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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Vous avez, dit-on, Madame, trouvé dans votre château le secret d’immortaliser un âne

 

http://www.youtube.com/watch?v=9RDO5KzQC9E

 Il est juste de faire un tel carillon pour un tel homme !

IL EST NE !

 

 

Il y a trois cent cinquante ans ! trois cent quinze ! (oups ! je ne sais plus compter, mais sachez pour ma défense qu'il ne fait pas son âge ){*}

 

Le 21 Novembre 1694 : naissance, baptême le jour suivant en l’église Saint André des Arts (à Paris, dans le faubourg St Germain) par l’abbé Bouché.

http://blog.pressebook.fr/ruesdeparis/2009/10/31/saint-an...

 

Mais qui est-il ce bébé ?

 

François-Marie Arouet

Voltaire !

 

Double anniversaire ce jour : celui de Voltaire et celui du blog que je ne me lasse pas d’admirer er fréquenter assidûment : http://www.monsieurdevoltaire.com/.

Vous avez entendu parler de Voltaire ! ? Alors écoutez-le, lisez-le ! Aimez -le !

Allez-y ! Tout de suite ! Plus vite que ça !

Euh ! prenez quand même le temps de lire ce qui suit , vous irez vous prendre votre dessert après ...

 

 

 

 

« A Anne-Louise-Bénédicte de Bourbon-Condé, duchesse du Maine

 [1720 ?]

                            Toutes les princesses malencontreuses qui furent jadis retenues dans des châteaux enchantés par des négromants eurent toujours beaucoup de bienveillance pour les pauvres chevaliers errants à qui même infortune était advenue [la duchesse dont le mari –fils de Louis XIV et de Mme de Montespan – avait été écarté du pouvoir par le Régent, avait été impliquée dans le complot de Cellamare en 1718 et exilée à Dijon, puis à Chalons . Elle était la « dictatrice » de l’Ordre de la Mouche à miel qu’elle avait créé à Sceaux en 1703.]. Ma Bastille, Madame, est la très humble servante de votre Chalons ; mais il y a une très grande différence entre l’une et l’autre :

 

Car à Chalons les grâces vous suivirent

Les jeux badins prisonniers s’y rendirent ;

Et tous ces enfants éperdus

Furent bien surpris quand ils virent

La fermeté, la paix, et toutes les vertus,

Qui près de vous se réunirent.

 

                            Cet aimable assemblage, si précieux et si rare, vous asservit les cœurs de tous les habitants.

 

On admire sur vos traces

Minerve auprès de l’amour.

Ah ! ne leur donnez plus ce Chalons pour séjour ;

Et que les muses et les grâces

Jamais plus loin que Sceaux n’aillent fixer leur cour.

 

                            Vous avez, dit-on, Madame, trouvé dans votre château le secret d’immortaliser un âne.

 

Dans ces murs malheureux votre voix enchantée

Ne put jamais charmer qu’un âne et les échos :

On vous prendrait pour une Orphée,

Mais vous n’avez point su, trop malheureuse fée,

Adoucir tous les animaux.

 

                            Puissiez-vous mener désormais une vie toujours heureuse, et que la tranquillité de votre séjour de Sceaux ne soit jamais interrompue que par de nouveaux plaisirs. Les agréments seuls de votre esprit peuvent suffire à faire votre bonheur.

 

Dans ses écrits le savant Malézieu

[Nicolas de Malézieu, membre de l’Académie des sciences, de l’Académie française, mais aussi organisateur des divertissements à Sceaux]

Joignit toujours l’utile à l’agréable ;

On admira dans le tendre Chaulieu

De ses chansons la grâce inimitable.

Il vous fallait les perdre tous les deux,

[Si Chaulieu mourut bien en 1720, Malézieu ne mourut qu’en 1727. La perte de Malézieu évoque le fait qu’il était aussi impliqué dans la conspiration de Cellamare et ne retrouvera sa liberté entière et le retour chez la duchesse qu’en 1722]

Car il n’est rien que le temps ne détruise ;

Mais ce beau dieu qui les arts favorise

De ses présents vous enrichit comme eux,

Et tous les dieux vivent dans Ludovise.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Et puis comme j’adore être un gentil iconoclaste, une version de «  Il est né le divin enfant qui m’enchante » et que j’aurais aimé entendre lors des messes de minuit auxquelles j’ai participé , sans y trouver de réelle fraternité, chacun se hâtant de retrouver la dinde et les bonnes bouteilles à la maison . Passons…

http://www.youtube.com/watch?v=a6z8ih20C6s

 

 

 

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{*} correction apportée grâce à la vigilance de LoveVoltaire

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il est quelquefois plus difficile d'avoir de la richesse qu'une femme aimable .

... Ce qui veut dire que parfois il est plus facile d'avoir une femme aimable que de gagner au loto; je le crois bien, c'est difficile, certes, mais pas impossible, et c'est tant mieux .

