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06/10/2024

Nous nous arrangerons aisément

... Ou pas, M. Barnier !

Que dites-vous ?

https://www.francetvinfo.fr/politique/michel-barnier/mich...

et que comprend-on ?  https://www.francetvinfo.fr/politique/michel-barnier/budg...

En passant, Bonne Fête aux Grands-Pères !... tant qu'on peut .

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Petits-enfants, sur quels chemins nous lançons-vous  ?

 

 

« A Guillaume-Claude de Laleu

Secrétaire du roi, Notaire

rue Sainte-Croix de la Bretonnerie

à Paris

3è avril 1769 à Ferney 1

Je vous demande en grâce, monsieur, de faire l’impossible pour avancer trois mille livres à Mme Denis . Nous nous arrangerons aisément, vous et moi, pour le reste, et pour les honoraires que je vous dois .

J'ai l'honneur d'être avec un attachement inviolable, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Original signé sur lequel est portée la mention : « Je soussigné reconnais avoir reçu du d[it] Me de Laleu les trois milles livres contenues au billet de l'autre part . À Paris ce 27 avril 1769, Mignot Denis. »

05/10/2024

Chacun a son diable, madame, dans cet enfer de la vie

...Ces diables sont plus aisés à trouver que des saints, la liste est déjà longue et éternellement renouvelée, depuis le dealer du coin de la rue jusqu'au dictateur sanguinaire en passant par le mari violent et les passeurs/assassins de migrants . Comment vivent ces fléaux ? Actuellement, il en est un qui est au premier rang des malfaisants : le Hezbollah, hydre mortelle alimentée de toute part , y compris l'Afrique de l'Ouest : https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/10/04/l-afriq...

 

 

 

« A Marie de Vichy de Chamrond , marquise Du Deffand

3è avril 1769 à Ferney 1

Chacun a son diable, madame, dans cet enfer de la vie. Le mien m’a affublé de onze accès de fièvre, et me voilà ; mais ce n’est pas pour longtemps 2. En vérité, c’est dommage que la nature m’ayant fait, ce me semble, pour vivre avec vous, me fasse mourir si loin de vous. Quand je dis que nos deux 3 espèces d’âmes étaient modelées l’une pour l’autre, n’allez pas croire que ma vanité radote. Le fait est clair. Vous me dites par votre dernière lettre 4 que  les choses qui ne peuvent nous être connues ne nous sont pas nécessaires . Grand mot, madame, grande vérité, et, qui plus est, vérité très consolante. Où il n’y a rien le roi perd ses droits, et Dieu 5 aussi. Faites-vous lire, s’il vous plaît, l’article « Nécessaire » dans un certain livre alphabétique 6, vous y verrez votre pensée.

C’est un dialogue entre Selim et Osmin, deux braves musulmans ; et Osmin 7 conclut que la nature n’ayant pas favorisé le genre humain, en tout temps et en tout lieu, du divin Alcoran, l’Alcoran n’est pas nécessaire à l’homme.

Au reste, je sens très bien que le siècle de Louis XIV est si prodigieusement supérieur au siècle présent que les athées de ce temps-ci ne valent pas ceux du temps passé. Il n’y en a aucun qui approche de Spinosa. Ce Spinosa admettait, avec toute l’antiquité, une intelligence universelle ; et il faut bien qu’il y en ait une, puisque nous avons de l’intelligence. Nos athées modernes substituent à cela je ne sais quelle nature incompréhensible, et je ne sais quels calculs impossibles. C’est un galimatias qui fait pitié.

J’aime mieux lire un conte de La Fontaine, ( quoique, par parenthèse, ses Contes soient autant au-dessous de l’Arioste que l’écolier est au-dessous du maître ). Cependant ces philosophes ont tous quelque chose d’excellent. Leur horreur pour le fanatisme et leur amour de la tolérance m’attache à eux 8. Ces deux points doivent leur concilier l’amitié de tous les honnêtes gens.

