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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Vous sentez, monsieur, combien je dois être flatté de l’honneur de vous avoir pour confrère . Mais entre nous (permettez

... Extrait de conversation surprise dès ce jour entre candidats députés et députés en place , entre postulants de toutes tendances , surtout (sauf erreur ! ) chez la gauche bâtarde et la droite extrême prêtes à toutes les compromissions .

https://www.linternaute.com/?gbmlus=07b4a7d1c939ab997cf79...

 

 

 

« A Antoine-Jean-Gabriel Le Bault

À Ferney, 6 février 1767

Vraiment, monsieur, quand vous voudrez, vous nous ferez grand plaisir de combattre nos abominables neiges avec quarante bouteilles d’excellent vin. Il n’y aurait qu’à les faire adresser par la veuve Rameau, à Nyon, où je les enverrais chercher. Je suis plus las de ma Sibérie que je ne le suis de la guerre de Genève, L’hiver y est pire qu’à Pétersbourg, de l’aveu de tous les Russes qui sont venus chez nous. C’est acheter trop cher quatre mois d’un été agréable. Le plaisir du plus bel aspect du monde n’est pour moi qu’une privation quand je perds la vue ; en un mot, je voudrais venir boire votre vin à Dijon.

Ne croyez pas au reste que notre guerre genevoise soit une pure plaisanterie. Nous n’avons plus de commerce ni avec la Savoie, ni avec Lyon, ni avec la Suisse : il faut tout faire venir avec des frais immenses. Plus notre maison est grosse, plus nous souffrons.

Vous sentez, monsieur, combien je dois être flatté de l’honneur de vous avoir pour confrère 1. Mais entre nous (permettez moi de vous le dire sous le secret) nous avons un étrange associé 2. C’est un tour sanglant qu’on a fait à l’Académie, je ne crois pas qu’elle doive le souffrir. Il est honteux surtout que la nomination d’un homme de votre considération soit l’époque d’une pareille insulte. Un geôlier honoraire n’est guère fait pour être académicien honoraire. Toutes les bienséances sont trop blessées 3.

Je prends la liberté de vous parler avec une confiance que m’inspire mon respectueux attachement pour vous. Vous ne me décèlerez pas.

Mme Denis vous présente ses obéissances ainsi qu’à Mme Le Bault.

J’ai l’honneur d’être avec bien du respect, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Voltaire. »

1 Le Bault a été élu à l'Académie de Dijon le 16 janvier 1767 .

2 Il sera de nouveau question de cet « étrange associé » dans la lettre suivante, sans que l'allusion puisse être éclaircie de façon sûre .

3 Il s’agit de l’Académie de Dijon. Voltaire en avait été reçu membre le 3 avril 1761. Nous n’aurons pas l’indiscrétion de rechercher à qui peut s’appliquer l’épithète de geôlier honoraire. (Note du premier éditeur. Mandat-Grancey) — La lettre du 6 février 1767 à de Ruffey a trait sans doute au même sujet : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire...

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13/06/2022 | Lien permanent

il y a une différence immense entre les sentiments des sociétés de Paris et le reste de l’Europe !

... Particulièrement en ce moment, et ce n'est pas flatteur pour nous !

 

 

 

 A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

22 Juillet 1767.

Ah ! mon respectable ami, mon cher ange, qu’il y a une différence immense entre les sentiments des sociétés de Paris et le reste de l’Europe ! Il y a bien des espèces d’hommes différentes ; et quiconque a le malheur d’être un homme public est obligé de répondre à tous.

Vous me mandez, dans votre lettre du 15 de juillet, que La Beaumelle est oublié, tandis qu’il y a sept éditions de ses calomnies dans les pays étrangers, et que tous les sots, dont le monde est plein, prennent ses impostures pour des vérités. Il est triste en effet que La Beaumelle soit le beau-frère de Lavaysse . Sa sœur a fait cet indigne mariage malgré son père. Mais dois-je me laisser déshonorer par un scélérat dans toute l’Europe, parce que ce malheureux est le beau-frère d’un homme à qui j’ai rendu service ? N’est-ce pas au contraire à Lavaysse de forcer ce malheureux à rentrer dans son devoir, s’il est possible ? La Beaumelle a fait commencer secrètement une nouvelle édition de ses infamies dans Avignon. Le commandant du pays de Foix 1 est chargé, par M. le comte de Saint-Florentin, de le menacer des plus grands châtiments , mais cela ne le contiendra point ; c’est un homme de la trempe des d’Éon et des Vergy ; il niera tout, et il en sera quitte pour désavouer l’édition ; je n’ai de ressource que dans une justification nécessaire ; je n’envoie mon mémoire qu’aux personnes principales de l’Europe, dont les noms sont intéressés dans les calomnies que La Beaumelle a prodiguées . Je remplis un devoir indispensable.

