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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

cette précieuse liberté sans laquelle la vie est un fardeau

...Nos paysans nous l'ont rappelé un peu brutalement , en France nous sommes les champions pondeurs de lois et normes , et ce, depuis un temps infini . Ministres, députés et sénateurs, c'est à qui laissera sa trace écrite dans le fouillis des codes de toute nature . Voir pour info , et ce n'est que la partie émergée de l'iceberg : https://www.vie-publique.fr/discours/290438-conseil-21072...

Allons, du balai !

Sans titre.jpg

 

 

« A François de Caire 1

Ingénieur en chef , etc.

à Versoix

Supposé, monsieur, que M. de Marcheval 2 soit aussi bon, aussi indulgent, aussi philosophe que vous, il me fera autant de plaisir que d'honneur . Mais si vous ne venez pas me soutenir, que deviendrai-je ? Je suis seul et très malade . M. Dupuits m'a quitté hier avec un autre ami qui me consolait .

Si vous pouvez venir, monsieur, vers les 2 heures, je vous supplierai de vouloir bien vous rendre le maître de la maison , de dîner comme vous pourrez avec M. de Marcheval, de me souffrir entre vous deux, de me voir aller et venir sans vous mettre en peine, et de jouir avec moi de cette précieuse liberté sans laquelle la vie est un fardeau .

Agréez mon respect, monsieur, mais agréez davantage les sentiments que vous m'avez inspirés, et qui vont tout droit à l'amitié .

Le vieux malade V.

A Ferney à 7 heures 1/4 du matin 30è juin 1768 . »

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13/02/2024 | Lien permanent

il faut mettre un frein aux demandes injustes qui viennent fondre de tous côtés

... Bientôt le résultat du chamboule-tout à Matignon : https://www.tf1info.fr/politique/en-direct-remaniement-ga...

Mélenchon et Marine en sont verts .

 

 

« A Marie-Louise Denis

16 mai [1768] 1

Je vous envoie, ma chère nièce, la copie d'une lettre d'un de nos amis à une dame que vous connaissez . Enfin donc je suis hors d'inquiétude, vous êtes payée en partie de M. de Richelieu et de M. de Lézeau . Je bonifie Ferney et je l'embellis autant que je le puis au lieu de le vendre . Des créanciers nouveaux sortent tous les jours de dessous terre . Un sieur Delvert de Saint-Claude exige, entre autres, le paiement de 81 mesures d'avoine qui manquaient à la délivrance qu'il fit à Mme Fay le 31 mai 1767 . Il devait délivrer 350 mesures et Mme Fay n'en trouva que 249 . Il en manquait donc 81 . Il faudrait que Mme Fay m'envoyât un certificat de ce déchet . C'est une bagatelle . Mais il faut mettre un frein aux demandes injustes qui viennent fondre de tous côtés .

Quand vous mettrez-vous en possession de votre maison de la rue Bergère ? Soyez sûre que vous y mènerez une vie plus agréable qu'à Ferney . Nous avons ici quatorze officiers, mais quand même leur société pourrait vous convenir, ce ne sont que des oiseaux de passage ; il vous faut des amis sur lesquels vous puissiez compter, des amis qui pensent comme vous, et que vous retrouviez tous les jours . La campagne n'est tolérable que pour une personne qui aime passionnément la solitude et l'agriculture . Je préfère beaucoup mes vaches, mes moutons et mes livres à des hommes que je ne verrais qu'en passant, et qui viendraient chez moi pour se gêner et pour me gêner .

On a tué la pauvre Atalante 2. Elle devenait enragée . Daumart se soutient toujours dans son état horrible . La Fanchon a été quatre mois entiers entre la vie et la mort . Voilà toutes les nouvelles de Ferney . On n'a point encore travaillé à Versoix . M. Dupuits y va quelquefois . Il attend M. Debourcet . La maison de Racle ne trouve point d'acheteurs . Il a fait comme moi un très mauvais marché . Bonsoir ma chère nièce . Voilà bien une lettre de vieux campagnard . Mille compliments à toute la famille .

