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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

un de ces ânes de Sorbonne qu'on appelle docteurs

... J'ai repensé à cette phrase et à bien d'autres, qui ne sont pas à la gloire des Sorbonnards du XVIIIè siècle, lors des obsèques et de l'hommage de la nation pour ce malheureux professeur Samuel Paty, assassiné par un islamiste et dont le cercueil est passé par la cour de la Sorbonne .

J'ai eu une petite grimace en entendant les journalistes présenter la Sorbonne comme un lieu d'excellence depuis sa création ; ils oublient la somme de croyances ineptes qui ont eu cours dans ces murs , de temps lointains jusqu'à nos jours, de la condamnation de l'inoculation anti-variolique du temps de Voltaire jusqu'à la réception et soutenance de thèse pronant l'astrologie d'Elisabeth Teissier (Docteur ! ).

Vérité et charlatanisme se partagent encore les mêmes murs . Qui l'emportera ?

 

Mis en ligne le 19/11/2020 pour le 23/9/2015

 

 

« A Nicolas-Claude Thieriot

chez M. Baron

Couture-Sainte-Catherine

A Ferney 23 septembre 1760

Monsieur l'habitant du Marais, que n'envoyez-vous chercher des billets de loge et d'amphithéâtre chez M. d'Argental ? Pourquoi dans les beaux jours ne vous donnez-vous pas le plaisir honnête de la comédie ? Je trouve un peu extraordinaire que messieurs les comédiens du roi et les miens vous aient ôté votre entrée . Qu'ils vous en privent quand ils jouent Les Philosophes, à la bonne heure, mais il me semble que ceux à qui j'ai fait présent de plusieurs pièces de théâtre et à qui j'abandonne le profit des représentations et de l'impression devraient vous avoir invité au petit festin que je leur donne .

Je vous prie mon cher amateur des arts de vouloir bien ajouter à tous vos envois, la traduction du Père de famille ou du Vero amico de Goldoni 1 par Diderot avec la préface et l'épître à Me de La Marck .

Si L’Écosseuse 2 est plaisante comme on me le mande, ayez la charité de la mettre dans le paquet car il faut rire . C'est aussi pour rire que je voudrais savoir positivement si c'est l'ami Gauchat qui est l'auteur de l'oracle des philosophes 3 et si ce Gauchat n'est pas un de ces ânes de Sorbonne qu'on appelle docteurs .

On me dit qu'il n'y a pas trop de quoi rire à nos affaires de terre et de mer . Il faut s’égayer avec les lettres humaines et inhumaines pour ne pas se chagriner des affaires publiques . Nous avons aux Délices M. le duc de Villars et un marquis d'Argence, grands amateurs de le science gaie . Ce marquis d'Argence vaut un peu mieux que les d'Argens des Lettres juives . Nous jouons la comédie, nous faisons des noces ; Mme Denis joue à peu près comme Mlle Clairon, excepté qu'elle a dans la voix un attendrissement que Clairon voudrait bien avoir . Mlle de Bazincourt, excellente confidente, et vous un grand nigaud, mon cher ami, de n'être pas aux Délices ou à Ferney .

Et vale .

V.

23 septembre . »

1 Il vero amico de Goldoni fut traduit sous le titre Le Véritable Ami, 1758 . on suppose que le traducteur fut Alexandre Deleyre ; mais selon Diderot, ce serait l’œuvre de Francis Veron de Forbonnais ; la publication à laquelle V* songeait était Il Padre di famiglia, traduite elle aussi par Deleyre sous le titre Le Père de famille, 1758 ; la préface comme la dédicace sont de Grimm ; la confusion s’explique par le fait que la pièce de Diderot intitulée elle aussi Le Père de famille, 1758, fut publiée la même année .

2 L'Ecosseuse est une parodie de L’Écossaise , œuvre non pas de Poinsinet cadet et d'Avesne, comme l'affirme d'Avenel, mais de Charles-François Pannard et Louis Anseaume ; elle fut représentée à la foire Saint-Laurent le 4 septembre 1760 ; Avenel fut trompé pat les initiales P. et A., sous lesquelles fut publié l'opéra-comique en 1761 .

Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52502871d.image

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23/09/2015 | Lien permanent

Point de jésuite pendu . La justice est lente

... Soit ! mais est-seulement un défaut quand elle commet des erreurs, quand elle tarde à les reconnaitre et  les réparer ? Ou alors quand au contraire elle est hâtive, précipitée, caricaturale ? Il devrait bien y avoir moyen de trouver le levier de vitesse , la bonne allure ; mais, je crois  le nombre des délits  un défi à l'entendement, le nombre des coupables un défi aux justiciers . Quand peut-on espérer un monde où la prévention primera sur la répression ?

 

justice du xxi è siècle.jpg

 http://cnb.avocat.fr/Colloque-Justice-du-21e-siecle-des-10-et-11-janvier-2014-compte-rendu-des-debats_a1872.html

 

« A Élie Bertrand

[vers le 10 mars 1759]

Vite, la poste part, il faut, mon cher ami, que je vous remercie du fond de mon cœur, il faut que vous épuisiez votre éloquence pour faire valoir tous les sentiments de ma reconnaissance 1 et mes tendres et respectueux remerciements à M. de Freydenrick et à M. de Bonstetten .

Comment va le mémoire pour Lyon ?2 Ne pourriez-vous point me communiquer un certain livre sur les tremblements ?3 Il me semble qu'il figurerait très bien dans une académie des sciences . Je vous embrasse . Je suis à vous pour la vie .

V.

Point de nouvelles aujourd'hui du Portugal . Point de jésuite pendu . La justice est lente . »

1 A la place de reconnaissance V* a d'abord écrit un autre mot soigneusement biffé .

 

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16/04/2014 | Lien permanent

Il n’appartient qu’aux excellents artistes comme vous d’approuver ce que leurs confrères ont de bon, et de garder le sil

... Ce n'est pas Francis Lalanne qui est ici félicité, qu'on en juge par ses récriminations : https://www.huffingtonpost.fr/entry/francis-lalanne-fort-...

Bonnes routes et amusez-vous bien où que vous alliez, les guignols sont encore vivants !

blague sur Francis Lalanne – Blagues et Dessins

"Je souhaite le même succès à Kanye West" ( Lalanne dixit ).

 

 

« A Jean-François La Harpe

2è avril 1765

Je me doutais bien, monsieur, que les vers charmants sur les Calas étaient de vous 1 ; car de qui pourraient-ils être ? J’avais reçu tant de lettres au sujet de cette famille infortunée, qu’après les avoir mises dans mon portefeuille, j’y trouvai votre belle épître sans adresse, et écrite, à ce qu’il me parut, d’une autre main que la vôtre.

J’apprends aujourd’hui par M. le marquis de Chimène que je vous ai très bien deviné ; mais je ne sais pas si bien répondre. Mon état est très languissant et très triste, et j’ai encore le malheur d’être surchargé d’affaires ; je vous assure que mes sentiments pour vous n’en sont pas moins vifs. J’ai été charmé de la candeur et de la réserve avec lesquelles vous m’avez écrit sur la pièce nouvelle. Cela est digne de vos talents, et met vos ennemis dans leur tort, supposé que vous en ayez. Il n’appartient qu’aux excellents artistes comme vous d’approuver ce que leurs confrères ont de bon, et de garder le silence sur ce qu’ils ont de moins brillant et de moins heureux. Vous avez tous les jours de nouveaux droits à mon estime et à ma reconnaissance, et vous pouvez toujours me parler avec confiance, bien sûr d’une discrétion égale à l’attachement que je vous ai voué. »

1  A Voltaire sur la réhabilitation de la famille Calas ; voir : Œuvres de La Harpe, 1820, III, 486-488 .

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12/07/2020 | Lien permanent

amour contrarié

« A Catherine – Olympe du Noyer

 

Je ne sais si je dois vous appeler Monsieur ou Mademoiselle ; si vous êtes adorable en cornettes, ma foi vous êtes un aimable cavalier, et notre portier qui n’est point amoureux de vous, vous a trouvé un très joli garçon. La première fois que vous viendrez, il vous recevra à merveille. Vous aviez pourtant la mine aussi terrible qu’aimable, et je crains que vous n’ayez tiré l’épée dans la rue, afin qu’il ne vous manquât plus rien d’un jeune homme : après tout, tout jeune homme que vous êtes, vous êtes sage comme une fille.

