Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

22/10/2021

Je vais prendre les eaux de Rolle qui commencent à avoir plus de réputation qu'elles n'en méritent

... L'avenir prouva que l'éternel malade n'y guérit pas , le pouvoir salvateur de ces eaux a fait long feu, si je puis dire .

https://chateauderolle.ch/wordpress/ancien-batiment-des-bains/

Office du Tourisme de Rolle

 

 

 

 

« A David-Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches

Aux eaux de Rolle en Suisse par Genève 25è juillet 1766

Me voici, monsieur, pour quelques jours dans votre pays natal . Je vais prendre les eaux de Rolle qui commencent à avoir plus de réputation qu'elles n'en méritent .

J'ai trouvé M. le prince de Brunswick tel que vous me l'aviez annoncé , et je crois que vous ne seriez pas fâché de servir sous un tel général . La nation à qui vous avez voué vos services s'en trouverait fort bien ; il me paraît fait pour la guerre, pour les lettres, pour la philosophie et pour l'amour .

Je vous envoie une relation qui vous fera frémir 1 . On m'assure que ce jeune homme sur qui on vient d'épuiser tant de cruautés, aurait été un excellent officier, et qu’il avait commencé un très bon commentaire sur les rêveries du maréchal de Saxe . Sa faute était la folie d'un jeune homme . Sa mort est affreuse . On assure qu'il a souffert les tourments horribles de la question, et qu'il a vu couper sa main et arracher sa langue avec un courage inaltérable . Je m'en rapporte à vos réflexions sur cette catastrophe . Agréez les tendres sentiments qui m'attachent à vous pour toute ma vie . »

21/10/2021

les tragédies que vous jouez . Elles sont à l’eau rose

... Oui, tabernac', c'est bien à vous, Céline Dion , que je m'adresse, vous qui avez "le coeur brisé" [sic] : https://www.20minutes.fr/arts-stars/culture/3152035-20211...

Céline Dion |

 

 

« A Henri-Louis Lekain

Mon cher ami, il faudrait une autre maison pour ajuster l’appartement 1 dont vous parlez. D’ailleurs la tragédie d’Abbeville excite en moi une telle indignation, qu’il ne m’est pas possible de relire les tragédies que vous jouez . Elles sont à l’eau rose, en comparaison de celle-là. Tout ce que je puis vous dire, c’est que je serai toujours l’admirateur de vos talents et l’ami de votre personne. Ces deux sentiments me sont trop chers pour qu’ils puissent jamais s’affaiblir dans mon cœur.

V.

23è juillet 1766 aux eaux de Rolle en Suisse par Genève.2»

1 La tragédie du Triumvirat.

2 L'édition Lekain met 25 pour le quantième . L'initiale tracée par Wagnière a été complétée en Voltaire d'une autre main .

20/10/2021

Il faudrait tâcher de prendre un parti ; et si vous me donnez votre parole, je vous réponds du succès, je dis même du succès le plus flatteur

... Cette affirmation, digne de Koh Lanta avant le conseil, court dans les couloirs de tous les partis éclatés . Les petits monnaient leur soutien à des moins petits qui , eux, sont prêts à racler le fond des urnes .

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

Aux eaux de Rolle en Suisse, par Genève, 23 juillet 1766

Mon indignation, mon horreur, augmentent à chaque moment, mon cher frère. Vous parlez de courage ; vous devez en avoir, vous et vos amis. Voici une lettre pour Platon 1. Il faudrait tâcher de prendre un parti 2; et si vous me donnez votre parole, je vous réponds du succès, je dis même du succès le plus flatteur. Il faut savoir quitter un cachot pour vivre libre et honoré. Je vous demande en grâce de m’obtenir l’extrait de la consultation, et les noms que j’ai demandés. Voici une lettre de Sirven pour Élie. Adieu. Tous mes sentiments sont extrêmes, et surtout celui de mon amitié pour vous. »

2 Il s'agit du départ envisagé de Diderot pour aller s’établir à Clèves .

Croyez-moi, il faut que les sages qui ont de l'humanité se rassemblent loin des barbares insensés

...

