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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Il broutera désormais ses chardons ; et voilà du moins cet âne rouge incapable de posséder jamais aucune charge : c’est,

... J'aimerais tant que cela s'applique à tous les politiciens qui n'ont pas respecté la loi, beau troupeau d'ânes rouges, l'espèce n'est pas en voie de disparition, n'est-il pas ?

Un Âne Peut en Cacher un Autre … | "Les Ânes de Marolles"

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

16 de septembre [1766]

Mon cher et grand philosophe, vous saurez que j’ai chez moi un jeune conseiller au parlement, mon neveu, qui s’appelle d’Hornoy. La terre d’Hornoy est à cinq lieues d’Abbeville. C’est par le moyen d’un de ses plus proches parents qu’on est venu à bout de honnir ce maraud de Broutel 1. Il broutera désormais ses chardons ; et voilà du moins cet âne rouge incapable de posséder jamais aucune charge : c’est, comme vous dites 2 une bien faible consolation. Je voudrais que vous fussiez à Berlin ou à Pétersbourg ; mais vous êtes nécessaire à Paris : que ne pouvez-vous être partout !

Quand vous écrirez à celui 3 qui a rendu le jugement de Salomon ou de Sancho-Pança, certifiez-lui, je vous prie, que je lui suis toujours attaché comme autrefois, et que je suis fâché d’être si vieux.

Le procureur général de Besançon 4, dont la tête ressemble, comme deux gouttes d’eau, à celle dont la langue est si bonne à cuire 5, fit mettre en prison ces jours passés un pauvre libraire 6 qui avait vendu des livres très suspects. Il n’y allait pas moins que de la corde par les dernières ordonnances. Le Parlement a absous le libraire tout d’une voix, et le procureur général a dit à ce pauvre diable :  Mon ami, ce sont les livres que vous vendez qui ont corrompu vos juges. 

La discorde règne toujours dans Genève, mais la moitié de la ville ne va plus au sermon. Je demande grâce à l’abbé de La Porte 7 ; je ne sais plus ni ce que je suis, ni ce que j’ai fait ; il faudra que je me recueille.

Il pleut des Fréret, des Du Marsais, des Bolingbroke . Vous savez que, Dieu merci, je ne me mêle jamais d’aucune de ces productions ; je ne les garde pas même chez moi ; je les rends quand je les ai parcourues. C’est une chose abominable qu’on aille quelquefois fourrer mon nom dans tous ces caquets-là ; mais il y aura toujours de méchantes langues. Prenez toujours le parti de l’innocence : je vous embrasse très tendrement. Les philosophes ne sont guère tendres, mais je le suis. »

1 Plutôt Broutet .

2 Voir lettre du 9 septembre 1766 de d'Alembert : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6494

3 Frédéric II; voir lettre lettre du 25 aout 1766 à d’Alembert https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6468

et lettre d'août 1766 de Frédéric II : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6474

4 Il se nomme Doroz .

5 Pasquier ; voir lettre du 16 juillet 1766 de d'Alembert : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/02/correspondance-avec-d-alembert-partie-41.html

6 Fantet ; voir lettre à Damilaville du 4 août 1766 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6444

7 Voir la fin de la lettre du 9 septembre 1766 de d'Alembert

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21/12/2021 | Lien permanent

Que conclure de tout cet examen ? Qu'il faut se contenter de retravailler

... En dira-t-on autant après le débat Fillon-Juppé demain soir ?

 http://images0.hiboox.com/images/4208/4e902229029c01f95ce064cc00857e50.jpg:

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

[novembre 1761] 1

1° Si on retranche quelque chose au 4è acte, qui est beaucoup trop court, il ne lui restera presque rien .

2° Quand on a averti Cassandre en présence d'Olympie qu'Antigone est entré en armes, quand Cassandre est sorti pour le combattre, il faut absolument qu'Olympie apprenne à la fin de cet acte ce qui est arrivé , parce que le lieu du combat est trop près pour qu'elle n'en ait pas de nouvelles, parce que le spectateur en attend, parce que tout presse, parce qu'il est ridicule, dans une telle situation, de finir un acte par un monologue sur l'amour . Si elle quitte le théâtre, où va-t-elle ? Sort-elle pour aller voir les combattants ? Cela serait absurde . Est-ce pour aller chez sa mère ? Rien de plus plat . Ce serait un moyen sûr de n'avoir ni un quatrième acte, ni un cinquième .

3° Quand on lui apporte les nouvelles de ce combat, si on se contente de lui dire qu'on est aux mains, elle le savait déjà ; la terreur n'augmente pas, et tout ce qui ne l'augmente pas la diminue .

4° L'hiérophante étant le seul homme qui peut lui parler, il serait ridicule qu'il s’écartât de Statira et des combattants pour n'apprendre rien de nouveau à Olympie . Il faut donc qu'il lui annonce une nouvelle, et que cette nouvelle soit plus frappante que tout ce qui s'est passé .

5° L'hiérophante ne peut se rendre auprès d’Olympie que dans le cas où Statira mourante le prie de lui amener sa fille, car il faut une raison terrible pour que ce grand-prêtre quitte son poste .

6° Si Statira n'a pas arrêté la fureur des deux princes en se donnant à leurs yeux un coup de poignard, il n'y a aucune raison pour laquelle ces deux rivaux ne continuent pas de combattre, et la victoire de l'un ou de l'autre étant alors décidée, le vainqueur devient le maître absolu d'Olympie et du temple . Il n'y a plus de cinquième acte . Le vainqueur enlève Olympie ; elle se tue , si elle veut ; mais il n'y a plus de tragédie, parce qu'il n'y a plus de suspension .

Si on porte au cinquième acte le combat des deux rivaux et la mort de Statira, il est impraticable, il est contre toute vraisemblance que dans l'instant même ces deux princes demandent sa fille en mariage . On n'a pas même le temps de préparer le bûcher de la mère ; tout se ferait avec une précipitation ridicule et révoltante . Il faut absolument, entre le quatrième et le cinquième, entre la mort de Statira et la proposition du mariage, un intervalle qu'on peut supposer de quelques heures, sans quoi ce cinquième acte paraitrait le comble de l'absurdité . Il est si odieux, si horrible de proposer un mariage à une fille dont la mère vient de se tuer dans l'instant même , qu'on ne conçoit pas comment une telle idée peut se présenter .

