Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

07/10/2017

ce sera le solde de son compte

... Peut-être .

Dès qu'il aura comparu devant le tribunal correctionnel, Nicolas Sarkozy saura qu'on ne triche pas impunément : « corruption », « trafic d’influence » et « recel de violation du secret professionnel », excusez du peu , pour cet habitué du flirt avec l'illégalité .

 http://www.20minutes.fr/politique/2146547-20171006-affair...

 Résultat de recherche d'images pour "sarko et la justice humour"

 

 

« A Henri Cathala

à Genève

Voulez-vous bien, monsieur, joindre à toutes vos bontés celle de me faire le plaisir d'envoyer à M. Daniel Malvesin, marchand-droguiste, que vous connaissez sans doute, la somme de quatre cent quarante livres ; ce sera le solde de son compte ; je vous serai très obligé de cette grâce .

Mes compliments, je vous en supplie, à M. Debrus ; pardonnez-moi les petites libertés que je prends avec vous, et me croyez un de vos plus fidèles serviteurs .

Voltaire.

A Ferney 28è novembre 1762 »

il a assez gagné avec moi pour faire ce que j'exige de lui

... C'est ce que j'aimerais bien entendre de la bouche de Xi Jinping à propos de Kim Jung-Un , ou est-ce trop demander ?

 Résultat de recherche d'images pour "xi jinping  kim jong un humour"

http://freedom.fr/les-relations-entre-la-chine-et-la-core...

 

 

« A Joseph- Marie Balleidier, Procureur

d'office de Ferney-Voltaire

à Gex

Je souhaite passionnément, monsieur, réussir pour vous dans votre affaire que j'ai recommandée à Mme la duchesse d'Anville auprès de M. le comte de Saint-Florentin . Je vous suis très obligé de ce que vous faites pour Mme Burdet ; je vous prie d'accélérer la fin de ses affaires dont dépend sa fortune .

Je vous prie aussi de me faire avoir du sieur Vuaillet, la signification qu'il a dû faire pour moi à M. De Brosses . Voici une lettre du sieur Vuaillet à la dame Burdet, il n'est pas juste qu'il vexe cette veuve ; il a assez gagné avec moi pour faire ce que j'exige de lui . Mme Burdet lui a d'ailleurs donné douze livres, c'est bien assez , il ne doit pas retenir les papiers en recevant de l'argent .

Comptez, monsieur, sur mon estime, et sur mon amitié .

Voltaire.

28 novembre [1762]1

Ayez je vous prie, la bonté d'ajuster au plus bas prix ce que Mme Burdet peut devoir au sieur Vuaillet, et de m’en rendre compte . »

1 Le manuscrit original est signé, date autographe, mentionnée au complet par Balleidier . Quelques mots isolés de cette lettre ont été imprimés par Vézinet .

vous ne me paraissez pas trop compter sur l'amitié des grands . N'avez-vous jamais éprouvé que les petits n'aiment guère mieux ?

... Je vous mets en garde, M. Macron, bien qu'il me semble que vous soyez déjà au fait .

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

28 novembre [1762]1

Mon cher confrère, mon grand philosophe, vous ne me paraissez pas trop compter sur l'amitié des grands i. N'avez-vous jamais éprouvé que les petits n'aiment guère mieux ? Pour moi qui ai le bonheur d'être petit, je vous avertis que je vous aime de tout mon cœur.

A l'égard du duc de Choiseul, convenez que je lui ai une très grande obligation puisque je lui dois d'être libre chez moi ii, et de ne pas dépendre d'un intendant. Vous en savez pas ce que c'est qu'un intendant de province. Le frère d'Omer iii me manda un jour qu'il n'était en place que pour faire du mal. Aussi voulut-il m'en faire ; et j'eus les franchises de ma terre malgré lui. Vous voyez que je me suis toujours moqué de la famille d'Omer. C'est à M. le duc de Choiseul que je dois tout cela. S'il a eu le malheur de croire sur une écriture rapide que j'avais écrit une sotte lettre iv, il a bien réparé son erreur. Il a noblement avoué son tort. Autrefois les ministres ne faisaient jamais de tels aveux.

