14/03/2016
je n'ai que du zèle ; mais ce zèle sera toujours bien vif quand vous voudrez bien le guider
...
« A Louis-Gaspard Fabry
Monsieur, j'ai l'honneur de vous envoyer cette lettre de M. de Trudaine 1. Vous verrez en quel état sont les affaires de notre pauvre petit pays ; il serait bon que j'eusse l'honneur de vous voir, et que vous me donnassiez vos instructions ; je n'ai que du zèle ; mais ce zèle sera toujours bien vif quand vous voudrez bien le guider . Je vous recommande toujours Sédillot 2 et nos marais, deux choses fort dangereuses pour la province . J'ai l'honneur d'être avec l’attachement le plus inviolable
monsieur
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire.
28è mars 1761 aux Délices . »
1 Cette lettre du 22 mars 1761 de Trudaine est conservée . Trudaine assure qu'il a apporté toute l'attention nécessaire au mémoire des syndics de Gex ; il le communique à la ferme générale ; il a déjà été question d'affranchir le pays de Gex de tous les droits de la ferme générale, mais on n'a pas voulu jusqu'ici offrir un abonnement égal au produit net des fermes ; il encourage Voltaire à contribuer à réaliser ce projet .
2 Voir lettre du 26 janvier 1760 à Fabry : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/01/31/il-y-a-dans-toute-cette-indigne-affaire-une-envie-marquee-de-5548494.html
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13/03/2016
Ô imitateurs, servile troupeau / O imitatores, servum pecus
... Je ne pense pas ici aux imitateurs professionnels tels Canteloup et autres qui sont à l'opposé de la servilité, mais à tous ces suiveurs, ces courtisans d'hommes politiques qui , pour rester en place, copient leurs dirigeants platement . Je n'oublie pas dans ce lot d'y mettre les adjuvants amplificateurs de tous les médias qui véhiculent , selon le bord qu'ils encensent, chacun une pensée unique .
Moutons de Panurge, vous allez boire le bouillon !
« A Etienne-Noël Damilaville
et
Nicolas-Claude Thieriot
26 mars 1761
J'envoie aux amis ce rogaton,1 cela amuse un moment .
J'ai reçu la fade Imitation de la mort et de l'apparition du révérend père Berthier .2
O imitatores, servum pecus 3.
L'épigramme sur ce pauvre Lacoste 4, associé de Fréron, vaut mieux et n'est point imitée .
Je fais mes compliments à mes frères, et je retourne à mes maçons : eruit aedificat insanire putes 5. »
1 On peut supposer qu'il s'agit du Rescrit … ; voir lettre du 19 mars 1761 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/03/05/j-ai-l-histoire-universelle-et-une-demi-lieue-de-pays-a-defr-5769440.html
2 Joseph Dubois [pseudonyme de Nicolas-Joseph Sélis] Relation de la maladie, de la confession et de la fin de M. de Voltaire et de ce qui s'ensuivit, 1761 ; il s'agit d'une satire assez amusante contre V*, censée écrite par son valet de pied .
3Ô imitateurs, servile troupeau ; Horace, Épîtres , I, 19, 19 .
4 Beuchot, suivi par Moland, dit qu'il s'agit de la fameuse épigramme : « L'autre jour au fond d'un vallon / Un serpent mordit Jean Fréron / Que pensez-vous qu'il arriva ? / Ce fut le serpent qui creva . » Mais V* identifie lui-même ce poème comme l'épigramme sur Emmanuel-Jean de La Coste citée dans la lettre de janvier 1762 à Le Brun : page 153 et page 236, lettre MMMXC, (datée de mai 1762 par Clogenson) : https://books.google.fr/books?id=cHlBAAAAYAAJ&pg=PA236&lpg=PA236&dq=l%27abb%C3%A9+de+la+coste+est+mort+%C3%A0+toulon&source=bl&ots=KpL_X_s5i2&sig=WTrxgTHcdrPFNT54OEdyG7O8cyM&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwio1ffjkrzLAhXCXRoKHUN6A0YQ6AEIIjAB#v=onepage&q=l%27abb%C3%A9%20de%20la%20coste%20est%20mort%20%C3%A0%20toulon&f=false
La Coste était un moine célestin qui avait été condamné pour une affaire de fraude financière . Voir : http://www.kronobase.org/chronologie-categorie-Emmanuel-Jean+de+La+Coste.html
5Il élève, édifie : on croirait qu'il a perdu l'esprit ; Horace, Épîtres ,I, 1, 100-101.
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12/03/2016
moi je cherche à faire diversion en vous écrivant
...A vous tous qui venez, volontairement ou par hasard, jeter un oeil attentif ou distrait sur ce blogounet qui n'a d'autre ambition que de vous faire côtoyer le génial Voltaire et, accessoirement, votre très humble et très obéissant serviteur .
Allez ! je me lance ! let's go !
