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14/01/2017

ceux à qui on avait promis quelques rétributions pour leurs peines auront aussi la mine fort allongée

... Je paierais cher (locution proverbiale, vue de l'esprit , rien de concret ne me concernant ici , je me contenterai, au plus, de payer ma redevance audio-visuelle ) pour voir la tête des candidats recalés au soir du premier tour de la primaire de gauche .

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Avant

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Après !

camenbert !

à chacun son pourcentage (de voix , pas de monnaie, quoi que ...)

 

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

et à

Nicolas-Claude Thieriot

Aux Délices 18 janvier 1762 1

Vraiment, mes chers frères, j'apprends de belles nouvelles ! Frère Thieriot reste indolemment au coin de son feu et on va jouer Le Droit du seigneur tout mutilé, tout altéré, et ce qui était plaisant ne le sera plus , et la pièce sera froide, et elle sera sifflée, et frère Thieriot en sera pour sa mine de fève, et ceux à qui on avait promis quelques rétributions pour leurs peines auront aussi la mine fort allongée .

Un autre inconvénient qui n'est pas moins à craindre, c'est qu'on ne prenne votre frère pour le sieur Picardin, de l'académie de Dijon . Alors il n'y aurait plus d'espérance, tout serait perdu sans ressource . Je demande eux choses très importantes . La première, c'est qu'on m'envoie la pièce telle qu'on la jouera . La seconde, qu'on jure à tort et à travers que je n'ai nulle part à cet ouvrage . Mon nom est trop dangereux, il réveille les cabales . Il n'y en a point encore de formée contre M. Picardin, et M. Picardin doit répondre de tout .

Mes chers frères, interim estote fortes in Lucrecio et in philosophia 2. »

1 Copie ancienne qui a été suivie , voir lettre du 9 janvier 1762 aux mêmes : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2017/01/05/2-5894703.html

2 Entre temps soyez forts dans Lucrèce et dans la philosophie, phrase adaptée du fameux fortes in fide (lettre de Saint Pierre, I, v, 9) .

 

le malin public n'aime pas à voir toujours la même personne sur le trottoir . Je suis un vieux routier, et je sais comme le monde est fait

... Paroles de Juppé ? ça aurait pu l'être . Il va falloir faire avec les zozos qui restent en lice . Dur ! dur !

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

Aux Délices 18 janvier 1762 1

Mes anges sont terriblement importunés de leur créature . Leur créature considère qu'il faut toujours plus de six semaines pour rapetasser ce qu'on a fait en six jours (comme on l'a déjà confessé ).

En toute tragédie comme en toute affaire, il y a un point principal, d'où dépend le succès, et auquel on doit être subordonné . Ce point principal, dans l'affaire de Cassandre, est qu'il ne soit pas odieux au public, et qu'il le soit horriblement à Statira . Il faut que son amour intéresse, et pour qu'il intéresse, il ne faut pas qu'on ait le plus léger soupçon que ce soit un lâche qui ait empoisonné Alexandre . Quelque soin que j'aie pris d'écarter cette idée, je vois qu'elle se loge dans beaucoup de têtes . Mes anges verront le soin que j'ai pris pour prévenir cette fausse opinion, par les deux scènes ci-jointes . Il me semble que ces deux scènes écartent toutes les objections qu'on pourrait faire au rôle de Cassandre . Il n'y a plus de reproches à faire qu'à Antipatre son père , c'est lui qui fit périr son maître, c'est lui qui emmena Olympie en esclavage, et Cassandre a élevé avec des soins paternels la prisonnière de son père . Rien ne peut plus s'opposer à l'intérêt qu'on doit prendre à lui . Il a tout réparé, il a tout fait pour mériter Olympie, et c'est à mon sens un coup de l'art singulier, que l'empoisonneur du père d’Olympie et le meurtrier de sa mère mérite d'être aimé de la fille .

Je supplie mes anges de faire coudre les deux scènes nouvelles à la nouvelle copie qu'ils ont reçue, et de vouloir bien m’en dire leur avis . Lekain m'a envoyé ses réflexions, je les reçus hier ; c'est un bonhomme ; il n'a point de débit, mais il a encore moins d'intelligence du théâtre, il m' a proposé tout ce qu'on peut imaginer de plus plat, et de plus insipide . C'est à Mme Denis qu'il s'est adressé 2; elle lui mandera qu'elle n' a pas osé me communiquer ses rêveries .

Je demande en grâce à mes anges qu'ils empêchent qu'on imprime Zulime . Ce serait un très mince bénéfice pour Clairon et Lekain ; il faut attendre quelque temps ; on me ferait une très grande peine si on la donnait comme aujourd'hui .

