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03/08/2010

Je ne puis me consoler qu'en pensant que le même homme a imprimé plus d'impostures contre nos princes et nos ministres que contre moi

 http://www.youtube.com/watch?v=81Nirx3ypQQ

 

 

« A François-Alexandre Gaubert-Lavaysse


 

3 auguste 1767


 

Il est très certain que j'ai reçu plusieurs lettres anonymes remplies d'injures et toutes au nom du sieur La Beaumelle, ou concernant sa conduite envers moi. J'ai envoyé la dernière au ministère [« … la quatre-vingt-quinzième ...» ; cf. lettre du 11 juillet]. Je n'ai su que très tard que le sieur La Beaumelle avait eu l'honneur d'épouser la sœur de M. Lavaysse de Vidon [= soeur du destinataire de cette lettre]. Cette alliance n'a pas empêché le sieur La Beaumelle de me joindre au nombre prodigieux de personnes qu'il a outragées de gaieté de cœur dans ses écrits [V* dans sa défense des Calas a aussi défendu leur ami Lavaysse, présent le soir de la mort de Marc-Antoine]. Il a fait faire depuis peu une nouvelle édition, où toutes ces insultes sont renouvelées [*]. Il a outragé la maison de Saxe-Gotha [**], ainsi que toute la maison royale de France [lettre du 11 juillet]. J'ai écrit à un de mes amis [Lettre de M. de Voltaire, 1767, sur La Beaumelle , datée du 24 avril : « … il s'enfuit avec une servante après un vol fait à la maîtresse de cette servante. »] que cet auteur avait étudié en théologie, qu'il avait été chassé de Copenhague et qu'il était parti il y a quelques années de Gotha avec une servante qui avait volé sa maîtresse ; mais je n'ai point dit qu''il ait été complice du vol.


 

Il a écrit depuis peu à Gotha pour avoir une attestation, et voici le certificat qu'il a obtenu d'un conseiller de la cour, du 24 juillet 1767 : « On se rappelle très bien que vous étiez parti d'ici avec la gouvernante des enfants d'une dame de Gotha qui, après s'être rendue coupable de plusieurs vols, s'éclipsa furtivement de la maison de sa maitresse, ce dont tout le public est pleinement instruit ici ; mais on n'a point dit que vous eussiez la moindre part à ces vols. »[ce qu'a écrit en substance Jacob-Auguste Rousseau de la part de la duchesse qui pria le même jour V* de se tenir hors de cette affaire.]


 

Je ne l'ai point dit non plus ; mais j'ai représenté à beaucoup de personnes en place l'atrocité des calomnies répandues par le sieur La Beaumelle dans Le Siècle de Louis XIV , falsifié par lui et chargé des notes les plus infâmes [cf. lettre à Walther du 18 novembre 1752 concernant la « nouvelle édition (du Siècle) augmentée d'un très grand nombre de remarques par M. de B*** »].


 

Quelques puissances étrangères [l'Autriche cf. lettre du 21 juillet à Thiriot] intéressées dans ces impostures en ont marqué leur mécontentement au ministère de France, plusieurs personnes de la cour sachant que leur maison a été insultée par le même auteur [dans les Honnêtetés littéraires, V* accuse La Beaumelle d'avoir attaqué la mémoire des maréchaux de Villeroy, de Villars, les marquis de torcy, de La Vrillière, Chamillard]. M. le marquis de Gudanes, commandant au pays de Foix, a été chargé de parler fortement au sieur La Beaumelle, sur cette licence dangereuse [***]. Le seul parti qu'il avait à prendre était de se rétracter, de demander pardon et de se corriger . J'ai été attaché et je le suis encore à la famille de M. de Lavaysse. Elle doit sentir combien il a été douloureux pour moi d'avoir essuyé pendant douze années de suite les calomnies d'un homme qui est entré dans une famille considérée. Je ne puis me consoler qu'en pensant que le même homme a imprimé plus d'impostures contre nos princes et nos ministres que contre moi. Si M. de Lavaysse de Vidon avait pu trouver quelque manière de réparer ces horreurs dans la lettre qu'il m'a écrite, j'aurais embrassé de grand cœur le parti qu'il m'aurait proposé.


 

Je le supplie d'être persuadé que les outrages réitérés du sieur La Beaumelle n'ont point altéré les sentiments que je conserverai toujours pour M. de Lavaysse et pour toute sa famille.


 

J'ai l'honneur d'être son très humble et très obéissant serviteur.


 

V. »

 

*Cf. lettre du 11 juillet ; en fait de réédition « récente » il ne parût que Mes pensées avec le supplément, 1761 .

Mais La Beaumelle en 1767, commence à préparer une édition critique des oeuvres de V*, qui ne parut pas .cependant il termina en août 1767 une critique de La Henriade, parue en 1769 et saisie à la demande de V*.