[Mis en ligne le 4 depuis une médiathèque]

 

 

 

« A Bernard-Joseph Saurin

de l'Académie

A Ferney [vers le 15 octobre 1761] 1

Dieu soit loué mon cher confrère de votre sacrement de mariage 2. Si Moïse Lefranc de Pompignan fait une famille d'hypocrites, il faut que vous en fassiez une de philosophes . Travaillez tant que vous pourrez à cette œuvre divine . Je présente mes respects à madame la philosophe . Il y a beaucoup de jolies sottes, beaucoup de jolies friponnes . Vous avez épousé beauté, bonté et esprit, vous n'êtes pas à plaindre . Tâchez de joindre à tout cela un peu de fortune , mais il est quelquefois plus difficile d'avoir de la richesse qu'une femme aimable .

Mes compliments je vous en prie à frère Helvétius, et à tout frère initié . Il faut que les frères réunis écrasent les coquins . J'en reviens toujours là . Delenda est Carthago 3.

Ne soyez pas en peine de Pierre Corneille . Je suis bien aise de recueillir d'abord les sentiments de l'Académie, après quoi je dirai hardiment mais modestement la vérité . Je l'ai dite sur Louis XIV, je ne la tairai pas sur Corneille . La vérité triomphe de tout . J'admirerai le beau, je distinguerai le médiocre, je noterai le mauvais . Il faudrait être un lâche ou un sot pour écrire autrement . Les notes que j'envoie à l'Académie sont des sujets de dissertations qui doivent amuser les séances, et les notes de l’Académie m’instruisent ; je suis comme La Flèche, je fais mon profit de tout 4.

Adieu, mon cher philosophe , je vis libre, je mourrai libre 5. Je vous aimerai et vous estimerai jusqu'à ce qu'on me porte dans la chienne de jolie église que je viens de bâtir, et où je vais placer des reliques envoyées par le Saint-Père .

V. »

1 Datée d'octobre, édition de Kehl ; datée ici par rapport à l'affaire des reliques et au mariage de Saurin .

2 Saurin , dans sa cinquante-sixième année, épousa Marie-Anne-Jeanne Sandras ( née le 31 mars 1734 ) le 12 août 1761 ; voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard-Joseph_Saurin

et : http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/bernard-jo...

3 Il faut détruire Carthage ; c'est le mot connu de Scipion l'Africain, que Caton le censeur aimait à citer en terminant ses harangues .

4 Réminiscence de L'Avare de Molière, I, 3 .

5 Sans doute une allusion au Spartacus de Saurin , derniers vers : Spartacus expirant brave l'orgueil du Tibre / Il vécut non sans gloire, et meurt en homme libre.

 

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04/10/2016 | Lien permanent

Tout le pays où je suis s'est empressé à me donner les marques les plus touchantes de bonne volonté

 

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« A M. le président De RUFFEY i

A Prangins, au pays de Vaud, 16 février 1755.

Il est vrai, monsieur, que j'ai loué pour quelque temps une des plus jolies campagnes du monde auprès de Genève. Je ne sais si j'en aurais pu trouver une aussi agréable auprès de Rome. Mais je n'ai choisi cette campagne qu'en qualité de malade, et parce qu'elle m'approche du médecin ii en qui Mme Denis dit que je dois avoir confiance. Cette maison est sur le chemin des bains d'Aix en Savoie, où l'on veut me conduire. J'aimerais bien mieux aller à Dijon, jouir de votre amitié et être témoin de tous les avantages que M. de La Marche iii procure à la ville et aux lettres. Si ma santé peut devenir tolérable, je vous assure que je viendrai à Dijon passer une partie de l'hiver. Je suis tendrement attaché à M. de La Marche depuis mon enfance iv, ce serait une grande consolation pour moi de le voir encore avant de mourir; mais je crains bien de n'avoir plus la force de faire des voyages. Je vous dois, monsieur, les bontés de Mme la baronne de Donop v; elle m'a fait déjà l'honneur de m'écrire pour m'offrir ses bons offices. Tout le pays où je suis s'est empressé à me donner les marques les plus touchantes de bonne volonté, mes maladies m'empêchent d'en profiter, mais elles me laissent un cœur bien sensible aux attentions dont vous m'honorez.

Je vous prie de vouloir bien présenter mes respects à M. le premier président de La Marche. J'ai l'honneur d'être, avec toute la reconnaissance possible et avec les sentiments les plus tendres et les plus respectueux, monsieur, votre très-humble et très obéissant serviteur.

 

V. »

 

i Le président Germain-Gilles-Richard de Ruffey : président de la Chambre des Comptes de Bourgogne, fondateur d'une société littéraire à Dijon , qui deviendra académie, dont en 1761, V* deviendra membre . Il enverra des poèmes, des rosiers, des graines, du vin à V* qui lui demandera son aide dans ses démêlés avec le curé Ancian et le président de Brosses . http://fr.wikipedia.org/wiki/Gilles_Germain_Richard_de_Ruffey

 

 

iiiClaude-Philippe Fyot de La Marche , ami au collège Louis-le-Grand de V*, et ami de de Ruffey, devenu premier président du parlement de Bourgogne .

 

 

v Ce n'est pas Mme Donop que V* avait connue à Berlin, mais Françoise Turrettini, veuve de David Vasserot, baron de Viney, qui avait épousé en secondes noces le baron August Moritz vonDonop, ministre des Affaires étrangères de Hesse-Cassel .