Je passe des athées à Sémiramis. Que voulez-vous, s’il vous plaît, que je fasse ? Je ne saurais, en vérité, prendre le parti de Moustapha contre elle. Son fils l’aime, son peuple l’aime, sa cour l’idolâtre . Elle m’envoie le portrait de son beau visage, entouré de vingt gros diamants, avec la plus belle pelisse du Nord et un Code de lois aussi admirable que notre jurisprudence française est impertinente. On parle français à Moscou et en Ukraine. Ce n’est ni le parlement de Paris ni la Sorbonne qui a établi des chaires de professeurs en notre langue dans ces pays autrefois si barbares. Peut-être y ai-je un peu contribué. Permettez-moi d’avoir quelque condescendance pour un empire de deux mille lieues d’étendue, où je suis aimé 9, tandis que je ne suis pas excessivement bien traité dans la petite partie occidentale de l’Europe où le hasard m’a fait naître 10.

Je vous avoue que j’aimerais mieux avoir l’honneur de souper avec vous dans votre couvent de Saint-Joseph 11 que de rester au milieu des neiges de l' épouvantable 12 chaîne des Alpes, ou de courir de roi en impératrice. Soyez très sûre, madame, que vos lettres ont fait de mon envie extrême de vous revoir une très grande passion. Comptez que mon âme court après la vôtre.

Je serais peut-être un peu décontenancé devant Mme la duchesse de Choi... Quand le vieux chevalier Des Touches Canon 13, père putatif de d’Alembert 14, voyait une jolie femme, bien aimable, il lui disait : « Passez, passez vite, madame ; vous n’êtes pas de ma sorte. » Je suis devenu un peu grossier dans ma retraite 15.

Que m’importe que la nature,
En dessinant ses traits chéris,
Pour modèle ait pris la figure
De la Vénus de Médicis ?
Je suis berger, mais non Pâris.
Un vieux berger n’est pas un homme.
Je pourrais lui donner la pomme
Sans que mon cœur en fût épris,
Et sans que la maligne engeance
Des déesses de son pays
Reprochât à mes sens surpris
D’être séduits par l’apparence.
Je sais que son esprit orné
A toute la délicatesse
Que l’on vanta dans Sévigné,
Avec beaucoup plus de justesse,
Qu’elle aime fort la vérité,
Mais ne la dit qu’avec finesse.
Ma grossière rusticité
Et mon impudence suissesse
Auraient grand-peine à se prêter

À tant de grâce et de souplesse.
Il faut que, pour bien s’ajuster,
Les gens soient d’une même espèce.
Vous, dont l’esprit et les bons mots,
L’imagination féconde,
La repartie et l’à-propos
Font toujours le charme du monde ;
Vous, ma brillante Du Deffand,
Conversez 16 dans votre retraite,
Vivez avec la grand’maman :
C’est pour vous que les dieux l’ont faite.
Si j’allais très imprudemment
Troubler vos séances secrètes,
Que diriez-vous d’un chat-huant
Introduit entre deux fauvettes ?

Cependant je veux savoir qui soupe entre Mme de Choi... et vous ; qui en est digne, qui soutient encore l’honneur du siècle 17.

Que voulez-vous que je vous dise ? Hélas ! toutes nos petites consolations ne sont encore que des emplâtres sur la blessure de la vie. Mais, dans votre malheur, vous avez du moins le meilleur des remèdes ; et, puisque vous existez, qu’y a-t-il de mieux que de consumer quelques moments de cette existence douloureuse et passagère avec des amis qui sont au-dessus du commun des hommes ? Vous m’avez donné une grande satisfaction en m'apprenant que le président a repris son âme.