A l’égard des Scythes, je suis indigné de la lenteur du libraire de Lyon. Il me mande qu’enfin l’édition sera prête cette semaine ; mais il m’a tant trompé que je ne peux plus me fier à lui. Un libraire d’une autre ville veut en faire encore une nouvelle édition. On n’imprime pas, mais on joue les Illinois. Nous avons joué ici l’Orphelin de la Chine ; mais, Dieu merci, nous ne l’avons pas donné tel qu’on me fait l’affront de le représenter à Paris. Je ne sais si de Belloy a raison de se plaindre 2; mais, pour moi, je me plains très fort d’être défiguré sur le théâtre, et par Duchesne. Je me flatte que vos bontés pour moi ne se démentiront pas. Vous m’avouerez qu’il est désagréable que les comédiens, qui m’ont quelques obligations, prennent la licence de jouer mes pièces autrement que je ne les ai faites. Quel est le peintre qui souffrirait qu’on mutilât ses tableaux ?

Ayez soin de votre santé, mon cher ange ; portez-vous mieux que moi, et je serai consolé d’avoir une santé détestable. »

1 Effectivement Saint-Florentin a demandé au marquis de Gudanes, commandant de Foix, d'' « avertir » La Beaumelle « de se tenir tranquille et de laisser en repos M. de Voltaire » . Mais il n’était nullement question dans sa lettre des « plus grands châtiments » . Dans sa réponse à Gudanes, La Beaumelle nie toute participation à ces lettres anonymes . Il fait de même auprès de Saint-Florentin.

Pour Gudanes, voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2teaux_de_Ch%C3%A2teau-Verdun_et_de_Gudanes#cite_note-20

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18/02/2023 | Lien permanent

On disait qu’étant libraire il ferait beaucoup d’impression à la cour

 

 

 

« A Sébastien Dupont

 

A Ferney, 30 mars 1770

 

             Mon cher ami, vous avez été bien étonné, peut-être que je n’aie point répondu à votre dernière lettre, et que je ne vous aie point envoyé ce que vous m’avez demandé. Mais figurez-vous que mon libraire [Gabriel Cramer] est sous les armes depuis environ six semaines [violences du 16 février contre les Natifs : cf. lettre du 18 février à Choiseul et du 11 mars à Hennin]; que toute la ville monte la garde ; qu’on a assassiné des vieillards de mon âge, des femmes grosses ; que presque toutes les boutiques sont fermées dans cette anarchie horrible ; que plusieurs habitants sont sortis de la ville, qu’on ne sait où les loger, et que tout est en combustion. Le Cramer que vous avez vu à Colmar [Philibert Cramer, « conseiller d’Etat » à Genève] chez moi est actuellement conseiller à grande perruque. Sa république l’a envoyé en qualité d’ambassadeur à la cour de France pour justifier les petits procédés de Genève. On disait qu’étant libraire il ferait beaucoup d’impression à la cour ; cependant il n’en a fait aucune ; il n’a pas même vu les ministres [à son retour à Genève, on le surnomma le « renvoyé » Cramer.].

 

             Je ne sais si je vous ai fait mon compliment sur la cure de monsieur votre fils ; je m’offre de l’aider dans ses fonctions quand il voudra, car il faut que vous appreniez que je suis capucin.