 

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30/11/2011 | Lien permanent

Je ne conçois pas, encore une fois, comment ce qui intéresse à la lecture pourrait ne point intéresser au théâtre

... Qui lit encore du théâtre ?

 

Rédigé le 10/11/2022 pour édition le 7/11.

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

27 avril 1767

Je reçois la lettre du 21 d'avril, toute de la main de mon ange. Il doit être bien sûr que je pèse toutes ses raisons; mais je conjure tous les anges du monde, en comptant M. de Thibouville, d'examiner les miennes. J'ai toujours voulu faire d'Obéide une femme qui croit dompter sa passion secrète pour Athamare, qui sacrifie tout à son père, et je n'ai point voulu déshonorer ce sacrifice par la moindre contrainte. Elle s'impose elle-même un joug qu'elle ne puisse jamais secouer; elle se punit elle-même, en épousant Indatire, des sentiments secrets qu'elle éprouve encore pour Athamare, et qu'elle veut étouffer. Athamare est marié; Obéide ne doit pas concevoir la moindre espérance qu'elle puisse être un jour sa femme. Elle doit dérober à tout le monde et à elle-même le penchant criminel et honteux qu'elle sent pour un prince qui n'a persécuté son père que parce qu'il n'a pu déshonorer la fille. Voilà sa situation, voilà son caractère.

Une froide scène entre son père et elle, au premier acte, pour l'engager à se marier avec Indatire, ne serait qu'une malheureuse répétition de la scène d'Argire et d'Aménaïde dans Tancrède, au premier acte. Il est bien plus beau, bien plus théâtral, qu'Obéide prenne d'elle-même sa résolution, puisqu'elle a déjà pris d'elle-même la résolution de fuir Athamare, et de suivre son père dans des déserts. Ce serait avilir ce caractère si neuf et si noble que de la forcer, de quelque manière que ce fût, à épouser Indatire ce serait faire une petite fille d'une héroïne respectable. Un monologue serait pire encore; cela est bon pour Alzire. Mais lorsque, dans son indignation contre Athamare, dans la certitude de ne pouvoir jamais être à lui, dans le plaisir consolant de se livrer à toutes les volontés de son père, dans l'impossibilité où elle croit être de jamais sortir de la Scythie, dans l'opiniâtreté de courage avec laquelle elle s'est fait une nouvelle patrie, elle a conclu ce mariage, qui semble devoir la rendre moins malheureuse, tout à coup elle revoit Athamare, elle le revoit souverain, maître de sa main, et mettant sa couronne à ses pieds alors son âme est déchirée et si tout cela n'est pas théâtral, neuf et touchant, j'avoue que je n'ai aucune connaissance du théâtre, ni du cœur humain.

Je vous répète que, si quelques-unes de vos belles dames de Paris ont trouvé qu'Obéide épousait trop légèrement Indatire, c'est qu'elles ont elles-mêmes jugé trop légèrement; c'est qu'elles ont trop écouté les règles ordinaires du roman, qui veulent qu'une héroïne ne fasse jamais d'infidélité à ce qu'elle aime. Elles n'ont pas démêlé, dans le tapage des premières représentations, qu'Obéide devait détester Athamare, et ne jamais espérer d'être à lui puisqu'il était marié. Elles ont apparemment imaginé qu'Obéide devait savoir qu'Athamare était veuf ce qu'elle ne peut certainement avoir deviné. Il faut laisser à ces très mauvaises critiques le temps de s'évanouir, comme aux critiques de Mèrope, de Zaïre, de Tancrède, et de toutes les autres pièces qui sont restées au théâtre.

Je vois trop évidemment, et je sens avec trop de force, combien je gâterais tout mon ouvrage, pour que je puisse travailler sur un plan si contraire au mien. Je ne conçois pas, encore une fois, comment ce qui intéresse à la lecture pourrait ne point intéresser au théâtre. Je ne dis pas assurément qu'Obéide doive toujours pleurer au contraire, j'ai dit qu'elle devait avoir presque toujours une douleur concentrée, douleur qui vaut bien les larmes, mais qui demande une actrice consommée. J'ai marqué les endroits où elle doit pleurer, et où Mme de La Harpe pleure. C'est à ces vers :

D'une pitié bien juste elle sera frappée,

En voyant de mes pleurs une lettre trempée, etc.

 

Laisse dans ces déserts ta fidèle Obéide.

Ah!... c'est pour mon malheur. ..



Ah! fatal Athamare!

Quel démon t'a conduit dans ce séjour barbare ?

Que t'a fait Obéide ?

etc.

A l'égard des détails, vous les trouverez tout comme vous les désirez.

On veut qu'Athamare soit moins criminel, et moi, je voudrais qu'il fût cent fois plus coupable.

Venons maintenant à ce qui m'est essentiel pour de très fortes raisons : c'est de donner incessamment deux représentations avec tous les changements, qui sont très considérables, de n'annoncer que ces deux représentations, qui probablement vaudront deux bonnes chambrées aux comédiens. Je vous demande en grâce de me procurer cette satisfaction c'est d'ailleurs le seul moyen de savoir à quoi m'en tenir. Je vous envoie un nouvel exemplaire où tout est corrigé, jusqu'aux virgules. Il servira aisément aux comédiens, je leur demande une répétition et deux représentations ce n'est pas trop, et ils me doivent cette complaisance.