V. »

1 L'année a été portée par Mme Denis pour compléter la date .

2 De quel animal s'agit-il ? Une jument ?

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11/01/2024 | Lien permanent

la renommée porte trois cornets à bouquin : l’un pour le vrai, que personne n’entend, l’autre pour l’incertain et le tro

... Qu'en disent les vedettes et célébrités violeurs et agresseurs sexuels ?

 

 

« A Sébastien Dupont

A Ferney, 26 avril 1768

Plût à Dieu, mon cher ami, que je fusse en état d’aller vers le pôle arctique dans ma soixante-quinzième année ! Je ne ferais pas assurément le voyage, mais je ne serais pas fâché d’être en état de le faire. Vous verrez peut-être bientôt un petit poème intitulé la Guerre de Genève, dans laquelle il est dit que la renommée porte trois cornets à bouquin : l’un pour le vrai, que personne n’entend, l’autre pour l’incertain et le troisième pour le faux, que tout le monde répète 1. J’apprends que M. de Klinglin s’est retiré ; je vous prie de lui présenter mes respects ; je lui souhaite, ainsi qu’à madame de Klinglin, la vie la plus longue et la plus heureuse.

J’ai toujours avec moi votre ancien camarade Adam. Mme Denis est allée à Paris pour des affaires qui l’y retiendront probablement un an ou deux. L’agriculture et les lettres partagent ma vie ; j’ai auprès de moi un avocat philosophe  2; ils le sont presque tous aujourd’hui. Il s’est fait une furieuse révolution dans les esprits depuis une quinzaine d’années ; les prêtres obéiront à la fin aux lois comme les chétifs seigneurs de paroisse : je me flatte que M. de Porrentruy 3 n’est pas despotique dans la Haute-Alsace.

Adieu, mon cher ami, je vous embrasse bien tendrement. 

V.»

1 La Guerre civile de Genève, IV, 16-21 : https://books.google.nl/books?id=Gy8HAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q=cornets&f=false

Dans l’édition de la lettre, ce passage est suivi d'une ligne de points ( http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/07/correspondance-... )

Effectivement l'idée des « trois trompettes »  a été reprise du Temple du goût et l'une de ces trompettes est soufflée par un organe peu recommandable

2 Christin .

3 V* songe apparemment au prince évêque de Bâle qui avait pouvoir sur la région de Porrentruy ; voir lettre du 12 février 1754 à Mme Denis et du 24 février 1754 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/02/24/quelques-justes-haussent-les-epaules-et-se-taisent.html

 

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28/12/2023 | Lien permanent

tout doit céder à l'intérêt public

... J'ose espérer que les nouveaux gouvernants en sont convaincus et agiront en conséquence en oubliant, rejetant , les projets d'annulations de lois utiles même si impopulaires, comme la réforme des retraites .

Il est temps qu'on apprenne à compter immédiatement et agisse en conséquence .

 

 

 

« A François de Caire

On ne peut être plus sensible que je le suis, Monsieur, à la bonté prévenante que vous avez, de me faire rendre les bois que j'ai achetés, et qui sont pour moi de la nécessité la plus pressante, comme vous le verrez par la déclaration que j'ai l'honneur de vous envoyer.

Je vois que nous n'avons plus d'autre ressource que la Franche-Comté, grâce à l’inexécution des lois qui ont vainement prohibé les transports de bois de charpente du pays de Gex à Genève. Non seulement on devrait empêcher tout transport de bois à bâtir, mais encor celui de chauffage.