 

Enfin, je vous ai vu, charmant objet que j’aime,

En cavalier déguisé dans ce jour,

J’ai cru voir Vénus elle-même

Sous la figure de l’amour.

L’amour et vous, vous êtes du même âge,

Et sa mère a moins de beauté ;

Mais malgré ce double avantage,

J’ai reconnu bientôt la vérité.

Olympe vous êtes trop sage

Pour être une divinité.

 

Il est certain qu’il n’est point de dieu qui ne dût vous prendre pour modèle, et il n’en est point qu’on doive imiter, ces sont des ivrognes, des jaloux et des débauchés. On me dira peut-être :

Avec quelle irrévérence

Parle des dieux ce maraud

 

Mais c’est assez parler des dieux, venons aux hommes. Lorsque je suis en train de badiner, j’apprends par Le Fèvre qu’on vous a soupçonnée hier. C’est à coup sûr la fille qui vous annonça, qui est la cause de ce soupçon qu’on a ici ; ledit Le Fèvre vous instruira de tout, c’est un garçon d’esprit et qui m’est fort affectionné, il s’est tiré très bien de l’interrogatoire de son Excellence [marquis de Chateauneuf]. On compte de nous surprendre ce soir, mais ce que l’amour garde est bien gardé, je sauterai par les fenêtres, et je viendrai sur la brune chez  **  si je le puis ; Le Fèvre viendra chercher mes habits sur les quatre heures, attendez moi sur les cinq en bas, et si je ne viens pas, c’est que je ne le pourrai absolument point ; ne nous attendrissons point en vain, ce n’est pas par des lettres que nous devons témoigner de notre amour, c’est en nous rendant service : je pars vendredi avec M de Maussion ; que je vienne vous voir ou que je n’y vienne point, envoyez moi toujours ce soir vos lettres par Le Fèvre qui viendra les quérir ; gardez vous de madame votre mère, gardez un secret inviolable, attendez patiemment les réponses de Paris, soyez toujours prête pour partir, quelque chose qui arrive je vous verrai avant mon départ : tout ira bien, pourvu que vous vouliez venir en France et quitter une mère …dans les bras d’un père. Comme on avait ordonné à Le Fèvre de rendre toutes mes lettres à son E.  j’en ai écrit une fausse que j’ai fait remettre entre ses mains, elle ne contient que des louanges pour vous et pour lui qui ne sont point affectées, Le Fèvre vous rendra compte de tout.

Adieu, mon cher cœur, aimez-moi toujours, et ne croyez pas que ne hasarderai pas ma vie pour vous.

 

Arouet 

le 4 décembre 1713»

 

Le futur Voltaire a 19 ans, est plein de fougue, et en bon homme de théatre fait de la mise en scène grandeur nature avec son premier amour Pimpette. Il sait déja dissimuler et truquer sa correspondance ce qui vaudra à nombre d'éxégètes de longues nuits sans sommeil pour démèler le vrai du faux dans sa correspondance touffue .

Homme de lettres  :"ce n’est pas par des lettres que nous devons témoigner de notre amour," et homme d'action : "c’est en nous rendant service" .

Rayon d'action modéré par le fait qu'à son époque la majorité est à 25 ans et qu'il n'a pas encore d'autonomie financière. Mme du Noyer mère contrarie les amoureux, François Marie Arouet ne revenant en grâce que lorsqu'il sera Voltaire, homme à succès et riche . Ce comportement n'est pas sans me rappeler celui de ceux qui volent au secours du succès de ceux qui peuvent leur obtenir des avantages : "souviens-toi, j'ai voté pour toi" ou "j'ai toujours dit que tu réussirais" et "tu peux compter sur moi" ; traduisez  in petto : "je suis un lèche-bottes (je reste poli ;-)) et je compte bien tirer bénéfice de ta réussite !". Non, non ne voyez aucune allusion à un certain pouvoir de décision qui vient de sortir du chapeau gouvernemental, -oh pardon-, présidentiel !

 

Vive les amoureux !