J'ajoute encore que, quand cette pièce sera bien jouée (si elle peut l'être), elle doit faire beaucoup plus d'effet à Paris qu'à Fontainebleau. C'est auprès du parterre qu'Indatire doit réussir à la longue, et jamais à la cour.

Je sais bien qu'Athamare n'est point dans le caractère de Lekain, il lui faut du funeste, du pathétique, du terrible. Athamare est un jeune cheval échappé, amoureux comme un fou mais pourvu qu'il mette dans son rôle plus d'empressement qu'il n'y en a mis, tout ira bien, le quatrième et le cinquième acte doivent faire un très grand effet.

Enfin le plus grand plaisir que vous me puissiez faire, dans les circonstances où je me trouve, c'est de me procurer ces deux représentations. Je vous en conjure, mes chers anges quand cela ne servirait qu'à faire crever Fréron, ce serait une très bonne affaire.

J'aurai à M. de Thibouville une obligation que je ne puis exprimer, s'il engage les comédiens à me rendre la justice que je demande. Le rôle d'Indatire ne peut tuer Molé et il me tue s'il ne le joue pas. »

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07/11/2022 | Lien permanent

Mes enfants, aimez-vous les uns les autres , si vous pouvez. Votre ennemi vous a dit, ou plutôt redit que nous sommes pe

... Il est parfois des ennemis qu'il faut écouter, et des amis à aimer, dans la mesure de nos possibilités . Advienne que pourra .

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 Union libre

 

« A Nicolas-Claude THIERIOT.
9 juin [1760]
J'ai reçu, mon cher et ancien ami, toutes les archives de l'esprit et de la raison, de l'horreur et de la méchanceté, du pour et du contre, de la persécution contre les philosophes, et de leur juste défense; il me manque la Vision 1. On dit qu'il y a des pourquoi, des oui et des non nouveaux, qui sont aussi bons que les que; je les attends aussi. Il faut que j'aie toutes les pièces du procès . Il est intéressant.
J'étais dans un bosquet de roses quand je reçus votre paquet ; je me flatte que je ne sentirai pas les épines de cette dispute. Voilà donc Robin-mouton envoyé à la boucherie 2! est-ce pour la Vision qu'on a saisi Robin? et cette Vision est-elle bien de Grimm ? Je soupçonne que Grimm est de la troupe des prophètes, mais que l'esprit ne descend pas sur lui seul.
Il serait bien à désirer que les frères fussent unis : ils écraseraient leurs indignes adversaires, qui les mangent l'un après l'autre. Il faudrait que les Da 3, Dé, Di, Do, Du, les H, les G, etc., soupassent tous ensemble deux fois par semaine.
Mes enfants, aimez-vous les uns les autres 4, si vous pouvez. Votre ennemi vous a dit, ou plutôt redit que nous sommes perdus si nous nous divisons 5.
Par quelle dure fatalité arrive-t-il que j'aie la réponse de Ramponeau 6, et que je n'aie pas le factum de M. de Beaumont 7 contre Ramponeau? Il n'y avait qu'un exemplaire de ce factum dans notre petite province; je ne l'ai tenu qu'un instant. Je l'ai lu rapidement, mais avec grand plaisir, et j'ai eu la bêtise honnête de le rendre. Voyez combien les philosophes sont honnêtes gens, quoi qu'en dise Palissot ! Je vous envoie la seule copie de la réponse que j'aie en main : elle est d'un homme de l'Académie de Dijon ; cela m'a paru gai, et je n'aime plus que ce qui est gai. Je veux passer, encore une fois, le reste de ma vie à lire et à rire.
Vous trouverez sans doute quelque bon citoyen qui se fera un plaisir de publier le Plaidoyer de Ramponeau. Je voudrais avoir de plus belles choses à vous envoyer, et de plus longues; mais il vient rarement de bonnes choses de la province.
Les Fétiches 8 du président de Brosses n'ont pas eu grand cours ; le Discours même du président de Montauban 9 n'est pas recherché. C'est la pierre sur laquelle on va aiguiser ses couteaux ; mais, pour la pierre, elle est au rebut.

A propos mon cher correspondant je n'ai point L’Interprétation de la nature 10. Je vous prie de me la faire tenir . N'auriez-vous point les deux derniers volumes de Warburton Moses legation ?11 Ils me manquent au besoin .
La Préface de Palissot 12 est pire que son ouvrage. Il impute aux encyclopédistes des passages de La Mettrie ; passages horribles, mais que La Mettrie lui-même réfute. Il supprime la réfutation.
Il présente ce poison à la cour, pour faire croire que ce sont nos philosophes qui l'ont apprêté. Je n'ai point ce livre de La Mettrie, de la Vie heureuse 13. Pouvez-vous me faire avoir toutes les œuvres de ce fou ? Vous devriez courir chez M. d'Alembert, qui ne sait pas peut-être combien ces passages sont altérés : car ce livre est, je crois, très-rare. Je pense qu'il faudrait faire un ouvrage sage, ferme et piquant, où tous les tours de mauvaise foi des ennemis fussent relevés ! qui le peut mieux que M. d'Alembert? Mais ce pauvre Robin, ce pauvre Robin-mouton ! pour Dieu, envoyez-moi La Vision.