On parle de jouer à présent Le Droit du seigneur 3, mais si on fait des coupures dans les premiers actes, comme on le dit, si on substitue des choses insipides à des plaisanteries assez naïves et assez bonnes, tout est perdu . Si on sait qu'elle est de moi, tout est perdu encore, car le malin public n'aime pas à voir toujours la même personne sur le trottoir . Je suis un vieux routier, et je sais comme le monde est fait .

Oserais-je supplier mes anges de me faire avoir un exemplaire de la façon dont on jouera Le Droit du seigneur ? ce serait une grande grâce qu'ils feraient à leur créature .

Voici une autre affaire, bien importante et bien délicate . Lekain se plaint amèrement de ce qu'un nommé Brisard veut appeler Marc Tulle Cicéron ; Lekain prétend que c'est lui qui doit être Cicéron mais il ne lui ressemble point du tout . Ce Cicéron avait un grand cou, un grand nez, des yeux perçants, une voix sonore, pleine, harmonieuse, toutes ses phrases avaient quatre parties, dont la dernière était la plus longue ; il se faisait entendre du haut de la tribune, jusque dans les derniers rangs des marmitons romains ; ce n'est point là du tout le caractère de mon ami Lekain ; mais où sont les gens qui se rendent justice ? Ce singe de La Noue ne me déclara-t-il pas une haine mortelle, parce que je lui avais dit que Du Fresne avait une face plus propre que la sienne à représenter Orosmane !

Je ne puis donc flatter Lekain dans son goût cicéronien ; je m'en remets à la décision de mes anges ; c'est aux premiers gentilshommes de la chambre à donner les rôles ; un pauvre auteur ne doit jamais se mêler de rien que d'être sifflé .

Autre requête à mes anges, concernant Le Droit du seigneur . On dit qu’on a tout mutilé, tout bouleversé . La pièce sera huée . Je vous en avertis . J'écris à frère Damilaville, je le prie de m'envoyer la pièce telle qu'on la doit jouer . Ce qu'il y a encore de très important, c'est qu'il faut jurer toujours qu'on ne connait point l'auteur . Le public cherche à me deviner pour se moquer de moi ; je vois cela de cent lieues .

Autre affaire . Un M. Cromelin doit solliciter mes anges pour faire obtenir qu'on reconnaisse en France une noblesse suisse ; je veux bien que M. Cromelin sache que j'en ai parlé à mes anges, mais je veux que mes anges sachent que je ne les fatigue pas . Si ces messieurs sont nobles, ils n'ont besoin de personne, s'ils ne le sont pas, pourquoi veulent-ils l'être ? Mes anges feront ce qu'ils voudront . Je voudrais bien que Mme de Fontaine la critique ne vit Cassandre qu'avec les deux ajoutoirs 4. Mille respects bien tendres . »

1 L'édition de Kehl fond des fragments de cette lettre et de la lettre du 20 janvier 1762 : voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-annee-1762-partie-2-122782110.html

2 Lettre probablement en réponse à la lettre que lui avait écrite Mme Denis le 30 décembre 1761 où elle disait notamment : « Je sais que vous avez lu Cassandre, il me semble que c'est un sujet superbe rendu d'une façon sublime . N'êtes-vous pas bien content du rôle de Cassandre ? Encore a-t-il été bien embelli depuis que vous ne l'avez vu . […] M. le marquis de Ximènes m'a dit , que vous comptiez venir nous voir ce printemps . J'en meurs d'envie, mandez moi sans perdre de temps combien vous pourrez nous donner, si vous ne comptez pas chemin faisant jouer quelque part , à qui il faudra s'adresser pour demander un congé . […] Mon dessein est de vous prier de jouer Cassandre, Gengis, Tancrède, et Ninias, dans Sémiramis, je saurai tous mes rôles à votre arrivée et les quatre pièces seront prêtes . J'ai grand besoin de vos conseils, imaginez qu'il y a près de huit ans que je n'ai vu de bons modèles, et quel plaisir j'aurai de vous entendre et de prendre de vos leçons . […] On parle d'une comédie intitulée Le Droit du seigneur qu'on dit être très agréable . Comme voilà Zulime et Cassandre qu'on jouera cet hiver, on devrait jouer Le Droit du seigneur immédiatement après Pâques, cela vous donnerait la facilité de rester quelque temps avec nous . »

3 C'est ce même 18 janvier 1762 que fut représentée la pièce sous le titre L’Écueil du sage ; elle eut huit représentations .

4 Ajoutoir, comme ajoutage, est un terme d' « arts mécaniques » curieusement employé ici par V* .