Les empressements des deux amants, le jour même de la mort de Statira, ont déjà quelque chose de si étrange, que si le grand-prêtre n'avait pas par ses discours diminué cette horreur, elle ne serait pas tolérable . Mais si , dans le moment même où l'on suppose qu'Olympie apprendrait la mort de sa mère, le grand-prêtre lui parlait de songer à prendre un mari, cette proposition, alors si déplacée, serait sifflée de tout le monde . Mais il n'est pas contre la bienséance que ce grand-prêtre, au quatrième acte, lui dise simplement ce que sa mère, qui n'est pas encore morte, lui recommande .

7° Il paraît donc d'une nécessité absolue que Statira meure à la fin du quatrième, et qu'Olympie ait le temps de prendre sa résolution entre la quatrième et le cinquième .

8° Cette résolution de se jeter dans le bûcher de sa mère ne peut être prise qu'avec un peu de temps ; il faut au moins laisser celui des funérailles . Mais figurez vous l'effet insupportable que ferait ici une action trop pressée : « Votre mère vient de se tuer dans le moment ; épousez vite Cassandre ou Antigone . Nous allons brûler votre mère tout d'un temps . » En vérité , un tel arrangement épouvante .

9° On dira peut-être qu'on peut faire mourir Statira entre le quatrième et le cinquième, et c'est précisément ce que j'ai fait ; elle se donne le coup de poignard au quatrième . Olympie qui court à elle, la trouve encore vivante ; elle meurt dans ses bras, elle lui recommande d’épouser Antigone . C'est cet ordre d'épouser Antigone qui fait le fondement du cinquième et qui le rend vraisemblable .

10° Il ne faut pas croire que le spectacle d'Olympie en deuil, au milieu des prêtresses en habit blanc, soit une chose à négliger . Ceux qui ont vu jouer la pièce ont trouvé le contraste très attendrissant .

11° Pour envisager la chose de tous les sens, songez qu'au cinquième acte ou bien l'on apprend la mort de Statira à sa fille, ou bien elle le sait déjà ; si elle la sait, il n'y a rien à changer à la pièce : c'est ainsi que je l'ai faite ; si on la lui apprend, reste-t-elle sur le théâtre ou s'en va-t-elle ? Si elle reste, quelle horreur ! Quel défaut de bienséance d'écouter ses deux amants ? Si elle s'en va, quel prétexte aurait-elle de revenir ? Qui occuperait le théâtre en son absence ? Qui écouterait-on ? Pourrait-elle quitter le corps de sa mère, dès qu'une fois elle serait près de ce corps ? Reviendrait-elle chercher ses amants ? Qu'aurait-elle à leur dire ? Il faut que ses amants lui parlent malgré elle, mais non pas qu'elle vienne les chercher .

Que conclure de tout cet examen ? Qu'il faut se contenter de retravailler quelques vers qui ne sont pas assez bien faits, que le cinquième acte doit subsister tel qu'il est, et que , s'il fait à Paris la moitié seulement de l'effet qu'il a produit ailleurs, on ne doit pas être mécontent . »

1 L'original à la BNF est intitulé « mémoire pour Olympie » . Cette lettre appartient évidemment à la même période que la lettre du 23 novembre 1761 aux d'Argental et que d'autres lettres aux d'ArgentaI , données par Besterman dans le corps de son ouvrage, tandis que celle -ci ne figure que dans le supplément ; peut-être ne s'agit-il aussi que d'une feuille séparée annexée à une autre lettre, par exemple être « l'incluse » de la lettre du 23 novembre 1761 elle -même .

 

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23/11/2016 | Lien permanent

On vend très bien des terres pendant la guerre, vu que cette guerre enrichit ...

... messieurs les entrepreneurs des vivres, fourrages, hôpitaux, vaisseaux, cordages, bœuf salé, artillerie, chevaux , poudre, et messieurs leurs commis et messieurs leurs laquais et mesdames leurs putains ."

Les termes sont forts, ils sont vrais .

Par exemple ...

 guerre terre israel zion.jpg

Que dire de plus, en réactualisant les faits, qui ne soit pas une évidence criante que les Etats, tant les démocratiques que ceux totalement opposés aux droits de l'Homme, connaissent et en profitent plus ou moins également . Ne serait-ce que par voie fiscale .

 

 

 

« A Claude-Adrien Helvétius

Aux Délices 19 janvier [1759]

Il est vrai, mon très cher philosophe persécuté, que vous m'avez un peu mis dans votre livre in communi martirum,1 mais vous ne me mettrez jamais in communi de ceux qui vous estiment et qui vous aiment . On vous avais assuré dites-vous que vous m'aviez déplu . Ceux qui purent vous dire cette chose qui n'est pas 2, comme s'exprime notre ami Suift, sont enfants du diable . Vous , me déplaire ? Et pourquoi et en quoi ! Vous en qui est gratia, fama,3 vous qui êtes né pour plaire, vous que j'ai toujours aimé et dans qui j'ai chéri toujours depuis votre enfance les progrès de votre esprit . On avait comme cela dit à Duclos qu'il m'avait déplu, et que je lui avais refusé ma voix à l'Académie 4. Ce sont en parties ces tracasseries de messieurs les gens de lettres et encore plus les persécutions, les calomnies, les interprétations odieuses des choses les plus raisonnables , la petite envie, les orages continuels attachés à la littérature qui m'ont fait quitter la France . On vend très bien des terres pendant la guerre, vu que cette guerre enrichit, et messieurs les trésoriers de l'extraordinaire, et messieurs les entrepreneurs des vivres, fourrages, hôpitaux, vaisseaux, cordages, bœuf salé, artillerie, chevaux , poudre, et messieurs leurs commis et messieurs leurs laquais et mesdames leurs putains . J'ai trois terres ici, dont une jouit de toute franchise comme le franc alleu 5 le plus princier, et le roi m'ayant conservé par un brevet la charge de gentilhomme ordinaire, je jouis de tous les droits les plus agréables . J'ai terres aux confins de 6 France, terre à Genève, maison à Lausanne, tout cela dans un pays où il n'y a point d'archevêque 7 qui excommunie les livres qu'il n'entend pas . Je vous offre tout, disposez-en . Cet archevêque dont vous me parlez ferait bien mieux d'obéir au roi, et de conserver la paix que de signer des torcheculs de mandements . Le parlement a très bien fait il y a quelques années d'en brûler quelques uns ; et ferait fort mal de se mêler d'un livre de métaphysique portant privilège du roi . J'aimerais mieux qu'il me fit justice de la banqueroute du fils de Samuel Bernard,8 Juif, fils de Juif, mort surintendant de la maison de la reine, maître des requêtes, riche de neuf millions et banqueroutier . Vendez votre charge de maître d'hôtel, vende omnia quae habes et sequere me 9 . Il est vrai que les prêtres de Genève et de Lausanne sont des hérétiques qui méprisent saint Athanase, et qui ne croient pas Jésus-Christ Dieu . Mais on peut du moins croire ici la Trinité comme je fais sans être persécuté . Faites-en autant . Soyez bon catholique, bon sujet du roi comme vous l'avez toujours été, et vous serez tranquille, heureux, aimé, estimé, honoré partout particulièrement dans cette enceinte charmante couronnée par les Alpes, arrosée par le lac et par le Rhône, couverte de jardins, et de maisons de plaisance, et près d'une grande ville où l'on pense . Je mourrais assez heureux si vous veniez vivre ici . Mille respects à madame votre femme .

