26/10/2017
tout ce qu'il faut faire pour mettre en règle cette affaire
... est mis en oeuvre par le Bundestag, qui, dans un pays réputé sérieux, est capable comme au Moyen Age de discuter très sérieusement du sexe des anges ou à peu près, jugez-en :
http://www.lemonde.fr/m-moyen-format/article/2017/10/20/q...
Dans le même temps les députés européens allemands se sont abstenus de voter contre l'interdiction du glyphosate (le détestable et si commun Roundup*); le Bundestag calculera-t-il jamais un jour le prix des dégâts causés par leurs
atermoiements ?
Autant en emporte le vent !
« A Joseph-Marie Balleidier, Procureur
d'office de Ferney
à Gex
Je prie instamment monsieur Balleidier de s'informer de M. Gérantet de tout ce qui concerne le fond et la forme de l'affaire d'une Mme Janève de Lagrange 1, native de Genève, laquelle ayant abjuré prétend avoir obtenu le droit de rentrer dans ses biens situés au pays de Gex , à St Jean, à Thoiry, à Fagères et ailleurs . Sitôt qu'il sera au fait, et qu'il pourra me dire si les papiers sont entre les mains du sieur Gérantet, et tout ce qu'il faut faire pour mettre en règle cette affaire, il me fera plaisir de m'en instruire sur-le-champ, et d'en venir conférer avec nous . Nous l'attendons aussi pour régler le compte de tutelle de Mme Burdet . Je me chargerai volontiers des avances, me flattant qu'elles ne seront pas perdues .
Je fais bien des compliments à monsieur Balleidier .
Voltaire.
Ferney 18è décembre 1762 .2 »
1 Comme le montre le texte de l'aide-mémoire cité en note 2, , il faut lire Janne (Jeanne) et non Janève . Par un curieux lapsus , Wagnière a anticipé les deux dernières syllabes de Genève , mot qui vient immédiatement après .
2 La lettre comportait un post-scriptum , fortement biffé : La lettre de change de livres . En outre, la minute d'un aide-mémoire relatif aux mêmes problèmes se trouvait avec cette lettre dans les papiers Balleidier , dont voici le texte : « S'informer chez Gérantet des prétentions et droits de la veuve Jeanne de La Grange native de Genève, laquelle ayant abjuré redemande ses biens situés à Saint-Jean à Thoiry et à Fagères . Savoir si les biens que redemande la veuve Burdet peuvent être regardés comme sa dot et reprises matrimoniales, et si en ce cas elle n'est pas première créancière . »
Quelques mots de cette lettre ont été imprimés par Vézinet A.
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25/10/2017
il plaira beaucoup aux Genevois, car il est sérieux, et il raisonne
... Vrai au XVIIIè siècle, toujours vrai aujourd'hui, les Genevois en particulier et les Suisses en général restent de forts coupeurs de cheveux en quatre (excepté les Valaisans qui ont un petit côté gaulois sympathique ) .
caricature parue dans le Nouvelliste du 5 mai 2005
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
18 décembre [1762]
Autres considérations présentées à mes anges au sujet du futur. Nos dames sont aujourd’hui beaucoup plus contentes . Je l’avais bien prévu. Il avait fait un traité sur le mariage, que madame Denis prétendait ressembler au catéchisme d’Arnolphe dans l’École des Femmes 1. Il s’est bien donné de garde de me lire ce rabâchage ; mais s’il épouse notre petite, nous lui ferons abjurer son catéchisme par une clause expresse du contrat, et il le brûlera en notre présence. Je crois que de notre demi-philosophe on pourra faire un philosophe complet, en rabotant un peu.
Je persiste à croire qu’on peut en toute sûreté l’employer aux grandes négociations avec la république de Genève. Mes anges, mon idée est divine , mes anges, il plaira beaucoup aux Genevois, car il est sérieux, et il raisonne. Figurez-vous, encore une fois, combien cette place nous ajusterait. Allons, monsieur le duc de Praslin, faites quelque chose en faveur de Cinna, et des belles scènes d’Horace et de Pompée. Mes anges, regardez cette affaire comme la plus digne de vos soins angéliques.
Vous y réussirez, n’est-il pas vrai ? Mon Dieu, quel plaisir ! »
1 Acte III, sc. 2 , vers 693- .
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je n’ai confié à personne qu’à vous mes propositions politiques. Tâchez de faire notre affaire
... Confidence du président à son premier ministre ; à quel sujet ? je ne suis pas dans le secret, mais tant pis , c'est leur affaire . Disons qu'elle sera bonne pour tous , et qu'on arrête ces manifestations de rue stériles, et finalement couteuses pour la nation .
