus meurtrière que l'autre . Il a jeté le fourreau dans la rivière 3 , à moins d'un miracle, nous voilà ruinés .

Je vous embrasse tendrement, ainsi fait ma nièce.

V.

Aux Délices 2 mai [1759] »

1 Pour habits est ajouté par V* au dessus de la ligne .

2 V* a d'abord écrit si timide, puis rayé et remplacé par honteux .

3 Dans la bible , il est question de déposer l'épée et le bouclier au bord de la rivière .

 

15/06/2014

je suis un républicain qui ne peut se résoudre à habiter, tout au plus, que la frontière d'un royaume . Encore s'en repend-il quelquefois en voyant la petite rapacité des petits officiers de justice et de finance

...

rapacité.jpg

 

 http://antibanque.blogspot.fr/2011_07_01_archive.html

 

 

« A Germain-Gilles-Richard de Ruffey

Aux Délices 2 mai [1759]

C’est abuser de vos bontés , monsieur, que d'avoir passé tant de temps sans en profiter . J'ai toujours attendu que Mgr le comte de La Marche , mon seigneur suzerain eût réglé ce qu'il veut avoir de la pauvre petite terre de ma nièce pour son droit de mouvance . Cette affaire n'est point encore terminée, et je ne sais même si on peut reprendre le fief et rendre foi et hommage avant d'avoir payé son seigneur pour lequel on doit marcher armé de pied en cape toutes les fois qu'il l'ordonne . Je vous envoie à tout hasard à l'adresse indiquée la grosse en parchemin du contrat d'acquisition et la procuration de Mme Denis qu'elle n'a pu faire par-devant notaire . Mais s'il est nécessaire qu'un notaire y passe, nous irons à Ferney faire cette cérémonie quoiqu’on ne puisse pas encore y loger . J'ai fait à Gex des contrats avec des procurations sous seing privé . Je ne sais si on est plus difficile à Dijon que dans le pays de Gex. En bonne justice l’oncle et la nièce auraient dû aller à Dijon vous rendre, à vous monsieur, et à Mme de Ruffey , leur foi et hommage, mais vous savez que je suis un républicain qui ne peut se résoudre à habiter, tout au plus, que la frontière d'un royaume . Encore s'en repend-il quelquefois en voyant la petite rapacité des petits officiers de justice et de finance, et les vexations exercées sur de pauvres cultivateurs, à qui on fait payer pour la taille le tiers au moins de ce que produisent leurs sueurs et leurs larmes 1. Je gémis en voyant le plus joli paysage de la nature défiguré par la voracité de tant de harpies . Il y a dans ce petit canton à la lettre plus de commis que de laboureurs . Je suis obligé de faire venir à grands frais des familles suisses pour cultiver des terres qui sans elles resteraient incultes . Si je pouvais labourer moi-même je le ferais, mais je suis trop faible . Je peux à peine tenir le nouveau semoir fort joliment verni, et vrai amusement d'une autre femme que Mme Denis ; mes Suisses sont tout ébahis de ne pouvoir semer le jour de la fête d'un saint qu'ils ne connaissent pas . Nous avons imaginé nous autres papistes qu'il fallait manquer de pain pour honorer saint Roch et saint Fiacre . Cela est fort sensé . On croit dans une cour être au pays de Sejan, et dans les campagnes au pays des Caffres . Nous verrons si des actions sur les fermes générales ramèneront l'abondance, et si le traducteur de Pope 2 remplacera Colbert . Je le souhaite . Quelques personnes l'espèrent . On dit que vous avez un bulletin passable de Paris . Adieu, le roi de Prusse est en Bohème , je le crois au dessus de ses affaires, car il m'écrit toujours des vers et trop de vers . Mille remerciements .

V. »

1 On voit ici apparaître un thème qui reviendra fort souvent chez V*, notamment dans le Pot pourri : www.bouquineux.com/pdf/Voltaire-Pot-pourri.pdf

et dans l'Homme aux quarante écus . Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-conte-l-homme-aux-quarante-ecus-partie-1-69199895.htm

2 Silhouette .

 

14/06/2014

vos rimes familières Immortalisent les beaux cus De ceux que vous avez vaincus, Ce sont des faveurs singulières.

...  - Parle à mon cul, j'ai la tête lourde !

DSCF4752 parle à mon cul.png

- Arrête de ruminer des idées noires ou c'est encore une histoire qui va finir par une boucherie !