« A Pierre-Robert Le Cornier de Cideville ancien
conseiller au parlement de Rouen
rue Saint-Pierre
à Paris
et s'il n'y est pas
renvoyer à Rouen
à sa terre de
Launay
Mon cher et ancien ami nous sommes tous malades . Nous avons quitté Ferney pour revenir aux Délices à portée des Tronchin . Mme Denis se fait saigner ; et moi je cherche à faire diversion en vous écrivant . Si on saigne aussi la petite-nièce du grand Corneille je demanderai qu'on en mette quelques gouttes dans mes veines si faire se peut pour la première tragédie que je ferai . M. de Chimène est le seul de la maison qui ait résisté à l'épidémie . Il s'était purgé par les lettres sur Jean-Jacques . Voici un Rescrit de l'empereur de la Chine sur la paix éternelle que ce Jean-Jacques va nous procurer . Amusez-vous de cela en attendant la diette europaine 1 . Ce petit rogaton n'enflera pas beaucoup le paquet . Je voudrais vous envoyer une grande diable d'épître en vers à Mme Denis sur l'agriculture 2 que nous aimons tous deux ; si vous en êtes curieux demandez-la à M. d'Argental ou à M. Thieriot, elle ne vaut pas le port .
Je vous suppose à Paris, sanum et hilarem 3. Je suis hilaris, mais non sanus . Si j'avais de la santé on verrait beau jeu . Adieu, je vous embrasse tendrement .
V.
Aux Délices 26 mars [1761]4. »
1 Sur le mot europain, voir lettre d'avril 1742 à Frédéric II : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-avec-le-roi-de-prusse-1742-partie-42-93329860.html
Sur le Rescrit voir : http://eirene-society.org/index.php/list-of-authors/257-voltaire/rescrit-de-l-empereur-de-la-chine/250-rescrit-de-l-empereur-de-la-chine
3 Bien portant et hilare .
4 Le second chiffre indiquant le jour dans la date est incertain, V* l'ayant modifié à deux reprises .
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11/03/2016
Amusez-vous toujours des sottises du genre humain . Il faut ou en profiter ou en rire .
... Personnellement je serais plutôt partisan d'en profiter et d'en rire , mais bon, ça n'engage que moi . En réalité je n'en profite guère, pour ne pas dire pas du tout, je n'arrive pas encore à être assez truand, rire me convient suffisamment . Donc, aucune carrière politique de haut vol ( que d'aucuns prennent au sens propre ) ne me tente , ni tentera .
En dire, oui, peut-être, mais en faire ... nuit-grave !
« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay
[vers le 25 mars 1761] 1
Ma belle philosophe amusez-vous un moment de ce chiffon et si vous voyez M. Diderot priez-le de faire mes compliments au cher abbé Trublet . J'aime à mettre ces deux noms ensemble , les contrastes font toujours un plaisant effet quoi que le monde en dise .
Amusez-vous toujours des sottises du genre humain . Il faut ou en profiter ou en rire .
Rousseau Jean-Jacques, que j'aurais pu aimer s'il n'était pas né ingrat, Jean-Jacques qui appelle M. Grimm un Allemand nommé Grimm 2, Jean-Jacques qui m'écrit que j'ai corrompu sa ville de Genève , … c'est un fou vous dis-je, avec sa paix perpétuelle . Il s'est brouillé avec tous ses amis . C'est un petit Diogène qui ne mérite pas la pitié des Aristippe 3. Adieu madame, je suis plus fâché que jamais qu'il y ait cent lieues entre La Chevrette et Ferney . Mais il il y a bien plus loin encore entre vous et les plats personnages de ce siècle . »
1 Clogenson place cette lettre entre le 1er et le 3 avril 1761 ; elle est ici datée d'un peu plus tôt par l’allusion à Trublet .
2 Dans sa lettre à Voltaire du 17 juin 1760 :http://classiques.uqac.ca/classiques/Rousseau_jj/lettres_1728_1778/rousseau_lettres.pdf
3 Aristippe professait et mettait en application une philosophie du plaisir ; l'application à V* et à ses semblables est donc aisée . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Aristippe_de_Cyr%C3%A8ne
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10/03/2016
Tout finit et finit bien vite . Cette réflexion que l'on fait si souvent devrait bien porter les souverains à ne pas précipiter la fin de tant de milliers d'hommes
... Et pour me consoler j'ai recours à deux grands hommes : https://www.youtube.com/watch?v=XRXJyw200TI
et j'en rajoute un :
https://www.youtube.com/watch?v=APrCehmhX5w
« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de Saxe-Gotha
A Ferney pays de Gex par Genève
25 mars 1761
Madame, Votre Altesse Sérénissime daigne bien connaître mon cœur . Je suis attaché à votre grande maîtresse 1 et pour elle-même et pour vous . Votre amitié prouve combien elle est digne d'être aimée . Je supplie Votre Altesse Sérénissime de vouloir bien permettre que j'insère dans ce paquet un petit mot qui lui fasse connaître que je lui suis attaché comme je l'étais quand j'avais le bonheur de partager avec elle l'honneur d'être dans votre cour .
Nous sommes tous condamnés à cette funeste séparation qu'elle vient d'essuyer . Tout finit et finit bien vite . Cette réflexion que l'on fait si souvent devrait bien porter les souverains à ne pas précipiter la fin de tant de milliers d'hommes . Mais il est dit qu'ils feront des malheureux et qu'ils le seront aussi . Voilà leur destinée .