Hélas ! qu’a-t-il pu ressaisir
De cette âme qui sut vous plaire ?
Quelque faible ressouvenir,
Et quelque image bien légère,
Qui ne revient que pour s’enfuir !
A-t-il du moins quelque désir,
Même encor sans le satisfaire ?
A-t-il quelque ombre de plaisir ?
Voilà notre importante affaire.
Qu’on a peu de temps pour jouir !
Et la jouissance est un songe 18.
Du néant tout semble sortir,
Dans le néant tout se replonge.
Plus d’un bel esprit nous l’a dit ;
Un autre Hénault
19 et Deshoulière,

Chapelle et Chaulieu, l’ont écrit ;
L’antiquité, leur devancière,
Mille fois nous en avertit ;
La Sorbonne dit le contraire :
À ces messieurs rien, n’est voilé ;
Et quand la Sorbonne a parlé,
Les beaux esprits doivent se taire.

Dites, je vous en conjure, au délabré président combien je m’intéresse à son âme aimable. La mienne prend la liberté d’embrasser la vôtre. Adieu, madame ; vivons comme nous pourrons.

V.

P.-S. La lettre à Guillemet 20 à Versailles, de Versailles à Lyon, de Lyon à Genève, et m'a enfin été rendue . Elle est charmante 21. »

1 Original . On dispose en outre pour cette lettre dont V* a particulièrement soigné le texte, de la première minute olographe et d'une seconde minute qui seront désignées respectivement par les sigles Min 1 et Min 2, et d'une copie corrigée de la main de V* sans doute en vue d'une publication qui aura pour sigle Cop 3 ; édition de Kehl.

2 Cette phrase manque dans Op 3.

3Ce mot manque dans Cop3.

5 Dans Min 1 V* a écrit Dieu ; dans Min 2, Dieu figure dans un premier jet puis a été corrigé en la nature et enfin restitué . Dans Cop 3 V* a de sa main corrigé Dieu en la nature .

6 Le Dictionnaire philosophique .

7 Dans Cop 3 , tout le début de ce paragraphe a été remplacé simplement par Un Turc y .

8 Dans Cop 3 les mots m'attache à eux ont été remplacés par en font de bons citoyens.

9 Les mots où je suis aimé ont été ajoutés au-dessus de la ligne dans Min 2 mais n'ont pas été transcrits dans l'original .

10 Ce paragraphe tout entier est omis dans Cop 3.

11 Les mots dans votre cuvent de Saint-Joseph sont omis dans Cop 3.

12 des neiges dans la belle et épouvantable (Min 2 et Cop 3).

13 Tel est le surnom du chevalier Des Touches, père présumé de d'Alembert . Voir Jean Sareil, Les Tencin, 1969, p. 54. Voir : https://journals.openedition.org/rde/4949#tocto1n9

14 Ces cinq mots sont omis dans Cop 3.

15 Les mots dans ma retraite sont omis dans Cop 3.

16 Et non conservez dans l'édition Besterman .

17 Les douze premiers vers depuis Vous dont l'esprit ... et le bref paragraphe qui les suit sont omis dans Cop3.

18 Ajouté dans Min 2, ce vers, nécessaire pour fournir une rime à replonge, est pourtant omis dans l'original . Il a été restitué dans Cop 3 par V*.

20 Il s'agit de la réponse de la duchesse de Choiseul à « monsieur Guillemet » : voir lettre du 2 février 1769 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/08/08/j... . Cette lettre de la duchesse datée du 8 février 1769, remise par elle au duc pour qu'il l'achemine par Hennin a été par erreur postée par lui ; aussi n'atteignit-elle V* qu’après un assez long délai .

21 Ce post-scriptum, omis dans Cop 3 manque dans toutes les éditions .

04/10/2024

Je m'en remets à vos bontés

... Que dit Laurence Garnier , secrétaire d'Etat à la Consommation, quelles bontés attendre du nouveau gouvernement :  https://www.francetvinfo.fr/politique/gouvernement-de-mic...