Il fut permis il y a trente ans de porter le bois de chauffage à Genève sur la prétendue réquisition des états, parce qu'alors quelques personnes qui avaient entrée aux états avaient du bois à vendre; mais dans l'extrémité où nous allons être réduits cette faible raison ne doit plus subsister, tout doit céder à l'intérêt public. On verra que si la ville de Versoix est bâtie, il sera impossible de la faire subsister une seule année. Le bois de chauffage coûtera plus de deux louis la voiture, et le comestible sera au poids de l'or.

Je ne doute pas, Monsieur, que dans l'occasion vous ne fassiez les représentations les plus fortes à M. le duc de Choiseul sur un objet si important. Pour moi je suis si accablé de ma vieillesse et de mes maladies que je suis devenu absolument inutile. Je n'ai plus de force que pour vous remercier de vos bontés. J'ai l'honneur de présenter mes respects à Madame De Caire, et d'être avec les mêmes sentiments, Monsieur, vôtre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire.

21e mars au soir 1769 à Ferney .1

Oserais-je vous supplier, Monsieur, de vouloir bien essayer d'un piqueur d'ouvriers qui s'appelle Barbera? Il est le mari d'une femme qui est à moi. Je vous réponds de sa conduite et de sa fidélité. C'est le porteur de cette Lettre.

J'achetai au mois de Janvier par le nommée Landry, charpentier demeurant à Ferney, mille pièces de bois de charpente tant petites que grandes et deux cent douzaines de planches avec vingt quatre douzaines de plateaux, pour les bâtiments que je fais construire au Châtelard et qui doivent être prêts pour la récolte.

Le marché étant conclu à Mijoux avec les frères Janins et Claude Joseph, forestiers demeurant à la Combe de Mijoux, je payai quarante louis d'or d'avance.

J'en donnai la déclaration à monsieur Fabry qui mit au bas, bon pour le passage.

Ce bon, n'est valable que pour cinq mois et je n'aurais pas le temps de bâtir les granges et écuries nécessaires, si on empêchait mes bois de me parvenir ; ma récolte serait entièrement perdue.

En foi de quoi j'ai signé au château de Ferney ce 21e mars au soir 1769

Voltaire. »

 

1 Original signé;édition Wade publie le corps de la lettre et la déclaration jointe comme s'il s'agissait de deux lettres différentes .

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23/09/2024 | Lien permanent

je communierai tant qu'il y aura une communion dans le monde, et je hurlerai avec les loups pour n'être point dévoré par

... Lorsqu'une religion est servie et prônée par de sales individus il devient nécessaire de les combattre avec leurs armes , sans remords, ni sentiment de culpabilité .

 

 

« A Jacob Tronchin

Conseiller d’État

à Genève

12è avril 1768 à Ferney

Je ne savais pas, monsieur, qu'il y eut un Tronchin allemand 1 ; ils me paraissaient tous Français et bons Français . Comment un Tronchin peut-il s'appeler Waldkirk, « Église du bois » ? Je parie que cette église n'est pas si jolie que celle où je communie . Oui, par Dieu, je communie, et je communierai tant qu'il y aura une communion dans le monde, et je hurlerai avec les loups pour n'être point dévoré par eux . J'accepte de bon cœur le Te Deum de votre pauvre diable d'évêque , qui comme vous savez est fait pour édifier l’Église, attendu qu'il est petit-fils d'un maçon .

Je n'ai jamais entendu parler du chandelier de Lyon ; c'est apparemment quelqu’un qui veut m'éclairer . Ce chandelier prétend que je suis votre parent . Plût à Dieu qu'il dît vrai , mais j'aime encore mieux que vous soyez mon ami .

Il est très vrai qu'on va travailler à force à Versoix . Ce sera un débouché de plus pour ceux qui achèteront Ferney . Pour moi qui ne songe qu'à la vie éternelle, il m'est fort indifférent de monter au ciel par Ferney ou par Tournay . Mais tant que je végéterai dans ce bas monde soyez très sûr que vous aurez en moi un serviteur passionnément dévoué .