 

             J’avais rendu, je ne sais comment, de petits services à des capucins, mes voisins, auprès de M. le duc de Choiseul [par l’intermédiaire de la duchesse de Choiseul, V* avait fait parvenir un de leurs placets le 20 novembre 1769 et obtenu 600 livres pour eux]; notre révérend père général m’a sur-le-champ envoyé de Rome de belles lettres patentes de capucin [V* était ainsi père temporel des capucins de Gex]. Il ne me manque que la vertu du cordon de saint François. Le pape m’en a fait des compliments par le cardinal de Bernis [Bernis dit avoir rapporté au pape une plaisanterie de V* et écrit le 28 février : « S. S. écouta cette plaisanterie avec plaisir, elle me parla avec éloge de la supériorité de vos talents ; si vous finissez par être un bon capucin, le pape osera vous aimer autant qu’il vous estime. »]; mais M. le contrôleur général [l’abbé Terray, pour trouver de l’argent suspendit le paiement des rescriptions et rogna les pensions et rentes viagères.] n’a pas été si poli que le pape ; il m’a pris tout le bien que j’avais à Paris, dès qu’il a su que j’avais renoncé à ceux de ce monde. Je me suis trouvé englobé dans la saisie des rescriptions, sur quoi je me suis récrié, en mettant cette déconvenue au pied de mon crucifix :

 

Dès que l’abbé Terré

A su ma capucinerie,

De mes biens il m’a délivré.

Que servent-ils dans l’autre vie ?

J’aime fort cet arrangement :

Il est leste et plein de prudence.

Plût à Dieu qu’il en fît autant

A tous les moines de la France !

 

             Je vous embrasse de tout mon cœur, vous et votre famille.

 

             Frère François V., capucin indigne. »

 

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28/03/2010 | Lien permanent

Il est donc dans la bouteille

http://www.dailymotion.com/video/x7ax7_chat-dans-bouteille

Bien sûr, il faut un peu d'entrainement !

Il faut commencer jeune !

http://www.wat.tv/video/chaton-qui-pratique-stretching-28q7j_2ey61_.html

Mais ça vaut la peine ...

Maintenant à vous ...

 

 

PUZZLE EN BOIS POUR BOUTEILLE II.jpg

 A offrir à un ami, histoire de vérifier s'il est encore capable de raisonner sainement, sinon, il vient de boire son dernier verre de la journée !

 http://www.deezer.com/listen-2052664

A votre santé !

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental


1er auguste [1763]


Ô anges de lumière, voici ce que M. de Thibouville me mande sous votre cachet :


Mais , j'aurai bien autre chose encore . oui, oui, oui, j'en sais plus que je n'en dis, peut-être plus que vous même qui me tenez rigueur, entendez-vous ? Mon Dieu que cela sera beau !



Il en sait plus qu'il n'en dit ; donc il a lu mes roués [= Octave ou Le Triumvirat]. Il en sait plus que moi, donc il sait votre sentiment sur mes roués, que je ne sais pas encore. Il est donc dans la bouteille. Vous lui avez donc fait jurer de garder le secret. Ce secret est essentiel. C'est en cela que consiste tout l'agrément de la chose. Figurez vous quel plaisir de donner tout cela sous le nom d'un adolescent sortant du séminaire . Comme on favorisera ce jeune homme qui s'appelle, je crois, Marcel [+]! Voilà la vraie tragédie, dira Fréron . Les soldats de Corbulon [= les partisans de Crébillon, allusion aux vers de Rhadamiste et Zénobie de Crébillon : « De quel front osez-vous, soldats de Corbulon / M'apporter dans ma cour les ordres de Néron ? »] diront : ce jeune homme pourra un jour approcher du grand Crébillon ; et mes anges de rire. Si on siffle, mes anges ne feront semblant de rien quoi qu'il arrive. C'est un amusement sûr pour eux ; et c'est tout cela que je prétendais.



Mais me voici à présent bien loin de la poésie et de cette niche que vous ferez au public. Mon procès me tourmente [++]. Je prévois une perte de temps effroyable. Si je peux parvenir à raccrocher cette affaire au croc du Conseil dont on l'a décrochée, je suis trop heureux. Elle y pendra longtemps, et j'aurai toujours le plaisir de me moquer d'un homme d'Église, ingrat et chicaneur. Il y a un siècle que je n'ai reçu de nouvelles de mon frère Damilaville. Je ne sais comment le monde est fait.