 

 

 

« A Jean-François Tabareau

2 avril 1769

Après onze accès de fièvre, mon cher monsieur, j'ai encore la force d'exercer auprès de vous ma charge de bibliothécaire . Voici trois exemplaires d'un nouveau recueil de lettres 1 dont il serait , ce me semble, très utile de faire une troisième édition à Lyon . Je crois qu'on en pourrait donner un exemplaire aux pères de l’Oratoire qui ne seraient pas fâchés de voir cet ouvrage réimprimé . Je m'en remets à vos bontés et à celles de M. Vassselier .

Voulez-vous bien faire passer le quatrième exemplaire à M. de Borde . Votre bibliothécaire vous embrasse bien tendrement . »

On prendra ensuite son parti après avoir épuisé tous les moyens de réussir ... Certainement il y a de l'argent et vous devez en toucher

... C'est le résumé de la tactique et du résultat espérés pour le budget de la France . Voir : https://www.capital.fr/votre-argent/budget-2025-hausse-de...

 

 

 

« A Marie-Louise Denis

Ma chère nièce, Lefèvre m'a mandé l'aventure assez désagréable qui lui est arrivée au sujet des Deux Frères 1. Cela me parait très injuste, et aurait pu s'éviter en prenant quelques précautions que je lui ai indiquées . J'en écris aux anges, peut-être ne serait-il pas mal de s'adresser à M. le maréchal de Richelieu par Mme d'Egmont, ou par quelque autre personne . Comme je ne vois les choses que de fort loin je ne puis rien proposer qu'au hasard, et je dois m'en rapporter à ceux qui sont sur les lieux.

Je ne crois pas que Mme la Présidente 2 ait un grand goût pour ces petites curiosités là ; mais il se pourrait très bien qu'elle les protégeât sans les aimer beaucoup . C'est une chose dont j'ai vu des exemples . Mais comment parvenir à faire parler ? À qui s'adresser ? Il n'y a guère d'espérance de réussir par cette voie . Le plus court serait à mon avis qu'on fit relire le procès au juge qui s'est d'abord déterminé trop sévèrement . J'ai redemandé aux anges le factum auquel la partie plaignante a ajouté environ quatre-vingts lignes, le tout précédé d'un avertissement très raisonnable , qui détruirait les applications odieuses que sans doute on aura faites . On prendra ensuite son parti après avoir épuisé tous les moyens de réussir .

Ce qui m'intéresse davantage, et ce qui me cause plus de chagrin, c'est votre projet de quitter Paris, où je me flattais que vous seriez heureuse . Vous y jouirez certainement de près de cinquante mille livres de rente . L'affaire de Wirtemberg s'arrange de jour en jour, et prend la forme la plus sûre et la plus inaltérable . Il ne m'en coûtera que deux ou trois quartiers des arrérages de cette année que je sacrifie pour assurer tout le reste . Vous jouissez à présent de plus de trente mille livres de revenu . Vous êtes sage, vous n'avez point de goût ruineux . Je ne vois pas , encore une fois, pourquoi Paris vous déplairait . Pour moi je comptais venir achever mes jours auprès de vous dans quelque faubourg lorsque j'aurais achevé tous les travaux qui m'occupent . Je travaille moins que vous ne pensez ; j'ai deux hommes auprès de moi qui me soulagent beaucoup et je soutiens ma faible santé non seulement par un régime exact, mais par la retraite même qui me donnent la facilité de me livrer à des assujettissements que la vie de Paris ne permet pas . Je ménage mes mauvais yeux en me faisant faire la lecture ; je ne mange plus de viande ; je ne vois plus personne ; je suis enseveli, que deviendriez-vous dans mon tombeau ? Il n'est pas dans la nature que vous puissiez supporter la vie à laquelle je suis réduit .

Mandez-moi donc quel était votre projet . Mandez-moi si M. le maréchal de Richelieu vous paiera, et si vous ne tirerez pas incessamment quelque chose de la succession de Guise . Certainement il y a de l'argent et vous devez en toucher .