De quoi s’avisait ce pauvre Jallabert de chevaucher 2 ? Je me garderai bien d'en faire autant .

Donnez-vous le plaisir d'ouvrir le paquet du chandelier . S'il y a quelque chose qui vaille la peine d'être lu ayez la bonté de me l'envoyer , sinon jetez-le dans le feu avec les quinze ou vingt volumes de brochures qui ont inondé votre République depuis quatre ans . Vivez gaiement, moquez-vous de tout . C'est un très bon parti que j'ai pris depuis longtemps .

V.

Quand vous viendrez à Ferney je vous ferai manger du pain bénit, tout indigne que vous en êtes. »

1 Louis Tronchin, mort en 1756, [Louis II Tronchin] avait épousé Élisabeth von Waldkirk à Schaffhausen le 3 décembre 1726, donnant ainsi naissance à une branche de Tronchin germanisée.

Voir : https://gw.geneanet.org/rossellat?lang=fr&p=louis&n=tronchin&oc=1

et http://www.stadtarchiv-schaffhausen.ch/fileadmin/Redaktoren/Dokumente/De_Waldkirch_Esther_Elisabeth.pdf

2 Jean Jallabert vient de faire une chute de cheval et a été mortellement blessé . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Jallabert

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13/12/2023 | Lien permanent

imitez les filles ; soyez modeste pour être riche

...

 

 

« A Charles-Joseph Panckoucke

A Ferney [vers le 30 juin 1768] 1

En vous remerciant, monsieur, de votre lettre et de votre beau présent 2, qui ornerait le cabinet d'un curieux. Vous vous êtes chargé d'un livre qui ne se débitera pas si bien . Je vous en ai averti dans un petit prologue de La Guerre de Genève, qui n'est pas encore parvenu jusqu'à vous . Les goûts changent aisément en France . On peut aimer Henri IV sans aimer La Henriade . On peut vendre des ornements à la grecque sans débiter Mérope et Oreste, toutes grecques que sont ces tragédies.

Et Gombaud tant loué garde encore la boutique. 3

Si j'avais un conseil à vous donner, ce serait de modérer un peu l’ancien prix établi à Genève 4, mais de ne point jeter à la tête une édition qu'alors on jette à ses pieds . Il faut que les chalands demandent, et non pas qu'on leur offre . Les filles qui viennent se présenter sont mal payées ; celles qui sont difficiles font fortune ; c'est l’abc de la profession : imitez les filles ; soyez modeste pour être riche . Interim je vous embrasse, et je suis de tout mon cœur, monsieur, votre, etc. »

1 L' édition de Kehl consiste en un amalgame de fragments déformés de trois lettres ; la présente, celle du 29 septembre 1768 et une suivante . La première édition place cette lettre fin mars 1768 et Beuchot, sans en avertir, change simplement la date en 1769 . Or si l'année est fausse, le mois l'est aussi ! Il est clair qu'on a ici une réponse à la lettre de Panckoucke annonçant l'envoi du livre dont V* accuse réception par la lettre du 9 juillet 1768 : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/07/correspondance-annee-1768-partie-21.html

2 On retrouvera plus loin ce présent, sans doute une édition des Fables choisies de La Fontaine ; voir lettre du 9 juillet : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/07/correspondance-annee-1768-partie-21.html

4 Dans le Mercure de juin 1768, II, 153, les sept premiers volumes de l'édition quarto sont annoncés à onze livres chacun . Voir page 153 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3746613x/f155.item.r=onze%20livres

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14/02/2024 | Lien permanent

Sénèque pleurait en Corse 

...Bruno Retailleau, lui,  pleure encore : https://www.publicsenat.fr/actualites/parlementaire/auton...