V.

Notre nièce est très sensible à l'honneur de votre souvenir . »

1 Dans le commun des martyrs ; voir lettre du 24 décembre 1758 à Thieriot , note sur l'allusion d'Helvétius à Voltaire : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/01/09/nous-serons-plus-heureux-vous-et-moi-dans-notre-sphere-que-d-5267196.html

2 The thing that is not , euphémisme pour mensonge, utilisé par Swift dans les Voyages de Gulliver . Voir : http://www.shmoop.com/gullivers-travels/houyhnhnm-land.html

3 Crédit, réputation ; Horace, Epîtres, I, iv, 10 .

4 Voltaire a apporté son soutien . Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Pinot_Duclos

5 Terme de droit féodal ; les terres de franc alleu étaient exemptes de toutes charges à l'égard d'un seigneur ; voir Emile Chéron, Etude sur l'histoire des alleux en France, 1888

6 V* a d'abord écrit en, remplacé par aux confins de .

7 Christophe de Beaumont, archevêque de Paris : http://fr.wikipedia.org/wiki/Christophe_de_Beaumont

8 Samuel-Jacques Bernard, célèbre pour ses extravagances, qui firent qu'il vint à bout de la fortune de son père ; voir lettre du 11 avril 1754 à Mme Denis et http://fr.wikipedia.org/wiki/Samuel-Jacques_Bernard_%281686-1753%29

9 Vends tout ce que tu possèdes et suis moi . Evangile de Mathieu, Marc et Luc .

 

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08/02/2014 | Lien permanent

Je vois avec des yeux d'envie que les Allemandes valent bien mieux que les Françaises

... Paroles de femme !

Femme(s) du XVIIIè , siècle, et non arrondissement .

A actualiser : est-ce encore vrai ? Je prêcherais plutôt pour l'égalité, ne voyant pas pourquoi les unes l'emporteraient sur les autres .

Quant à ceux qui ont tout de suite pensé qu'il était question de voitures, je vous laisse faire votre choix, sachant que les Allemandes ont une fâcheuse propension à se faire valoir en trichant , mentant sur leurs émanations nocives, et buvant plus que de raison , pire qu'à l'Oktoberfest, -bière ET schnaps : réveils difficiles garantis,- comme quand on passe à la pompe ! 

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Union cordiale ist besser !

 

 

« Marie-Louise Denis et Voltaire

à

Charlotte-Sophie von Altenburg, comtesse Bentinck

Ce 7 mai [1761]

Je n’ai reçu, madame, la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire datée du 12è mars que le 30 avril . J'ai déploré mon sort . Ce retardement m'a fait sentir combien j'étais loin de vous .

J'ai eu l'honneur de vous faire une réponse à la lettre dont vous me parlez le 13 janvier . Le 20 mars je vous ai envoyé le mémoire que vous m'aviez chargé de demander au chevalier de Florian 1. J'y ai joint une Épître en vers sur l’agriculture très agréable que mon oncle a daigné m'adresser et dont je suis fort glorieuse .

Voilà un compte exact de ma conduite qui d'ordinaire n'est pas trop bonne . Mais je compte sur vos bontés . Il est vrai madame que mon oncle a fait une très belle action en offrant à Mlle Corneille une main bienfaisante . Son nom seul est intéressant, elle était dans une situation triste . Il est bien étonnant que M. de Fontenelle, son parent , ne lui ai rien laissé . Mon oncle est né plus sensible, il a réparé cette faute . J'en suis d'autant plus contente que cette jeune personne est un très bon sujet, elle est gaie, caressante et très reconnaissante . Si nous trouvons à la marier, mon oncle s'y prêtera de tout son cœur . Si elle aime mieux rester avec nous, elle nous fera une société agréable .

Je ne suis point étonnée, madame, que Tancrède vous plaise . Cette pièce est faite pour les cœurs sensibles, le rôle d'Aménaide est un des plus beaux qui soient au théâtre . Je l'ai joué quelquefois et j'espère le jouer encore . Je sais que vous lisez les vers à merveille et mon oncle est très flatté que vous preniez du plaisir à rendre les siens . Mlle Clairon fait un effet prodigieux dans cette pièce, elle dit toujours que si M. de Voltaire ne veut pas aller l'entendre, elle viendra le trouver et lui jouera toutes ses pièces . Il bâtit actuellement une église à Ferney et finira par un théâtre . Vous voyez madame qu'il remplit tous ses devoirs, c'est à vous à le justifier aux yeux de tous vos rigoristes d'Allemagne . Si vous vous chargiez de sa cause elle serait en de si bonnes mains que je ne désespèrerais pas que vous ne le fissiez canoniser un jour à Vienne, mais il l'est déjà puisqu'une princesse fait pour lui des choses charmantes .

Je vois avec des yeux d'envie que les Allemandes valent bien mieux que les Françaises . On ne peut faire plus agréablement des vers, ni louer plus finement . Mon oncle aura l'honneur de vous écrire incessamment . Vous nous feriez aimer la guerre si nous n’espérions de vos nouvelles que dans ces moments de carnages et d'horreurs . Honorez-nous de vos lettres madame et faisons la paix . Vous savez que vous avez pour ce temps-là des projets à exécuter . Nous souhaitons de nous trouver sur votre passage et de vous renouveler notre attachement le plus inviolable , le plus respectueux et le plus tendre .

Denis .

 

Réponse à l'illustre dame 2

qui me soupçonne d’en avoir trop dit.

Je n'ai pas l'honneur d'être sage,

Mes écrits sont peu compassés.

J'en disais trop dans mon jeune âge,

Mais si je viens vous rendre hommage,

Quoique mes beaux jours soient passés,

Je vous en dirai davantage,

Et je n'en dirai point assez .