Pour Luc, quoique je doive être très fâché contre lui, je vous avoue qu'en qualité d'être pensant, et de Français je suis fort aise qu'une très dévote maison v n'ait pas englouti l'Allemagne et que les jésuites ne confessent pas à Berlin. L'Infâme est bien puissante vers le Danube. Vous me dites qu'elle perd de son crédit vers la Seine vi. Je le souhaite, mais songez qu'il y a trois cent mille hommes gagés vii pour soutenir ce colosse affreux, c'est à dire plus de combattants pour la superstition que la France n'a de soldats. Tout ce que peuvent faire les honnêtes gens, c'est de gémir entre eux quand cette superstition est persécutante, et de rire quand elle n'est qu'absurde, d'éclairer le plus d'esprits bien nés que l'on peut et de former insensiblement dans l'esprit [des hommes]viii destinés aux places une barrière contre ce fléau abominable. Ils doivent savoir que sans les disputes sur la transsubstantiation et sur la bulle, Henri III, Henri IV et Louis XV n'auraient pas été assassinés . C'est un bon arbre, disent les scélérats dévots, qui a produit de mauvais fruits. Mais puisqu'il en a tant produit ne mérite-t-il pas qu'on le jette au feu ?ix Chauffez-vous en donc tant que vous pourrez, vous et vos amis.

Vous pensez bien que je ne parle que de la superstition car pour la religion chrétienne je la respecte et je l'aime comme vous .

Courage donc, mes frères, prêchez avec force et écrivez avec adresse. Dieu vous bénira.

Protégez, mon frère, tant que vous pourrez la veuve Calas . C'est une huguenote imbécile, mais son mari a été la victime des pénitents blancs. Il importe au genre humain que les fanatiques de Toulouse soient confondus. Un autre fanatique, Patouillet, aidé de Caveirac, a écrit deux volumes contre l'Histoire générale x. Tant mieux. Si on lit leur livre, cela fera naître des éclaircissements. J'avais levé un coin du voile dans la première édition, je le déchire un peu dans la seconde. Vous y trouverez de quoi vous édifier. En attendant j'enverrai à l'Académie l'Héraclius de Calderon : il fera connaitre le génie espagnol xi. En vérité ils sont dignes d'avoir chez eux l'Inquisition.

Que faites-vous à présent ? travaillez-vous en géométrie, en histoire, en littérature ? Quoi que vous fassiez, écrasez l'Infâme, et aimez qui vous aime. »

1 V* répond à la lettre du 17 novembre 1762 de d'Alembert : « Vous auriez un très grand tort, mon cher et illustre maître, de faire une satire contre un ministre à qui vous avez , dites-vous, de si grandes obligations ; vous auriez même eu tort de l'outrager, quand vous eussiez été intéressé dans la comédie des Philosophes dont il a procuré et favorisé la représentation […] J'aurais été très fâché que l'on m'eût soupçonné d'être le bureau d'adresse des satires qu'on s'avise de faire contre le gouvernement […] Pour la philosophie, je ne crois pas qu'Omer et Palissot lui fassent réparation sitôt ; mais en attendant, on fait justice de ses ennemis . Cependant il y a , dit-on, 24 jésuites retirés à Versailles […] Le parlement ne les y voit pas de bon œil […] Eh bien que dites-vous de la paix ? Et croyez-vous pour le coup que votre ancien disciple s'en tire ? Ce serait un grand malheur pour la philosophie que la maison d'Autriche, encore superstitieuse, fût la maîtresse de l'Allemagne […] On dit que pour dédommager la maison de Saxe, qui a bien l'air de payer les frais, on donnera un évêché en France ou en Allemagne au prince Clément ; ce sera une maison crossée et mitrée […] »

i D'Alembert moqueur a écrit : « ... à l'égard de ses bontés (de Choiseul) je vous en souhaite la continuation. » ; lettre du 17 novembre : http://books.google.fr/books?pg=PA592&lpg=PA592&i...

ii En mai 1759, Choiseul a fait obtenir à V* et Mme Denis le brevet de conservation des droits seigneuriaux de Ferney ; ces droits seront à nouveau contestés en mai 1763.

iii Le frère d'Omer Joly de Fleury était intendant de Bourgogne. V* l'avait reçu chez lui en octobre 1760, fort bien, avec le fils même d'Omer : http://fr.wikipedia.org/wiki/Famille_Joly_de_Fleury

et cf. lettre du 16 octobre 1760 à Mlle Clairon : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/10/16/a...