 

« A FRÉDÉRIC II, roi de Prusse.
2 mai [1759.]

 


Héros du Nord, je savais bien
Que vous avez vu les derrières
Des guerriers du roi très-chrétien,
A qui vous taillez des croupières;
Mais que vos rimes familières
Immortalisent les beaux cus
De ceux que vous avez vaincus,
Ce sont des faveurs singulières.

Nos blancs-poudrés sont convaincus
De tout ce que vous savez faire;
Mais les ons, les its, et les us,
A présent ne vous touchent guère.

Mars, votre autre dieu tutélaire,
Brise la lyre de Phébus;
Horace, Lucrèce, et Pétrone,
Dans l'hiver sont vos courtisans;
Vos beaux printemps sont pour Bellone :
Vous vous amusez en tout temps.



Il n'y a rien de si plaisant, sire, que le congé 1 que vous avez donné, daté du 6 novembre 1757. Cependant il me semble que dans ce mois de novembre vous couriez à bride abattue à Breslau, et que c'est en courant que vous chantâtes nos derrières.
Le bel arrêt 2 du parlement de Paris sur le bon sens philosophique de d'Argens, et sur la Loi naturelle, pourrait bien aussi avoir sa part dans l'histoire des culs; mais c'est dans le divin chapitre des torche-culs de Gargantua 3. La besogne de ces Messieurs ne mérite guère qu'on en fasse un autre usage. On a traité à peu près ainsi, à la cour, les impertinentes remontrances que cette compagnie a faites, on ne pourra jamais leur reprocher la Philosophie du bon sens. On dit que Paris est plus fou que jamais, non pas de cette folie que le génie peut quelquefois permettre, mais de cette folie qui ressemble à la sottise. Je ne veux pas, sire, avoir celle d'abuser plus longtemps des moments de Votre Majesté; je volerais les Autrichiens, à qui vous les consacrez. Je prie Dieu toujours qu'il vous donne la paix, et que son règne nous advienne 4.
Car, en vérité, au milieu de tant de massacres, c'est le règne du diable; et les philosophes qui disent que tout est bien ne connaissent guère leur monde. Tout sera bien quand vous serez à Sans-Souci, et que vous direz :
Alors, cher Cinéas, victorieux, contents,
Nous pouvons rire à l'aise, et prendre du bon temps
5»


 

1 Il s'agit d'une pièce de vers du roi de Prusse intitulée Congé de l'armée des cercles et des tonneliers , « plaisanterie grivoise » envoyée par Frédéric à V* avec sa lettre du 11 avril à laquelle répond ici v* . Imprimée dans les Œuvres de Frédéric, cette pièce date de 1757 , on a reconnu dans les terminaisons citées dans ce vers des rimes scabreuses . Ce sont les Français que désigne « tonneliers », et le nom de tonneliers leur était donné, parce qu'ils avaient avec eux les troupes des cercles d'Allemagne. Le Congé est daté de Freybourg. (Beuchot.)Voir page 256 : http://books.google.fr/books?id=DnwHAAAAQAAJ&pg=PA256&lpg=PA256&dq=Cong%C3%A9+de+l%27arm%C3%A9e+des+cercles+et+des+tonneliers&source=bl&ots=emD848pQYS&sig=aRgKjH5VOno_yE3PcW0Tb0adEpA&hl=fr&sa=X&ei=16ScU_OsKKGW0AXfvIGIBw&ved=0CC8Q6AEwAw#v=onepage&q=Cong%C3%A9%20de%20l%27arm%C3%A9e%20des%20cercles%20et%20des%20tonneliers&f=false

 

2 Du 6 février 1759.

 

3Gargantua, XIII, Rabelais : http://mapage.noos.fr/crosin000v/Rabelais/Extraits_fr_Rab...