L'affaire de La Borde m'inquiète beaucoup . Je vous prie encore une fois de me renvoyer mon billet de trois mille livres à Laleu, puisque vous ne voulez pas en faire usage ; je vous en ferai tenir un autre à la première occasion . Je vous prie surtout de me mander quel est ce projet que vous aviez . Si c'est de vous retirer à Lyon  je doute que ce parti pût convenir à vous et à moi , et assûrément une jolie maison dans un faubourg de Paris ( dès que mes affaires seront arrangées ) serait plus agréable et plus honnête de toute façon . Je m'imaginais que vous vivriez à Paris avec votre frère, mais je vois que cela n'est guère compatible avec les arrangements qu'il a pris . En un mot, quelque chose qui arrive, votre bien-être me sera toujours cher, et sera mon objet principal . Je ne puis prendre aucun parti cette année ; il faut auparavant que je mettre toutes mes affaires en règle ; que je finisse le Châtelard ; que les engagements de Laborde soient éclaircis, que le procès de Choudens soit terminé ; et que je n'aie plus rien qui m'arrête . Comptez que je ne laisse pas d'être dans quelque embarras . Si je meurs tout est fini, et si je vis je vivrai pour vous .

V. »

1 Les Guèbres .

2 C'est un des noms de code de Mme Du Barry.

03/10/2024

sa mémoire est prodigieuse ; son esprit est digne de sa mémoire, et il a toute la modestie convenable à ses talents

... Emilien bien sûr : "Bravissimo" : https://www.allocine.fr/tvactu/articles/article-100010633...

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Gentil couple

 

 

 

« A Catherine II, impératrice de Russie

A Ferney 1er avril 1769 1

Madame,

Un jeune homme 2 des premières familles de Genève, qui, à la vérité, a près de six pieds de haut, mais qui n’est âgé que de seize ans, assistant chez moi à la lecture de l’instruction que Votre Majesté impériale a donnée pour la rédaction de ses lois, s’écria : « Mon Dieu, que je voudrais être Russe ! » Je lui dis en présence de sa mère : « Il ne tient qu’à vous de l’être ; Pictet 3, qui est plus grand que vous, l’est bien ; vous êtes plus sage et plus aimable que lui. Madame votre mère veut vous envoyer dans une université d’Allemagne apprendre l’allemand et le droit public : au lieu d’aller en Allemagne, allez à Riga , vous apprendrez à la fois l’allemand et le russe ; et à l’égard du droit public, il n’y en a certainement point de plus beau que celui de l’impératrice. »

Je proposai la chose à sa mère, et je n’eus pas de peine à l’y faire consentir. Ce jeune homme s’appelle Gallatin ; il est de la plus aimable et de la plus belle figure ; sa mémoire est prodigieuse ; son esprit est digne de sa mémoire, et il a toute la modestie convenable à ses talents. Si Votre Majesté daigne le protéger, il partira incessamment pour Riga, après avoir commencé à suivre votre exemple en se faisant inoculer. Je suis fâché de n’offrir à Votre Majesté qu’un sujet ; mais je réponds bien que celui-là en vaudra plusieurs autres.

Oserai-je prendre la liberté de demander à Votre Majesté à qui il faudra que je l’adresse à Riga ? Sa mère ne peut payer pour lui qu’une pension modique. J’ose me flatter qu’il n’aura pas été un an à Riga sans être en état de venir saluer Votre Majesté en russe et en allemand. Qu’est devenu le temps où je n’avais que soixante ans ? Je l’aurais accompagné.

Si Votre Majesté va s’établir à Constantinople, comme je l’espère, il apprendra bien vite le grec . Car il faut absolument chasser d’Europe la langue turque, ainsi que tous ceux qui la parlent. Enfin, madame, au nom de toutes vos bontés pour moi, j’ose vous implorer pour le jeune Gallatin, et je puis répondre qu’il méritera toute votre protection. J’attends les ordres de Votre Majesté impériale 4.