 

« A Denis Diderot

23 juillet 1766 1


On ne peut s'empêcher d'écrire à Socrate quand les Melitus et les Anitus se baignent dans le sang et allument les bûchers. Un homme tel que vous ne doit voir qu'avec horreur le pays où vous avez le malheur de vivre. Vous devriez bien venir dans un pays 2 où vous auriez la liberté entière non seulement d'imprimer ce que vous voudriez, mais de prêcher hautement contre des superstitions aussi infâmes que sanguinaires. Vous n'y seriez pas seul, vous auriez des compagnons et des disciples. Vous pourriez y établir une chaire qui serait la chaire de la vérité. Votre bibliothèque se transporterait par eau et il n'y aurait pas quatre lieues de chemin par terre. Enfin vous quitteriez l'esclavage pour la liberté. Je ne conçois pas comment un cœur sensible et un esprit juste peut habiter le pays des singes devenus tigres. Si le parti qu'on vous propose satisfait votre indignation et plaît à votre sagesse, dites un mot et on tâchera d'arranger tout d'une manière digne de vous, dans le plus grand secret et sans vous compromettre. Le pays qu'on vous propose est beau et à portée de tout. L'Uranibourg de Tycho Brahé 3 serait moins agréable . Celui qui a l'honneur de vous écrire est pénétré d'une admiration respectueuse pour vous, autant que d'indignation et de douleur. Croyez-moi, il faut que les sages qui ont de l'humanité se rassemblent loin des barbares insensés. »

1 L'édition Collection Littéraire ne désigne le destinataire que par le seul nom de « Platon ».

2 Clèves . Voir lettre de Frédéric II à Voltaire, de juillet 1766 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6409

3 L'astronome Tycho Brahé était sur le point de quitter le Danemark pour Bâle quand Frédéric II de Danemark lui donna à vie l'île de Hveen, où fut construit en 1576 l'observatoire d'Uraniborg . Voir : https://www.futura-sciences.com/sciences/personnalites/astronomie-tycho-brahe-721/

et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tycho_Brahe

L’homme, en général, est un animal bien lâche ; il voit tranquillement dévorer son prochain, et semble content, pourvu qu’on ne le dévore pas 

...

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

Aux eaux de Rolle en Suisse, par Genève, 23 juillet 1766 1

Un Genevois, nommé Ballessert , qui est à Paris, et qui a remporté un prix à je ne sais quelle académie, par un excellent ouvrage 2, veut se présenter devant mes anges pour obtenir par leur protection une audience de M. le duc de Choiseul. Je ne sais s’il veut lui parler des affaires de Genève, ou s’il a quelque autre grâce à lui demander ; mais je supplie mes divins anges de daigner lui accorder toute la faveur qu’ils pourront : ce sera une nouvelle grâce que j’aurai reçue d’eux.

Je me flatte que mes anges voudront bien m’envoyer le petit paquet 3 en toile cirée, pour lequel je leur ai présenté requête. J’ai écrit à M. de Chauvelin 4 . Pour peu qu’il connaisse l’amour-propre des auteurs, il n’aura pas été médiocrement surpris que je sois en tout de son avis.

Je ne dormirai point jusqu’à ce que j’aie la consultation des avocats 5. Hélas ! mes anges, nous ne sommes pas heureux en consultations. Celle de l’avocat 6 qui joue si bien la comédie n’a point réussi . Celle qui devait porter les juges à l’humanité n’a pas empêché qu’on ne traitât de pauvres jeunes gens, coupables d’extravagances, en coupables de parricides ; et enfin la consultation de Beaumont pour les Sirven ne vient point. Les horreurs du fanatisme qui vous environnent semblent avoir glacé la main d’Élie . Il me paraît au contraire qu’on devrait s’encourager plus que jamais à combattre l’atrocité des jugements injustes. On dit que cet infortuné jeune homme, qui n’avait que vingt et un ans, est mort avec la fermeté de Socrate ; et Socrate a moins de mérite que lui  car ce n’est pas un grand effort, à soixante et dix ans, de boire tranquillement un gobelet de ciguë ; mais mourir dans des supplices horribles, à l’âge de vingt et un ans, cela demande assurément plus de courage. Cette barbarie m’occupe nuit et jour. Est-il possible que le peuple l’ait soufferte ? L’homme, en général, est un animal bien lâche ; il voit tranquillement dévorer son prochain, et semble content, pourvu qu’on ne le dévore pas : il regarde encore ces boucheries avec le plaisir de la curiosité.