Pour vous madame la comtesse, il y a bien longtemps que vous ne m'avez rien dit . Je ne peux vous en faire de reproches puisque vous êtes dans la première des cours et dans la plus aimable . Je conçois bien qu'on ne vous laisse pas le temps d'écrire . Mais vous pensez à trop de choses à la fois pour oublier entièrement le plus respectueux et le plus attaché de vos anciens courtisans, le plus pénétré de votre mérite, et qui certainement ne vous oubliera jamais .

V. »

1 A cette date, Mme Denis écrivait en effet à la comtesse Bentinck : « Pardonnez-moi si j'ai tardé si longtemps . Mais ma lettre a eu de la peine à joindre M. Florian, qui est actuellement chez Mme de Fontaine au château d'Ornoy en Picardie . Il m'envoie ce mémoire madame, il me charge d'avoir l'honneur de vous le faire tenir . Si vous voulez avoir la bonté de lui remettre cet argent, il suffira de faire prendre une lettre de change à Vienne à l'ordre de M. de Florian sur M. Tourton, banquier à Paris . »

2 Dans une lettre du 2 juin 1761, la comtesse Bentinck nomme cette « illustre dame » : c'est la princesse de Trautson ; voir : https://archive.org/stream/charlottesophiec01lebliala/charlottesophiec01lebliala_djvu.txt

 

 

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14/04/2016 | Lien permanent

je suis comme cet homme qui chantait les psaumes sur l'air Tout cela m'est indiffèrent.

... Après avoir parcouru les nouvelles People, entre autres comme celles-ci : https://www.purepeople.com/article/-c-est-ma-derniere-int...

 

 

 

« Au chevalier Pierre de Taulès

Mes raisons de vous aimer, monsieur, sont que vous avez la franchise et la bonté de mon héros 1, dans le pays duquel vous êtes né. Il faut avoir bien envie de crier, pour trouver mauvais qu'on ait produit les lettres de Jean Jacques 2 . Je croyais d'ailleurs que des archives étaient faites pour être consultées . On en use ainsi à la Tour de Londres, et jamais on ne s'est avisé de trouver Rymer 3 indiscret.

Je prendrai la liberté d'en écrire un mot à M. le duc de Choiseul . Il y a longtemps que l'anecdote du traité apporté par des gardes du corps est imprimée. Un fait aussi peu vraisemblable a besoin d'autorité . Il y a une note qui indique que cela est tiré du dépôt 4. Effectivement, vous savez qu'avant vous il y a un homme fort au [fait] qui m'apprit cette particularité, et c'est ce que je certifierai à votre principal . Mais il n'est pas encore temps.

Vous êtes informé de plus qu'on m'a fait une petite tracasserie avec lui, et qu'on m'a voulu faire passer pour représentant 5. Cependant je ne me mêle pas plus des représentations de Genève que de celles des parlements, et je suis comme cet homme qui chantait les psaumes sur l'air Tout cela m'est indiffèrent.

Ce qui ne m'est pas indifférent, c'est votre amitié. Je vous supplie, quand vous verrez M. Thomas, de lui dire qu'il n'a point d'admirateur plus zélé que moi.

Je finis là ma lettre, car je suis bien malade, et je la finis sans compliments, ils sont dans mon cœur.

V. 

14è décembre 1767 à Ferney. »

1 Henri IV. Taulès était aussi Béarnais.

2 Voir page 41 : https://fr.wikisource.org/wiki/Page%3AVoltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome26.djvu/51

La lettre dans laquelle J.-J. Rousseau se plaint de la conduite de Montaigu. V* l'a publiée dans les Notes , voir lettre du 24 octobre 1766 à Hume : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/01/20/il-est-vrai-qu-a-la-sagesse-toujours-consequente-de-sa-conduite-et-de-ses-e.html

3 Thomas Rymer a compilé le vaste ouvrage intitulé Fœdera, conventiones, litterae et cujuscunque generis acta publica, 1704-1717 : https://archive.org/details/fderaconventione01ryme/page/n5/mode/2up

Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Thomas_Rymer

et : https://data.bnf.fr/fr/12477170/thomas_rymer/

4 Cette « note » est en réalité une allusion à ce qui apparaît au début du chapitre VIII du Siècle de Louis XIV ; voir page 235 : https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Si%C3%A8cle_de_Louis_XIV/%C3%89dition_Garnier/Chapitre_08

Cette « note », qui se rapporte au fait cité tome XIV n'existe dans aucune édition. Voltaire aura sans doute été invité à la supprimer.

5 C'est-à-dire attaché au parti de la bourgeoisie .

On se souvient que les représentants étaient l'un des partis qui se disputaient à Genève ; V* les a effectivement aidés quelque temps de ses conseils et ses intrigues .

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07/07/2023 | Lien permanent

Quand vous mettrez encore trois ou quatre mois à polir cet ouvrage, le succès vous paiera de toutes vos peines

... "Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage" M. le ministre Clément Beaune : https://www.20minutes.fr/politique/4068928-20240103-immig...

Qu'arrivera-t-il de bon ? Arrivera-t-il quelque chose de bon ?

 

 

« A Michel-Paul-Guy de Chabanon, de

l'Académie des belles-lettres,

rue du Doyenné Saint-Louis du Louvre

à Paris

5 mai 1768 à Ferney

Mon cher ami, je suis comme vous, je pense toujours à Eudoxie. Je vous demande en grâce de ne vous point presser. Je vous conjure surtout de donner aux sentiments cette juste étendue, nécessaire pour les faire entrer dans l’âme du lecteur ; de soigner le style, de le rendre touchant ; que tout soit développé avec intérêt, que rien ne soit étranglé, qu’un intérêt ne nuise point à l’autre ; qu’on ne puisse pas dire : « Voilà un extrait de tragédie plutôt qu’une tragédie » ; que le rôle de l’ambassadeur soit d’un politique profond et terrible ; qu’il fasse frémir, et qu’Eudoxie fasse pleurer ; que tout ce qui la regarde soit attendrissant et que tout ce qui regarde l’empire romain soit sublime ; que <le>1 lecteur, en ouvrant le livre au hasard, et en lisant quatre vers, soit forcé, par un charme invincible, de lire tout le reste.

Ce n’est pas assez qu’on puisse dire  cette scène est bien amenée, cette situation est raisonnable ; il faut que cette scène soit touchante, il faut que cette situation déchire le cœur.

Quand vous mettrez encore trois ou quatre mois à polir cet ouvrage, le succès vous paiera de toutes vos peines. Elles sont grandes, je l’avoue ; mais le plaisir de réussir pleinement auprès des connaisseurs vous dédommagera bien.