Voltaire commente le post scriptum de la Lettre du 11 avril 1759 de Frédéric II à V* : « DE FRÉDÉRIC II, ROI DE PRUSSE.
Bolkenhayn, 11 avril 1759
Distinguez, je vous prie, les temps où les ouvrages ont été faits. Les Tristes d'Ovide et l'Art d'aimer ne sont pas contemporains. Mes élégies ont leur temps marqué par l'affreuse catastrophe qui laissera un trait enfoncé dans mon cœur, autant que mes yeux seront ouverts. Les autres pièces ont été faites dans des intervalles qui se trouvent toujours, quelque vive que soit la guerre. Je me sers de toutes mes armes contre mes ennemis; je suis comme le porc-épic qui, se hérissant, se défend de toutes ses pointes. Je n'assure pas que les miennes soient bonnes ; mais il faut faire usage de toutes ses facultés telles qu'elles sont, et porter des coups à ses adversaires les mieux assénés que l'on peut.
Il semble qu'on ait oublié dans cette guerre-ci ce que c'est que les bons procédés et la bienséance. Les nations les plus policées font la guerre en bêtes féroces. J'ai honte de l'humanité; j'en rougis pour le siècle. Avouons la vérité; les arts et la philosophie ne se répandent que sur le petit nombre; la grosse masse, le peuple, et le vulgaire de la noblesse, restent ce que la nature les a faits, c'est-à-dire de méchants animaux.
Quelque réputation que vous ayez, mon cher Voltaire, ne pensez pas que les housards autrichiens connaissent votre écriture. Je puis vous assurer qu'ils se connaissent mieux en eau-de-vie qu'en beaux vers et en célèbres auteurs.
Nous allons commencer dans peu une campagne qui sera pour le moins aussi rude que la précédente. Le prince Ferdinand épaule bien ma droite;Dieu sait quelle en sera l'issue. Mais de quoi je puis vous assurer positivement, c'est qu'on ne m'aura pas à bon marché, et que, si je succombe, il faudra que l'ennemi se fraye par un carnage affreux le chemin à ma destruction.
Adieu ; je vous souhaite tout ce qui me manque.
FÉDÉRIC.
N. B. On dit qu'on a brûlé à Paris votre poème de la Loi naturelle, la Philosophie du bon sens , et l'Esprit, ouvrage d'Helvétius. Admirez comme l'amour-propre se flatte; je tire une espèce de gloire que la même époque de la guerre que la France me fait devienne celle qu'on fait à Paris au bon sens. »

 

 

 

 

13/06/2014

République de Genève je vous aime

...

delices_1.jpg

 Les Délices, quartier St Jean , République de Genève

 

« A François Tronchin

[avril/ mai 1759]

République de Genève je vous aime et j'entends que votre chemin soit très embelli sans qu'il vous en coute rien, et à moi pas grand chose .

Au lieu de continuer notre muraille de trente toises je recule ma haie en ceintre, je prie M. Dunan d'en faire autant, je recule encore en ceintre la haie de mes vignes . Je vous fais une pièce immense, ronde , régulière, ornée d'arbres en boule . Grille à ma vigne, grille au bas de ma terrasse, grille à la haie ceintrée de M. Dunan, jolies vues de tous les côtés, entrée charmante à Genève, qu'en dites-vous, mon cher ami ? qui avez du goût et vous aussi messieurs Mallet 1 et Jacquier, dites si cela ne sera pas délicieux.

V. »

1 Jean-Jacques Mallet, Ami de Chapeaurouge, et François Tronchin avaient été nommés comme commissaires pour surveiller les travaux de la nouvelle route . Tronchin se déroba et fut remplacé par Pierre Jacquet .Voir aussi : http://www.ville-ge.ch/bge/imv/gazette/15/pdf_15/15_clin.pdf

et page 341 : http://books.google.fr/books?id=LQ4QVb1NWDsC&pg=PA340&lpg=PA340&dq=Ami+de+Chapeaurouge&source=bl&ots=Kk1Cv-eJN5&sig=TFh7E60aN1NEFN5qkXvUKdESiWA&hl=fr&sa=X&ei=hXGbU8PlEZKe0wW4oYDACg&ved=0CGUQ6AEwCQ#v=onepage&q=Ami%20de%20Chapeaurouge&f=false

Il faut que je connaisse mes devoirs pour les remplir

...

 

 

 

« A François Tronchin

Je vous prie mon cher ami de m'envoyer l'original ou du moins copie entière de mon accord avec la sérénissime république 1. Je vous serai très obligé . Il faut que je connaisse mes devoirs pour les remplir et quoique j'aie des ponts-levis et des créneaux je veux vous être très soumis . Il y a bien longtemps que l'oncle et la nièce n'ont eu l'honneur de vous voir .

Mercredi au soir [avril/mai 1759] »

1 De Genève, au sujet du mur à restaurer . Voir lettre précédente : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/06/13/voyez-si-la-republique-veut-payer-5390756.html

 

Voyez si la république veut payer

...