J'apprends que les braves troupes russe ont déjà battu les Tartares . Cette nouvelle diminue une maladie cruelle dont je suis actuellement accablé . Puisse la gloire de vos armées égaler celle de votre génie !

Je suis avec le plus profond respect et la plus sensible reconnaissance,

madame,

de Votre Majesté impériale

le très humble et très obéissant serviteur

Voltaire . »

1 Copie contemporaine (Moscou) bien datée (voir l'avant-dernier paragraphe de la présente lettre) seule complète de la fin qui a été suivie ; édition Cayrol.

2 Jean Gallatin, fils d'Abraham et de Louise Gallatin : https://gw.geneanet.org/rossellat?lang=fr&n=gallatin&oc=20&p=jean

4 Les ordres de Catherine vinrent dans une lettre datée du 26 avril (nouveau style ) : « A Saint-Pétersbourg 15 [26 n.s.] d'avril 1769

« J'ai reçu, monsieur, votre belle lettre du 26 février . Je ferai mon possible pour suivre vos conseils, si Moustapha ne sera pas rossé, ce ne sera assurément ni votre faute ni la mienne, ni celle de mon armée, mes soldats vont à la guerre contre les Turcs comme s’ils allaient à une noce . Puisque l'envie de faire cause commune contre les barbares est passée aux autres puissances de l'Europe, la Russie seule cueillera ces lauriers-ci, et son attention à bien abattre ses ennemis ne sera point distraite par des combinaisons de campagnes concertées auxquelles souvent, il n'y a eu que les ennemis qui aient gagné . Si vous pouviez voir tous le embarras dans lesquels ce pauvre Moustapha se trouve, à la suite du pas précipité qu'on lui a fait faire, contre l'avis de son Divan et des gens le plus raisonnables, il y aurait des moments où vous ne pourriez vous empêcher de le plaindre comme homme, et comme homme très mal dans ses affaires .

Il n'y a rien qui me prouve plus la part sincère que vous prenez, monsieur, à ce qui me regarde que ce que vous me dites sur ces chars de nouvelle invention . Mais nos gens de guerres ressemblent à ceux de tous les autres pays, les nouveautés non éprouvées leur paraissent douteuses .

Je suis bien aise, monsieur, de ce que mon instruction a votre approbation, je doute qu'elle ait celle du Saint-Père et du Moufti . Les cardinaux devraient élire ce dernier pour pape, ils sont présentement si bien avec lui . Ce serait aux cardinaux ultramontains à en faire la proposition au conclave .

Je vous prie, monsieur, d'être assuré que tout ce qui me vient de votre part me fait un plaisir infini, je ne saurais pas assez vous remercier de l'envoi que vous m’avez fait, le tableau de M.  Huber y compris, c'est un vrai cadeau . Je regretterais bien d'être privée de ce qui paraîtrait à l'avenir, je crois qu'il faudrait l’envoyer en Hollande par la voie de quelque marchand, et de là on me l'enverrait ou par la poste ou d'autres occasions qui ne sont pas rares de ce pays-là.

Vivez , monsieur, et réjouissez-vous lorsque mes braves guerriers auront battu les Turcs . Vous savez je pense qu’Azof à l’embouchure du Tanaïs est déjà occupé par mes troupes, le dernier traité de paix stipulait que cette place resterait abandonnée de part et d'autre . Vous aurez vu par les gazettes que nous avons déjà envoyé promener les Tartares dans trois différents endroits lorsqu’ils ont voulu piller l'Ukraine, cette fois-ci ils s'en sont retournés aussi gueux qu'ils étaient sortis de la Crimée, je dis gueux car les prisonniers qu'on a faits sont couverts de lambeaux et non d'habits . S'ils n'ont pas réussi leurs désirs chez nous, en revange [sic] ils se sont dédommagés en Pologne, il est vrai qu'ils y avaient été <envoyés> par leurs alliés les protégés du nonce du Pape .