Mes anges, j’ai le cœur déchiré.

Permettez que je joigne ici un petit mot pour Lekain 7, malgré toute l'horreur qui me subjugue . »

1 L'édition de Kehl, et les suivantes , sont amputées du dernier paragraphe biffé sur la copie Beaumarchais .

2 Jacques Balexserd, né à Genève en 1726 et mort en 1774 ; Dissertation sur l'éducation physique des enfants […] Ouvrage qui a remporté le prix, le 21 mai 1762, à la Société hollandaise des sciences (Harlem), 1762, in-8° : https://books.google.fr/books?id=Ots04VEFMowC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

3 La copie de la tragédie du Triumvirat.

4 Lettre perdue .

5 La Consultation des huit avocats ; voir lettre du 14 juillet 1766 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/10/07/si-la-loi-etait-claire-tous-les-juges-seraient-du-meme-avis-6342130.html

6 L'édition Besterman donne Pierre Jabineau de La Voute pour l'avocat indiqué ici .

Note selon Beuchot : « Huerne de Lamothe, auteur du Mémoire en forme de dissertation sur la question de l’excommunication , auteur , avocat au parlement, né à Sens, est mort vers 1790 . Au lieu des mots, qui joue si bien la comédie, j’ai été tenté de mettre, qui loue si bien la comédie. Mais je m’en suis tenu au texte de toutes les éditions. »

19/10/2021

Non encore une fois, je ne puis souffrir que vous finissiez votre lettre en disant , je rirai . Ah mon cher ami, est-ce là le temps de rire ?...

... Il suffit pour s'en convaincre d'écouter France Info et ses intervenants , avec par exemple Fabien Roussel patron du PCF, mini parti qui , toute modestie avalée, se suppose arbitre du second tour de la présidentielle :

https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/8h30-fauvelle-dely/pouvoir-d-achat-chasseurs-rassemblement-de-la-gauche-le-8h30-franceinfo-de-fabien-roussel_4793815.html

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

Aux eaux de Rolle en Suisse par Genève 23 de juillet 1766 1

Oui, vraiment, je le connais, ce mufle de bœuf et ce cœur de tigre 2, qui mérite par ses fureurs ce qu'il a fait éprouver à l'extravagance ; et vous voulez prendre le parti de rire mon cher Platon ! Il faudrait prendre celui de se venger, ou du moins quitter un pays où se commettent tous les jours tant d'horreurs . N'auriez-vous pas déjà lu la relation ci-jointe 3? Je vous prie de l'envoyer à frère Frédéric, quoiqu'elle ne soit pas tout à fait exacte , il est de la plus grande importance qu'il l'ait de cette façon, afin qu'il soit plus irrité, et qu'il accorde une protection plus marquée et plus durable à cinq ou six hommes de mérite qui veulent se retirer dans une province méridionale de ses États , et y cultiver en paix la raison, loin du plus absurde fanatisme qui ait jamais avili le genre humain, et loin des scélérats qui se jouent ainsi du sang des hommes . L'extrait de la première relation est d'une vérité reconnue , je ne suis pas sûr de tous les faits contenus dans la seconde, mais je sais bien qu'en effet il y a une consultation d'avocats, et si je puis par votre moyen parvenir à l'avoir, vous ferez une œuvre méritoire . Je sais que vous n'êtes pas trop lié avec le barreau, mais voilà de ces occasions où il faut sortir de sa sphère . L'abbé Morellet, M. Turgot pourraient vous procurer cette pièce, vous pourriez me la faire tenir par Damilla , qui cherche se son côté . Pourquoi faut-il n'avoir que de telles armes contre des monstres qu'il faudrait assommer ? C'est bien dommage, encore une fois, que Jean-Jacques soit un fou et un méchant fou, sa conduite a fait plus de tort aux belles-lettres et à la philosophie, que Le Vicaire savoyard ne leur fera jamais de bien . Non encore une fois, je ne puis souffrir que vous finissiez votre lettre en disant , je rirai . Ah mon cher ami, est-ce là le temps de rire ? Riait-on en voyant chauffer le taureau de Phalaris 4? Je vous embrasse avec rage . »