Gérald Darmanin fait provision de mouchoirs

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Ce n'est vraiment pas une tête de vainqueur

 

 

« A David-Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches

Ferney 2 octobre 1768 1

Le vieux malade bat des mains à l'exul et exilium 2, il crie, brave, du fond de son lit à tout ce qu'il apprend d'un Suisse aimable qui fait vaincre les difficultés ; l'imitation de Sénèque a le mérite qui manque à beaucoup de traductions. Vous surpassez, monsieur, ces preux chevaliers que l'on chantait ; ils savaient à peine signer leur nom ; vous savez plusieurs langues, vous faites des vers ; vous joignez au portrait de Paoli des pièce justificatives du procès, il est battu ; et vous êtes modeste .

Sénèque pleurait en Corse ; il regrettait Rome 3; vous cueillez des lauriers sur ces rocs que vous ne trouvez pas horrides 4, vous y portez de la gaieté, et vous oubliez Paris quand vous me promettez de venir vous reposer au pied du mont Jura ; que ce soit bientôt, je vous en supplie, je suis presque mort, vos lettres me raniment, votre présence me fera vivre ; nous ne perdrons point notre temps à deviner Sénèque . M. le marquis de Chauvelin se loue beaucoup de vous, vous verrez sa lettre, tout bon Français doit vous aimer, et le colonel général des Suisses et Grisons 5 doit mieux vous aimer que tous les autres . Je fais des vœux bien tendres pour votre conservation, il me paraît que c'est tout ce qui reste à vous souhaiter . Vous savez ce que je vous suis.

V. »

1 Édition [feuillet intitulé] Lettre de M. de Voltaire en tête d'un poème intitulé « A M. de Voltaire, le 1er de l'an 1775. En lui envoyant Le Système de la Nature. »

2 L'exilé et l'exil . Voir note suivante.

4 Voir : https://fr.wiktionary.org/wiki/horride

Ce latinisme apparaît déjà dans une lettre de V* du 24 mai 1737 à l'abbé Moussinot : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire... . Il désigne ici les montagnes escarpées de Corse où Constant est allé avec l'armée française .

5 Choiseul.

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18/04/2024 | Lien permanent

Ils prétendirent que les honnêtes gens n'avaient pas besoin de l'enfer pour être vertueux, que l'idée de l'enfer faisait

 Un peu gnan-gnan, mais chanté juste : http://www.deezer.com/listen-869901

Beaucoup plus plaisant pour moi : http://www.deezer.com/listen-1117108

Jazzy et poétique : http://www.deezer.com/listen-1101604 , à écouter en boucle, à deux, c'est très dansant .

Simplement pour rendre hommage à Volti qui fit cohabiter paisiblement catho et parpaillots, un chant enregistré à Taizé qui sait réunir des voix de tous horizons :  http://www.deezer.com/listen-1134741

 Hey! WAKE UP ! http://www.deezer.com/listen-3976065

A moins que vous ayez des états d'âme comme ici : http://www.deezer.com/listen-2554431

 

 

 

 

 

« A François Achard Joumard Tison, marquis d'Argence

 

A Tournay par Genève

1er octobre 1759

 

Monsieur,

 

La confiance que vous voulez bien me témoigner et le goût que vous avez pour la vérité me touchent sensiblement. Vous avez perdu , dites-vous, des protecteurs, mais vous êtes sans doute votre protecteur vous-même. On n'a besoin de personne quand on a un nom et des terres. M. le chevalier d'Aydie a pris il y a longtemps le parti de se retirer chez lui. Il s'est procuré par là une vie heureuse et longue. Il n'y a personne qui ne regarde le repos et l'indépendance comme le but de tous ses travaux, pourquoi donc ne pas aller au but de bonne heure ? On est égal aux rois quand on sait vivre heureux chez soi.