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"http://img.1.vacanceo.net/classic/138328.jpg"

 

 

 

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05/12/2008 | Lien permanent

Ce qu’il y a de désespérant pour la nature humaine

Manque de temps - doit être partout à la fois - pousserai ma goualante demain ....

Brut de décoffrage, Volti ci-après :

« A Jean Le Rond d’Alembert

 

 

                   Mon très digne et ferme philosophe, vrai savant, vrai bel esprit ; homme nécessaire au siècle ; voyez, je vous prie dans mon Épître à Mme Denis une partie de mes réponses à votre énergique lettre.

                   Mon cher archidiacre et archi-ennuyeux Trublet est donc de l’Académie ! Il compilera un beau discours des phrases de La Motte. Je voudrais que vous lui répondissiez : cela ferait un beau contraste. Je crois que vous accusez à tort Cicéron d’Olivet ; il n’est pas homme à donner sa voix à l’aumônier d’Houdar et de Fontenelle. Imputez tout au surintendant de la reine.

 

                   Ce qu’il y a de désespérant pour la nature humaine c’est que ce Trublet est athée comme le cardinal Tencin, et que ce malheureux a travaillé au Journal chrétien pour entrer à l’Académie par la protection de la reine.

 

                   Les philosophes sont désunis. Le petit troupeau se mange réciproquement quand les loups viennent le dévorer. C’est contre votre Jean-Jacques que je suis le plus en colère. Cet archifou qui aurait pu être quelque chose, s’il s’était laissé conduire par vous, s’avise de faire bande à part, il écrit contre les spectacles, après avoir fait une mauvaise comédie, il écrit contre la France qui le nourrit, il trouve quatre ou cinq douves pourries au tonneau de Diogène ; il se met dedans pour aboyer , il abandonne ses amis, il m’écrit à moi la plus impertinente lettre que jamais fanatique ait griffonnée . Il me mande en propres mots : vous avez corrompu Genève pour prix de l’asile qu’elle vous a donné. Comme si je me souciais d’adoucir les mœurs de Genève, comme si j’avais besoin d’un asile, comme si j’en avais pris un dans cette ville de prédicants sociniens, comme si j’avais quelque obligation à cette ville. Je n’ai point fait de réponse à sa lettre, M. de Chimène a répondu pour moi, et a écrasé son misérable roman .Si Rousseau avait été un homme raisonnable à qui on ne pût reprocher qu’un mauvais livre il n’aurait pas été traité ainsi.

 

                   Venons à Pancrace Colardeau ; c’est un courtisan de Pompignan et de Fréron. Il n’est pas mal de plonger le museau de ces gens là dans le bourbier de leurs maîtres.

 

                   Mon digne philosophe que deviendra la vérité ? que deviendra la philosophie ? Si les sages veulent être fermes, s’ils sont hardis, s’ils sont liés, je me dévoue pour eux. Mais s’ils sont divisés, s’ils abandonnent la cause commune, je ne songe plus qu’à ma charrue, à mes bœufs et à mes moutons ; mais en cultivant la terre, je prierai Dieu que vous l’éclairiez toujours ; et vous me tiendrez lieu du public. Que dites-vous du bonnet carré de Midas Omer ? Je vous embrasse très tendrement.

 

                            V.

                            A Ferney pays de Gex 19 mars 1761

                   Ne m’écrivez plus avec de l’Académie ni à Genève. »

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19/03/2009 | Lien permanent

quel délai on peut avoir pour répondre aux mensonges avérés

... Je suppose que l'éternité n'est pas de trop, le mensonge prend trop peu de rides et vieillit bien, alors opposons lui éternellement une jeune vérité, pas de péremption .

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 Qu'on ne s'y laisse pas prendre, le menteur n'est pas aussi repérable !

 

« A Joseph-Marie Balleidier 1

A Ferney 24 décembre [1759]2

On a signifié par écrit et devant témoins la révocation du prêt .

M. Balleidier est prié de mander quel délai on peut avoir pour répondre aux mensonges avérés, signifiés par les Choudens .

Il faut beaucoup de temps pour obtenir les certificats nécessaires -à Genève- Mme Denis persistera dans sa demande en fin de non recevoir .

Visite d'experts ne doit point être admise quand il est prouvé que le domaine voulu rapportait moins au vendeur que l'argent reçu par lui .