Respect et tendresse. »





+Quelques jours avant, V* écrit à Choiseul-Praslin : « il faut mettre la conspiration sous le nom d'un jeune novice jésuite, qui, grâce à la bonté du parlement , est rentré dans le monde, et qui … attend son dîner du succès de son ouvrage. Je m'imagine que les girouettes françaises tournent actuellement du côté des jésuites ; on commence à les plaindre … on aimera passionnément un pauvre petit diable jésuite, qui donnera l'espérance d'être un jour un Lemierre, un Colardeau, un Dorat. Je persisterai toujours à croire qu'il faut donner un nom à ce jeune jésuite … Si on ne nomme personne on me nommera, et tout sera perdu. »

La « conspiration » est le code utilisé pour parler de la pièce et ce qui la concerne.


++ Le curé Pierre Gros de Ferney voulait faire payer la dîme à V*, propriétaire de la terre de Ferney, et avait porté l'affaire devant le tribunal de Dijon, à la suite de la condamnation du précédent propriétaire par défaut devant le Conseil du roi.

V* voulait « en vertu du traité d'Arau » la faire porter à nouveau devant le Conseil du roi, où le curé avait toutes les chances de perdre.

V* demandait à cet effet l'appui du duc de Choiseul-Praslin, ministre des Affaires étrangères, directement par lettre (6 juin) et indirectement par les d'Argental.

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01/08/2010 | Lien permanent

4 heures du mat'

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental

 

Votre amie |Emilie du Chatelet] a d’abord été bien étonnée quand elle a appris qu’un ouvrage aussi innocent que Le Mondain avait servi de prétexte à quelques uns de mes ennemis, mais son étonnement s’est tourné dans la plus grande confusion, et dans l’horreur la plus vive à la nouvelle qu’on voulait me persécuter sur ce misérable prétexte. Sa juste douleur l’a emporté sur la résolution de passer avec moi sa vie. Elle n’a pu souffrir que je restasse plus longtemps dans un pays où je suis traité si inhumainement. Nous venons de partir de Cirey, nous sommes à quatre heures du matin à Vassy où je dois prendre des chevaux de poste. Mais mon véritable, mon tendre et respectable ami, quand je vois arriver le moment où il faut se séparer pour jamais de quelqu’un qui a fait tout pour moi, qui a quitté pour moi Paris, tous ses amis , et tous les agréments de sa vie, quelqu’un que j’adore et que je dois adorer, vous sentez bien ce que j’éprouve. L’état est horrible. Je partirais avec une joie  inexprimable, j’irais voir le prince de Prusse qui m’écrit souvent pour me prier d’aller à sa cour, je mettrais entre l’envie et moi un assez grand espace pour n’en être plus troublé, je vivrais dans les pays étrangers en Français qui respectera toujours son pays, je serais libre et je n’abuserais point de ma liberté, je serais le plus heureux homme du monde. Mais votre amie est devant moi qui fond en larmes. Mon cœur est percé. Faudra-t-il la laisser retourner seule dans un château qu’elle n’a bâti que pour moi, et me priver de ma vie parce que j’ai des ennemis à Paris ? Je suspends dans mon désespoir mes résolutions, j’attendrai encore que vous m’ayez instruit de la mesure ou de l’excès de fureur à quoi on peut se porter contre moi.

C’est bien assurément réunir l’absurdité de l’âge d’or et la barbarie du siècle de fer que de me menacer pour un tel ouvrage. Il faut donc qu’on l’ait falsifié. Enfin je ne sais que croire. Tout ce que je sais, c’est que je voudrais être ignoré de toute la terre et n’être connu que de vous et de votre amie. Elle vous mande aujourd’hui de ne point satisfaire la personne qui exige cet argent et à qui elle nous avait priés de le faire tenir. En contremandant ainsi ses premières volontés elle était déterminée à neuf heures du soir à me laisser partir. Mais moi je vous dis à présent à quatre heures du matin de concert avec elle : faites tout ce que vous croyez convenable. Si vous jugez l’orage trop fort, mandez-le moi à l’adresse ordinaire et j’achèverai ma route. Si vous le croyez calmé véritablement, je resterai. Mais quelle vie affreuse ! Etre éternellement bourrelé par la crainte de perdre sans forme de procès sa liberté sur le moindre rapport ! J’aimerais mieux la mort. Enfin je m’en rapporte à vous. Voyez ce que je dois faire. Je suis épuisé de lassitude, accablé de chagrin et de maladie. Adieu, je vous embrasse mille fois, vous et votre aimable frère.