1 L'édition de Kehl suivie par les éditions remplace par afin le passage quoiqu'elle ne soit [,,,] irrité, et .

2 C'est Pasquier que d'Alembert décrit dans sa lettre du 16 juillet 1766 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_(d%E2%80%99Alembert)/Correspondance_avec_Voltaire/070

4 Phalaris, tyran d’Agrigente faisait périr ses ennemis dans un taureau d'airain chauffé par un feu ardent : https://fr.wikipedia.org/wiki/Phalaris_(tyran)

18/10/2021

Notre religion est prêchée en France par des bourreaux

... On les débusque petit à petit, enfin . "Notre religion" n'est plus la mienne depuis longtemps et je n'ai pas la lâcheté d'en prendre une autre, Dieu et ses représentants de commerce se passent allègrement de moi , semble-t-il , et moi d'eux .

cette-pasteur-appelle-les-croyants-a-partager-des-caricatures -de-leur-propre-religion-13-images - Vidéo Dailymotion

https://www.dailymotion.com/video/x7wyjn9

 

 

 

« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de Saxe-Gotha

A Ferney 22 juillet [1766] 1

Madame,

C’en est trop, votre générosité est trop grande ; mais il faut avouer que Votre Altesse Sérénissime ne pouvait mieux placer ses bienfaits que sur cette famille infortunée. Il n’en a presque rien coûté pour l’opprimer, pour lui ravir les aliments et pour faire expirer la vertueuse mère, presque dans mes bras ; et il en coûte de très fortes sommes avant qu’on se soit mis seulement en état de lui faire obtenir une ombre de justice. On fait même mille chicanes au généreux de Beaumont pour l’empêcher de publier l’excellent mémoire qu’il a composé en faveur de l’innocence. On persécute à la fois par le fer, par la corde et par les flammes, la religion et la philosophie. Cinq jeunes gens ont été condamnés au bûcher pour n’avoir pas ôté leur chapeau en voyant passer une procession à trente pas. Est-il possible, madame, qu’une nation qui passe pour si gaie et si polie soit en effet si barbare ? L’Allemagne n’a jamais vu de pareilles horreurs ; elle sait conserver sa liberté et respecter l’humanité. Notre religion est prêchée en France par des bourreaux. Que ne puis-je venir achever à vos pieds le peu de jours qui me restent à vivre, loin d’une si indigne patrie !

C’est moi qui suis le trésorier de ces pauvres Sirven . On peut tout m’envoyer pour eux. Que votre âme est belle ! Madame , qu’elle me console de toutes les abominations dont je suis témoin ! Mon cœur est pénétré de la bonté du vôtre. Daignez agréer mon admiration, mon attachement, mon respect pour Vos Altesses Sérénissimes. Je n’oublierai jamais la gr[ande] maîtresse des cœurs. »

1 L'édition Baron Henry Brougham and Vaux, Lives of Men of Letters and,Science, who Flourished in the Time of George III, 1845 , date la lettre de 1762 ; voir page 140 : https://books.google.bj/books?id=5V4DAAAAYAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q=saxe%20gotha&f=false

Bavoux et François la donnent à tort de 1760 ; Moland rectifie l'année .