20/05/2020
Je joins de loin mes acclamations à celles de tout Paris
... aux heureux déconfinés des départements verts !
Consolation : il fait très beau, et si François d'Assise veut bien plaider pour moi et dire un mot aux pigeons, pies et merles, j'aurai le loisir de manger les quelques cerises restantes.
« A Pierre-Laurent Buyrette de Belloy
6 mars 1765 1
Je suis presque entièrement aveugle, monsieur, mais j'ai encore des oreilles, et les cris de la renommée m'ont appris vos grands succès ; j'ai un cœur qui s'y intéresse . Je joins de loin mes acclamations à celles de tout Paris . Jouissez de votre bonheur, et de votre mérite . Il ne vous manque que d'être dénigré par Fréron pour mettre le comble à votre gloire . Je vous embrasse sans cérémonie, il n'en faut point faire entre confrères .
V.»
1 Il y a plusieurs copies contemporaines dont est ici retenue la plus soignée , de l'édition Lettres, 1766 . Les Mémoires secrets signalent cette lettre à la date du 17 mars, en même temps que la réponse de Belloy . Le 4 avril 1765, envoyant une copie de la présente à Formey. , Trubler ajoute, non sans perspicacité : « Il y a encore lancé un trait à Fréron, comme il fait dans tout ce qu'il écrit . Ce n'est pas prudent : c'est donner acte et aveu à Fréron de sa sensibilité aux traits qu'il lui lance de son côté, et il vaudrait mieux feindre de les mépriser ; mais l'amour-propre de Voltaire est trop fort pour être habile . » Il faut ajouter que les critiques de Fréron sont souvent pénétrantes et frappent juste .
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Si nous étions trop court d'une page ou deux, il serait aisé d'y remédier en un quart d'heure
... Telle est la conclusion du rédacteur des discours présidentiels qui ne chôme pas ces derniers temps . En effet, un peu de bla-bla en sus, ça ne pose aucun problème à qui aime faire de belles phrases avec de belles affirmations et de belles promesses .
Les plumes à poil
« A Gabriel Cramer
[vers le 5 mars 1765]
J'envoie à monsieur Caro 21 pages, qui à la vérité sont un peu barbouillées, mais qu'on pourra déchiffrer . Je prends ce parti afin de ne le point faire attendre .
Je présume que ces 21 pages rempliront tout juste la lacune . Si nous étions trop court d'une page ou deux, il serait aisé d'y remédier en un quart d'heure .
Le petit ouvrage que j'envoie est très intéressant 1. C'est précisément la même aventure que celle des Calas ; elle commence à faire beaucoup de bruit dans Paris et dans la Flandre .
Monsieur Cramer sera étonné et attendri .
Je le prie de faire imprimer séparément ce petit ouvrage en octavo et de m'en envoyer quelques douzaines d'exemplaires . »
1 Ce doit être la lettre du 1er mars à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/05/14/on-vit-alors-que-s-il-y-a-de-grands-crimes-sur-la-terre-il-y-a-autant-de-ve.html
A une date ultérieure Cramer n'aurait pas pu être « étonné » par l'affaire Sirven comme V* lui promet qu'il le sera ici .
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19/05/2020
entre les genoux d'Issé Je le crois dieu bien davantage ... C'est pour autrui qu'on est aimable, Mais il faut être heureux pour soi
... Ah ! coquin de Voltaire ! et sage tout autant !
Sans masque et sans peur
« A Charles-Michel, marquis du Plessis-Villette 1
5è mars 1765, à Ferney 2
Vous savez penser comme écrire ;
Les grâces avec la raison
Vous ont confié leur empire .
L'infâme Superstition 3
Sous vos traits délicats expire .
Ainsi l'immortel Apollon
Charme l'Olympe par sa lyre
Tandis que les flèches qu'il tire,
Écrasent le serpent Python.
Il est dieu, quand par son courage
Ce monstre affreux est terrassé ;
Il l'est, quand son brillant visage
Rallume le jour éclipsé ;
Mais entre les genoux d'Issé
Je le crois dieu bien davantage 4.
Moins le hibou de Ferney, monsieur, mérite vos jolis vers, plus il vous en doit des remerciements . Il s'intéresse vivement à vous ; il connait tout ce que vous valez .
Les erreurs et les passions,
De vos beaux ans sont l'apanage ;
Sous cet amas d'illusions,
Vous renfermez l'âme d'un sage .
Je vous retiens pour un des soutiens de la philosophie , je vous en avertis , vous serez détrompé de tout, vous serez un des nôtres .
Plein d'esprit, doux et sociable,
Ce n'est pas assez , croyez-moi,
C'est pour autrui qu'on est aimable,
Mais il faut être heureux pour soi .
Nous avons une cellule nouvelle, et nous en bâtissons une autre ; vous savez combien vous êtes aimé dans notre couvent. »
2 L'édition « Lettre de M. de Voltaire à M . le marquis de Villette », Journal étranger du 1er juin 1765, date la lettre du 15 mars . La date portée sur les copies est confirmée par la réponse de Villette datée du 6 mars 1765 .