Palissot m'a écrit, j'ai répondu . Je vous enverrai ma lettre . Cela est curieux . »

1 Préface de la comédie des PHILOSOPHES, ou la Vision de Charles Palissot. — Cette brochure de l'abbé Morellet, dans laquelle la princesse de Robecq était nommée, fit mettre son auteur à la Bastille le 11 juin. Il en sortit le 30 juillet suivant. Robin, libraire au Palais-Royal, qui avait vendu et distribué un grand nombre d'exemplaires de cette Préface, fut mis en prison dès le 31 mai; mais il en sortit le 25 juin. (Clogenson.)

2 Il s'agit d'un libraire nommé Robin qui avait vendu un nombre considérable d'exemplaires de la Vision ( voir lettre du 31 mai 1760 à Chennevières : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/05/29/faites-moi-le-plaisir-mon-cher-ami-5631086.html ) et qui avait fait l'objet d'un mandat d'arrêt le 30 mai ; la nouvelle de son arrestation est donnée par Cramer dans une lettre à Grimm du 9 juin 1760 . Pour Robin mouton, voir La Fontaine : Le Berger et son troupeau : http://www.la-fontaine-ch-thierry.net/bergtroup.htm

3 D'Alembert., d'Epinay, Diderot., Duclos, et autres philosophes.—Les initiales H et G désignent Helvétius et Grimm.

4 « Hæc mando vobis, ut diligatis invicem. » Evangile de Jean, chap. xv, v. 17.

5 Vers de la comédie des Philosophes, acte III, scène III.

6 V[oltaire] : Plaidoyer pour Genest Ramponeau […] contre Gaudon, entrepreneur d'un théâtre des bouleverts [sic], 1760 .

7 Ramponeau était gérant d'une auberge qui devint soudain très populaire ; un entrepreneur de spectacles nommé Gaudon l'engagea à monter sur les planches ; le propriétaire de l'auberge résilia le contrat de Ramponeau et fut alors poursuivi en justice par Gaudon, représenté par Jacques Élie de Beaumont . Le factum de ce dernier parut dans le Recueil des facéties parisiennes, 1760 .Voir : page 166 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4235914/f166.image.r=ramponeau.langFR

8 Du Culte des dieux fétiches, ou Parallèle de l'ancienne religion d'Égypte avec la religion actuelle de Nigritie, 1760, in-12. Voir lettre du 12 décembre 1759 à De Brosses : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/12/21/et-parcus-victus-cum-deficiente-crumena-et-une-vie-frugale-e-5517378.html

9 Lefranc de Pompignan, premier président, frère de l'évêque .

10 Il s'agit de l'ouvrage (anonyme) de Diderot : Pensées sur l’interprétation de la nature aux jeunes gens qui se disposent à l'étude de la philosophie naturelle , 1754 . http://sami.is.free.fr/Oeuvres/diderot_nature.html

12 Il ne s'agit pas , bien entendu, de la Préface de Morellet, habituellement appelée Vision, mais de la véritable préface de Palissot publiée sous le titre de Lettre de l'auteur de la comédie des Philosophes au public pour servir de préface à la pièce , in-12 de vingt-trois pages,1760 .

 

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09/06/2015 | Lien permanent

si j’avais vos connaissances, votre style, et votre précision

 

 

 Je fais un petit détournement de signification pour "sel" juste pour vous faire remuer :

http://www.youtube.com/watch?v=aZ0BpzVRQPc

 

sel-uyuni-bolivie.jpg

 Quelques repères sur des valeurs de nos jours oubliées :

http://dictionnaire.sensagent.com/minot/fr-fr/

 

Sel, produit nécessaire (?) ce jour où il neige sur le château depuis ce matin : http://videos.tf1.fr/jt-we/l-est-de-la-france-en-rupture-...

 

http://www.tagtele.com/videos/voir/48955 = "arpents verts" so kitch !

 

LouisDor_France_front_ 1726.jpg
LouisDor_France_back_1726.jpg

 

 

 

« A François de Fargès de Polizy

 

9 février 1776

 

                            Monsieur,

 

                            La lettre dont vous m’honorez du 31 janvier reçue le 7 février redouble la joie et les acclamations de mes compatriotes.

 

                            Je commence par vous remercier au nom de douze mille hommes de vos deux mille minots de sel.

 

                            Ensuite j’ose vous prier, monsieur, de vouloir bien seulement montrer à monsieur le contrôleur général dans un moment de loisir ce petit article-ci par lequel je lui demande pour nos Etats la faveur de les laisser les maîtres d’asseoir la répartition des trente mille livres pour les pauvres fermiers généraux [rachat du monopole des fermiers généraux dans le pays de Gex]. Le fait est qu’en général l’agriculture dans notre canton est à  charge aux propriétaires, et qu’un homme qui n’a point d’attelage pour labourer son champ et qui emprunte la charrue et la peine d’autrui perd douze livres par arpent. Un gros marchand horloger peut gagner  trente mille francs par an. N’est-il pas juste qu’il contribue un peu à  soulager le pays qui le protège ? Tout vient de la terre sans doute, elle produit les métaux comme les blés, mais cet horloger n’emploie pas pour trente sous de cuivre et de fer au mouvement d’une montre qu’il vend cinquante louis d’or. Et ce cuivre, et ce fer changé en acier fin, il le tire de l’étranger. A l’égard de l’or dont la boite est formée et des diamants dont elle est souvent ornée, on sait assez que notre agriculture ne produit pas de ces misères.