Vous êtes donc débarrassée de nous, madame . Voilà je crois sept ou huit mille de vos courtisans et de vos admirateurs hors de vos États 2. Ils doivent peut-être quelque argent à Votre Altesse Sérénissime ; et on paye mieux en temps de paix qu'en temps de guerre . Je ne sais comment elle a pu trouver pendant tout ce remuménage le temps de lire Tancrède . Cette pièce vaut mieux à la représentation qu'à la lecture . Cela faisait un beau spectacle de chevalerie mais à mon âge un pauvre malade fait des vers qui sont aussi faibles que lui . Il y a une épître à la fin dans laquelle Votre Altesse Sérénissime m'aura trouvé plaisamment dévot . Mais c'est qu'il y a des gens qui sont bien sottement hypocrites, et d'autres furieusement fanatiques . Ce monde-ci est une guerre perpétuelle de prince à prince, de prêtre à prêtre, de peuple à peuple , de barbouilleur à barbouilleur de papier . Le seul papier que j'emploie bien est celui où je présente mon profond respect à Votre Altesse Sérénissime .
Le Suisse V. »
1 Surnom donné par V* à Mme de Buchwald, dame de compagnie de la duchesse avec rang officiel de « grande maitresse de la cour » qui donne naissance au calembour de V* .
2 Après la bataille de Langensalza, de Broglie avait connu un nouvel échec à Cassel . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Langensalza_%281761%29
et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Si%C3%A8ge_de_Cassel_%281761%29
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Nous comptions sur vous ; et nous ne comptons plus sur rien
... Voilà ce que disent ces jeunes qui ont été lâchement et stupidement abandonnés dans le programme de gouvernement mensonger de ce Fanfoué Hollande qui, décidément n'est pas doué pour autre chose que faire pleuvoir, et distribuer des hochets à des émirs et princes autoproclamés et autres gugusses peu fréquentables démocratiquement parlant .
Pourquoi faut-il en arriver là ?
« A Henri-Louis Lekain
Au château de Ferney pays de Gex
23 mars [1761]
Nous comptions sur vous ; et nous ne comptons plus sur rien, que sur notre amitié pour vous et sur vos sentiments . Mandez-nous mon cher Roscius ce que c'est que votre triste aventure à laquelle nous nous intéressons bien vivement Mme Denis et moi . Il y a près d'un mois que je n'ai reçu de lettres de M. d'Argental . Le petit Prault ne m'a pas seulement envoyé un exemplaire de Tancrède . Vous voyez que je suis aussi abandonné que vous êtes persécuté . Au surplus prenez tout gaiement, faites-vous applaudir ; cela console de tout .
J’ignore si on pourra déterminer Mlle Dumesnil à jouer Clytemnestre, mais je sais que vous feriez bien valoir le rôle d'Oreste . Je suis déterminé à ne rien donner à moins qu'on ne joue cette pièce . Vos camarades me doivent peut-être cette complaisance . Je vous prie d'en parler à M. d'Argental, et de me répondre sur tous ces articles . Celui qui vous regarde est le plus intéressant pour moi . Je vous em[brasse.]1
V. »
1 Le manuscrit en fin de lettre est abimé .
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09/03/2016
Si cette proposition vous convient, voulez-vous me dire combien vous en voulez ?
... Car, ne nous voilons pas les yeux, toutes les manifestations présentes et à venir contre les projets de lois ne sont que des discussions de chiffonniers, des tentatives d'intimidation pour des questions de gros sous, des réclamations à courte vue .
Hâtons-nous de ne rien changer surtout si on n'y comprend rien .
Yes ! chic !(pour les frenchies) une option supplémentaire par rapport au pile-ou-face !
« A Hyacinthe de Pingon, comte de Sallenove , seigneur de Feuillasse etc.
à Sallenove en Savoie
à Annecy 1
A Ferney 22 mars [1761] 2
Monsieur, voici ce qu'un de vos voisins a l'honneur de vous proposer . Voulez-vous vendre à vie la terre de Feuillasse à un gentilhomme qui l'embellira et l'améliorera, elle vous reviendra un jour en meilleur état que vous ne l'aurez donnée . Si cette proposition vous convient, voulez-vous me dire combien vous en voulez ? on vous paiera argent comptant . Je m'acquitte de la commission qu'on m'a donnée,3 et je profite de cette occasion pour vous assurer des sentiments respectueux avec lesquels j'ai l'honneur d'être
monsieur
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire
gentilhomme ordinaire du roi. »
1 L'adresse a été complétée par une autre main sur le manuscrit .
2 Le comte répondra le 28 mars 1761 , voir Bestermann D 9704 .
3 Le comte de Sallenove avait acquis la Feuillasse à Saconnex en 1745 d'un certain Jean Trembley ; mais l'histoire de ce domaine devient par la suite obscure ; V* dans une lettre à Ximénès du 1er octobre 1773 , dira qu'elle avait été acquise par ce dernier .
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