L'on fait très bien ici la porcelaine dite en biscuit, je ne sais monsieur comment j'ai pu dire que votre buste était en plâtre, une dame française dirait que c'est une bévue qui ne ressemble à rien, mais comme je n'ai pas l'honneur d'être welche, je dirai que c'est une distraction digne de Moustapha .

Au moment où j'achevais ces lignes, j'ai reçu votre lettre, monsieur, du 1 d'avril . Le conseil que vous avez donné au jeune Gallatin m'est une nouvelle marque bien flatteuse de votre amitié pour moi . La vérité m’oblige de vous dire que si ce jeune homme doit encore étudier à quelque université, je crois que ses parents feront mieux de l'y envoyer qu'à Riga , où je crains qu'il ne trouverait point l’équivalent des universités d'Allemagne ; mais s'il ne s'agit que de lui apprendre l'allemand, Riga est aussi propre que Leipzig même, et alors vous voudrez bien monsieur l'adresser au gouverneur général de la Livourne, M. de Braun, qui réside à Riga, auquel j'écrirai à ce sujet . Nous en aurons soin, s'il conserve l'envie de s'établir en Russie ; sinon il sera très libre de faire ce qui lui plaira, et même de venir assister à votre entrée à Constantinople, où vous m'avez promis de me venir trouver, quand j'y serai s'entend . En attendant je tâcherai d'étudier un beau compliments grec que je vous débiterai . Il y a deux ans lorsque j'étais à Kazan , j'avais apprises [sic] quantité de phrases tartares et arabes ce qui faisait un grand plaisir aux habitants de cette ville, qui , pour la plupart sont de cette nation, bons musulmans, bien riches, et qui bâtissent une magnifique mosquée en pierre depuis mon départ . Je suis bien fâchée de ce que votre santé ne réponde pas à mes souhaits, si les succès de mes armées peuvent contribuer à la rétablir, je ne manquerai pas de vous paire part de tout ce qui nous arrivera d'heureux . Jusqu'ici Dieu merci je n'ai encore que de très bonnes nouvelles de tous côtés, on renvoie bien étrillés tout ce qui se montre Turks, Tartares, mais surtout les mutins de Pologne .

J'espère dans peu avoir des nouvelles de quelque chose de plus décidé que des affaires de partis entre troupes légères, je suis avec une estime bien particulière .

« Catherine. » Cette lettre est datée 4-15 août 1769 dans l'édition Garnier : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1769/Lettre_7633#cite_ref-1

02/10/2024

Si cela peut vous amuser et faire passer quelques moments agréables

... Je vous conseille les chroniques du génial François Morel , avec , pour débuter dans l'actualité ceci : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-billet...

 

 

« A Louise-Suzanne Gallatin

[mars-avril 1769 ?]

N'ayant point de copiste, madame, je vous envoie le seul manuscrit au net qui me reste . Si cela peut vous amuser et faire passer quelques moments agréables à notre prince 1, je n'aurai pas perdu mes peines .

Mille respects . »

1 Frédéric II de Hesse-Cassel dont Suzanne Gallatin est la correspondante ; voir lettre du 23 mars 1768 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/11/17/se-faire-une-petite-bibliotheque-de-tous-les-rogatons-nouvea-6471426.html

Voici les additions qu'on envoie

... Accessible à tous : https://www.economie.gouv.fr/cedef/finances-publiques

et plus particulièrement , intéressant tout salarié, inquiet à juste titre: https://www.economie.gouv.fr/cedef/revenu-initial-revenu-...

 

 

 

« A Gabriel Cramer

[mars-avril 1769]

Voici les additions qu'on envoie à monsieur Caro pour Le Siècle de Louis XIV . Il est nécessaire qu'il envoie son 3ème tome de l'essai sur l'esprit et les mœurs des nations pour que l'on confronte les additions qui se trouvent dans la copie que nous avons, avec l'exemplaire de monsieur Caro. On lui fait mille compliments . »