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31/01/2013

Pardon d'écrire si peu . Je répare cela en aimant beaucoup .

... En vous aimant beaucoup Mam'zelle Wagnière, je vous l'assure .

 

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« A Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de Lutzelbourg

19 novembre [1757] aux Délices

Je n'ai que le temps et à peine la force madame de vous dire en deux mots combien je suis affligé du dernier malheur 1 . On doit le sentir plus vivement à Strasbourg qu'ailleurs . Je ne sais si monsieur votre fils était dans cette armée . En ce cas je tremble pour lui . Si vous avez une relation je vous supplie de vouloir bien me l’envoyer .

Mme Denis est très malade . Je la garde . Pardon d'écrire si peu . Je répare cela en aimant beaucoup .

Vous connaissez mon tendre respect .

V. »

1 Défaite des troupes françaises à Rossbach face aux Prussiens .

 

je vois beaucoup de raisons d'être bien traité, et aucune d'être exilé de ma patrie cela n'est fait que pour des coupables, et je ne le suis en rien

... La peste soit des censeurs !

Fuyons ! mais pas trop loin, dans un pays "propre en ordre" !

 

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« A M. Charles-Augustin Ferriol, comte d'ARGENTAL.

Aux Délices, 19 novembre 1757
Vous avez un cœur plus tendre que le mien, mon cher ange; vous aimez mieux mes tragédies que moi. Vous voulez qu'on parle d'amour, et je suis honteux de nommer ce beau mot avec ma barbe grise. Toutes mes bouteilles d'eau rose sont à l'autre bout du grand lac, à Lausanne. J'y ai laissé Fanime et la Femme qui a raison, et tout l'attirail de Melpomène et de Thalie; c'est à Lausanne qu'est le théâtre. Nous plantons aux Délices, et actuellement je ne pourrais que traduire les Géorgiques. Cependant je vous envoie à tout hasard le petit billet que vous demandez 1. Je croyais l'avoir mis dans ma dernière lettre; j'ai encore des distractions de poète, quoique je ne le sois plus guère.
Je serais bien fâché, mon divin ange, de donner des spectacles nouveaux à votre bonne ville de Paris, dans un temps où vous ne devez être occupé qu'à réparer vos malheurs et votre humiliation; il faut qu'on ait fait ou d'étranges fautes, ou que les Français soient des lévriers qui se soient battus contre des loups. Luc n'avait pas vingt-cinq mille hommes, encore étaient-ils harassés de marches et de contre-marches. Il se croyait perdu sans ressource, il y a un mois; et si bien, si complétement perdu, qu'il me l'avait écrit; et c'est dans ces circonstances qu'il détruit une armée de cinquante mille hommes. Quelle honte pour notre nation ! elle n'osera plus se montrer dans les pays étrangers. Ce serait là le temps de les quitter, si malheureusement je n'avais fait des établissements fort chers, que je ne peux plus abandonner.
Ces correspondances 2, dont on vous a parlé, mon cher ange, sont précisément ce qui devrait engager à faire ce que vous avez eu la bonté de proposer, et ce que je n'ai pas demandé. Je trouve la raison qu'on vous a donnée aussi étrange que je trouve vos marques d'amitié naturelles dans un cœur comme le vôtre. Si Mme de Pompadour avait encore la lettre que je lui écrivis 3 quand le roi de Prusse m'enquinauda 4 à Berlin, elle y verrait que je lui disais qu'il viendrait un temps où l'on ne serait pas fâché d'avoir des Français dans cette cour. On pourrait encore se souvenir que j'y fus envoyé en 1743, et que je rendis un assez grand service 5; mais M. Amelot, par qui l'affaire avait passé, ayant été renvoyé immédiatement après, je n'eus aucune récompense. Enfin je vois beaucoup de raisons d'être bien traité, et aucune d'être exilé de ma patrie cela n'est fait que pour des coupables, et je ne le suis en rien.
Le roi m'avait conservé une espèce de pension que j'ai depuis quarante ans 6, à titre de dédommagement; ainsi ce n'était pas un bienfait, c'était une dette comme des rentes sur l'Hôtel de Ville. Il y a sept ans que je n'en ai demandé le payement; vous voyez que je n'importune pas la cour. Le portrait que vous daignez demander, mon cher ange, est celui d'un homme qui vous est bien tendrement uni, et qui ne regrette que vous et votre société dans tout Paris. L'Académie aura la copie du portrait peint par La Tour. Il faut que je vous aime autant que je fais pour songer à me faire peindre à présent. Quant au roman que vous m'envoyez 7, il faudrait en aimer l'auteur autant que je vous aime, pour le lire et vous savez que je n'ai pas beaucoup de temps à perdre. Il faut que je démêle dans l'Histoire du monde, depuis Charlemagne jusqu'à nos jours, ce qui est roman et ce qui est vrai. Cette petite occupation ne laisse guère le loisir de lire les Anecdotes syriennes et égyptiennes. Puisque vous avez un avocat nommé Doutremont, je changerai ce nom dans la Femme qui a raison; j'avais un Doutremont 8 dans cette pièce. Je me suis déjà brouillé avec un avocat qui se trouva par hasard nommé Grifon 9 il prétendit que j'avais parlé de lui, je ne sais où.
M. le maréchal de Richelieu me boude et ne m'écrit point. Il trouve mauvais que je n'aie pas fait cent lieues pour l'aller voir. »

