12/07/2021
Il [elle] apprécie grandement le soin qu'elle prend de corriger les infamies
... Voilà ce que peut ressentir l'internaute, je l'espère, qui comme Mila vient enfin de voir passer la justice et fait reconnaître le délit de cyberharcèlement ; cette petite correction des infamies ne suffit pas à réparer les dégâts, ni à empêcher la malfaisance via réseau social . Combien de Mila sont encore menacé.e.s à bas bruit ?
« A Mme Nicolas-Bonaventure Duchesne
Au château de Ferney, le 10 avril [1766] 1
[M. de Voltaire, qui est toujours très malade, a reçu la lettre de Mme Duchesne du 4 avril . Il apprécie grandement le soin qu'elle prend de corriger les infamies dont les éditeurs malintentionnés ont souillé l'utile ouvrage qu'elle a imprimé …
Bigex.]
1 Le manuscrit olographe de deux pages de cette lettre est passé à la vente Dubrunfaut le 22 décembre 1884 et date cette lettre de 1756 . Or le libraire Duchesne n'est mort que le 4 juillet 1765, et ce n'est donc qu'après cette date que V* put s'adresser à sa veuve .
15:56 | Lien permanent | Commentaires (0)
point de guerre civile, les citoyens sont trop riches pour se battre
... D'où la Révolution des pauvres de 1789 ?
Et en 2021 ?
« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de Saxe-Gotha
6è avril 1766 à Ferney
Madame, j’attendais, pour avoir l’honneur d’écrire à Votre Altesse Sérénissime, que je pusse lui envoyer le recueil des bagatelles dont quelques-unes l’ont amusée ; mais les petits troubles de Genève n’ont pu encore me permettre de satisfaire votre curiosité. On me fait espérer que j’aurai ce recueil dans quinze jours. Ces querelles de Genève, qu’on lui a peintes comme quelque chose de fort sérieux, ne sont au fond qu’une querelle de ménage ; il n’y en a jamais eu de si paisible, et les médiateurs sont tout étonnés qu’on ait fait tant de bruit pour si peu de chose. Les esprits sont en mouvement, mais il n’y a pas eu la moindre violence. Un étranger qui passerait par cette ville ne pourrait pas seulement deviner que les habitants ne sont pas d’accord. Ils disputent opiniâtrement sur leurs droits, mais avec une bienséance et une circonspection étonnante, et il n’y a point d’exemple jusqu’ici d’une discorde si paisible. Il semble que les ambassadeurs ne soient venus que pour leur donner à dîner. Les choses ne se passaient point ainsi à Rome du temps de Marius et de Sylla.
Il est vrai, madame, que, depuis environ douze ans, les esprits fermentent un peu dans une partie de l’Europe ; mais, si on excepte les cours de justice appelées en France parlements, cette fermentation est presque toute philosophique.
On se moque également des papes et de Luther, on secoue un respect servile pour des opinions ridicules ; la raison gagne, et l’autorité sacerdotale perd beaucoup 1. Les princes ne peuvent que gagner à cela, car il faut avouer que leurs plus grands ennemis ont toujours été les prêtres. Je suis bien trompé, ou l’on ne se battra plus pour des billevesées théologiques. C’est le plus grand bien que la philosophie pût faire aux hommes.
Quant aux Lettres de la montagne, elles ont un peu éveillé les citoyens de Genève ; mais elles ne causeront point de guerre civile, les citoyens sont trop riches pour se battre.
Je me mets aux pieds de Votre Altesse Sérénissime avec le plus profond respect.
V.
J’apprends dans le moment que la reine de France est assez mal 2, et qu’elle crache du pus. »
1 On lit en marge de ces trois lignes : Dans les affaires d’État.
2 Elle mourra deux ans plus tard . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Marie_Leszczynska
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11/07/2021
deux personnes qui manquent à la fois leur coup font encore un mauvais effet
... Les paris sont ouverts pour savoir qui sera celui qui manquera son coup en duo avec Emmanuel Macron, l'un au micro, l'autre à la plume , ce lundi soir 12 juillet . Le concert sur Champ-de-Mars, le feu d'artifice et le défilé militaire feront-ils oublier les couacs et grincements de dents du lundi ?