Pourquoi Mlle Quinault ne m’aime–t-elle pas assez pour daigner recevoir un colifichet de ma part ? [Il avait demandé à Moussinot de lui faire livrer « un joli secrétaire »]

Voltaire

Ce dimanche 9 décembre 1736 à quatre heures du matin »

 

Pour Le Mondain voir : http://www.bacfrancais.com/bac_francais/215-voltaire-le-mondain.php

 

Une fois de plus notre héros est jeté sur les routes avec la colère gouvernementale sur la tête . Notre galopin ex-amoureux de Pimpette est aujourd’hui épris de la divine Emilie « quelqu’un que j’adore » et c’est vrai , ça lui fend le cœur. Il a 42 ans, juste la moitié de sa vie, et en a justement ras le bol de risquer de perdre de sa liberté : il est dans le collimateur du pouvoir comme on peut l’être encore dans bon nombre de pays actuels.

Ce qui m’épate quand même c’est sa faculté de ne pas perdre le sens pratique (fils de notaire, ça laisse des traces !) après avoir exprimé sa douleur être capable de parler argent , et tout « épuisé de lassitude » s’inquiète du devenir de ses cadeaux. Il aime aimer et être aimé, c’est évident et notre sautillant auteur philosophe na pas fini de nous séduire et nous agacer. Bientôt la suite de ses aventures…

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qui sole mange, sole lui vient

... Qui a besoin d'un.e premier.e ministre, premier.e ministre lui vient !

 

 

« A Jean-François-René Tabareau, directeur des postes à Lyon

Mardi au soir 20è janvier 1767 à Ferney

Nous vous avons, monsieur, l'obligation d'avoir satisfait parfaitement le goût d'un des sept péchés mortels . Notre gourmandise vous remercie très sensiblement de vos soles qui étaient aussi fraiches que si nous les avions mangées à Marseille . Je suis honteux des offres que vous voulez bien me faire . Plus j'en ai de reconnaissance, plus je crains d'en abuser, mais si vous avez quelque commissionnaire à qui vous vouliez bien me recommander nous profiterions de vos bontés Mme Denis et moi, jusqu'au point de vous envoyer quelquefois une petite liste de nos nécessités . Nous aurions en cela le plaisir d'obéir aux ordres du roi qui a défendu tout commerce entre la France et Genève . Entourés que nous sommes de neiges et de soldats, nous ignorons dans notre retraite si les voitures publiques de Lyon vont à Genève ; en cas qu'on ne pût se servir de cette voie,nous vous supplierions de permettre que votre courrier se chargeât jusqu'à Meyrin de quelques petits paquets, supposé qu'il fasse le voyage en voiture .

J'en étais là, monsieur, lorsque l'on nous apporte de votre part une alose et deux soles ; les chartreux de Ripaille 1 ne font pas si bonne chère que nous, et c'est beaucoup dire . Le proverbe ne savait pas encore que qui sole mange, sole lui vient .

Si Mme Denis et moi nous étions bien impudents, nous vous supplierions d'engager votre pourvoyeur à nous envoyer cet hiver par notre courrier deux pièces de volaille deux fois par semaine ; cela ne le chargerait pas beaucoup, nous paierions exactement le pourvoyeur, et le courrier ne sera pas oublié, mais en vérité nous n'osons pas avoir tant d'indiscrétion .

Je suis très fâché que votre parent qui était fait pour avoir de la considération s'attire des réponses mortifiantes qui courent le monde . S'il venait demander une grâce à M. le duc de Choiseul, la réponse vous venez trop tard est bonne ; mais elle ne vaut rien s'il ne s'agit que d'une visite du Jour de l'An . M. le duc de Choiseul est trop grand pour s’apercevoir si on lui fait sa cour de bonne heure ou trop tard .

Je ne savais pas que M. Jean-Georges, évêque 2 […] . L'église abhorre le sang, à ce qu'elle dit, l'évêque Jean-Georges n'a jamais fait périr personne que d'ennui . Je n'ai jamais entendu dire que j'eusse écrit une lettre à M. le duc de Choiseul sur l'évêque Jean-Georges . On ne tarit point sur les contes .