 1 Compliment pour deux acteurs ; voir lettre du 8 novembre 1757 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/01/26/mettons-nous-a-l-eau-de-rose-pour-leur-plaire.html

2 Avec Frédéric que V* engageait au mois d'août précédent, à faire la paix .

3 Lettre non retrouvée .

4 Ce mot est dans Le Florentin de La Fontaine et signifie « rendre quinaud », à savoir « dupe ». Voir : http://www.lettres-persiennes.net/textes-extraits/jean-fontaine/florentin.php

5 V* se rendit en Prusse auprès de Frédéric II afin de connaître ses intentions ; il ne fût pas très efficace dans cette mission « d'espionnage ».

6 La pension était de 2000 livres, et datait de 1719.

8 Le marquis d'Outremont : voir : http://books.google.fr/books?id=dig6AAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

Le nom de ce personnage apparaitra parmi ceux des signataires du factum de Linguet (avocat) en faveur du chevalier de La Barre .

9 Autre personnage de La femme qui a raison ; Grifon sera changé en Gripon, mais d'Outremont restera inchangé .

 

S'il y a quelque nouvelle du carnage nous ne manquerons pas de vous en informer

 ... Carnage des libertés et de l'égalité que quelques illuminés (ils marchent encore à la bougie !) entendent présenter comme voulu par Dieu de toute éternité .

Amen !

Les catholiques praticants, soit trois pour cent de la population française, ont prié Dieu pour éviter le vote d'une loi qui leur déplait . Oserais-je leur rappeler que Jésus lui-même pria son Père éternel en demandant d'éloigner la coupe du supplice qui l'attendait selon les saintes Ecritures , et il eut, lui le fils bien-aimé, une fin de non recevoir et un billet pour le Golgotha avant de devenir le premier homme à échapper au globe terrestre sans scaphandre ; donc quelques gugusses en mal de publicité à genoux dans la rue avec sono ( Dieu est une vieille personne qui ferait bien d'aller chez Audica, selon Robert Hossein) ne font pas le poids . Bonne chose, ils vont simplement faire plaisir aux blanchissseurs chinois .

 

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 http://www.checkpoint-online.ch/CheckPoint/Forum/Livre-HansonCarnageCulture.html

 

 

« A François Tronchin

[vers le 18 novembre 1757]

Nièce dolente, oncle malingre remercient de tout leur cœur . S'il y a quelque nouvelle du carnage 1 nous ne manquerons pas de vous en informer . Nous vous présentons obéissances très humbles . 

V.»

1 On suppose qu'il s'agit de la bataille de Rossbach perdue par les Français .

 

30/01/2013

Ces Parisiennes-là n'ont jamais fini . Elles épuisent la patience et les bontés

... Comme Aurélie Philipetti, ministre pleine aux as ! Voir : http://www.leparisien.fr/laparisienne/actu-people/photos-...

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« A Jean-Robert Tronchin

banquier à Lyon

Aux Délices 17 novembre [1757]

Plus quatorze aunes de velours d'Utrecht cramoisi .

C'est encore la requête de l'insatiable Mme Denis . Ces Parisiennes-là n'ont jamais fini . Elles épuisent la patience et les bontés de monsieur Tronchin . Elles mettent leur oncle à la besace . Cependant mon cher correspondant je crois que le roi de Prusse y met l’armée de Soubise . On s'enfuit dit-on de tous côtés sans vivres et sans équipage . Voilà un nouveau coup de la fortune . Cette bataille 1 peut laisser le roi de Prusse maître absolu de la Saxe et le mettre au printemps en état de faire feu de tous côtés . Il peut arriver à nos troupes ce qui leur est arrivé en 1742 2 dans ces quartiers-là . Je doute qu'à présent on demande grâce . Ce qui me fâche c'est que le galga 3 n'a rien apporté pour moi . Consolons nous et plantons .