Vous vous amusez donc toujours de Pandore ? Je conçois que l’époux soumis et facile 2 est un vrai Parisien, et qu’il ne faut pas faire rire dans un ouvrage aussi sérieux que le péché originel des Grecs.

Comme j’en étais là, je reçois votre charmante lettre du 29 d’avril. Elle a beau me plaire, elle ne me désarme point. Voici ma proposition : c’est que vous vous remplissiez la tête de toute autre chose que d’Eudoxie, pendant trois mois, que vous y reveniez ensuite avec des yeux frais, alors vous pourrez en faire un ouvrage supérieur. Tenez-la prête pour l’impression dès que quelqu’un des quarante passera le pas, et vous serez mon cher confrère ou mon successeur 3.

Mandez-moi, je vous en prie, comment il faut s’y prendre pour vous faire tenir un petit paquet qui ne vous coûte rien. Bonsoir, mon très cher et très aimable ami. »

1 L'article est tombé dans le manuscrit par « saut du même au même »

2 Citation de Pandore, ac. V : Némésis :« Vous régnerez sur votre époux

            Il sera soumis et facile. » . Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Pandore_(Voltaire)/1877

3 Chabanon succédera à Foncemagne à l'Académie en 1780 . Voir : https://www.academie-francaise.fr/les-arts-et-les-lettres

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05/01/2024 | Lien permanent

il vaut mieux que cet ouvrage paraisse en France bien corrigé que d'y venir des pays étrangers informe et plein de faute

 

http://www.deezer.com/listen-3862917

 

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A tous les malades, comme Volti, je recommande le rire comme remède :

http://www.deezer.com/listen-1042307

 

 

 

« A Michel Lambert

 

Berlin 7 février [1752]

 

Je ne peux vous écrire de ma main , mon cher Lambert, je suis trop malade, et je crains bien de ne plus vous revoir. Ce serait pour moi une consolation si vous pouviez faire une jolie édition du Siècle de Louis XIV, que l'on commence à débiter en Allemagne. C'est un monument que j'ai voulu laisser à la gloire de ma patrie . Et pour le rendre moins indigne d'elle j'ai corrigé avec tout le soin dont mes maladies peuvent me laisser encore capable un exemplaire que j'ai envoyé à M. de Malesherbes . Je ne doute pas que vous n'alliez trouver Mme Denis i et que vous ne fassiez les démarches les plus vives de tout côté pour obtenir au moins une permission tacite qu'il serait bien étrange qu'on vous refusât . Vous représenterez sans doute qu'il vaut mieux que cet ouvrage paraisse en France bien corrigé que d'y venir des pays étrangers informe et plein de fautes, que d'ailleurs on ne pourra guère empêcher que les libraires de Lyon et de Rouen ne l'impriment. Leur édition serait malheureusement conforme à l'étrangère ii, et ainsi il ne se multiplierait que de mauvaises copies d'un ouvrage assez important pour qu'on y ait plus d'égards. J'ose me flatter que ces réflexions pourront faire quelque impression sur les personnes dont dépend cette affaire et que vous ne négligerez rien pour parvenir à un but si honorable.

 

J'apprends que l'on va jouer dans quelque temps Rome sauvée,iii quelque chose qui arrive il faudra que vous en donniez une édition particulière vers Pâques . Il y a une préface assez curieuse et assez intéressante que j'ai envoyée à Mme Denis . Vous pourrez ensuite ajouter cette pièce à une nouvelle édition que j'espère que vous ferez de mes œuvres , car pour celle qui est sortie de votre presse iv, je crois qu'il faut y renoncer et la regarder désormais comme non avenue . On y trouve les quatre premiers chapitres du Siècle de Louis XIV, ce qui est un double emploi très vicieux . Il y manque de plus beaucoup de pièces curieuses que je n'ai pas été à portée de vous fournir, n'ayant pas été consulté par vous . Vous pourrez en faire une édition très jolie en vous conformant en partie à celle de Dresde que l'on fait actuellement . Il y a beaucoup de morceaux nouveaux . J'ai corrigé avec grand soin toutes les pièces qui la composent . Il n'y a pas jusqu'à La Henriade où l'on ne trouve une centaine de nouveaux vers v . Vous pourrez d'autant plus surement faire cette édition qu'il ne sortira plus de moi de nouveaux ouvrages et que mes maladies me mettent hors d'état de changer les anciens . Je fais bien mes compliments à tous vos amis et je vous embrasse de tout mon cœur. Je vous prie instamment d'envoyer un exemplaire en feuilles à M. de Lalleu, mon notaire . Il demeure rue Ste-Croix-de-la-Bertonnerie vis-à-vis de la rue Bourtibour vi. Adieu, Monsieur, je vous prie de me conserver votre amitié . Je n'ai encore reçu aucun paquet de vous .

 

Volt. »

 

iLa copie ancienne conservée à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris porte : « de Nise ».

 

 

ii Celle de Berlin .

 

iii Cf. lettre à Walther, libraire à Dresde, du 6 mars 1752 sur Rome sauvée .

 

 

iv Edition de 1751 . Le 15 avril, à Formey : « c'est de toutes la plus passable » quoiqu'il y ait « bien des fautes » et en particulier le « double emploi » cité ici.

v Ce qui va à l'encontre de sa première idée ; le 29 mai 1751, à Walther, il conseille de « commencer » l'impression « par la Henriade parce qu'(il) n'y changerait certainement rien. » Lettre MDCCXXV page 297 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800327/f302.image.p...

 

vi = Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie et Boug-Tibourg.

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07/02/2011 | Lien permanent

Quoi ! sérieusement, vous voulez rendre la théologie raisonnable ? mais il n’y a que le diable de La Fontaine à qui cet

...

De prime abord, "théologie" et "raisonnable" m'ont parus comme l'huile et l'eau, incompatibles, ou alors seulement elles bien secoué(e)s et nous donnant une mayonnaise plus ou moins digeste , enfer et damnation !

 http://www.eglise-numerique.org/2015/04/retour-sur-une-te...

 

 

 

« Au cardinal François-Joachim de Pierre de Bernis

Aux Délices , ce 28 décembre [1761] 1

Monseigneur, Les chevaux et les Ânes 2 étaient une petite plaisanterie ; je n’en avais que deux exemplaires, on s’est jeté dessus ; car nous avons des virtuoses. Si je les retrouve, Votre Éminence s’en amusera un moment ; ce qui m’en plaisait surtout, c’est que le théatin Boyer était au rang des ânes.