Avez-vous dans votre arrière bibliothèque la tragédie comique de Saul et de David ? Si vous ne l'avez pas je vous la déterrerai .

Comptez , monsieur, sur mon attachement inviolable.

V. »

1 A Ripaille, au bord du Léman, à l'est de Thonon, est installée la commanderie de l’ordre de St Maurice, fondée par Amédée VIII, duc de Savoie ; la vie qu'on y menait a donné lieu à l’expression faire Ripaille . On y visite ses remarquables cuisines .

2 Six ou sept mots sont emportés par la pliure du papier . Évidemment , il s'agit de Jean-Georges Le Franc de Pompignan, évêque du Puy.

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15/05/2022 | Lien permanent

Voilà comme sont faits tous ces animaux-là. Ils croient régenter un collège, et c’est au collège qu’il faut les renvoyer

.... Que tous les partis qui se vantaient de donner en quelques heures de réflexion des noms de ministrables se le tiennent ici pour dit : excréments ! 

Pour info : https://charliehebdo.fr/2024/07/politique/entretien-la-censure-va-devenir-une-epee-de-damocles-au-moindre-texte-chaud/

 

 

 

« A Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand

4è janvier 1769 1

Eh bien ! madame, j’écris très souvent quand j’ai des thèmes. Faites-vous lire la lettre de M. le marquis de Bélestat 2, et jugez après cela si c’est avec justice qu’on m’a imputé son ouvrage. Jugez si j’ai été fidèle à l’amitié, si j’ai été offensé du mal qu’on disait de M. le président Hénault, et si je n’ai pas pris son parti beaucoup plus que je n’ai jamais pris le mien. Voilà la vérité enfin reconnue, et il faut que le président en soit instruit : j’ai cru sentir dans ses lettres qu’il me soupçonnait, je n’en ai eu que plus de zèle. Oui, madame, je suis vif, et je le serai jusqu’au dernier moment de ma vie, quand je croirai servir l’amitié et la raison.

La Bletterie est encore plus coupable que le marquis de Bélestat ; puisqu’il veut être de l’Académie, il ne devait pas outrager un homme de quatre-vingt-deux ans qui fait tant d’honneur à notre corps. Rougissez d’avoir pris le parti de ce pédant orgueilleux. Que votre petite mère ou grand’mère se repente de l’avoir protégé ! Voilà comme sont faits tous ces animaux-là. Ils croient régenter un collège, et c’est au collège qu’il faut les renvoyer . Le duc de Choiseul m’a écrit trois pages de sa main pour m’assurer l’innocence de ce janséniste. Je me repens bien d’avoir répondu gaiement, et d’avoir tourné le tout en plaisanterie. J’aurais dû lui faire connaître un méchant homme, qui abuse de sa protection pour insulter tout le monde. Comptez que La Bletterie ne vaut pas mieux que Jean-Jacques : tout cela est l’excrément du siècle. Le royaume du bon goût et de l’esprit est tombé en quenouille . Je ne prétends dire une fadeur ni à vous, ni à Mme la duchesse de Choiseul. Ce n’était pas en Sorbonne que le roi de Danemark devait aller : il devait venir souper chez vous sans façon.

Je suis un de ces étrangers qui regrettent de n’avoir pas cet honneur , mais je suis bien mieux encore, je suis un vieux serviteur attaché à votre char depuis quarante ans, vous respectant et vous aimant de toutes mes forces. »

1 Correspondance complète de Mme du Déffant avec la duchesse de Choiseul, l’abbé Barthélémy, et M. Craufurt, publiée par M. le marquis de Sainte-Aulaire, 1859 et 1877 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2063902/f587.item

2 On a dit que cette lettre était conservée et on en a donné le texte ; voir lettre du 31 octobre 1768 à Hénault : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/05/10/en-fait-d-ouvrages-de-gout-il-ne-faut-jamais-repondre-en-fai-6497711.html

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13/07/2024 | Lien permanent

rien ne presse, mais vous ferez ce qui vous paraîtra convenable

... Paroles d'Alexis Kohler au président avant l'intervention de 20H 15 ce soir ?

Mais qui sont ces béquilles présidentielles : https://fr.wikipedia.org/wiki/Cabinet_du_pr%C3%A9sident_d...