 

                            Nous nous proposons, Monsieur, de ne recevoir jamais au-delà de six francs par tête de chaque maître horloger et nous n’en recevrons pas davantage des autres marchands et des cabaretiers qui offrent tous de nous secourir dans l’affaire des trente mille livres, et dans celle de l’heureuse abolition des corvées.

 

                            Quant à la nécessité absolue de tirer nos grains de la Franche-Comté et du Bugey ou de mourir de faim, si quelques paysans abusent de cette permission, il sera aisé à monsieur le contrôleur général de limiter d’un mot la quantité de cette importation.

 

                            Pour les tanneries j’ai cru, Monsieur, sur la foi de l’almanach royal qu’elles étaient sous vos ordres [Fargès est intendant du Commerce]. Je me contente de représenter ici que les tanneries de Gex ont été déclarées exemptes de tous droits par le duc de Sully, prédécesseur immédiat de monsieur Turgot.

 

                            A l’égard des pauvres habitants de l’abîme nommé Lélex, cinq cents pieds sous neige au bas de la Faucille de Gex, déclarés dépendants de Belley à quinze lieues de leur habitation, par cet autre prédécesseur monsieur l’abbé Terray, je me jette encore aux pieds de monsieur le contrôleur général en faveur de ces malheureux qui travaillèrent encore l’an passé à nos corvées, et qui ont toujours pris leur sel à Gex. Les gardes viennent de les saisir chargés de quelques livres de sel achetées à Ferney. J’ai pris la liberté d’envoyer le procès-verbal à Mons[ei]g[neur] le contrôleur général.

 

                            Nous attendons l’édit des corvées comme des forçats attendent la liberté. Vous daignez me proposer, Monsieur, de publier un écrit sur cet objet. J’y travaillerais sans doute dès ce moment, si j’avais vos connaissances, votre style, et votre précision. Je suis si ignorant sur cette matière que je ne sais pas même comment monsieur Turgot s’y est pris pour détruire ce cruel abus dans sa province. Si je recevais de vos bontés quelques instructions, je pourrais hasarder de me faire de loin votre secrétaire comme je le suis de nos Etats.

 

                            Pourriez-vous, Monsieur, pousser votre extrême condescendance jusqu’à me favoriser d’un mot de réponse et d’éclaircissement sur les articles de cette trop longue lettre ?

 

                            J’ai l’honneur d’être avec respect et reconnaissance

                                      Monsieur votre …

 

                                                                  Voltaire. »

 

 

 

 

Quelques renseignements sur les arcanes du gouvernement sous l'Ancien Régime , où l'on retrouve notre Fargès de Polizy :  http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/be...

 

 

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09/02/2010 | Lien permanent

il me semble que cette affaire presse

... La vaccination !

Je suis effaré de savoir que tant de mes concitoyens soient aveuglément contre cet acte médical et social, au mépris de leur santé, celle de leurs enfants et celle de tous les autres humains . Pour les réfractaires, petite piqure de rappel très actuelle et proche :

https://www.mesvaccins.net/web/news/12100-debut-d-une-epi...

 

 

 

« A Joseph-Marie Balleidier, Procureur

à Gex

J'attends de monsieur Balleidier des nouvelles de ce qu'il a fait pour Mme Burdet ; il ne m'en donne aucune ; il me semble que cette affaire presse . Dès que je le verrai, je lui donnerai cinq louis d'or pour achever la subhastation du morceau de terre à Pasteur, joignant celui que j 'ai acquis à l'Ermitage .

Une affaire qui doit l'intéresser est celle de MM. de Crassy ; elle est considérable, MM. de Crassy étant réformés, ne sont pas en état de la poursuivre . Il faut, ou que je me fasse rembourser de dix-huit cents francs que j'ai prêtés à M. de Crassy le second, ou que l'appel du sieur Chapeaurouge soit jugé . Or, pour le juger il faut une procuration de la mère qui est tutrice des mineurs ; celle que m'a donnée M. de Crassy le second ne vaut rien, et il ne m'a pas accusé juste quand il m'a dit qu'il était seul tuteur . Il a emprunté 1800 livres : sur cette affaire, je suis en droit de le faire condamner, c'est à monsieur Balleidier à conduire cette affaire avec prudence ; elle fera le bien des mineurs, et opèrera mon remboursement .

Je le prie encore de m'informer s'il est vrai que les jésuites abandonnent Ornex, si on pourrait acquérir quelque terre de leur domaine, et à qui il faudrait s'adresser . Je lui envoie cette lettre par la poste, je lui rembourserai ses petits frais ; il faut qu'il m'écrive aussi par la poste de Genève .