Voyez, je vous prie, si je suis un âne dans l’examen de Rodogune. Vous me trouverez bien sévère, mais je vous renvoie à la petite apologie que je fais de cette sévérité à la fin de l’examen. Ma vocation est de dire ce que je pense, fari quae sentiam 3: et le théâtre n’est pas de ces sujets sur lesquels il faille ménager la faiblesse, les préjugés et l’autorité. Je vous demande en grâce de consacrer deux ou trois heures à voir en quoi j’ai raison et en quoi j’ai tort. Rendez ce service aux lettres, et accordez-moi cette grâce. Dictez il vostro parere 4 à votre secrétaire. Vous lirez au coin du feu, et vous dicterez sans peine des jugements auxquels je me conformerai.

Bene si potria dir, frate, tu vei

L’altrui monstrando, e non vedi il tuo fallo 5.

Et puis vous me parlerez de poutre et de paille dans l’œil 6; à quoi je répondrai que je travaille jour et nuit à rapetasser mon Cassandre, et que je pourrai même vous sacrifier ce poignard qu’on jette au nez des gens, etc., etc., etc.

Quoi ! sérieusement, vous voulez rendre la théologie raisonnable ? mais il n’y a que le diable de La Fontaine à qui cet ouvrage convienne. C’est La chose impossible  7.

Laissez là saint Thomas s’accorder avec Scot 8. J’ai lu ce Thomas, je l’ai chez moi ; j’ai deux cents volumes sur cette matière, et qui pis est, je les ai lus. C’est faire un cours de Petites-Maisons. Riez, et profitez de la folie et de l’imbécillité des hommes. Voilà, je crois, l’Europe en guerre pour dix ou douze ans. C’est vous, par parenthèse, qui avez attaché le grelot 9. Vous me fîtes alors un plaisir infini. Je ne croyais point que le sanglier 10 que vous mettiez à la broche fût d’une si dure digestion. C’est, je crois, la faute de vos marmitons. Une chose me console, avant que je meure : c’est que je n’ai pas peu contribué, tout chétif atome que je suis, à rendre irréconciliables certain chasseur et votre sanglier. J’en ris dans ma barbe ; car, quand je ne souffre pas, je ris beaucoup, et je tiens qu’il faut rire tant qu’on peut. Riez donc, monseigneur, car, au bout du compte, vous aurez toujours de quoi rire. Je me sens pour vous le goût le plus tendre et le plus respectueux. Je me souviens toujours de vos grâces, de votre belle physionomie, de votre esprit ; vivez felix 11. Daignez m’aimer un peu, vous me ferez un plaisir extrême. »

 

1 V* répond à une lettre de Bernis du 24 décembre 1761 , où celui-ci écrivait : « Vous êtes curieux de savoir […] si je cultive encore les lettres . J'ai abandonné totalement la poésie depuis onze ans . Je savais que mon petit talent me nuisait dans mon état et à la cour […] J'aime l'histoire . Je lis, ou me fais lire quatre heures par jour . […] J'écris ou je dicte deux heures […] Je n'ai point abandonné Horace , ni Virgile . Je reviens toujours à eux avec plaisir . Vous dites que le cardinal de Richelieu faisait de la théologie à Luçon . Je suis tenté bien souvent de la réduire à ses véritables bornes ; c'est à dire de la dépouiller de toutes les questions étrangères au dogme, et d'enseigner par cette méthode l'art d'éteindre toutes les disputes d'école qui ont été, sont et seront la source des plus grands troubles et des plus grands crimes . Vous me demandez si je suis heureux ? Oui tant que l'humeur de la goutte ne me tracasse pas . Les grandes places m'avaient rendu malheureux, parce que je sentais que je ne pouvais y acquérir la réputation que mon âme ambitionnait, ni y faire le bien de ma patrie . J'étais trop sensible aux maux publics, quand le public avait droit de m'en demander la guérison . Envoyez-moi Les Ânes et les chevaux , s'il est convenable de me les envoyer . »

3 Dire ce que je pense ; réminiscence d'Horace, Épîtres, I, iv, 9 .

4 Ce qu'il vous en semble .

5 Heureux si je pouvais dire : Frère, tu vois pour montrer du doigt autrui, et tu ne vois pas ta propre faute .

6 Évangile selon Matthieu, VII, 3 .

7 Titre d'un conte de La Fontaine, IV, 14 ; http://www.lafontaine.net/lesContes/imprimeConte.php?id=61

8 Citation de Boileau, Satires, VIII, 229 .

9 A l'époque , on considérait généralement que la politique autrichienne de Bernis avait précipité la guerre ; en fait cette politique était clairvoyante à l'égard des ambitions de Frédéric II, et n’échoua que par l'infériorité des chefs militaires français ou alliés par rapport à Frédéric .« Nous parlerons quelque jour du grelot que vous dites que j’ai attaché, répondit Bernis le 30 janvier 1762, et des marmitons qu’on a voulu employer malgré moi. J’ai connu un architecte à qui on a dit : Vous ferez le plan de cette maison, mais bien entendu que l’ouvrage commencé, les piqueurs, ni les maçons, ni les manœuvres, ne seront point sous votre direction, et s’écarteront de votre plan autant qu’il leur conviendra de le faire. » (Georges Avenel.)

10 Le chasseur est Choiseul, le sanglier, Frédéric II .

11 Heureux .

 

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29/12/2016 | Lien permanent

J'ose penser que cet homme sage attendra, il sait qu'on n'accommode guère les procès que quand les deux parties n'ont pl

 ... Les plaideurs finissent souvent à poil, les avocats s'engraissent, la justice rame et ramasse .

Quelques cas exceptionnels , style Tapie, mais tout le monde n'est pas fortuné à ce point .

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« A M. Jean-Robert TRONCHIN

à Lyon
Lausanne, 20 décembre [1757].
Vous savez mon cher monsieur, la nouvelle victoire du roi de Prusse 1 les cinquièmes jours du mois lui sont favorables. M. le maréchal Keith, qui m'écrit du 8 au milieu de ses-montagnes, ne me mande point que les Prussiens aient repris Breslau, comme on le dit.