Prenons l'air, mettons la VMC à fond (Vaccin-Masque-Confinement ).
« A Charles-Auguste Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
6è avril 1766
J’ai montré au petit apostat la lettre de mes anges, et leurs judicieuses observations. En vérité, ce pauvre jeune homme est à plaindre. « Vos anges voient clair, m’a-t-il dit ; je pourrais disputer avec eux sur un ou deux points ; mais je ne veux pas songer à des coups d’épingle lorsque je me meurs de la consomption. Je peux bien promettre à vos anges une cinquantaine de vers bien placés et vigoureux ; je pourrai limer, polir, embellir ; mais comment intéresser dans les deux derniers actes ? Les gens outragés qui se vengent n’arrachent point le cœur ; c’est quand on se venge de ce qu’on adore qu’on fait des impressions profondes, et qu’on enlève les suffrages ; deux personnes qui manquent à la fois leur coup font encore un mauvais effet . Cette dernière réflexion me tue. Ma maison est tellement construite que je ne peux en ôter ce triste fondement. Tout ce que je puis faire, c’est de dorer et de vernir les appartements, et de les dorer si bien qu’on pardonne les défauts de l’édifice. Écrivez donc à vos anges qu’ils aient la bonté de me renvoyer mes cinq chambres 1, afin que je les dore à fond. »
Ayez donc pitié de ce pauvre diable, je vous en prie. Gloire vous soit rendue à jamais pour avoir réhabilité un art charmant et nécessaire ! On a bien de la peine avec les Welches, mais à la fin on vient à bout d’eux.
Il y a deux exemplaires à Genève d’un maudit livre intitulé La France détruite par M. le duc de … 2 . Je n’ai pu parvenir à le voir, et je ne crois pas qu’il se vende à Paris avec privilège. Je me mets au bout des ailes de mes anges avec mon culte ordinaire. »
1 Les cinq actes de la tragédie du Triumvirat.
2 Pamphlet contre le duc de Choiseul ? Voir lettre d'avril 1766 à François-Claude Marin : « La France détruite existe ; il y en a à Genève deux exemplaires, et je n'ai pu les avoir . »
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10/07/2021
Ah ! Ne persécutons point .
... Pas mieux !
« A Gabriel Cramer
[vers le 5 avril 1766]
Voici D , qui voudra connaître Spinoza lise D1 . J'attends E.
J'ai lu le panégyrique delp[h]inois 2 , ce qui m'a fait le plus de plaisir, c'est que le dauphin disait : « Ne persécutons personne 3. » Au reste il savait par cœur la moitié de La Henriade .
J'ai remercié M. de Taulès . Il est l'ami de l'auteur , et moi aussi .
Il y a certainement à la bibliothèque un Éginhard 4 que je n'ai point , et que j'ai besoin de consulter . Je ne sais si ce livre est isolé ou s'il se trouve dans les capitulaires de Charlemagne . Je demande en grâce à M. Caro de vouloir bien me faire avoir Éginhard et de me l'envoyer le plus vite qu'il pourra .
M. de Capperonnier se plaint de ce que la bibliothèque du roi n'a pas les deux derniers volumes des œuvres complètes de V. »
1 On n'a pu retrouver dans quel ouvrage la signature D correspond à une référence à Spinoza ; voir aussi la lettre du même jour à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/07/08/je-parle-des-honnetes-gens-qui-n-ont-point-de-principes-fixe-6325909.html
2 Il faut lire delphinois, du dauphin, nouveau néologisme ; voir lettre du 1er avril 1766 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/07/06/m-6325583.html
3 Les termes exacts, rapportés par Thomas sont « Ah ! Ne persécutons point . »
4 La bibliothèque publique et universitaire de Genève possède l'ouvrage d'Eginhard intitulé De vita Carolimagni commentarius, 1755 . Voir : https://data.cerl.org/thesaurus/cnp01318762
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La première chose qu’il faut faire quand on veut écrire, c’est de penser
... J'essaie ! Pour quelques essais transformés, combien de coups de botte en touche ? Ce n'est pas à moi d'arbitrer .