3 Le journal étranger imprime L'horrible Superstition pour effacer la référence trop connue à l'infâme de V*.
4 Allusion à Issé, de Destouches, joué autrefois par Emilie du Châtelet : https://www.forumopera.com/isse-de-destouches-montpellier-festival-applaudissez-isse
et voir : https://www.les-surprises.fr/programme/isse/
et écouter : https://www.youtube.com/watch?v=8eNRWsYOg2U
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18/05/2020
je présente mes respects à madame votre femme , et je salue vos beaux tableaux
... élyséens, monsieur le président , faute de pouvoir profiter librement de tous les paysages de notre beau pays . Pour une fois je vous envie, allant à votre gré par-ci par-là, alors que , je vous l'avoue, votre fonction ne me tente pas du tout .
https://www.dailymotion.com/video/x5kngk5
Mes hommages matutinaux
« A François Tronchin
Conseiller d’État
rue des Chaudronniers
à Genève
Mon cher ami, c'est avec un grand regret que j'ai quitté les Délices . L'état de mes affaires m'a seul forcé à ce sacrifice , mais c'est avec un grand plaisir que je vous en vois le possesseur . Nous prendrons maman et moi le jour qui vous conviendra .
Je suis actuellement un peu malade et condamné à un régime bien austère . Je jeûnerai pour venir me crever chez vous . Je vous embrasse tendrement vous et les vôtres ; je présente mes respects à madame votre femme , et je salue vos beaux tableaux .
V.
5è mars [1765] 1»
1 Selon l'édition Tronchin, quelque peu incomplète .
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Il doit être très sûr que je n'enverrai point à Paris la Destruction
... Plein de bonne volonté, je ne sors quasiment plus et toujours masqué, alors comment se fait-il que je sois encore jugé dangereux, confiné dans le rouge ?
« A Gabriel Cramer
[vers le 4 mars 1765]
J'envoie à mon cher Gabriel la lettre de Protagoras 1, je le prie de me la renvoyer chez l'ami Souchay . Il doit être très sûr que je n'enverrai point à Paris la Destruction ; et il doit être encore très sûr que la Destruction édifiera beaucoup . En vérité, c'est un joli ouvrage .
Quand j'aurai les journaux de Schurler 2 ou l'équivalent je me mettrai bien sérieusement à griffonner pour frère Gabriel . »
1 Lettre de d'Alembert du 27 février 1765 dans laquelle celui-ci demande notamment qu'on lui fasse relier deux exemplaires de la Destruction des jésuites, l'un « en veau tout simple », l'autre »en maroquin doré sur tranche » à l'intention du roi de Prusse et de Catt, secrétaire des commandements de Frédéric II .Voir : http://dalembert.academie-sciences.fr/Correspondance/oeuvres.php?Exp_lettre=Voltaire
2 Le Mercure historique et politique : https://fr.wikipedia.org/wiki/Mercure_historique_et_politique
et voir : http://gazetier-universel.gazettes18e.fr/periodique/mercure-historique-et-politique-1-1686-1782
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17/05/2020
Il faut avouer que la maison d'Aristippe valait mieux que le tonneau de Diogène
... Jugez-en : http://www.philo5.com/Les%20philosophes%20Textes/Aristippe_OntDitSur.htm
« A Charles Pinot Duclos
4 mars 1765
J'ai reconnu sur-le-champ, mon cher et illustre confrère, votre portrait et votre style . Je vous assure que je suis bien content de l'un et de l'autre . Puisque vous écrivez si bien sur les mœurs, j’aurais voulu que vous en eussiez inspiré d'un peu plus douces à J.-J. Rousseau . Les siennes ne l'ont pas rendu heureux . Il faut avouer que la maison d'Aristippe valait mieux que le tonneau de Diogène . »
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16/05/2020
Il me paraît qu'il sera plus aisé à guérir que votre république
... Le Français est effectivement guérissable puisqu'il pense déjà aux vacances, et, sans surprise, des mouvements de grève sont prévus . Déconfiné, vous avez dit déconfiné ? Oui . La république, elle attendra , rassurée car le CAC40 va progresser, c'est promis , malgré tout . A suivre .
« A Théodore Tronchin
Mon cher Esculape, la philosophie se met entre vos mains ; le meilleur ami que j'aie parmi les philosophes 1 vous supplie avec moi de vouloir bien donner vos avis . Il me paraît qu'il sera plus aisé à guérir que votre république . Étendez du moins vos bontés sur mon philosophe, et conservez-moi celles dont vous m'avez toujours comblé, et qui font le charme de ma vie .
V.
4è mars 1765 à Ferney
Je vous prie d'envoyer votre réponse chez M. Souchay rues Basses au Lion d'Or . »
1 Damilaville, voir lettre du 6 mars : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/09/correspondance-annee-1765-partie-7.html
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