« a Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
16 décembre [1762] 1
O mes anges ! vous avez entrepris d’affubler mademoiselle Corneille du sacrement de mariage, seul sacrement que vous devez aimer. Mon demi-philosophe, que vous m’avez dépêché, n’est pas demi-pauvre, il l’est complètement. Son père n’est pas demi-dur, c’est une barre de fer. Il veut bien donner à son fils mille livres de pension ; mais, en récompense, il demande que je fasse de très grands avantages ; de sorte que je ne suis pas demi-embarrassé. Je n’ai presque à donner à mademoiselle Corneille que les vingt mille francs que j’ai prêtés à M. de La Marche, qui devraient être hypothéqués sur la terre de La Marche, et sur lesquels M. de La Marche devrait s’être mis en règle depuis un an ; au lieu que je n’ai pas même de lui un billet qui soit valable. Cela s’est fait amicalement, et les affaires doivent se traiter régulièrement.
Ces vingt mille francs donc, 1400 livres de rente déjà assurés, environ quarante mille livres de souscriptions, le marié et la mariée nourris, chauffés, désaltérés, portés 2 pendant notre vie, c’est là une raison qui n’est pas la raison sans dot 3; et si un père qui ne donne rien à son fils le philosophe trouve que je ne donne pas assez, vous sentez, mes anges, que ce père n’est pas un homme accommodant.
Cependant il faut tâcher de faire réussir une affaire que vous m’avez rendue chère en me la proposant.
Notre futur a fait noblement son métier de meurtrier, tout comme un autre : puis il me paraît trop philosophe pour aimer beaucoup l’emploi de tuer du monde pour de l’argent et pour une croix de Saint-Louis. Je le crois très propre aux importantes négociations que nous avons avec la petitissime et pédantissime république de Genève. Voici un temps favorable pour employer ailleurs M. de Montpéroux, résident à Genève. Il y a bien des places dont M. le duc de Praslin dispose. Il me semble que si vous vouliez placer à Genève notre futur, vous obtiendriez aisément cette grâce de M. le duc de Praslin . Rien ne serait plus convenable pour les Genevois et pour moi, et surtout pour madame Denis, qui commence à trouver les hivers rudes à la campagne au milieu des neiges. Mademoiselle Corneille vous devrait son établissement, madame Denis et moi nous vous devrions la santé, M. de Vaugrenant vous devrait tout. Voyez, anges bienfaisants, si vous pouvez faire tant de bien, si M. le duc de Praslin veut s’y prêter. Vous pouvez faire quatre heureux, et c’est la seule manière de célébrer ce beau sacrement de mariage sous vos auspices . Sans cela l’inflexible père ne donnera point son consentement, et voici comment il raisonne . L’argent des souscriptions est peut-être peu de chose, et l’on ne saura que dans dix-huit mois à quoi s’en tenir. On ne veut guère articuler dans un contrat de mariage l’espérance d’un produit de souscriptions pour un livre imprimé par des Genevois. Les 1400 livres de rente qui appartiendront à mademoiselle Corneille ne sont que viagères ; elle n’aura donc que mille livres de rente à stipuler réellement.
Il pourra même pousser plus loin ses scrupules, s’il sait que le premier président actuel de Dijon dispute à son père jusqu’à la propriété de la terre de La Marche. Notre sacrement est donc hérissé de difficultés, et toutes seraient aplanies par l’arrangement que j’imagine. Le sort de mademoiselle Corneille est donc entre les mains de mes anges.
Je baise le bout de leurs ailes avec plus de ferveur que jamais . Il est vrai que je ne leur envoie point de tragédie pour les séduire. Je suis occupé à présent à faire un parc d’une lieue de circuit, qui a pour point de vue, en vingt endroits, dix, quinze, vingt, trente lieues de paysage. Si je peux trouver d’aussi belles situations au théâtre, vous aurez des drames ; mais laissons passer les plus pressés, et faisons-nous un peu désirer. Je sais bien que M. de Marigny 4 ne m’élèvera point de mausolée ; mais mes anges diront : il avait quelque talent, il nous aimait.
Au reste, je n’ai confié à personne qu’à vous mes propositions politiques. Tâchez de faire notre affaire . Si vous voulez que M. de Vaugrenant et mademoiselle Corneille fassent des philosophes et des faiseurs de tragédies, donnez-nous la résidence de Genève.
Mes anges, faites comme vous voudrez, comme vous pourrez ; pour moi, je suis à vos ordres, à vos pieds, à vos ailes jusqu’au dernier moment de ma vie.
N.B. – Madame Denis et mademoiselle Corneille ne sont pas si contentes que moi du demi-philosophe ; elles le trouvent sombre, duriuscule 5, peu poli, peu complaisant, marchandant, et marchandant mal . Mais si la résidence genevoise était attachée à ce mariage, nos dames pourraient être plus contentes. Enfin ordonnez.
V. »
1 L’édition Supplément au recueil est très inexacte .
2 Allusion au Joueur de Regnard, III, 3 . Portés fait référence à l'équipage .
3 Réminiscence comique de L'Avare, I, 5 .
4 Marigny, frère de la marquise de Pompadour et intendant des bâtiments du roi, avait commencé à faire ériger un mausolée à la mémoire de Crébillon le tragique qu'avait protégé sa sœur .