 

iv « ... sotte lettre » : version très falsifiée et antigouvernementale publiée dans le St James's chronicle du 17 juillet 1762 de la lettre adressée à d'Alembert le 29 mars ; cf. lettre du 15 septembre à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/09/15/tachez-de-votre-cote-d-eclairer-la-jeunesse-autant-que-vous.html

et lettre 104 et suivantes,pages 587-... : http://books.google.fr/books?pg=PA592&lpg=PA592&i...

 

Cela faisait sa « vraie tribulation » que le duc de Choiseul le « crû l'auteur de cette belle rhapsodie anglaise » et «  qu'il le (lui)( eût) écrit avec bonté... » disait-il aux d'Argental le 25 octobre ; il ajoutait : « J'en ai été outré et je lui ai dit bien des injures qu'il mérite. » Pour détromper Choiseul

il lui envoyait la véritable lettre avec un billet de d'Alembert ; le 12 décembre, Choiseul le tranquillisait : « Vous avez raison, vous n'avez point écrit la lettre supposée ; personne n'en parle, ni ne songe actuellement à vous l'imputer ... ma chère marmotte, je vous aimerai toujours de tout mon cœur. »

v La maison d'Autriche. Luc = Frédéric II de Prusse. V* montre ici clairement qu'il fait passer sa passion antireligieuse avant la considération de l'intérêt français en Europe ; on ne le trouve pas plus clairvoyant à l'égard de la politique continentale qu'à propos de la politique maritime relative au Canada . Cela contraste avec ses jugements pertinents portés sur l'attitude des parlements .

vi Le 17 novembre d'Alembert lui a écrit : « il y a , dit-on, 24 jésuites retirés à Versailles ...Le parlement ne les y voit pas d'un bon œil et se propose d'enfumer le terrier ..., ils ne sont plus guère renards. » Sur les avatars des jésuites, cf. lettre du 19 mai 1762 . La dissolution de l'ordre a été prononcée le 6 août 1762 par le Parlement.

vii Prêtres et moines.

viii Mots omis par V*.On pense aussi à jeunes gens , qui sont une restitution fondée sur des déclarations analogues de V* . De toute façon, l'omission s'explique par un « saut du même au même » sur la syllabe des qui commence le mot destinés .

ix Tel qu'il est dit dans les évangiles.

x V* évoque les Erreurs de M. de Voltaire sur les faits historiques, dogmatiques..., 1762, ouvrage anonyme dont il a demandé le nom de l'auteur à Damilaville ; cf. lettre du 9 septembre 1762, et page 407 lettre CCLIX : http://books.google.be/books?id=9EUQAAAAYAAJ&pg=PA407...

. L'auteur est le jésuite Nonnotte (qui figure dans le tableau dit Le triomphe de Voltaire au château à Ferney-Voltaire, -en enfer bien entendu !-.)

Le père Patouillet avait publié entre autre l'Apologie de Cartouche, ou le scélérat sans reproche par la grâce du P. Quesnel, 1731,http://books.google.be/books?id=EewFAAAAQAAJ&pg=PA5&a...

et Novi de Caveirac, auteur de l'Apologie de Louis XIV et de son conseil, sur la révocation de l'Édit de Nantes ... avec une dissertation sur la journée de la Saint Barthélémy, 1758 : http://books.google.be/books?id=708A7rLJkwAC&printsec...

 

xi V* a joint à ses Commentaires sur Corneille une traduction de la pièce de Calderon qu'il juge très sévèrement ; cf. lettre du 4 juin à Capacelli et lettres du 17 juin et 15 septembre 1762 à d'Alembert.

06/10/2017

Il me manque deux choses, monsieur, pour répondre avec exactitude

... C'est une phrase que je recommande à tout étudiant de mettre en tête de toute copie, à condition de bien trouver les "deux choses" qui donneront un peu d'intérêt et de valeur à une absence de réponse, et éviteront le 0 ( la bulle) fatidique .  L'humour et le savoir ne sont pas incompatibles, mais il ne faut pas se tromper d'emploi, c'est ma seconde et dernière recommandation aux usagers de l'impasse . Le correcteur peut diablement manquer du premier , ou alors en user lui aussi , et noter : "Fatal error 414, Game over, Try again !"