 

 Quand aux objets de métaphysique dont vous me faites l'honneur de me parler, ils méritent votre attention. Il est bien vrai que dans les lois de Moïse il n'est jamais parlé de l'immortalité de l'âme, ni de récompenses et de peines dans une autre vie. Tout est temporel ; et l'Anglais Warburton que M. Silhouette a traduit en partie [i] prétend que Moïse n'avait pas besoin de ce ressort pour conduire les Hébreux parce qu'ils avaient Dieu pour roi, et que ce roi les punissait sur-le-champ quand ils avaient fait quelque faute. Cependant il est clair que du temps de Moïse les Égyptiens avaient embrassé le dogme de l'existence d'une âme aérienne et éternelle qui devait se rejoindre au corps après une multitude de siècles. C'est pour cette raison qu'on embaumait les corps afin que l'âme les retrouvât, et qu'on bâtissait des tombeaux en pyramides. L'idée de l'immortalité de l'âme et d'un enfer se retrouve dans l'ancien Zoroastre, contemporain de Moïse, dont les rites et les opinions nous ont été conservés dans le Sadder. La même opinion est confirmée dans les poésies d'Homère. Il est vrai qu'on n'avait pas l'idée d'un esprit pur. L'âme chez tous les Anciens était un air subtil, mais il n'importe qu'elle fût son essence. Le grand intérêt des sociétés demandait qu'elle fût immortelle, et qu'après la mort on pût lui demander compte. Démocrite, Épicure et plusieurs autres combattirent ce sentiment. Ils prétendirent que les honnêtes gens n'avaient pas besoin de l'enfer pour être vertueux, que l'idée de l'enfer faisait plus de mal que de bien, que l'âme n'est pas un être à part , que c'est une faculté de sentir, de penser, comme les arbres ont de la nature la faculté de végéter, qu'on sent par les nerfs, qu'on pense par la tête, comme on touche avec les mains et qu'on marche avec les pieds.

 

Pour Platon et Socrate il est indubitable qu'ils croyaient l'âme immortelle. Ce dogme a été le plus universellement répandu. Il paraît le plus sage, le plus consolant et le plus politique. Pour peu que vous lisiez, Monsieur, les bons livres traduits en notre langue, vous en saurez beaucoup plus que je ne pourrais vous en dire, et avec l'esprit juste que vous avez, vous vous formerez des idées saines de toutes ces choses qui nous intéressent véritablement. Vous avez grande raison de rejeter toutes les idées populaires . Jamais les sages n'ont pensé comme le peuple. Saint Crépin est le saint des cordonniers, sainte Barbe des vergetiers [ii], mais la vérité est le saint des philosophes . En voilà beaucoup pour un vieillard qui ne connait plus que sa charrue et ses vignes. Je trouve que la meilleure philosophie est celle de cultiver ses terres. Je me croirais fort heureux si je pouvais avoir l'honneur de vous recevoir dans un de mes ermitages.

 

Je suis avec respect

Monsieur

votre très humble et très obéissant serviteur

 

Voltaire

gentilhomme ordinaire du roi. »

 

iDans ses Dissertations sur l'union de la religion, de la morale et de la politique, tirées de Warburton par Etienne de Silhouette, 1742.

http://books.google.fr/books?id=0qgUAAAAQAAJ&printsec...

 

ii Fabricants de brosses à nettoyer.

 

 

POUR LA BONNE BOUCHE : http://www.deezer.com/listen-4624134

 

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01/10/2010 | Lien permanent

J'ai toujours regardé les athées comme des sophistes impudents, je l'ai dit, je l'ai imprimé

http://www.google.fr/imgres?imgurl=http://art-et-miss.blo...

papillon philosophe.jpg

 



 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental


4è auguste 1775


Il est certain, mon cher ange, qu'il n'y a eu nulle négligence de la part de M. de La Reynière, et qu'il n'a point reçu les paquets. C'est un mystère sacré, qu'il n'est pas permis à un profane comme moi d'approfondir.


Papillon philosophe Mme de Saint-Julien est actuellement à Ferney sur les fleurs de Ferney, et bat des ailes. Papillon a instruit le hibou [V*] de bien des choses que le hibou ignorait.