 

 

 

« A François Tronchin

[avril/mai 1759] 1

M. Murani 2 dit qu'il faut un mur pour soutenir les terres de votre immense domaine tronchinois nommé les Délices 3. Je l'en crois . Voyez si la république veut payer moitié pour son chemin et son mur , M. Tronchin quart , moi quart . Se no, no 4.

Mille tendres amitiés . »

1 Il est souvent question des travaux à faire ou faits aux Délices à cette époque, route, murs, terrasses . Il semble que les discussions préliminaires relatives à ce mur eurent lieu à la fin d'avril ou au début de mai, et qu'un arrangement fut conclu vers la mi-mai au plus tard . Le travail commença, mais V* s'aperçut en juillet qu'il ne conviendrait pas, d'où une seconde série de lettres , où V* fait appel à Mathey au lieu de Mirani . Cette lettres semble être la première de cette correspondance . Voir aussi du 5 mai au 6 octobre 1759 la fin des lettres : du 5 mai 1759 à Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine, du 7 mai , du 10 mai , du 21 juillet , du 28 juillet et du 6 octobre à Jean-Robert Tronchin .

2 Il s'appelait A. Mirani .

3 Ce mur fut construit . Quand Théodore Besterman fonda l’Institut et le Musée Voltaire aux Délices, en 1952, le mur était en mauvais état . Il s'écroula peu de temps après et fut reconstruit par les autorités genevoises en ciment, ce qui fit disparaître une des quelques traces subsistantes des travaux fait sous Voltaire .

4 Sinon , non .

 

12/06/2014

Les maux de la guerre influent sur tout . On parle de paix et on couvre la terre de soldats

... D'abord les soldats sur terre et les patates dessous, puis l'inverse ! mais enterrer des hommes n'est pas encore le bon moyen de les multiplier .

Semez des pommes de terre pour les soldats de la France.jpeg

 C'est pas d'la soupe, c'est du rata ;

 C'est pas la mort mais ça viendra !

 

 

« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de Saxe-Gotha

Aux Délices 29 avril 1759

Madame, j'userai donc de la permission de Votre Altesse Sérénissime veut bien me donner d'oser lui adresser une lettre pour Mme la comtesse de Bassevits, mais j'abuserai de cette permission et je vous supplie madame de pardonner le liberté que je prends . Je lui envoie des livres imprimés en échange de manuscrits que je devrai à vos bontés . Quelle autre protection que la vôtre puis-je choisir madame pour lui faire parvenir ce petit ballot . Les armées occupent tous les chemins ; la plupart des paquets qu'on m'envoyait de Pétersbourg se sont perdus ; les housards ont pillé les matériaux de l'histoire de Pierre le Grand . Les maux de la guerre influent sur tout . On parle de paix et on couvre la terre de soldats, et tandis qu'on va marier un archiduc 1, on célèbrera ses noces par l'effusion du sang humain . Je plains dans ces circonstances ceux qui demeurent dans le Mecklembourg, et sans les bontés de Votre altesse Sérénissime, j'aurais peur que ma lettre à Mme de Bassevits ne parvint pas à son adresse .

Je vous supplie madame de vouloir bien qu'elle passe par vos respectables et très aimables mains . J'aurai l'honneur de l'envoyer, quand le paquet qui va lentement sera à moitié chemin . La cousine de M. Pertriset 2 est toujours bien fière, elle a de la beauté, de l'esprit et de l'argent . Je vous tiens madame bien plus heureuse qu'elle . Je me mets aux pieds de Votre Altesse Sérénissime avec le plus profond respect . »

1 Ferdinand, fils de Marie-Thérèse d'Autriche, était à marier et le choix de sa femme fut longtemps discuté dans les négociations en vue de la paix . Il épousa finalement Maria-Béatrix, princesse ( puis plus tard duchesse en titre) de Modène .Voir : http://en.wikipedia.org/wiki/Maria_Beatrice_d%27Este,_Duchess_of_Massa

2 M. Pertriset serait Frédéric II ; le 8 décembre « Mlle de Pestris ou Pertris » serait la duchesse elle-même . Le 18 décembre, la duchesse écrira à V* : « La demoiselle Pertriset n'est gurère aimable, mais son adresse est excellente » Il y a là évidemment une couverture pour les messages adressés à Frédéric .Voir aussi page 422 : http://fr.wikisource.org/wiki/Page:Revue_des_Deux_Mondes_-_1902_-_tome_7.djvu/428