Image associée

 

 

« A Alexis-Jean Le Bret

24 novembre 1762 au château de Ferney près de Genève

Il me manque deux choses, monsieur, pour répondre avec exactitude, de la santé et du loisir , sans cela vous auriez plus souvent de mes nouvelles . Il est impossible que les Cramer puissent commencer à imprimer votre dictionnaire de Bayle avant un an etc. etc. 1»

Je m’amuse à peindre les sottises des hommes, et je vais jusqu’à l’année présente . La matière est abondante

... Einstein dira même que c'est la seule chose qui est réellement infinie .

  http://www.leglobelecteur.fr/wordpress/wp-content/uploads/2013/02/lucien_jerphagnon_la_sottise_m.jpg

http://www.leglobelecteur.fr/piste-4-la-sottise-89

 

 

« A Bernard-Louis Chauvelin

22 novembre [1762] à Ferney 1

Bénies soient vos excellences, qui aiment notre tripot, et qui l’aiment au point de vouloir bien payer un port exorbitant pour une pièce médiocre 2! Le titre en est beau, je l’avoue ; mais je tiens avec vous, monsieur l’ambassadeur, qu’il vaut mieux être possesseur de madame de Chauvelin que d’avoir le droit des prémices de toutes les filles de village.

Quand vous serez bien las de cette comédie, ne pourriez-vous pas l’envoyer à M. d’Argental, sous l’enveloppe de M. le duc de Praslin ? Il pourra, en qualité d’amateur du tripot, se donner l’amusement de la faire jouer, pour divertir les Anglais qui sont à Paris.

Vous êtes un vrai ministre. Vous avez vite envoyé à M. d’Argental certain quatrième acte tragique sans m’en rien dire ; mais je m’en suis bien douté, et je vous jure que je vous ai pardonné ce tour de tout mon cœur. Je sens bien qu’il serait bon [que]3 ce quatrième acte fût aussi plein de fracas que les autres . Je veux laisser reposer quelque temps la pièce et moi. Les choses ont souvent besoin d’être quittées pour être senties. Vous avez un goût infini . Je suis aussi charmé de vos judicieuses réflexions que de vos bontés. Si j’avais autant de génie que vous avez de lumières, je vous assure qu’on verrait beau jeu. Mais avouez que le rôle d’Olympie ferait un effet merveilleux dans la bouche de madame l’ambassadrice, à Ferney. Vous m’avez promis de revenir à la paix ; la voilà faite. Quand ferons-nous venir les violons pour l’orchestre ? passerez-vous votre vie à Turin ? Vos amis de Paris n’auront point de repos s’ils ne vous revoient. La société de ce pays-là a besoin de vous ; vous en faites le charme, et il faut surtout que vous aidiez au bon goût à se maintenir . On dit qu’il va un peu en décadence. Vous me réchaufferez en passant. Je crois que je suis à présent le seul vieillard qui fasse des tragédies et qui plante. Je vous donne rendez-vous au printemps, moi, mes arbres, et mon théâtre. S’il me vient quelques idées bien tragiques cet hiver, je vous consulterai sur-le-champ ; mais à présent c’est le quartier de l’histoire. Je m’amuse à peindre les sottises des hommes, et je vais jusqu’à l’année présente . La matière est abondante. Adieu, monsieur ; conservez-moi des bontés qui font la consolation de ma vieillesse, de ma retraite, et de mes travaux. Je me mets aux pieds de madame l’ambassadrice.

V. »

1 L'éditeur a hésité entre 1762 et 1763 .

2 Le Droit du seigneur .

3 V* a oublié que qui s'impose ici .

05/10/2017

trouvez-vous que le commerce se ressente déjà de la paix, et qu'il en procure les fruits ?

... Heu ! comment dire ? franchement : NON !

Ce serait même plutôt le contraire, le commerce de l'armement est florissant, le Rafale français et toutes les munitions et armes de tous pays sont encore de bon rapport pour les balances commerciales ; on n'est pas près de forger des charrues avec . Il va falloir se faire encore à cette idée de manger des fruits amers , et pire encore s'en trouver bien, par défaut .

 Image associée

Message reçu !

 

« A Ami Camp, Banquier

à Lyon

Ferney 21è novembre 1762

Mon cher correspondant, trouvez-vous que le commerce se ressente déjà de la paix, et qu'il en procure les fruits ? Vous me feriez plaisir de me dire si on compte en effet sur la cession de la Floride et si vous en avez quelques nouvelles positives ?

Je ne peux vous dire encore si j'aurai recours à vos bontés pour mon métier d'agriculteur . Je vous prierai seulement de vouloir bien me dire à votre loisir ce que coûte le quintal de bon frumental .

Je vous supplierai de défalquer sur les 120 louis de chaque mois les fournitures dont vous me permettez que Mme Denis et moi nous vous importunons afin que les 180 000 livres restent intactes .