J'ai réparé le malheur de mes paquets [] en écrivant en droiture à M. le m[aréch]al de Duras, et en lui demandant bien pardon d'une méprise dont je n'ai pas été coupable.


S'il est vrai, mon cher ange, qu'il y eût place pour Cicéron, pour Catilina, et pour César [c'est à dire pour Rome sauvée de V*; cependant on lui préfèrera Menzicoff de La Harpe], dans les fêtes qu'on prépare pour les princesses des pays subjugués autrefois par ce César [le mariage du 27 août entre la princesse Marie-Adélaïde de France avec le prince de Piémont Charles -Emmanuel], je compterais sur vos bontés auprès de M. le maréchal[Duras] dont vous êtes l'ami. Votre suffrage seul suffirait pour le déterminer, et je vous aurais l'obligation d'être compté dans Versailles parmi ceux qui cultivent les lettres avec quelque honneur. J'aurais grand besoin qu'on me regardât comme un homme qui s'est appliqué à travailler dans l'école de Corneille, et non pas comme un écrivain de livres suspects.


Papillon philosophe m'a appris que la petite cabale du Bon Sens [ du baron d'Holbach] m'attribuait ce cruel et dangereux ouvrage. Je réponds à cette imputation:

Seigneur, je crois surtout avoir fait éclater

La haine des forfaits qu'on ose m'imputer.

[Phèdre de Racine]


J'ai toujours regardé les athées comme des sophistes impudents, je l'ai dit, je l'ai imprimé. L'auteur de Jenni [ Histoire de Jenni ou le sage et l'Athée, qu'il « vient de finir » le 12 avril selon une amie et voisine Mme Gallatin, et dont on est en train de faire une nouvelle édition le 10 septembre] ne peut pas être soupçonné de penser comme Épicure. Spinosa lui-même admet dans la nature une intelligence suprême. Cette intelligence m'a toujours paru démontrée. Les athées qui veulent me mettre de leur parti me semblent aussi ridicules que ceux qui ont voulu faire passer saint Augustin pour un moliniste.


Le neveu du pape Rezzonico [ Clément XIII] est venu me voir malgré ma mauvaise réputation. Je compte plus sur vous à la cour de France que sur lui à la cour de Rome. Je vous conjure donc, mon cher ange, d'engager le premier gentilhomme de la chambre [Duras] à faire ce que vous avez si bien imaginé. Rien n'est plus aisé, et ces bagatelles réussissent quelquefois . Cela peut contribuer à me laisser finir tranquillement ma vie. Mais vous, mon cher ange, songez que votre amitié me la fait passer heureusement , songez que vous êtes toujours ma première consolation, soit de près soit de loin. Je vous embrasse plus tendrement que jamais, mon cher ange ; Mme Denis se joint à moi. Papillon philosophe paraît vous aimer autant que nous vous aimons ; et moi qui me croit plus philosophe que Papillon je me vante de l'emporter sur elle en sentiments pour vous.


Je me flatte que cette lettre arrivera à bon port. »

La lettre de remerciement que lui a écrite V*, où il « répond sur son discours à l'Académie »était perdue. Le duc de Duras, premier gentilhomme de la chambre du roi, était de quartier en 1775, chargé des spectacles.

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04/08/2010 | Lien permanent

ces misérable bienséances françaises et de ces petitesses d’un peuple qui est assez ignorant et assez fou pour vouloir q

Colchiques dans les prés .....

Rétro ? oui-da !

Kitch ? oui derechef !

Mais en tout cas c’est de saison : http://www.youtube.com/watch?v=hdZb6wO8LrA

Un peu sopo ?

Ah ! alors là, plus personne ne réagit ! Nous sommes dans un autre monde, la quatrième dimension de la chanson , le rêve !!