Voltaire.

Aux Délices 25è mars 1763 .1 »

1 Balleidier a noté sur le manuscrit : « R[eçu] le 27è / port 4 [sous] . »

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20/03/2018 | Lien permanent

ils [l']ont détérioré, [qu']ils ont coupé les arbres, [qu']on peut à présent avoir recours contre eux

... Et il est temps !

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Oui, halte aux conn... Ecologistes de mes deux ! vous êtes d'une logique remarquable : brûler des pneus, ravager une route , ça sent bon le crétinisme de voyous inexcusables .

 

« A Joseph-Marie Balleidier

Procureur

à Gex

12 avril [1763], aux Délices 1

Je reçois la lettre de monsieur Balleidier touchant l'affaire Crassy . Je lui écrivis hier sur cet objet, et il n'a peut-être pas encore reçu ma lettre .

J'avancerai tout ce qui sera nécessaire, et monsieur Balleidier peut en assurer Mme Crassy, mais il faut que je sois assuré du remboursement . Je ne peux être assuré de ce remboursement qu'en cas que la famille poursuive à Dijon la confirmation de la sentence de Gex . Il faut donc que la mère me donne une procuration pour poursuivre en son nom ou en celui de ses enfants . M. Arnoud, mon avocat à Dijon, qui est le plus accrédité de la province se chargera de tout et l'affaire sera bientôt finie ; si on a une meilleure voie et des moyens plus sûrs on peut me les indiquer . Il est de l'intérêt de la famille de ne pas négliger une affaire qui la remet en possession de son patrimoine et il est de sa probité de ne pas me frustrer d'un argent que j'ai prêté avec quelque générosité . L'affaire presse, attendu que les jésuites gèrent leur patrimoine, qu'ils l'ont détérioré, qu'ils ont coupé les arbres, qu'on peut à présent avoir recours contre eux, et qu'il ne sera plus temps quand le domaine des jésuites sera remis aux économats, comme il le sera sûrement 2.

Il est d'ailleurs probable que MM. de Crassy rentreront dans leur domaine sans rien payer à M. de Chapeaurouge attendu que la longue jouissance de l'usure nommé antichrèse, absorbe beaucoup au delà du principal prêté aux auteurs de MM. de Crassy .

Ils voient sans doute combien la poursuite de cette affaire est avantageuse . Je leur ai procuré les moyens de recouvrer leur domaine . Je continuerai . Je ne demande que les suretés convenables .

Je prie monsieur Balleidier d'en conférer avec M. Rouph et avec la famille .

Voltaire . »

1 L'édition Vézinet imprime le deuxième paragraphe de la lettre en deux morceaux séparés . Date endossée par Balleidier .

2 Des ordonnances du 3 et du 5 février 1763 ont défini les attributions du « bureau des économats » pour l’administration et la vente des biens appartenant à l'ordre des Jésuites.

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09/04/2018 | Lien permanent

Les grands ... sont entre la flatterie et la calomnie mais la puissance les console.

... Magnifique constat . Voltaire voit juste et connait le fond de l'âme des "grands" dont il n'est pas dupe , enfin , pas trop longtemps, heureusement.

 Enfumons-les, à coups d'encensoir ou de flatteries dont ils sont friands, quoiqu'ils disent ! Leur pouvoir passera comme cette fumée .

encensoir.jpg

 Les calomnier n'est pas de mon ressort . S'en moquer fut un travail de maître que Volti accomplit en virtuose . Et je m'en régale .

 

« A madame la duchesse de SAXE-GOTHA1.

Aux Délices, près de Genève, 10 juin [1786]

Madame, que ma personne n'est-elle à vos pieds comme mon cœur y est! Faudra-t-il que je meure sans cette consolation? Le roi de Prusse veut bien me rappeler auprès de lui; mais Votre Altesse sérénissime sait que c'est Gotha seul que je regrette. Les rois font semblant de s'aimer, ils se le disent dans leurs traités; mais il n'y a qu'une souveraine de ma connaissance qui sache se faire aimer véritablement. Les cœurs sont à elle les rois n'ont que de l'encens.
Il est vrai, madame, que dans ces Mémoires de Mme de Maintenon, dont Votre Altesse sérénissime daigne me parler, l'encens ne brûle guère pour les souverains. La Beaumelle déchire un peu les vivants et les morts. Ce qui n'est pas de lui, ce qui est d'un certain évêque d'Agen, dont il a pillé les mémoires manuscrits, est légèrement écrit. Ce qui est de La Beaumelle est d'un étourdi sans bienséance et sans conséquence, qui veut avoir de l'esprit à tort et à travers. On ne peut concevoir comment un homme qui a eu le bonheur d'être en état de dire des vérités, ayant d'excellents mémoires entre les mains, a pu vomir tant d'impudents mensonges. Il n'y a point de vérité qu'il n'ait défigurée par des calomnies, et point de calomnie qu'il ne débite avec une insolence brutale. Les grands seraient bien à plaindre si la postérité les jugeait sur de tels écrits, ils sont entre la flatterie et la calomnie mais la puissance les console.
Je ne sais si je me trompe, madame, mais il me semble qu'il y a plus de vrai bonheur dans une cour comme la vôtre que dans celles qui mettent deux cent mille hommes sous les armes, et qui quelquefois font naître des millions de murmures justes ou injustes. Y a-t-il donc quelque chose de préférable à la douceur de gouverner en repos un peuple heureux? Il paraît que, dans les circonstances présentes, le peuple anglais ne prétend guère à ce titre d'heureux; les esprits y paraissent bien divisés. Tous sont réunis sous votre domination, madame; tout y est tranquille. Si je pouvais me traîner, je me traînerais à Gotha. Mon sort est de faire des vœux inutiles.
Que Votre Altesse sérénissime et toute son auguste famille daignent recevoir mon profond respect. »