Non seulement Mme Denis prouvera par les baux et par les taxes, que Choudens ne retirait que 200 livres annuellement de ce domaine, mais elle demandera qu'on interroge Mme de Donop à qui les Choudens voulurent vendre pour 5000 livres la portion qu'ils vendirent 6000 à Mme Denis .

Préalablement Mme Denis veut actionner Choudens pour extorsion et vol .

On a retrouvé la soumission des Choudens par laquelle ils s'engageaient à ne demander jamais aucuns arrérages de l'argent demeuré entre les mains de Mme Denis pour payer leurs créanciers, et cependant ils se sont fait payer ces intérêts .

Ils reçurent un reste de paiement à Ferney et ils s'enfuirent sans donner quittance, en présence de Landry et de Fay . Ce Fay est à Paris, il faudra ordre pour les faire interroger tous deux .

M. Balleidier est prié de mander ce qu'il faut dire selon la coutume de Gex, supposé qu'il y ait une coutume . »

1 Joseph Marie Balleidier, né le 23 décembre 1727 à Cruseilles, mort le 13 octobre 1794 à Gex, homme d'affaires de Voltaire, procureur au bailliage de Gex, procureur d'office de la seigneurie de Ferney et syndic de l'Hôtel de Ville de Gex ;voir  : http://fr.wikipedia.org/wiki/Gex

2 L'affaire dont il est question réapparaitra dans la correspondance : lettres du 3 avril 1760 à Bordier, du 25 avril 1760 à François de Bussy, du 7 mai 1760 à François Tronchin .

 

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03/01/2015 | Lien permanent

j'aime la vérité comme un fou

... Mais je me soigne ! Car elle n'est pas toujours belle .

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Auteur anglais -nul n'est parfait- avec lequel j'ai fait mes premiers pas dans l'humour et l'auto-dérision (Trois hommes dans un bateau)

 

 

« A Charles-Jean-François Hénault

A Ferney , 4 novembre 1761

Ah, mon cher et respectable confrère, illustre et exact auteur de ce qu'il faut savoir de l'histoire de France , j'en appelle à votre exactitude . Confrontez les dates . Vous verrez que ma lettre au chancelier d'Olivet était écrite avant la vôtre . Il vous est arrivé la même chose qu'à l'impératrice de toutes les Russies . Elle a envoyé aux libraires Cramer l'argent de deux cents souscriptions , mais après ma lettre . Ainsi je n'ai pu m'en vanter à notre chancelier . Dieu m'est témoin que je ne lui avais pas écrit pour que ma lettre fût publique . C'est lui qui l'a voulu . J'en appelle à son témoignage per deos immortales 1. Laissez faire, tout sera bien réparé .

Mais qu'est devenu un paquet que j'avais envoyé à Mme Du Deffand !2 Un paquet qui devait l'amuser, et vous amuser vous même ; un paquet d'histoire, un Ezour Vedam, une chose unique, et qu'il me fallait me renvoyer . Je vous demande en grâce d'insister qu'on me le renvoie chez M. d'Argental .

Je me trouve entre trois Pierre, Pierre le Grand, le grand Pierre Corneille, et Pierre le Cruel . Je ne sais auquel entendre .

J'ai envie de vous envoyer et de vous soumettre le chapitre de la mort de ce pauvre Alexis , fils de Pierre le Grand . Vous prendrez peut-être alors mon Russe pour Pierre le Cruel . Ce chapitre est embarrassant, car quoique j'aime fort l'impératrice de toutes les Russies, j'aime la vérité comme un fou .

Adieu, monsieur ; mille tendres respects à Mme Du Deffand, comme à vous . »

1 Au nom des dieux immortels .

 

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07/11/2016 | Lien permanent

Il ne tient qu'à vous de m'envoyer un détail exact qui puisse autoriser mon zèle : il est très vif et très sincère, mais

... Serge Tournaire et Aude Buresi, juges, ont pu le dire tour à tour à cette anguille qu'est Nicolas Sarkozy . A  mon avis, ils ne sont pas près d'avoir satisfaction, le prévenu est tout, sauf clair .