Je vous donne maintenant une version qui me plait davantage et je vous le dis : "N'oubliez pas Dorothée, elle a ravi bien des enfants (dont les miens) et mérite qu'on se souvienne d'elle affectueusement ." En tout cas elle me convient agréablement : http://www.youtube.com/watch?v=DMHuVEqmYJw&NR=1

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«  A Charles –Augustin  Ferriol, comte d’Argental

 

 

                            Je fais passer par vos mains, cher et respectable ami, ma réponse à monsieur le comte de Choiseul, ne sachant pas son adresse. Collini vient d’arriver, et je reçois trop tard vos avis et ceux des anges. On vend déjà dans Paris en manuscrit L’Orphelin comme La Pucelle, et tout aussi défiguré. L’état cruel où les nouvelles infidélités touchant l’Histoire de la guerre dernière, et les dangers où me mettaient les copies abominables de La Pucelle avaient réduit ma santé  ne me permettait pas de travailler. Il s’en fallait de beaucoup. Tout ce que j’ai pu faire a été de prévenir par une prompte édition [de l’Orphelin de la Chine] le mal que m’allait faire une édition subreptice dont j’étais menacé tous les jours. Tout le mal vient de donner des tragédies à Paris quand on est au pied des Alpes. Cela n’est arrivé qu’à moi. Je ne crois pas avoir mérité qu’on me forçât à fuir ma patrie ; je m’aperçois seulement qu’il faut être auprès de vous pour faire quelque chose de passable, et que si l’on veut tirer parti des talents il ne faut pas les persécuter.

 

 

                            Je compte sur quelque souvenir de la part de madame de Pompadour et de monsieur d’Argenson. Mais je perdrais absolument leurs bonnes grâces, si on avait publié cette Guerre de 1741 et que l’un et l’autre m’avaient recommandé de ne pas donner au public, et le roi  m’en aurait su très mauvais gré malgré les justes louanges que je lui donne. Je risquais d’être écrasé par le monument même que j’érigeais à sa gloire.

 

 

                            Jugez du chagrin que m’a causé la conduite de M. de Malesherbes, [qui a permis l’édition par Prieur du manuscrit volé à V* par le marquis de Ximenes] et son ressentiment injuste contre mes très justes démarches.

                           

                            Enfin, voila la pièce imprimée avec tous ses défauts qui sont très grands. Il n’y a autre chose à faire qu’à la supprimer au théâtre, et à attendre un temps favorable pour en redonner deux ou trois représentations [il faudra attendre octobre 1757]. Comptez que je suis très affligé de ne m’être pas livré  à tout ce qu’un tel sujet pouvait me fournir. C’était une occasion de dompter l’esprit de préjugé qui rend parmi nous l’art dramatique encore bien faible. Nos mœurs sont trop molles. J’aurais dû peindre avec des traits plus caractérisés la fierté sauvage des Tartares et le morale des Chinois : il fallait que la scène fût dans une salle de Confucius, que Zamti fût un descendant de ce législateur ; qu’il parlât comme Confucius même ; que tout fût neuf et hardi, que rien ne se ressentît de ces misérable bienséances françaises et de ces petitesses d’un peuple qui est assez ignorant et assez fou pour vouloir qu’on pense à Pékin comme à Paris. J’aurais accoutumé peut-être la nation à voir sans s’étonner des mœurs plus fortes que les siennes, j’aurais préparé les esprits à un ouvrage plus fort que je médite [sans doute L’Essai sur les mœurs], et que je ne pourrai probablement exécuter. Il faudra me réduire à planter des marronniers et des pêchers. Cela est plus aisé, et n’est pas  sujet aux revers que les talents attirent. Il faut enfin vivre pour soi, et mourir pour soi, puisque je ne peux vivre pour vous et avec vous. Je vous embrasse bien tendrement, mon cher ange.

 

 

                            V.

                            17 septembre 1755. »

 

 

 

 

 

                           

 

 

 

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