 

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10/07/2012 | Lien permanent

moins de nouvelles, moins de sottises

... C'est bien vrai ça !

Par contre aucune nouvelle de Mam'zelle Wagnière est angoissant . Comment allez-vous ? Ou êtes-vous ? que faites-vous ?

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Rose de Noël = délivrez- moi de mon angoisse !

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Perce-neige = espoir !

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

19è mai 1764 aux Délices 1

Je vous remercie bien, mon cher frère, de votre lettre du 11 de mai. Je me souviens que Catherine Vadé pensait comme vous, et disait à Antoine Vadé, frère de Guillaume , mon cousin, pourquoi faites-vous tant de reproches à ces pauvres Welches 2 ? Eh ! ne voyez-vous pas, ma cousine, répondit-il, que ces reproches ne s’adressent qu’aux pédants qui ont voulu mettre sur la tête des Welches un joug ridicule ? Les uns ont envoyé l’argent des Welches à Rome, les autres ont donné des arrêts contre l’émétique et le quinquina ; d’autres ont fait brûler des sorciers,  d’autres ont fait brûler des hérétiques et quelquefois des philosophes. J’aime fort les Welches, ma cousine ; mais vous savez que quelquefois ils ont été assez mal conduits. J’aime d’ailleurs à les piquer d’honneur et à gronder ma maîtresse.

Voilà ce que disait ce pauvre Antoine, dont Dieu veuille avoir l’âme ! et il ajoutait que tant que les Welches appelleraient un angiportus, cul-de-sac 3, il ne leur pardonnerait jamais.

J'enverrai demain la partie de votre lettre qui regarde la personne intéressée ; je suis bien aise qu'elle voie combien elle a tort . Je vous demanderai la permission de ne point envoyer la lettre à cachet volant, parce que venant de ma part elle paraîtrait mendiée ; et ce que vous me mandez étant beaucoup plus fort, fera un bien meilleur effet . Cette tracasserie était des plus étranges . Je ne puis assez, encore une fois, vous remercier de l'avoir finie .

Je vous demande en grâce d’écrire en droiture à frère Cramer pour avoir vos exemplaires de Pierre qui doivent être en route . Il y en a un qu'il faudra donner à M. Héron en cas qu'il n'en reçoive pas un de la part de frère Cramer en droiture . Je ne crois pas qu'à présent il en reste un seul à Genève, et moi-même je n'en ai qu'un seul exemplaire imparfait , sans figures, et sans la liste des souscripteurs . Je crois que les Cramer font une nouvelle édition qui paraîtra bientôt .

A l’égard du dessein où sont les libraires de Paris d’imprimer les Remarques à part, ce dessein ne pourrait être exécuté que longtemps après que M. Pierre Corneille, le petit-neveu, se serait défait de sa pacotille ; et si je ne puis empêcher cette édition, il faut mieux qu’elle soit bien faite et correcte qu’autrement. Ainsi, quand vous verrez mes anges, je vous prie d’examiner avec eux s’il n’est pas convenable de faire dire aux libraires de ma part, que je les aiderai de tout mon cœur dans leur projet ; cette espérance qu’ils auront les empêchera de se hâter, et ils pourront faire un petit présent à M. Pierre : voilà qu’elle est mon idée.

Dans ma dernière lettre, partie le 17, il y en avait une pour Briasson, qui ne regarde en aucune manière l’édition de Corneille. Je lui demande seulement la Démonstration évangélique de Huet 4, dont j’ai besoin. Je sais que cette Démonstration n’est pas géométrique 5; mais on se sert quelquefois en français du mot de démonstrations pour signifier fausses apparences.

Pardon mon cher frère de tout ce verbiage . Je suis bien aise qu'il n'y ait point de nouvelles de Paris . Je dis toujours comme dans L’Écossaise, moins de nouvelles, moins de sottises . Je vous embrasse bien tendrement .

Écrasez l'infâme .

Je dois des réponses à frère Grimm et à frère Thieriot ; mais je n'ai pas un moment à moi . »

1 L'édition de Kehl est amputée de près de la moitié et mêlée à un fragment de la lettre du 21 mai 1764 ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/07/correspondance-annee-1764-partie-17.html

2 Voir Discours aux Welches .

4 Demonstratio evangelica, 1679, de Pierre-Daniel Huet ; voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre-Daniel_Huet

et https://data.bnf.fr/fr/12175668/pierre-daniel_huet/

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19/06/2019 | Lien permanent

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