Ce qu'il y a de plus triste, et ce que je ne veux pas croire, c'est qu'une lettre de l'armée de Richelieu parle aussi d'une bataille que nous venons de perdre contre les Hanovriens 2. Si malheureusement cette nouvelle se confirme, voilà cent mille hommes et deux cents millions de perdus, comme dans la guerre de 1741. Dans ces circonstances malheureuses, vous m'avouerez que les affaires générales seraient plus difficiles à ajuster que des billets de confession. Peut-être le résultat de tant de vicissitudes sera que la cour de France aurait pu donner la paix, il y a quatre mois, et ne pourra pas même la recevoir dans deux.
Dieu veuille que la nouvelle de la prétendue défaite de M. de Richelieu soit sans fondement, et que les prophéties de madame la margrave soient fausses . Ses desseins sont plus agréables que ses prophéties. Elle ne respire que la paix. Le chaos serait beau à débrouiller. Il serait bien rare de s'accommoder avec le roi de Prusse sans se brouiller avec l'impératrice, et de rester maître du Hanovre sans avoir à craindre le roi de Prusse. Mais je crois que les d'Ossat 3 et les Richelieu auraient peine à résoudre un pareil problème. Qui en sait plus qu'eux tous le résoudra. Mais il y a sur les bords de notre Rhône, et près de la. cathédrale où vous n'allez point, un homme 4 qui peut-être est le seul capable dans l'Europe de voir et de faire ce qui est convenable. J'ose penser que cet homme sage attendra, il sait qu'on n'accommode guère les procès que quand les deux parties n'ont plus d'argent pour plaider.

Me voici à Lausanne toujours sur les bords de mon lac dans une maison charmante qui même pourrait se passer de vos baguettes dorées que j'attends . J'y jouis d'un repos que je souhaite à quiconque est sur le Veser, sur l'Elbe ou sur l'Oder . Ma nièce et moi nous vous embrassons de tout notre cœur . »

1 Celle de Lissa ou Leuthen le 5 décembre 1757 près de Breslaw , entre le roi de Prusse et le prince Charles, qui est battu. La ville de Breslaw est obligée de se rendre aux Prussiens, qui reprennent ensuite une bonne partie de la Silésie, dont les Autrichiens s'étaient rendus maîtres. Dans l'espoir de prendre ses quartiers d'hiver en Silésie, le prince Charles et Daun avaient marché sur Leuthen, mais Frédéric II prévoyant ce mouvement manœuvra si bien que le 19 décembre il défit les Autrichiens tuant ou faisant prisonniers 53000 hommes sur un total de 90000, n'ayant lui-même que 40000 hommes combattant .

Le prince Charles-Joseph de Ligne (1735-1814), alors jeune officier au service d’Autriche, prit part aux campagnes en Europe centrale et fut mêlé de fort près à de nombreux combats ; voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles-Joseph_de_Ligne

2 Fausse nouvelle.

3 Célèbre diplomate, né en 1536, mort en 1601 : http://fr.wikipedia.org/wiki/Arnaud_d%27Ossat

4 Le cardinal de Tencin à Lyon .

 

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23/02/2013 | Lien permanent

est-il vrai que de cet ouvrage immense, et de douze ans de travaux, il reviendra vingt-cinq mille francs à Diderot , tan

... Et qui va toucher des ristournes fabuleuses/dessous de tables/pots de vin pour la vente de nos merveilleux Rafales ? Pas vous, pas moi , pas Diderot !

 

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« A Jean Le Rond d'ALEMBERT.
25 d'avril [1760].
Mon cher et digne philosophe, j'avoue que je ne suis pas mort,1 mais je ne peux pas dire que je sois en vie. Berthier se porte bien, et je suis malade ; Abraham Chaumeix digère, et je ne digère point : aussi ma main ne vous écrit pas, mais mon cœur vous écrit; il vous dit qu'il est sensiblement affligé de voir les fanatiques réunis pour accabler les philosophes, tandis que les philosophes, divisés, se laissent tranquillement égorger les uns après les autres.
C'est grand dommage que Jean-Jacques se soit mis tout nu dans le tonneau de Diogène; c'est le sûr moyen d'être mangé des mouches. Est-il possible qu'on laisse jouer cette farce impudente dont on nous menace ?2 c'est ainsi qu'on s'y prit pour perdre Socrate. Je ne crois pas que la comédie des Nuées 3 approche des opéras-comiques de la Foire. Je crois Favart 4 et Vadé 5 fort supérieurs au Gilles d'Athènes, quoi qu'en dise Mme Dacier; mais enfin ce fut par là que les prêtres commencèrent à préparer la ruine des sages. La persécution éclate de tous côtés dans Paris ; les jansénistes et les jésuites se joignent pour égorger la raison, et se battent entre eux pour les dépouilles. Je vous avoue que je suis aussi en colère contre les philosophes qui se laissent faire que contre les marauds qui les oppriment. Puisque je suis en train de me fâcher, je passe à Luc; il fait le plongeon, il désavoue ses Œuvres, il les fait imprimer tronquées 6 : cela est bien plat, quand on a cent mille hommes; mais cet homme-là sera toujours incompréhensible. Il m'envoie tous les huit jours des paquets les plus outrecuidants, les plus terribles, de vers et de prose; des choses à faire coffrer le receveur, si le receveur était à Paris ; et il ne m'envoie point l'épître 7 qu'il vous a adressée 8, qui est, dit-on, son meilleur ouvrage. Il ne sait pas trop ce qu'il veut, et sait encore moins ce qu'il deviendra. Il serait bien à souhaiter qu'il se mît à devenir sage ; il eût été le plus heureux des hommes s'il avait voulu, et il valait cent fois mieux être le protecteur de la philosophie que le perturbateur de l'Europe. Il a manqué une belle vocation : vous devriez bien lui en dire deux mots, vous qui savez écrire, et qui osez écrire. Il est très-faux que l'abbé de Prades l'ait trahi ; il écrivait seulement au ministre de France pour avoir la permission de faire un voyage en France, et cela dans un temps où nous n'étions pas en guerre avec le Brandebourg. S'il avait en effet tramé une trahison contre son bienfaiteur, soyez très-persuadé qu'on ne se serait pas borné à lui donner un appartement dans la citadelle de Magdebourg.
Vous savez que Darget a mieux aimé un petit emploi subalterne à Paris que deux mille écus de gages, et le magnifique titre de secrétaire. Algarotti a préféré sa liberté à trois mille écus de gages, je dis trois mille écus d'empire. Vous savez que Chazot 9 a pris le même parti ; vous savez que Maupertuis, pour s'étourdir, s'était mis à boire de l'eau-de-vie 10, et en est mort. Vous savez bien d'autres choses; vous savez surtout que vous n'avez une pension de cinquante louis que comme un hameçon. Faites vos réflexions sur tout cela ; je me fie à votre probité, et je veux avoir votre amitié.
Mandez-moi, je vous en prie, à quoi en est la persécution contre les seuls hommes qui puissent éclairer le genre humain.
N'imitez pas le paresseux Diderot; consacrez une demi-heure de temps à me mettre un peu au fait. On prétend que la cabale dit : Oportet Diderot mori pro populo 11 .
Le Dictionnaire encyclopédique continue-t-il ? sera-t-il défiguré et avili par de lâches complaisances pour des fanatiques ? ou bien sera-t-on assez hardi pour dire des vérités dangereuses ? est-il vrai que de cet ouvrage immense, et de douze ans de travaux, il reviendra vingt-cinq mille francs à Diderot 12, tandis que ceux qui fournissent du pain à nos armées gagnent vingt mille francs par jour ? Voyez vous Helvétius ? connaissez-vous Saurin ? qui est l'auteur de la farce contre les philosophes ? qui sont les faquins de grands seigneurs 13, et les vieilles p... dévotes de la cour 14 qui le protègent ? Écrivez-moi par la poste, et mettez hardiment : A Voltaire, gentilhomme ordinaire du roi, au château de Ferney, par Genève; car c'est à Ferney que je vais demeurer, dans quelques semaines.
Nous avons Tournay pour jouer la comédie, et les Délices sont la troisième corde à notre arc. Il faut toujours que les philosophes aient deux ou trois trous sous terre, contre les chiens qui courent après eux. Je vous avertis encore qu'on n'ouvre point mes lettres, et que, quand on les ouvrirait, il n'y a rien à craindre du ministre des affaires étrangères, qui méprise autant que nous le fanatisme moliniste, le fanatisme janséniste et le fanatisme parlementaire. Je m'unis à vous en Socrate, en Confucius, en Lucrèce, en Cicéron, et en tous les autres apôtres ; et j'embrasse vos frères, s'il y en a, et si vous vivez avec eux. »