5 Allusion comique au Malade imaginaire , II, 9 ; voir : https://www.littre.org/definition/duriuscule
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24/10/2017
Je n'ai pourtant qu'un cerveau de 5 doigts de profondeur
... comme nous tous humains et quelques bestioles qu'on dit bêtes, et ce tas de neurones , ni plus ni moins volumineux que celui de Voltaire, est censé mener ma carcasse pour quelque temps encore avec des pensées qui n'auront pas plus d'un travers de main de profondeur, et , je l'espère, pas moins .
A gauche, mon cerveau, à droite celui de mon PC .
« A Gabriel Cramer
[décembre 1762]
Faîtes pour le mieux, caro Gabriele et pour vos intérêts auxquels je subordonnerai toujours toutes mes idées poétiques et prosaïques .
Je ne sais plus où j'en suis de l’Histoire générale . Quelles est votre dernière page ? où suis-je ? Ah Gabriel, Gabriel, j'en ai par dessus les yeux, histoire, chapitres, Pierre le Grand, le grand Corneille, théâtre, pièce à jouer, pièce à faire . Je n'ai pourtant qu'un cerveau de 5 doigts de profondeur . »
14:54 | Lien permanent | Commentaires (0)
Comment va l'enflure ?
... Non, je ne m'enquiers pas ici de la santé de Harvey Weinstein, non plus que de celle de Gilbert Rozon !
« A Gabriel Cramer
[décembre 1762]
Caro, c'est un rude fardeau de lire une feuille de Don Sanche d'Aragon 1. J'aimerais mieux je crois faire une mauvaise tragédie que d'en lire une .
Les estampes dont on se plaint sont d'Annibal Carache 2, en comparaison des rabâchages de Pierre, mais faites tout comme il vous plaira 3. Mon seul emploi sera de commenter le peu de pièces de Pierre où il se trouve encore quelques étincelles de génie .
Les nouvelles de Virtemberg sont-elles bien sûres ? Que sont donc devenues les 180 000 marionnettes de Son Altesse 4? Comment va l'enflure ? »
1 Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Th%C3%A9%C3%A2tre-Fran%C3%A7ais._-_Reprise_de_Don_Sanche_d%E2%80%99Aragon
2 Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Annibale_Carracci#Suiveurs_de_Carrache
On trouve au château de Voltaire à Ferney, deux tableaux , copies de ceux de Francesco Albani (qui reprend les conceptions du paysage idyllique d'Annibal Carrache ) : La Toilette de Vénus ou l'Air, et Les Amours désarmés ou la Terre .
3 Gabriel Cramer écrira le 17 décembre 1762 à Maurice Quentin de La Tour : « La lettre que vous avez pris la peine de m'écrire […] m'a aidé à décider M. de Voltaire […] ; il ne sera donc plus question des dessins du Bourguignon, et M. Gravelot restera seul chargé de la besogne . » . Voir lettre du 18 décembre 1762 de V* à Fyot de La Marche : « Il y a une terrible tracasserie à l'Académie de peinture de Paris au sujet de votre dessinateur. »
4 Fin novembre 1762, les Prussiens ont envahi la Franconie, pris Nuremberg, et se sont avancés jusqu'à la frontière du Wurtemberg .
01:24 | Lien permanent | Commentaires (0)
23/10/2017
Macte animo
...
« A Gabriel Cramer
[vers le 15 décembre 1762]
Caro, voici pour une feuille de l’Histoire, en attendant la valeur de deux autres que j'ai envoyées à Paris en consultation et qui reviendront lundi .
Macte animo 1.
Vosges soutient que ses estampes sont admirables . M. le premier président de La Marche va à Paris plaider pour lui . Vale .
V.
Vous avez reçu une lettre pour Mlle Delon 2. Vale . »
1 Courage ! Horace, Satires, I, ii, 31 .
2 Elle va à Cassel, où elle épousera Jean-Pierre-Louis de La Roche du Maine, marquis de Luchet , que l'on retrouvera dans la correspondance .Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Pierre-Louis,_marquis_de_Luchet
et : http://data.bnf.fr/12000743/jean-pierre-louis_de_la_roche_du_maine_luchet/
D'autre part on connait Claire Delon , de La Salle en Languedoc, épouse de Gabriel Cramer .
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Au sujet d'un vol dont il a été victime
... Pour le respect de la parité , dont "elle" etc.
The voice !
« A Joseph-Marie Balleidier
Ferney 14 décembre 1762 1
[Au sujet d'un vol dont il a été victime .]
1 Le manuscrit olographe avec l’adresse est passé à la vente Gauthier-Lachapelle le 20 mai 1872, et en dernier lieu à la vente Anderson le 6 novembre 1924 .
14:52 | Lien permanent | Commentaires (0)