V. »

3 Serait-ce une allusion à ce lévrier espagnol (galgo ; mâle ; galga, femelle ), en rapport imagé avec la Compagnie de Cadix ? La question reste en suspend . Voir : http://www.over-blog.com/com-1173894091/SAUVONS_LES_LEVRIERS_DESPAGNE_GALGOGALGA_ET_AUTRES_RACES.html

 

 

 

Je reçois de vos grâces deux cafetières en dépit du docteur

... C'est bien connu, les médecins sont faits pour ne pas être écoutés, tant qu'il y aura des fumeurs et des alcooliques dans leurs rangs . A qui se fier  ?

Allez ! au jus !

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http://www.argenterie-et-orfevrerie.com/histoire%20des%20objets/Le%20caf%C3%A9%20et%20la%20cafeti%C3%A8re/le%20caf%C3%A9%20et%20la%20cafeti%C3%A9re.htm

 

 

« A Jean-Robert Tronchin

à Lyon

Je reçois de vos grâces deux cafetières en dépit du docteur ,1 et cinquante-neuf petits pitons dorés . Mon cher monsieur je vous prie d'envoyer à M. Cathala quatre cents louis d'or neufs pour mon compte par la messagerie le plus tôt que vous pourrez .

Je suppose que vous avez touché les 25 000 livres tournois . Je vous embrasse de tout mon coeur . »

V.

Ce 16 novembre [1757]

1 Théodore Tronchin était effaré par la consommation de café de V* .

 

il paraît que la tête tourne à plus d'un héros ou soi-disant tel

... Hélas !

 

 

 

« A Jean-Robert Tronchin

à Lyon

Aux Délices 15 novembre [1757]

Notre nièce, mon cher monsieur, fut baptisée Marie-Louise . Elle vous est bien obligée de vos bontés . Vous avez fait l'oncle genevois et la nièce lyonnaise . Votre dernière lettre me donne de grandes espérances de nos pêchers et de nos abricotiers . S'il arrivait par hasard que le révérend père procureur ou portier ait déjà emballé les arbres ci-devant demandés il n'y aurait point de mal . Tout sera bien reçu . Vos clous dorés feront précisément mon affaire . Tout réussit entre vos mains . Je doute encore pourtant que vous puissiez réaliser les rêves dont je vous ai fait part . Nous attendons des nouvelles d'une bataille 1 et peut-être n'y a-t-il pas eu un qui vive . Dieu les bénisse , il paraît que la tête tourne à plus d'un héros ou soi-disant tel . Heureux qui plante des arbres et qui n'a pas la colique . L'oncle et la nièce vous embrassent bien fort . »

1 La bataille de Rossbach eut lieu le 5 novembre 1757 et rendit temporairement la fortune à Frédéric II ; il ne perdit que 550 hommes contre 7000 côté français . De plus l'armée française découragée ne prit plus une part effective aux opérations militaires en Europe pendant le reste de la guerre de Sept ans .

 

vous devez avoir reçu une petite caisse d'une liqueur qu'on fait dans le pays que j’habite

... Je suppose que Schouvalov en bon Russe n'aurait pas rechigné à boire une des gnoles qu'on distille au pays de Gex . D'ici peu, l'alambic doit prendre ses quartiers pour 10 à 15 jours près de chez moi, avec le contrôle des douaniers, représentants du fisc, pour toucher les taxes sur l'alcool . Il va y avoir un peu de viande saoule dans le secteur .

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« A Ivan-Ivanovitch Shouvalov

Aux Délices 14 novembre 1757

Monsieur, vous devez avoir reçu une petite caisse d'une liqueur qu'on fait dans le pays que j’habite . C'est un essai pour savoir si votre excellence l'agrée et pour avoir l'honneur en ce cas d'être votre pourvoyeur . Vous m'aviez donné un plus beau titre . J'attendais vos archives et je vous ai adressé un essai d'histoire très informe qui ne vaut pas celui de l'eau de Colladon 1. Je comptais le rectifier  sur vos Mémoires . J'attends toujours vos ordres et j'ai l'honneur d'être avec le même zèle .

Monsieur

de Votre Excellence

le très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Cordial inventé par la famille Colladon ; on en parle dans « La médecine à Genève jusqu'à la fin du XVIIè siècle » de Léon Gautier . Voir page 93 et suiv. : http://books.google.fr/books?id=_QJNAAAAcAAJ&pg=PA94&lpg=PA94&dq=famille+colladon+cordial&source=bl&ots=togpnS4_eE&sig=QQz7haxMna35hHhndn78aT3URXU&hl=fr&sa=X&ei=HioJUbDXJsjC0QWg4IHYCA&ved=0CDAQ6AEwAA#v=onepage&q=famille%20colladon%20cordial&f=false