C'est toujours en supposant que M. de Laleu paie avec la régularité qu'il a promise . Je suppose que vous touchez exactement ces 120 livres par mois, et que cela n'a rien de commun avec les 44 740 livres que vous m'avez fait toucher . Si ces objets étaient mêlés ensemble je vous prierais de m'en vouloir bien fournir une note . Mais il me semble qu'ils sont absolument séparés . Ainsi mes comptes en deviendront plus faciles en défalquant de mois en mois ce que vous pourriez avoir payé sur les 120 louis . Je tâcherai d'user avec discrétion de la bonté que vous avez de permettre que nous recourions à vous dans nos petites nécessités . Mme Denis et moi nous vous renouvelons notre tendre attachement, et Mlle Corneille en dit autant à son docteur .

V. »

n’avez-vous jamais vu un ministre donner audience, écouter cent affaires, et ne se soucier d’aucune ?

... Si, bien sûr ! la liste remonte à l'antiquité et n'a pas de fin .

Sinon ce serait trop beau d'avoir des ministres attentifs à tous les problèmes et trouvant des solutions adéquates .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

21 novembre [1762]

O mes anges ! n’avez-vous jamais vu un ministre donner audience, écouter cent affaires, et ne se soucier d’aucune ? n’avez-vous jamais vu un avocat plaider trois ou quatre causes sans s’en mettre en peine, et les juges prononcer sans les entendre ? Vous croyez donc qu’il en est de même de votre créature des Alpes ? Il me faut à la fois faire imprimer, revoir, corriger une Histoire générale, une Histoire de Pierre-le-Grand ou le cruel, et Corneille avec ses commentaires, et passer de cet abîme à une tragédie. Le tripot, le tripot doit l’emporter, j’en conviens ; mais, encore une fois, je n’ai qu’une âme logée dans un chétif corps usé, sec, et souffrant. J’avais mis votre Olympie en séquestre, afin de la revoir avec un œil sain et frais. Il était nécessaire de laisser tomber les grosses taies que l’enthousiasme étend sur les prunelles d’un auteur, dans la première ivresse d’une composition rapide. Je vous donnerai votre Olympie pour votre carême ; c’est un temps tout à fait sacerdotal, et digne d’une pièce dont l’action se passe dans un couvent. L’Opéra-Comique célébrera gaiement, au commencement de l’hiver, les plaisirs de la paix, et Paris aura mon grave hiérophante pour sa quadragésime. Ne trouvez-vous pas cet arrangement tout à fait convenable ? Puisque je suis à présent enfoncé dans l’historique, permettez-moi de vous demander simplement le secret de l’État, qui est le secret de la comédie. Les Espagnols cèdent-ils bien réellement la Floride ?1 la chose m’intéresse. Une famille suisse, qui m’est très recommandée, veut aller s’établir dans ce pays-là, et ne veut point vendre son petit fonds helvétique sans être sûre de son fait. Ne négligez pas, je vous en prie, ma question . Elle peut être hasardée, mais elle est charitable, et vous êtes anges du temporel comme du spirituel.

Avez-vous à Paris M. de La Marche ? c’est encore un point dont je vous supplie de m’instruire.

Le philosophe épouseur 2 arrivera donc. Nous requinquerons Cornélie-Chiffon, nous la parerons. Elle prétend qu’elle pourra savoir un peu d’orthographe : c’est déjà quelque chose pour un philosophe. Enfin nous ferons comme nous pourrons . Ces aventures-là s’arrangent toujours d’elles-mêmes . Il y a une providence pour les filles.

J’avais bien deviné que M. de Chauvelin m’avait trahi. Vous vous entendez comme larrons en foire. Il a sans doute beaucoup d’esprit et de goût. Plus vous en avez, mes chers anges, plus vous sentez combien une tragédie est une œuvre difficile, surtout quand le goût du public est usé.

Je voudrais bien que M. le duc de Bethfort 3 vît Tancrède, et qu’il souscrivît pour mademoiselle Corneille.

Zulime est de mediocribus.4

Mille tendres respects. »

1 Par le traité, la Grande-Bretagne restituait La Havane et Manille, et obtenait en échange la Floride et diverses autres compensations ; voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_Paris_(1763)

et : http://mjp.univ-perp.fr/traites/1763paris.htm

3 Ministre plénipotentiaire anglais , le duc de Bedford .

4 Médiocre .