 

 

 

« A Marie-Louise Denis chez

M. d'Hornoy Conseiller au

Parlement rue d'Anjou au

Marais

à Paris

25 mai 1768 1

Il serait bien étrange, ma chère nièce, que vous n'eussiez point reçu ma lettre qui est partie le 11, et qui a dû arriver le 17 au plus tard 2 . Elle était adressée à Mme Denis, rue d'Anjou au Marais , à Paris . La lettre et l'adresse étaient de la main de Bigex . Outre cette lettre, je vous ai écrit depuis un petit billet 3 par lequel je vous priais de m'envoyer une déclaration de Mme Fay , qui certifiât qu'il manquait 81 mesures à l'avoine dont on me demande le paiement ; c'est un nommé Delvert, de Saint-Claude, qui demande cet argent d'une denrée qu'il na pas fournie .

Wagnière vient de se coucher pour un grand mal de tête, l'ami Bigex continuera . Il vous dira que la chose très décente que j'ai faite, laquelle fait rire ceux qui rient de tout, était absolument nécessaire pour faire taire deux dogues mitrés 4 qui aboyaient dans ce pays-ci . C'est ce que vous pouvez dire au Mécène de Versailles 5 en cas que vous puissiez le voir . Mais le danger où est la reine pourra fort bien vous empêcher d'aller à Versailles ; rien ne presse, mais vous ferez ce qui vous paraîtra convenable .

Panckoucke se moque du monde . On lui a déjà lavé la tête dans le petit prologue de La Guerre de Genève, on la lui relavera encore . Il se conduit ridiculement . J'attendrai que le gros Turc soit à Paris et que votre gros neveu ait quitté la robe à manteau pour la robe noire 6, on sera toujours assez à temps de signer le compte de Laleu .

Vous ne commencerez pas probablement sitôt vos arrangements pour votre maison de votre rue Bergère, et moi pendant ce temps-là je ferai vos foins et votre moisson .

Le président De Brosses jure toujours qu'il vous a envoyé une explication de son infâme contrat ; plus il jure, moins je le crois . Je vous demande en grâce de m'envoyer un petit mot, un petit billet déparé qui contiendra deux ou trois lignes par lesquelles vous certifierez que jamais vous n'avez reçu de la part de M. De Brosses un seul mot qui regardât le contrat qu'il a fait avec moi . Je finis par vous dire, ma chère nièce, que si vous n'avez pas reçu mes deux dernières lettres, elles seront probablement restées au grand bureau, parce que le nom de la maison où vous demeurez n’était pas sur l'adresse, et que peut-être le facteur ne se sera pas assez bien informé .

M. Dupuits attend de jour en jou[r M.] Borcet qui ne vient point et qui est attendu ici depuis un mois . J'embrasse sa petite femme, comptez que je vous aime autant que je vous ai jamais aimée. »

1 Le premier paragraphe de la main de Wagnière, le reste,ainsi que la date de celle de Bigex . Le papier est endommagé en quelques points d'où les restitutions .

4 Les évêques d'Annecy et de Saint-Claude .

5 Choiseul.

6 On se souvient que Mignot est à la fois abbé (robe à manteau) et avocat (robe noire).

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16/01/2024 | Lien permanent

Quoi vous avez trois beaux-frères prêtres et tous trois honnêtes gens ! Vous êtes un homme unique

... La fin du XIXè siècle et la première moitié du XXè ont été de grands pourvoyeurs de curés et bonnes-soeurs, et ma famille en a compté quelques uns, honnêtes gens s'il en fût . Tout ça pour qu'en quatre générations la religion perde son rôle de guide faute d'avoir des représentants respectables . En restera-t-il encore assez ?