1° - Y penser 2° - Passer outre 3°- Ecrire 4° Y repenser ....
« Au chevalier Pierre de Taulès
À Ferney, 5è avril 1766
Je n’oublierai jamais, monsieur, le discours de M. Thomas , mais j’ai oublié sa demeure, et d’ailleurs je ne peux m’adresser qu’à vous pour le remercier ; de tous ceux qui ont fait l’éloge du dauphin, il est le seul qui m’ait fait connaître ce prince. Je n’ai vu que des mots dans tout ce que j’ai reçu de Paris, en prose et en vers, sur ce triste événement. La première chose qu’il faut faire quand on veut écrire, c’est de penser ; M. Thomas ne s’exprime éloquemment que parce qu’il pense profondément.
À propos de penseur, puis-je vous supplier, monsieur, de présenter mes respects à Son Excellence ? Elle donne des indigestions à tout Genève avant de lui donner une paix inaltérable . J’ose me flatter que quand nous aurons des feuilles, et que vous aurez le temps de prendre l’air, vous voudrez bien donner la préférence à l’air de Ferney . Ce n’est pas assez de faire du bien à des hérétiques, il faut encore consoler les vieux catholiques malades. Je compte hardiment sur vos bontés et sur celles de M. Hennin.
Daignez, monsieur, être sans cérémonie avec votre très humble et très obéissant serviteur.
V. »
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09/07/2021
Je voudrais vous donner bien des causes à soutenir
... Comme les 30km/h à Paris qui est un modèle de fausse bonne idée, les chauffeurs , les yeux rivés sur leurs compteurs, vont devenir des escargots la tête dans la coquille . Mme Hidalgo , écologiste inconséquente, vous vous tirez une balle dans le pied, adieu la présidence , heureusement .
Au fait, en êtes vous, vous et le président en exercice, pour la cause des sans-logis ? L'hiver n'a jamais été si près, savez-vous ? "La misère est moins pénible au soleil" comme chantait le défunt exilé fiscal ; "moins", sans doute , mais "pénible" quand même . Bougez vous les fesses et sortez de vos bureaux climatisés, ça urge !
La construction de stades est-elle plus prioritaire que celle de logements ?
Et le feu d'artifices du 14 juillet ?
« A Jacques Lacombe
Pour vous dédommager, monsieur, du recueil que vous avez bien voulu faire de tout ce qu’une certaine personne a écrit sur la poésie, on vous propose de faire un recueil plus piquant de tous les chapitres un peu philosophiques répandus dans les ouvrages du même auteur 1, en mettant le tout par ordre alphabétique, et en puisant même dans un certain dictionnaire où l’on pourrait trouver, avec discrétion, quelques morceaux curieux.
Vous n’avez point changé de profession : vous serez l’avocat de la philosophie. Je voudrais vous donner bien des causes à soutenir ; mais je suis si vieux qu’il ne m’appartient plus d’avoir de procès.
Comptez, je vous en supplie, sur l’estime et l’amitié de votre très humble et très obéissant serviteur.
V.
5è avril 1766. »
1 Il ne s'agit pas ici des Pensées philosophiques qui sont déjà sous presse ainsi qu'en témoigne la lettre du 11 février 1766 à Contant d'Orville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/05/29/chaque-siecle-a-ses-vices-dominants-je-crois-que-la-calomnie-6318794.html
Mais la suggestion de V*, quoique apparemment négligée par Lacombe, peut avoir conduit à la sixième édition, corrigée et augmentée de 34 articles par l'auteur du Dictionnaire philosophique, 1767 , laquelle effectivement reprend à peu près la moitié de ces « trente-quatre articles » dans les éditions de 1765 .