 

 

« A Pierre Rousseau etc. 1

Chez monsieur le Comte de Turpin

rue Garancière

à Paris

26è mars 1763 aux Délices 2

J'ai écrit , monsieur, dès que j'ai reçu votre lettre, mais je n'ai pu écrire qu'en général, et vous jugez bien que la requête d'un solitaire des Alpes a très peu d'effet à Paris et à Versailles, surtout quand elle n'est pas assez motivée . J'aurais désiré que vous m'eussiez instruit des prétextes qu'on a pris pour saisir vos effets . Il faut apparemment qu'on vous suppose quelques dettes, ou que vous ayez eu le malheur de transiger avec des personnes qui abusent de votre facilité . Il n'est que trop ordinaire aux gens de lettres de faire de mauvais marchés . En ce cas, ne pourrait-on pas demander des arbitres , et les faire agréer par M. le duc de Bouillon ? Cette voie me paraît la plus raisonnable, la plus courte et la moins dispendieuse . Je ne vois pas , d'ailleurs, qu'on puisse vous empêcher de faire un journal ; c'est un travail que tout le monde peut entreprendre, et s'il y a quelque avantage, c'est pour celui qui réussit le mieux .

Je conçois encore moins comment on a pu saisir les effets de madame votre femme, sans quelque sentence juridique, obtenue en vertu de quelque dette contractée, ou de quelque acte de société . Vous me laissez dans une ignorance totale de ce qu'il était nécessaire de savoir pour vous rendre service . Il ne tient qu'à vous de m'envoyer un détail exact qui puisse autoriser mon zèle : il est très vif et très sincère, mais il a besoin d'être éclairé .

J'ai l'honneur d'être, monsieur, avec tous les sentiments qui vous sont dus, votre très humble et très obéissant serviteur

V. »

2 Sur l'adresse, une main étrangère a barré les indications et les a remplacées par «à Bouillon »

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23/03/2018 | Lien permanent

On pourrait déposer les volumes entre les mains de quelque homme intelligent et fidèle , qui moyennant un profit honnête

... Le problème est bien de trouver cet homme "intelligent et fidèle" qui se contenterait d'un "profit honnête" . L'actualité judiciaire montre que l'honnêteté en affaires, surtout chez les intermédiaires, est denrée rare et l'association Anticor [anticorruption] ne manque pas de grain à moudre .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ArgentaI

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

[vers le 1ermars 1764] 1

Mes anges, protecteurs des deux Pierre, sont priés humblement de considérer,

Que le roi ayant souscrit pour deux cents exemplaires, M. de Laborde ayant favorisé cette entreprise avec toute la générosité possible, et ayant payé d'avance la moitié de la souscription de Sa Majesté, il demande aujourd'hui la délivrance de ces deux cents exemplaires, après nous avoir flatté que le roi n'en prendrait qu'une douzaine .

Il est certain que le roi n'a que faire de ces deux mille quatre cents volumes, qui composent les deux cents exemplaires souscrits par Sa Majesté .

Si le roi en prend 50 c'est beaucoup . Ne pourrait-on pas engager le roi ou ses ayants cause à faire présent de ces 150 exemplaires restants à Pierre Corneille du Pont-Marie 2? Cela pourrait composer une somme de trois cents louis d'or pour ledit Pierre ; mais pour lui procurer cet avantage il ne faudrait pas baisser le prix . On pourrait déposer les volumes entre les mains de quelque homme intelligent et fidèle , qui moyennant un profit honnête, se chargerait de la vente . On pourrait même du produit faire une petite rente sur la tête de M. Pierre et de sa femme . Je soumets ma proposition aux lumières et aux bontés de mes anges, et je leur demande bien pardon de ne leur envoyer aujourd'hui que trois mémoires.