 3 pretres.jpg

 Sur les trois , l'un ne l'est plus officiellement (célibataire )

 

« A Jacques-Abram-Elie-Daniel Clavel de Brenles

[vers le 20 janvier 1759]1

assesseur baillival

à Lausanne

agréable colère,

Digne ressentiment à votre ami bien doux .2

Je suis enchanté mon cher ami de savoir que tous vos beaux-frères sont dignes de l’être . Quoi vous avez trois beaux-frères prêtres et tous trois honnêtes gens ! Vous êtes un homme unique . Le prêtre qui m'avait dit que le catéchiste de Vevay ne savait pas son catéchisme, est tombé là dans une grande erreur, mais il n'est pas coupable de malice . Errare humanum est perseverare diabolicum aut sacerdotale 3. On m'a mandé aussi qu'il y avait une cabale sacerdotale contre notre mai Polier, et qu'on avait pris pour le mortifier la main de l'auteur du libelle . Il paraît qu'à Lausanne l'oisiveté est un peu la mère du vice . Je ne parle pas des laïques ; les gens du monde sont honnêtes gens . Nota bene que parmi eux je ne compte point les libraires .

Oui, les Anglais sont des bavards . Leurs livres sont trop longs, Bollingbroke, Shaftersbury, auraient éclairé le genre humain s'ils n'avaient pas noyé la vérité dans des livres qui lassent la patience des gens les mieux intentionnés . Cependant, il y a beaucoup de profit à faire avec eux .

Après tout, mon cher ami, ils ne nous disent que ce que nous savons, et encore n'osent-ils pas écrire aussi librement que nous parlons vous et moi quand j'ai le bonheur de jouir de votre entretien . Je vous regrette beaucoup cet hiver . Je suis homme à venir faire un tour à Lausanne pour vous embrasser . Mille tendres respects à votre she philosopher 4.

V. »

1 Il semblerait que cette lettre soit une réponse à celle de Clavel de Brenles après qu'il ait répondu à le lettre du 9 janvier de V*.

2 D'après le Cid, I, viii, de Corneille .

3 Se tromper est humain, persévérer dans l'erreur est diabolique ou digne d'un prêtre .

4 Philosophe en jupon .

 

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12/02/2014 | Lien permanent

Envoyez-moi je vous prie la lettre du descendant du chien de Diogène

... ,  ce bien nommé Jean-Jacques Rousseau , dit Voltaire .

Et bazardez ces écoutes téléphoniques  dit ce roquet de Paul Bismuth, alias Nicolas Sarkozy alias la Purge . http://lci.tf1.fr/france/faits-divers/info-lci-affaire-de...

 

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« Au professeur Théodore Tronchin

Je vous prie de demander ce que Tronchin voudrait d'argent pour faire le voyage .

Ces paroles sont tirées de la lettre de Luc du 28 avril 1 de Landshutt en Silésie . Elles ressemblent moins à saint Luc qu'à saint Matthieu, commis des fermes avant d'être apôtre . Je crois mon cher grand homme que vous m'approuverez quand je laverai la tête à Luc pour sa belle question . Elle est aussi digne de lui qu'indigne de vous .

Envoyez-moi je vous prie la lettre du descendant du chien de Diogène 2. Vous voilà entre un tigre et un dogue . Nous sommes ici vos brebis .

V.

18 mai [1759] »

1 Frédéric envisageait de faire venir le docteur Tronchin pour soigner son frère Ferdinand ; voir notes de la lettre à Frédéric du 1er avril 1759 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/05/26/ce-voltaire-est-admirable-de-penser-a-moi-et-d-alimenter-par-5377599.html

2  Cet épithète désigne Jean-Jacques Rousseau ; la lettre en question avait été envoyée par Rousseau à Tronchin le 28 avril 1759 . Il y écrivait notamment : « Je suis l'ami du genre humain et l'on trouve partout des hommes . » Tronchin envoya effectivement la lettre à V* qui y griffonna : « L’extrême insolence est une extrême sottise, et rien n'est plus sot à un Jean-Jacques que de dire le genre humain et moi . » Voir page 144 : http://books.google.fr/books?id=X1ZixOxS2M8C&pg=PA144&lpg=PA144&dq=j+j+rousseau+lettre+du+28+avril+1759+%C3%A0+tronchin&source=bl&ots=VAKqTbMr9C&sig=3kXcrHjw_wTGUcciYh08r0WcMMQ&hl=fr&sa=X&ei=dB-zU5TvJYXJ0AX914HgDA&ved=0CCIQ6AEwAA#v=onepage&q=j%20j%20rousseau%20lettre%20du%2028%20avril%201759%20%C3%A0%20tronchin&f=false

et faire recherche « tronchin » dans : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k16123j/texteBrut

 

 

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01/07/2014 | Lien permanent

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