 

** A La Condamine, le 3 mai 1771, il signale qu'à la page 108 de Mes pensées, que V* a dans sa bibliothèque (1752) : « Je voudrais bien savoir de quel droit les petits princes, un duc de Gotha par exemple, vendent aux grands le sang de leur sujets pour des querelles où ils n'ont rien à voir. On s'est donné à eux pour être défendu, et non pour étre acheté. » 


 

*** Le marquis de Gudanes reçut cette lettre de Saint -Florentin : « Le sieur de La Beaumelle … a écrit une infinité de lettres anonymes à M. de Voltaire …; vous voudrez bien l'avertir de se tenir tranquille et de laisser en repos M. de Voltaire . Tous ces écrits anonymes ne pourraient que lui attirer des désagréments s'il les continuait. »

 

Quelques repères sur les Lavaysse:

http://books.google.be/books?id=xaEGAAAAQAAJ&pg=PA500...

http://tolosana.univ-toulouse.fr/notice/083062211

http://www.biu-toulouse.fr/num150/PPN083062211.pdf

 Sotto vocce : http://www.youtube.com/watch?v=s0WbgTOUQlY&feature=re...

 

02/08/2010

on dit que dans votre pays on fait le mal assez vite et qu'on l'oublie de même.

 

 

 

 

« A Étienne-Noël Damilaville


 

4 auguste 1766


 

J'ai communiqué à votre ami [V* lui-même] votre lettre du 28. Je vous ai écrit par nos correspondants de Lyon. Nous attendons, Monsieur, des lettres d'Allemagne pour l'établissement en question [« colonie » ou « manufacture » philosophique de Clèves ; cf. lettres du 23 juillet à Diderot et d'Alembert]. Je suis toujours très persuadé que votre ami de Paris [« Tonpla » = « Platon » = Diderot] y trouverait un grand avantage. Il n'y a peut-être que la mauvaise santé de mon correspondant de Suisse qui pût déranger ce projet ; mais si la chose était une fois en train, ni les maladies ni sa mort ne pourraient empêcher l'établissement de subsister . Il ne s'agit que de se rassembler sept ou huit bons ouvriers dans des genres différents, ce qui ne serait point du tout malaisé.


 

Le seigneur allemand [Frédéric] à qui on s'était adressé a eu la petite indiscrétion d'en dire quelque chose à un jeune homme qui peut l'avoir mandé à Paris [±]. On n'était point encore entré avec lui dans les détails [±±]. On ne lui avait point recommandé le secret ; on a tout lieu d'espérer qu'étant actuellement mieux instruit cette petite affaire pourra se conclure avec la plus grande discrétion.


 

On soutient toujours à Hornoy que tout ce qu'on a dit du sieur Belleval est la pure vérité [cf. lettre du 28 juillet]. Ces anecdotes peuvent très bien s'accorder avec les autres, elles servent à redoubler l'horreur et l'atrocité de cette affaire qui est peut-être entièrement oubliée dans Paris ; car on dit que dans votre pays on fait le mal assez vite et qu'on l'oublie de même.


 

Nous doutons fort que le Dictionnaire des sciences et des arts [ = Encyclopédie] soit donné de longtemps aux souscripteurs de Paris. Mais, quoi qu'il en soit, le projet de réduire cet ouvrage [±±±] et de l'imprimer en pays étranger est extrêmement approuvé . Plût à Dieu que je visse le commencement de cette entreprise ! Je mourrais content dans l'espérance que le public en verrait la fin.


 

On dit qu'on fait des recherches chez tous les libraires dans les provinces de France. On a déjà mis en prison à Besançon un libraire nommé Fantet [V* écrira Lettre d'un membre du conseil de Zurich à M. D*** avocat à Besançon, au sujet du commerce de livres philosophiques du libraire Fantet, 1767]. Nous ne savons pas encore de quoi il est question.


 

Toute notre famille vous fait les plus tendres compliments. Nous espérons de vous incessamment le mémoire en faveur du Breton [ = La Chalotais ; cf. lettre du 1er avril 1766 à Damilaville] et ensuite du Languedochien [ = Sirven].


 

Adieu, Monsieur, on vous aime bien tendrement.

Boursier et compagnie.



 

On me recommanda, ces jours passés, une lettre pour un notaire ; en voici une autre qu'on m'adresse pour un procureur ; l'amitié ne rougit point de ces petits détails. »



±Frédéric se défendra le 1er septembre d'avoir parlé du projet ; il « n'a ni vu ni parlé au fils de l'Hippocrate moderne », c'est-à-dire à Louis-François Tronchin (en Prusse), fils de Théodore Tronchin, médecin alors à Paris.

L'indiscrétion pouvait venir de duc de Brunswick qui avait séjourné à Ferney et à qui V* avait parlé du projet, ou de La Correspondance littéraire.

Aux d'Argental, le 15 août, il dément la rumeur qu'il s'installe en Prusse : « Ce qui a fait courir le bruit … c'est que le roi de Prusse m'ayant mandé qu'il donnerait aux Sirven un asile dans ses États, je lui ai fait un petit compliment, je lui ai dit que je voudrais les y conduire moi-même... » ; cf. lettre à Mme du Deffand du 24 septembre.


 

±± Quelques réserves de Frédéric le 7 août : « Vous me parlez d'une colonie de philosophes qui se proposent de s'établir à Clèves. Je ne m'y oppose point ; je puis leur accorder tout ce qu'ils demandent, au bois près,que le séjour de leurs compatriotes a presque entièrement détruit dans ces forêts (guerre de Sept ans) ; toutefois à condition qu'ils ménagent ceux qui doivent être ménagés, et qu'en imprimant ils observent de la décence dans leurs écrits. »


 

±±± Le 28 juillet : il faudrait « réduire à quatre lignes les ridicules déclamations des Cahusac et de tant d'autres … fortifier tant de bons articles … Il y a un volume de planches dont on pourrait très bien se passer... »