1 Voir en note de la lettre du 21 avril 1760 à Collini, ce qu'en disait d'Alembert dans sa lettre du 14 avril à laquelle V* répond ici  : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/04/18/on-m-a-dit-mort-cela-n-est-pas-entierement-vrai-5605707.html

2 Les Philosophes, de Palissot ; d'Alembert, en post scriptum écrivait : « Il ne manquait plus à la philosophie que le coup de pied de l'âne . On va jouer sur le théâtre de la Comédie française une pièce intitulée Les Philosophes modernes . Préville doit y marcher à quatre pattes pour représenter Rousseau . Cette pièce est fort protégée . Versailles la trouve admirable . » Dans sa lettre du 6 mai, après trois représentations de la pièce qu'il n'a pas vue et ne veut pas voir, il précisera : « Nous n'y sommes attaqués personnellement ni l'un ni l'autre, les seuls maltraités sont Helvétius, Diderot, Rousseau, Duclos, Mme Geoffrin, et Mlle Clairon qui a tonné contre cette infamie […] Les producteurs femelles (déclarés) de cette pièce sont Mmes de Villeroy, de Robecq, et du Deffand votre amie, et ci-devant la mienne […] En hommes , il n'y a […] que maître Aliboron, dit Fréron […] elle ne peut avoir été jouée sans protecteurs puissants […] tous la désavouent . Les seuls qui soient un peu plus francs , sont Séguier et Joly de Flleury . » Choiseul dira laconiquement, en post scriptum de sa lettre du 8 mai : « Je n'ai point vue la pièce contre les philosophes, je l'ai lue ; le fond peut être mauvais, la diction en est bonne, les vers bien faits et la morale approuvable. »

3 Titre d'une pièce d'Aristophane que V* désigne plus loin sous le nom peu agréable de « Gilles d’Athènes »

4 Charles-Simon Favart qui écrivit de nombreuses pièces à succès destinées à l'Opéra-Comique et eu Théâtre des Italiens . Pur charmantes que soient souvent ses comédies elles ne peuvent être comparées avec celles d’Aristophane . Voir : http://blog.bnf.fr/gallica/index.php/2010/03/13/charles-simon-favart-1710-1792/

5 Jean-Joseph Vadé qui mit à la mode le genre « poissard » . il était mort depuis le 4 juillet 1757 et l'on voit souvent V* mentionner, dès la présente époque « Mlle Vadé » qui jouera encore un rôle involontaire dans les Contes de Guillaume Vadé, réellement écrits par V* en 1764 . Voir : http://www.paperblog.fr/1180887/jean-joseph-vade-ecrivain-chansonnier-poete-grivois-et-poissard/

et : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Joseph_Vad%C3%A9

7 Il l'envoya le 1er mai ; voir la lettre de Frédéric II : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6514333b/f388.texte.r=3485

8« Il faudrait imprimer à la suite du discours de notre nouveau confrère [Pompignan]une épître que je viens de recevoir du roi de Prusse contre les fanatiques . Les dévots, les jésuites, et notre saint-père le pape y sont bien traités » . Sur l4Epître à d'Alembert […] voir la lettre du 14 avril 1760à Mme de Fontaine : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/04/10/mettez-nous-je-vous-en-prie-un-peu-au-fait-non-pas-de-ce-qui-5600503.html

9 Le chevalier François-Egmont de Chasot ; voir : http://friedrich.uni-trier.de/de/oeuvres/25/III/text/?h=C...|Egmont

10 Il y a là quelque exagération mais il est vrai que Maupertuis avait contracté à Berlin ,dans l'entourage du roi, certaines habitudes d'intempérance . Voici un billet adressé par Frédéric à Maupertuis, pendant que ce dernier
était encore à Berlin : « Je vous envoie le sieur Cothenius, un des plus grands charlatans de ce pays. Il a eu le bonheur de réussir quelquefois, par hasard, et je souhaite qu'il ait le même sort avec vous. Il vous ordonnera bien des remèdes; pour moi, je ne vous défends que les liqueurs; mais je vous les défends entièrement. » — Ce charlatan, médecin de Frédéric, est nommé Codénius, dans une lettre antérieure ..

11 Parodie de l'évangile de Jean, XVIII, 14. : il convient que Diderot meure pour le peuple .

12 Davantage, puisqu'il recevait 2500 francs par volume .

13 Le duc de Choiseul en était un.

14 Parmi ces « dévotes de la cour » on peut citer Mme de Robecq qui fut une amie de V* et qui devait mourir le 4 juillet 1760, ce qui fera dire à Mme du Deffand , le 5 juillet 1760 : » […] elle a trop tardé, six mois plus tôt nous auraient épargné une immensité de mauvais ouvrages . »

 

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23/04/2015 | Lien permanent

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