N.B. – Les exemplaires sont en chemin . »

1 Manuscrit original intitulé par Wagnière « Mémoire pour Pierre Corneille du Pont-Marie, au sujet de Pierre Corneille auteur de Cinna » . Le 14 mars 1764 (voir lettre à Damilaville ) , V* exprime sa satisfaction que sa suggestion soit approuvée par les d'Argental : d'où la date proposée ici, cette lettre ayant été toujours datée de décembre 1764 dans les éditions .Voir page 537 : https://books.google.fr/books?id=rZ5fAAAAcAAJ&pg=PA537&lpg=PA537&dq=pierre+corneille+du+pont-marie&source=bl&ots=UHVaAC_jkF&sig=ACfU3U13rUJQEbjgK3SOq8ocPx6xzbYOsA&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwiN1sCE8KHhAhUyA2MBHW7cCXgQ6AEwDHoECAgQAQ#v=onepage&q=pierre%20corneille%20du%20pont-marie&f=false

2 Le père de Marie-Françoise ; à propos de cette famille, voir : https://www.persee.fr/doc/annor_0003-4134_1984_num_34_2_5554#annor_0003-4134_1984_num_34_2_T1_0151_0000

 

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27/03/2019 | Lien permanent

Les langages, à mon gré, sont comme les gouvernements, les plus parfaits sont ceux où il y a le moins d'arbitraire

http://www.deezer.com/listen-5113357



 

 

« A Pierre-Jean-Jacques-Guillaume Guyot


7è auguste 1767, à Ferney


Il est très certain, Monsieur, que la France manque d'un bon Vocabulaire [Guyot fut un des auteurs du Grand Vocabulaire français, 1767-1774]; l'Espagne [Diccionario de la lengua castellana … compuesto por la real Academia española, 1726-1739] et l'Italie [Vocabulario degli accademici della Crusca, 1612] en ont, tous les mots y sont marqués avec leur étymologies, leurs significations propres et figurées, avec des exemples tirés des meilleurs auteurs dans les différents styles . Il faut remarquer surtout qu'en espagnol et en italien, on écrit comme on parle. Tout cela est à désirer dans nos dictionnaires. Notre écriture est perpétuellement en contradiction avec notre prononciation. Il n'y a point de raison, pour laquelle je croiois, j'octroiois, doivent s'écrire ainsi, quand on prononce je croiais, j'octroiais [cette graphie en ai ne sera adoptée par l'Académie qu'en 1835. V* pense qu'on reconnaît ses publications à cette graphie]. Le second oi ne doit pas être plus privilégié que le premier. Du temps de Corneille on prononçait encore je connois, et même on retranchait l's. Vous voyez dans Héraclius :


Qu'il entre ; à quel dessein vient-il parler à moi,

Lui que je ne vois point, qu'à peine je connoi ?

[on prononçait wé]



On ne souffrirait point aujourd'hui une pareille rime puisque l'on prononce je connais.



Notre langue est très irrégulière. Les langages, à mon gré, sont comme les gouvernements, les plus parfaits sont ceux où il y a le moins d'arbitraire. Il est bien ridicule que d'augustus on ait fait aoust, de pavonem, paon, de Cadomum, Caen, de gustus, goût . Les lettres retranchées dans la prononciation prouvent que nous parlions très durement ; ces mêmes lettres que l'on écrit encore sont nos anciens habits de sauvages.



Que de termes éloignés de leur origine ! Pédant qui signifie instructeur de la jeunesse est devenu une injure . De fatuus qui signifiait prophète on a fait un fat [en latin, fatuus avec un a long est, selon Varron, un mot du vocabulaire religieux archaïque qui désigne le Devin ; mais fatuus avec un a bref signifie ou fade, ou extravagant et en substantif désigne le fou, le bouffon]. Idiot qui signifiait solitaire ne signifie plus qu'un sot [en grec ce mot était employé au sens de « simple, ignorant, vulgaire » (à partir du sens de « simple particulier ») ; en latin ça désigne « qui n'est pas connaisseur, profane, ignorant »].



Nous avons des architraves et point de trave, des archivoltes et point de volte en architecture, des soucoupes après avoir banni les coupes, on est impotent et on n'est point potent, il y a des gens implacables et pas un de placable. On ne finirait pas si on voulait exposer tous nos besoins. Cependant notre langue se parle à Vienne, à Berlin, à Stokolm, à Copenhague, à Moscou. Elle est la langue de l'Europe, mais c'est grâce à nos bons livres et à la régularité de notre idiome. Nos excellents artistes ont fait prendre notre pierre pour de l'albâtre.



J'attends, Monsieur, votre Vocabulaire pour fixer mes idées et je vous remercie par avance de votre politesse et de vos instructions. »

 

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07/08/2010 | Lien permanent

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