18:52 | Lien permanent | Commentaires (0)
Il est bien difficile, de quelque manière qu’on s’y prenne, qu’il ne reste quelque aigreur dans les esprits
... J'élimine à ce sujet les discutailleries politiciennes pour en revenir aux choses vraiment importantes : les Jeux Olympiques . Aigreur chez les sportifs privés de public, et plus encore aigreur, déjà nettement présente, chez nos hôtes nippons qui se retrouvent avec un déficit kolossal ! Où en sera le virus pour les Jeux d'hiver l'an prochain en Chine ( je n'ose pas mettre à Pékin, qui comme chacun sait, est une station de sports d'hiver de réputation mondiale ) ?
Tous mes voeux aux sportifs qui vont défendre leurs couleurs dans une ambiance de catacombes, ou mieux ( ? = pire ) de flicage permanent . Les Grecs n'en reviendraient pas !
https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/07/08/covid-1...
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
5è avril 1766
Jusques à quand abuserai-je des bontés de mes anges ? Voilà l’historien 1 de François Ier qui de secrétaire d’un grand monarque veut se faire secrétaire des pairs, et je ne sais où il demeure, et je crains de faire encore une méprise. Je prends donc la liberté de leur adresser ma lettre , et de les supplier de vouloir bien faire mettre l’adresse.
Mes anges connaissent plus de pairs que moi ; je puis à peine le servir ; ils pourront le protéger fortement, en cas qu’ils n’aient pas une autre personne à favoriser.
Je ne sais si je me trompe, mais je prévois que les citoyens de Genève pourront perdre leur cause au tribunal de la médiation. Il est bien difficile, de quelque manière qu’on s’y prenne, qu’il ne reste quelque aigreur dans les esprits. Je suis donc toujours pour ce que j’en ai dit. Je voudrais que la médiation se réservât le droit de juger les différends qui pourront survenir entre les corps de la République. J’ai peur que les médiateurs ne veuillent pas se charger de ce fardeau, fardeau pourtant bien léger et bien honorable. Ce serait, ce me semble, une manière assez sûre d’attacher les Genevois à la France, sans leur ôter leur liberté et leur indépendance. Je sais bien qu’on n’a pas à faire des Genevois ; mais les temps peuvent changer, on peut avoir des guerres vers l’Italie. Je serais fâché de penser autrement que monsieur l’ambassadeur, et je croirais avoir tort ; mais j’aime ma chimère, et je voudrais que M. le duc de Praslin l’aimât un peu aussi.
Dites-moi, je vous prie, mes divins anges, comment réussit l’Éloge de M. le dauphin, par M. Thomas. Il me paraît que [de] tous les ouvrages qu’on a faits sur ce triste sujet, le sien est celui qui inspire le plus de regrets sur la perte de ce prince.
Me sera-t-il encore permis de recourir à vos bontés, non-seulement pour une lettre de remerciements que je dois à M. Thomas , mais pour un petit paquet que M. d’Alembert attend ? Figurez-vous mon embarras : je ne sais l’adresse d’aucun de ces messieurs ; il faut pourtant leur écrire, pardonnez donc mon importunité . Je prendrai dorénavant si bien mes mesures que je ne tomberai plus dans le même inconvénient.
Le petit ex-jésuite attend sa toile de Pénélope, qu’il défait et qu’il refait toujours ; mais songez que c’est pour vous plaire qu’il se plaît si peu à lui-même.
N. B. -- M. d’Alembert ne demeure plus rue Michel-le-Comte, comme on l’avait mis sur la lettre ; c’est, je crois, près de Bellechasse. Encore une fois, pardon. »
1 Gabriel-Henri Gaillard, auteur d'une Histoire de François Ier, roi de France, 1766-1769, dont les quatre volumes viennent de paraître . Il a écrit à V* le 11 février 1766 pour lui annoncer l’envoi de ceux-ci et lui demander ce qu'il pense de son œuvre . Mais il n'est pas question dans cette lettre de la requête dont parle ici V* .
Voir note 6 : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome7.djvu/254
et : https://data.bnf.fr/fr/13010406/gabriel-henri_gaillard/
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